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Lapériode féodale.
Elle est liée à l’influence de la politique de conquête menée par les Merina au cours du XIXe siècle, lui à celle plus proche de la colonisation française à Madagascar. Il faut connaître la mesure de cette double pénétration à ’intérieurl de la grande ile que transforme l’esprit de règles coutumières. Elle ressemble à celle que connurent les juristesmédiévaux en France lorsqu’ils cherchent à déterminer l’influence exacte du droit écrit sur l’ensemble des coutumes pratiquées dans les Royaumes. En effet, il s’agit bien ici encore de déterminer le rôle joué par une législation écrite sur la formation d’un droit oral. Donc, il faut faire une distinction très nette entre le droit écrit merinaet le droit moderne. Leur portée respective n’a pas été la même.
La législation écrite Merina est essentiellement représentée par toute la série des codes promulgués de 1828 à 1881, dates du plus célèbre d’entre eux, le code des 305 articles. Ces codes ont été implantés petit à petit, suivantles modalités de la conquête et leur influence n’a pas été identique dans l’ensemble de l’île. C’est ainsi qu’en 1894, pour les 2/3 de Madagascar soumis aux rois merina, il faut distinguer deux catégories de peuples : ceux administrés directement, par eux et ou, par conséquent, leur législation s’appliquent intégralement, et ceux où ils n’exercent qu’une sorte de protectorat et où l’influence du droit écrit ne se fait sentir que partiellement et épisodiquement. Et il existait donc une troisième catégorie de peuples, ceux qui étaient entièrementindépendants et qui comprenaient les Antesaka, les Antanosy, les Antandroy, les Mahafaly et une grande partie des sakalava.
La période d’annexion de 1896
Au début de la colonisation, pour des raisons de commodité, le code des 305 articles a été répandu dans l’ensemble des tribunaux de la grande île. Paradoxalement, la France a ainsi fait pénétrer le droit merina dans esd régions qui l’avaient ignoré jusque-là et il est certain qu’à partir de ce moment le code des 30 5 articles, jouant le rôle de dénomination commun, devait contribuer à la diffusion, sur l’ens emble du territoire, de certaines institutions, celle du Kitaytelo an-dalana ou de la légitimation adoptive par exemple. Le droit écrit donc est amené, comme les migrations intérieures, à jouer un rôle unificateur. Son influence cependant n’est pas identique partout. Dans certains cas même on trouve une véritable réaction à son encontre.
Ceci notamment lorsque ses dispositions sont contraires aux règles traditionnelles. Tout autre est le rôle joué par le droit moderne à partir de 1896. Son influence provient en particulier des tribunaux établis dans toute île.En effet, « Selon une jurisprudence constante de la cour d’appel de Tananarive, les juges pouvaient avoir recours au droit français considéré comme écrite lorsque les dispositions de la loi malgache étaient insuffisantes ou inexistantes ». On trouve d’ailleurs cette règle dans l’article 116 du décret du 05 Mai 1909 : « La loi française sera suivie en tout ce qui n’est pas prévue par la loi ou le coutume indigène »1.
C’était lui donner en quelque sorte le même rôle que celui joué par le droit romain au Moyen Âge : Comme le dernier, le droit français devait s’insérer dans le droit coutumier. Les nombreuses institutions juridiques Malgaches notamment en matière d’absence, de tutelle des enfants mineurs, des responsabilités civiles, obligations conventionnelles, ont été transformées et perfectionnées grâce au droit moderne. Certaines coutumes ont pu aussi de la sorte, il est vrai, être méconnues ou mal interpréest. Toutefois, en définitive, l’influence du droit français semble bénéfique, dans la mesure où en important. Certaines de ses règles à Madagascar, il a préparé la modernisation du droitcoutumier de la grande île.
