Approche théorique de l’agriculture
Les Physiocrates
Les physiocrates favoriseront le développement rural par l’agriculture. Pour eux, la seule activité réellement productive est l’agriculture. Ils considèrent la terre comme un don de la nature. L’ordre économique est un ordre de la quantité. Cette conception les conduit, par leur thème fondamental du produit net, à sacraliser la terre. Dans ce cas, nécessaire est de rappeler le fonctionnement du « tableau économique » afin de mieux dégager ce que l’on entend par « produit net ».
Le tableau économique
Il aborde l’économie sous forme d’un circuit. François Quesnay entendait démontrer que la circulation des biens dans la société pouvait être comparée à la circulation du sang dans le corps. Il en conçoit donc chaque classe de la société comme un organe du corps social et entend montrer comment chacune de ces classes dépend des autres à travers l’interdépendance des activités économiques, les relations qui s’établissent dans la production et la répartition. Quesnay y représente l’économie comme un domaine cohérent de nature systémique en s’inspirant de la découverte, réalisée un siècle et demi plus tôt par William Harvey, du mécanisme de la petite et de la grande circulation sanguine. Il divise la société en deux secteurs (l’agriculture et le reste). Le tableau qu’il élabore ainsi peut être représenté de façon plus moderne sous la forme d’un circuit ou encore d’un tableau entrées-sorties de Leontief, utilisé en analyse entrées-sorties. De plus, le tableau de Quesnay qui relie les classes sociales par des flux de matières et de monnaie peut être considéré comme l’ancêtre des matrices de comptabilité sociale.
La notion du produit net
Ce produit résulte d’un « don gratuit » de la nature. En accordant la primauté absolue à l’agriculture, les physiocrates sont amenés à montrer que la circulation du revenu net à travers les groupes sociaux anime toute vie économique, et que la propriété foncière se trouve au cœur du droit naturel. La pensée économique des physiocrates définie l’économie comme une science des richesses matérielles. Le principal auteur de ce courant de pensée est François Quesnay (1694-1774). La physiocratie considère l’agriculture comme la seule activité capable de produire un « produit net ». Un surplus agricole peut être dégagé par l’agriculture d’où l’appellation « produit net ». Quesnay est le premier à s’opposer au mercantilisme. Pour développer l’économie, il préconise le libéralisme. L’État est neutre pour les physiocrates. Le protectionnisme et l’interventionnisme sont créateurs de déstabilisation. Les physiocrates sont d’ailleurs considérés comme les précurseurs du libéralisme. La physiocratie offre une politique qui donne la primauté à l’agriculture. Les réglementations qui entravent l’agriculture devront donc être supprimées. L’intervention de l’État doit être réduite au maximum selon Quesnay.
Le capital joue également un rôle essentiel pour les physiocrates. Comme l’agriculture consiste à réaliser une production, le capital est donc incontournable. L’ouvrage qui a fait le renommer de Quesnay est « Le Tableau Économique » (1758). Cette œuvre représente systématiquement la pensée économique des physiocrates. Elle analyse la circulation de la richesse dans l’économie entre les classes. Quesnay considère qu’il existe trois classes sociales à savoir : la classe productive, la classe des propriétaires et celle des artisans. La classe productive crée les biens utiles à la consommation. Elle assure également la reconstitution des semences et la production agricole. Cette classe comprend les entrepreneurs, et elle est la seule productrice de « produit net ». La classe des propriétaires pour sa part, prélève une partie des richesses créées. Ce prélèvement constitue également des avances. Ces dernières serviront de réserve à la subsistance des travailleurs de la terre et à la semence. Cette classe comprend les propriétaires des terres, et elle vit sur le revenu versé par la classe productive. La classe des artisans est une classe qui travaille sans produire des richesses du point de vue des physiocrates. Elle est stérile et ne dégage pas de produit net. Elle ne fait que consommer sa production. Le « produit net » est donc la différence entre la production et les avances.
