Le nom
Le nom est un constituant essentiel de la phrase comme le verbe. Sémantiquement, le nom est un mot qui sert à désigner la personne, les choses et les animaux. Du point de vue formel, cette définition est linguistiquement inopérante. La définition du nom varierait d’une langue à l’autre, mais en gros, on pourra dire que le nom est l’élément qui commande la forme du verbe lorsqu’on met en rapport l’élément qu’il désigne avec l’action verbale ou l’état du procès. Certaines précisions sur ce rapport apparaîtront dans la suite de ce travail tandis que d’autres seront traitées dans la thèse. On distingue deux sortes de noms : le nom commun et le nom propre. Le nom commun s’applique à un être en tant qu’il appartient à une espèce, à une catégorie d’éléments tandis que le nom propre s’applique à un ou plusieurs êtres pour les distinguer des autres êtres de même espèce. La structure des noms présente de grandes divergences en malgache et en swahili.
Le nom en malgache Le nom commun demande souvent en malgache l’antéposition de l’article ny, ilay : ny olona, ilay zaza, ny latabatra, ilay vorona. On doit supposer que le nom est la seule catégorie linguistique apte à recevoir les articles ; lorsque d’autres catégories de mots reçoivent l’article, on peut toujours supposer qu’il manque quelque nom qui a été effacé : ilay mianatra, ny mahantra avec le verbe et l’adjectif précédés d’articles, peut se gloser ilay zavatra omena anarana hoe mianatra « cette chose à laquelle on donne le nom d’étudier », ny olona mahantra « les gens pauvres ». Les deux expressions se rendent respectivement par « le fait d’étudier » et « les pauvres ». Le nom propre s’écrit toujours avec une initiale en majuscule. Les noms propres se divisent en noms de lieux, de personnes et de tout autre objet. Les noms propres de lieux commencent souvent par une préposition comme an-/añ-, et i-/e-. La première préposition se décline devant une consonne radicale On peut avancer les cas de Antsiranana, Añahidrano, Ampanihy, Ikalamavo, Ehoala. Les noms propres de personne sont affectés des articles Ra, Andrian-, An-. On peut citer Ikoto, Ratovo, Andriantsoly. Les noms propres de lieux, de personnes et d’autres espèces d’objets ne sont pas toujours prédés d’article. On peut citer Befandriana, Mangoky, Madagasikara pour les noms de lieux, Sambo, Zaranaina pour les noms de personnes, Kelimalaza et Belangilangy pour les noms de talisman. L’habitude qui consiste à mettre l’article i ou ikala devant un nom propre commençant par les enclitiques i-, ra-, an-/añ- doit être considéré comme un procédé syntaxique destiné à rendre la phrase licite au même titre que l’emploi des articles ny et ilay dans le groupe subjectal ; ces particules ne doivent pas être considérées comme des éléments qui font partie des noms propres. Cet emploi se rencontre dans Manana harena i Madagasikara «Madagascar a des richesses ». Quant au terme ikala, il est composé de l’article particularisant i et du nom de familiarité kala « femme de mœurs affables ». L’emploi de l’article sert ici tout juste à marquer qu’il s’agit d’un être singulier que certains termes régionaux tendent à effacer, comme le terme vaiavy « femme ». Au lieu de Tonga i vaiavy Chila « La femme Chila est arrivée », on a plutôt tendance à dire Tonga vaiavy Chila. Au fait, n’importe quel terme commun peut être pris pour un nom propre s’il est employé pour désigner un être unique dans la collection déterminée où il se trouve. L’utilisation de la lettre majuscule pour l’initiale pour signaler les noms propres est juste un artifice utilisé pour le besoin de la cause. Dans la thèse, nous nous donnerons la tâche de décrire les différentes valeurs des noms et des articles qui les accompagnent ou qui en sont absents. Et nous chercherons à élucider l’étymologie de ces éléments ainsi que leurs comportements, notamment par comparaisons avec les données des langues apparentées au malgache comme le swahili et l’indonésien.