La nature etle mode de formation de la coutume
A Madagascar, les coutumes se traduisent par « fomba », constituent la trame de la vie sociale, familiale et religieuse des malgaches. Elles sont intimement liées à leur vie quotidienne. Elles déterminent avec soin la conduite à tenir, précisant à chaque instant avec rigueur. Ce qui fait et ce qui ne se fait pas : ce qui est fady. Ce qui doit être dans toutes les circonstances de la vie sociale et partant de la vie juridique de chaque individu. Or la notion de « fady », difficile à traduire, ont meilleur équivalent serait semble-t-il mot latin « sacer » signifie en français « sacrer ». Le tabou est un de s éléments fondamentaux de la vie sociale et individuelle des habitants de Madagascar. En un mot, la coutume c’est l’habitude, usages prop res aux mœurs dans un groupe, d’un clan. Et droit coutumier c’est l’ensemble des règles juridiques établies par un usage coutume et ayant force obligatoire. Le tabou qui nait du droit coutumier ainsi qu’il est de règle établie par un usage continu. « Le tabou vient des règles de l’existence quotidienne du roturier, du noble, du chef de famille, de la tribu entière même, il décide souvent de la parenté et du genre de vie de l’enfant qui vient de naitre, il élève des barrières entre les jeunes gens et limite ou nécessite l’extension territoriale de la famille ; il règle de manière de travailler et repartit strictement l’ouvrage, il décide même le menu ; il isole le malade, écarte les vivants du mort ; il conserve au chef sa puissance et au propriétaire son bien…Ainsi le tabou joue à Madagascar un rôle important dans la vie religieuse , politique, économie et sexuelle ; partout il intervient en quelque sorte comme un régulateur»2.
Une fois admise l’importance de cette notion, on comprend la difficulté qu’il y a à déceler au milieu de ces innombrables interdits ceux qui ont un caractère et une portée juridique et ceux qui au contraire n’ont qu’une val eur sociale ou religieuse. La notion defady comme celle du tabou, implique pour celui qui ne les respecte pas une sanction automatique : de même qu’à chaque défense des codes correspondant à une peine, de même chaque violation d’un fadyentrainent une sanction de caractère mystique au début, mais qui tend à perdre ce caractère du jour où elle se transforme en une amende perçue au profit de la collectivité ou du roi.
C’est une évolution semblable à celle que nous rencontrons dans les droits de l’Antiquité, comme actuellement dans le droit africain : strictement religieuse au point de départ, la sanction acquiert une valeur sociale lorsque le groupe tout entier l’exige pour ne pas subir les conséquences de la faute individuelle, puis juridique lorsqu’elle s’est complètement dépouillé de son caractère religieux. Cette transformation s’est depuis longtemps accomplie à Madagascar dans certaines régions, mais ne s’est pas encore achevée dans d’autres.
Partout subsiste un certain nombre d’interdits, qui ne sont pas sanctionnés pénalement, mais qui le restent plus ou moins mystiquement ou socialement. La coutumenantie d’une sanction ayant une portée juridique, n’apparait que rarement avec netteté. Presque toujours, il faut l’extraire au milieu d’innombrables obligations, qui n’ont que la valeur de simples usages sociaux. Et la discrimination est souvent fort difficile à faire. Ceci explique que la plupart des auteurs qui se sont attachés à l’étude des différents groupes ethniques malgaches aient été dans l’impossibilitéde les dégager pour en faire la synthèse et se soient contentés de les englober dans la description de la vie journalière.
D’autre part, l’usage de l’écriture s’est implanté très tardivement à l’intérieur du pays. Aussi, à l’exception de l’Imerina, les textes officiels susceptibles d’apporter une aide sérieuse à la connaissance de la coutume sont-ils rares. Pour cette double raison nous ne disposons pas d’une base déjà élaborée capable de ousn révéler le contenu des différentes coutumes. Quant aux Imerina, il ne faut pas la considérer dans son ensemble comme traduisant l’esprit du droit coutumier. Si certains cadres s’en sont directement inspirés, d’autres au contraire cherchent à la reformer.
Il est juste de faire une place à part aux kabary d’Andrianampoinimerina. Il ne s’agit pas d’une législation écrite mais « en fait », bien quela formulation soit uniquement orale, Andrianampoinimerina crée un véritable code : mêlant ensemble les règles traditionnelles aux décisions que la prise, formulent ses innovations ou les soutenant de proverbes déjà connus, il fixe d’une façon quasi-définitive l’état d’une question en imbriquant son apport personnel au fond coutumier transmis par la tradition. » On prend dans de telles conditions que le recueildeceskabary, tel qu’il a été constitué et publié par le PèreALLETC en 1873, demeure la source essentielle du droit oral malgache ; de beaucoup la plus importante et la plus riche.
La portée du droit coutumier Malagasy
La coutume malgache est donc demeurée essentiellement orale, elle s’exprime en d’innombrables proverbes, reflets de la sagesse populaire, et seule l’enquête directe, conduite sur terrain auprès des retables de village et des autorités administratives locales, est susceptible, dans la majeure parties des cas de la révéler. Et l’une d’entre elle nous semble résider dans le fondement religieux du droit oral, une autre dans la primauté accordée à l’ancienneté, base de la cohésion du groupe familiale et de la notion de parenté. Aussi, les fokonolona sont les plus vivaces encore à l’heure actuelle, e t qui parallèlement à la famille, jouent un rôle fondamental sur les institutions du droit coutumier malgache.