Produit net = Production – (Avance + Dépense d’exploitation)
Les néo-classiques
La théorie de la production, avec sa célèbre loi des rendements décroissants, est une des pierres angulaires de la théorie économique, même si cela n’est pas reconnu par tous les économistes. Elle a deux fonctions liées mais bien distinctes. La première est celle de fournir une base théorique à la gestion des unités de production, autrement dit les exploitations agricoles pour ce qui nous concerne. Mais pour la plupart des économistes, c’est la seconde qui a été privilégiée à savoir celle d’être une composante indispensable de toute théorie économique visant à analyser le fonctionnement de l’économie dans son ensemble. Rappelons que les différents concepts de productivité sont directement issus de la théorie économique de la production. La théorie de la production répond à une série de questions (quoi produire? Combien ? Comment ? Avec quelles ressources ? En quelles quantités? Avec quelles techniques ?) En focalisant l’attention sur les décisions des producteurs individuels, chacun d’eux étant confronté à ces questions pour lui-même. L’hypothèse fondamentale est que le producteur prend ces décisions de telle sorte que son profit soit maximum dans le cadre des contraintes auxquelles il est soumis quant aux ressources qu’il peut mobiliser et des lois techniques de la production. Très tôt, les économistes agricoles ont suggéré de substituer la maximisation du revenu agricole à celle du profit pour tenir compte de la spécificité des exploitations agricoles familiales. Dans ces exploitations, une part importante des facteurs de Production (travail, terre et capital) est en quelque sorte fournie directement par la famille sans passer par des marchés. Dans ce cas, le profit n’a qu’un sens très abstrait et, surtout, la maximisation du revenu agricole et celle du profit sont formellement équivalentes.
la théorie du comportement adoptif de l’agriculteur
Rétrospectivement, on voit bien que la TCA est apparue à un moment précis dans l’histoire de l’agriculture française, moment qui correspondait à un besoin de renouvellement de la théorie pour comprendre le comportement des agriculteurs, en particulier leur plus ou moins grande propension à adopter le progrès technique (Petit, 1975). Depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, il était généralement admis que les agriculteurs devaient naturellement adopter le progrès technique sans État d’âme, tellement ce progrès était considéré comme efficace et supérieur à la situation antérieure. Il devait permettre aux agriculteurs de « maximiser le profit» ! À l’époque, tout un courant de pensée fleurissait, qualifiant les agriculteurs de retardataires, passéistes, voire archaïques pour « expliquer » leur refus du progrès technique. L’objectif avoué des politiques publiques et des actions collectives professionnelles était de transformer l’agriculture en une activité vraiment industrielle, pour la sortir du passé et la mettre à l’heure moderne : il fallait donc transférer vers le monde agricole les outils industriels (en particulier la comptabilité), faire en sorte que les agriculteurs changent de rationalité pour qu’ils adoptent celle du monde industriel et qu’ils deviennent ainsi des entrepreneurs ! La nécessité de l’industrialisation de l’agriculture est d’ailleurs explicitement affirmée par J. Chombart de Lauwe dans son manuel cité précédemment, publié seulement quelques années avant nos premiers travaux. Nous illustrons, ici, la pertinence de la théorie du comportement adaptif à cette époque sur trois points : le renouvellement du regard sur les agriculteurs familiaux impliqués dans la modernisation de l’agriculture en France dans les années 1970, sa contribution à la rénovation pédagogique de l’enseignement technique agricole en France également et le passage d’une conception de la gestion centrée sur des outils normatifs à une conception centrée sur l’acteur et son projet, valable aussi au-delà de la France. Enfin, pour illustrer la pertinence de cette théorie pour l’éclairage des politiques publiques, nous décrirons brièvement sa contribution à la définition des mesures d’aide aux « agriculteurs en difficulté » dans les années 1980. Soulignons que cette pertinence repose sur la capacité de la TCA de permettre des analyses à la fois fines et complètes du fonctionnement technico-économique des exploitations agricoles.
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Table des matières
INTRODUCTION
PARTIE I) ETUDE CONCEPUEL DE L’AGRICULTURE ET DU DEVELOPPEMENT
Chapitre I) Approche théorique de l’agriculture
Section 1) Les Physiocrates
Section 2) Les néo-classiques
Section 3) la théorie du comportement adoptif de l’agriculteur
Chapitre II) Le concept du développement rural
Section 1) Définition
Section 2) Les contraintes et limites du développement rural
Conclusion de la partie I
Partie II) LES REALITES DU SECTEUR AGRICOLE
Chapitre I) L’aperçu général de l’agriculture à Madagascar
Section 1) Les contextes macroéconomie
Section 2) Les caractéristiques de l’agriculture malagasy
Section 3) Les difficultés rencontré par le secteur agricole malagasy
Section 4) Les grandes freins de développement du secteur agricole malagasy
Chapitre II) L’importance de l’agriculture à Madagascar
Section 1) L’agriculture comme fournisseur des produits et source des devises
Section 2) L’agriculture comme protection des services environnementaux
Section 3) Mobilisation de l’emploi
Conclusion de la partie II
PARTIE III) LA POLITIQUE AGRICOL A MADAGASCAR
3-1) Objectifs
3-2) Stratégies et mesure
Conclusion de la partie III
CONCLUSION