« De même que la langue malgache est une dans toutel’île, écrit Berthier, les tribus de Madagascar ont un fond commun de coutume, représentant, il est vrai, des différences dues aux contingences et à leur degré inégal d’évolution»3.Sur le plan juridique et tout spécialement en ce qui concerne le droit coutumier,à quels impératifs cette surprenante unité est-elle due ?Essentiellement, nous semble-t-il, à une communauté de religion, à une conception de l’au-delà que l’on retrouve à peu prè s partout sur le sol de la grande île, même si son expression n’est pas toujours identique. Le culte que les Malgaches rendent à leurs morts, l ’importance à la description purement matérielle de ces rets, on ne s’est pas toujours a perçu qu’ils constituent le pivot autour duquel s’ordonne l’ensemble du comportement social de la population de la grande île et traduisent non seulement l’attachement très profond des Malgachepour les morts, mais font que les ancêtres restent toujours au centre de toutes les préoccupations des vivants.
« L’ambiroa », l’un des huit ou dix vocables qui s’approche le plus de notre concept de l’âme, s’affirme tout autant principe de vie que de survie. Il s’agit donc d’une force latente, toujours prête à se manifester, constatée à maintesreprises ouau moins ressentie, elle n’est mise en doute par aucun malgache. Les morts sont présents « Ils constituent selon l’expression de Mannoni, « L’instance morale supérieure dans la personnalité dépendante du malgache » et réclament l’obéissance la plus différente des vivants dont ils sont toujours les pères »4. Si ces derniers se dérobent à leurs devoirs envers eux, ils s’attireront des malheurs, d’où la nécessité de respecter scrupuleusement lesrègles cultures destinées à apaiser les mânes des ancêtres, à se les rendre favorables, à o btenir leur aide et leurs conseils par des sacrifices appropriés.
Les évènements de la vie courante à Madagascar, tels la naissance, la circoncision, le mariage, sont ainsi assortis de sacrifice de bœufs, de poulets ou d’actes d’offrande donnant au droit coutumier un caractère sacré comparable à celui que nous rencontrons dans la plupart des Droits de l’Antiquité. Mais surtout une telle conception explique le désirextrêmement fort des Malgaches d’avoir la descendance la plus nombreuse.5Les enfants sont indispensables pour perpétuer le culte des ancêtres, ils sont pourles parents l’unique, l’indispensable garantie du bon accomplissement des rites funéraires qui après leur mort les feront pénétrer dans la société mânes.
Ce désir d’avoir à tout prix une progéniture, la plus nombreuse possible, domine l’esprit dans lequel se sont organisées des institutions de droit privé aussi importantes que le mariage, la protection de l’enfant et l’adoption. D ’autre part, la stérilité étant considérée comme un malheur, et mourir sans enfant comme une chose impensable, les coutumes malgaches vont s’ingénierà y remédier. C’est ainsi que la polygamie apparait au premier chef comme un moyen destiné à s’assurer avec le plus de certitude une descendance. D’après l’étude sociologie, le droit coutumier départà la coutume, mais la coutume apparait à partir l’usage, tradition. Donc, une fois n’est pas coutum e.
La règle coutumière est régit par le« fady » c’est-à-dire interdit à le faire. Cette prohibition des ancêtresest diteégalementle sacréla; sanction vient aux âmes, ainsi qu’elles ont existétoujours à tous temps et espaces. Incontestablement, le tabou c’est la règle traditionnelle pour apaiser la société malgache, enface des tentatives émanentà chaque individu de la famille, clan cet du Fokonolona.Ces règles coutumières rendentjusqu’actuelleune institution très importante et non négligeable pour déterminer les degrés des faits sociaux.
L’INTERACTION DU DROIT COUTUMIER AU DROIT POSITIF
L’intégration des coutumes dans la législation s’efectue sous deux formes. Certaines coutumes ont été réceptionnées par le droit moderne, d’autres ne surviennent que par la voie jurisprudentielle.
Les coutumes intégrées dans le droit moderne
La plupart de ces coutumes ont été intégrés dans uxde systèmes (jurisprudence et moderne) : Il s’agit du kitaytelo an-dalana,misintaka Le kitaytelo an-dala était le mode de partage des biens des époux en cas de divorce, qui s’effectuait suivant la proportion 1/3 pour l’épouse et le 2/3 pour le mari.6Le partage inégalitaire s’explique par la primauté de l’hommepar rapport à la femme, qui à l’époque, résultait de l’importance des attributions, rôles joués par l’homme dans la Socrate traditionnelle en général, dans le ménage en particulier.En effet, au sein de la société malgache traditionnelle, les durs labeurs et les grandes responsabilités revenaient à l’homme si la femme ne se voyait attribuer que les travaux domestiques: ces hommes partaient en guerre contre les clans rivaux, assuraient la défense du territoire, étaient responsables des travaux agro-pastoraux, si les femmes, à l’exceptio n des travaux de repiquage de riz, de pelage de paddy trouvaient leur place de choix au foyer.
Ce partage inéquitable pendant des décennies, étaitjugé normal aux yeux de la coutume malgache et lors de l’adoption du code civil malgache, lekitayteloan-dalana a été érigé en régime légal ou de droit communA. défaut de contrat de mariage, les biens étaient partagés selon la proportion 2/3 pour l’homme et 1/3 pour la femme.Sous « le régimekitaytelo an-dalana », sont présumés commun, tous les biens existant ua moment de la dissolution de la communauté, sauf l’époux (ou à ses ayant droit) quiallègue un droit exclusif de propriété sur eux, à établir qu’il a acquis avec des deniers propres »8.
Autrement dit, la règle en matière de mariage légime,t est la présomption de communauté des biens acquis pendant le mariage, d’une part, le principe est le partage suivant la prescription du kitaytelo an-dalana en cas de dissolution de la communauté, si l’exception est le régime conventionnel qui implique un partageconséquent. Ce régime peu équitable n’a pas résisté à la fronde des femmes AREMA sous l’égide de la première dans de l’époque, Madame Celine Ratsiraka, épouse du président de laRépublique, les années 1990.Et c’est ainsi qu’en vertu d’une loi n° 90.014 du 20 Juillet 1990, en son article 16, «La composition, l’administration et le partage des biens constituant le patrimoine de la communauté ou de chacun des époux dans le régime du droit commun ou« mizara mira » sont soumis aux règles suivantes parlant des biens personnels, des biens de la communauté et de sa dissolution.
L’application du texte a fait l’objet d’un arrêt civil n° 736 rendu par la Cour d’Appel d’Antananarivo en date 10 Avril 1996 frappé de pouvoir de cassation pour avoir appliqué le « mizara mira » s’agissant d’une communauté déjà dissoute en 1984. La Cour Suprême, chambre civil dans un arrêt de 20 Janvier 2000, a écidé que le texte en 1990 sur le« mizara mira » ne peut s’appliquer que sur une communauté en cours au moment de la promulgation dudit texte. Partant, il ne saurait être question de « mizara mira » pour une communauté déjà dissoute et ayant déjà fait l’objet d’un partage.
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Table des matières
Première partie : cadre logique du droit coutumier
Chapitre I : Situation historique du droit coutumier
Section-1 : évolution historique du droit coutumier
Section-2 : source du droit coutumier
Chapitre II- l’interaction du droit coutumier au droit positif
Section-1 : les coutumes intégrées dans le droit moderne
Section-2 : les coutumes intégrées par voie jurisprudentielle
Section-3 : les dispositions sur une propriété individuelle
Chapitre-III-les procédures de droit positif malgache
Scetion-1 : le droit positif malgache
Section-2 : le droit positif face aux réalités sociales malgaches
Section-3 : droit positif face à la culture juridique
Deuxième partie : l’analyse juridique du droit coutumier
Chapitre I : Cadre juridique de la coutume
Chapitre-I- les éléments constitutifs de la coutume
Section-1 : les diverses catégories des coutumes
Section-2 : la portée de la normativité de la coutume
Chapitre-II-le rôle du droit coutumier dans le droit de personnes
Section-1 : le droit des personnes
Section-2 : originalité du droit coutumier malgache
Section-3 : le droit coutumier facteurs du particularisme
Chapitre III- Etude critique sur la récupération de droit coutumier face au droit positif
Section-1 : les remises en question de l’application du droit coutumier
Section-2 : les preuves de l’importance du droit coutumier face au droit positif
Section-3 : la recommandation juridique sur le droit positif
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