Le nom en swahili Comme pour toutes les langues bantoues, les noms se laissent répartir en classes spécifiques appelées justement classes nominales. Il y a huit classes nominales en swahili. En général, chaque classe se caractérise par l’opposition de deux préfixes dont l’un indique le singulier et l’autre le pluriel. Au départ, les classes nominales devaient servir à dénoter des êtres appartenant à un champ sémantique donné. C’est ainsi que la première classe ou classe m-/wa- devait comprendre des noms désignant des êtres humains tandis que la troisième classe ou ki-/vi- devait contenir des noms désignant des êtres inanimés. Mais comme partout en langue, il y règne une bonne dose de l’arbitraire linguistique et les êtres désignés par une classe nominale peut comprendre des êtres appartenant à plusieurs domaines du réel. Certaines classes nominales connaissent un seul préfixe de classe tandis qu’une classe nominale possède trois préfixes classificateurs. Un certain nombre de catégories de mots s’accordent en classe avec nom. Ce sont les verbes, les adjectifs, de quelque nature qu’ils soient, et la préposition possessive. Dans le cas où une classe nominale possède un seul préfixe classificateur, les mots qui s’y rapportent se caractérisent généralement par l’opposition de deux préfixes tels que l’un indique le pluriel et l’autre le pluriel. Par exemple, les noms de la classe n sont de forme invariable, mais les verbes qui s’accordent avec ces noms sont affectés du préfixe i- pour le singulier et du préfixe zi- pou le pluriel. L’on a ainsi nyumba moja inatosha « une maison suffit », nyumba tatu zinatosha « trois maisons suffisent ». Nous ne voulons pas entrer dans le détail des faits pour ne pas alourdir notre projet de thèse. Nous traiterons des marques d’accord des mots avec les noms lorsque nous examinerons ces classes de mots. Voici, disposées dans un tableau les huit classes nominales du swahili : m-/wa-, m-/mi-, ki -/vi-, n, ma-, u, ku, mahali.
Les substituts locatifs
Le substitut locatif désigne l’endroit indiqué. Il est composé d’une voyelle initiale e/a voyelle finale o/y et d’une consone médiane –t-, -r-, -n-, -ts- . Exemple : eto, ato, any, ery, etsy. La voyelle initiale e- désigne le lieu découvert, la voyelle le initiale a- désigne le lieu caché. Les voyelles finales –o, -y, -oa expriment la distance ou l’éloignement. Les consonnes médianes expriment la position du locuteur par rapport à lui-même ou par rapport aux autres protagonistes de la communication ou par ra^pport à la situatuion de l’endroit désigné. La forme locative s’emploie d’abord comme déterminant ; elle accompagne en le précédant et éventuellement en le suivant un syntagme nominal introduit par la préposition polyvalente amin- ou par la préposition locative an-. Remarquons que celle-ci peut prendre la fome a- ou i-. Exemple : ao aminareo ao “ chez vous”, eto an-tanàna eto, atsy ambany atsy, ery aloha, any ivelany any. La forme locative n’a pas reçu de classe dans cet emploi. On pourrait l’appeler adverbe locatif. Elle devient un substitut locatif lorsqu’elle s’emploie sans être tributaire d’un syntagme nominal. Elle peut alors s’employer comme prédicat ou comme sujet ou comme complément. Exemple : Eo Randria « Randria est là » (comme prédicat), Mahafinaritra any « Il fait beau là-bas » (comme sujet), Mipetra eroa izahay « nous habitons en cet endroit » (comme complément) ». Nous discuterons en profondeur des formes, des emplois et des valeurs des marqueurs démonstratifs dans la future thèse. Nous rechercherons une explication unificatrice des différentes formes des démonstratifs, aussi bien des adjectifs démonstratifs, pris séparément ou dans leur globalité.
Les adverbes en swahili
Il existe des mots bases qui sont des adverbes et des mots dérivés qui se comportent comme des adverbes. Les adverbes sont ainsi appelés auxiliaires parce qu’ils accompagnent les verbes qu’ils déterminent, mais ces espèces de mots déterminent souvent d’autres mots que les verbes. Nous donnons d’abord ceux qui déterminent les verbes. On peut citer ceux qui ont une valeur intensive comme sana, mno, tele. Ces adverbes s’emploient dans Alicheka sana « il riait beaucoup », ananitazama mno « il me regarde intensément », ng’ombe wanakuja tele « les bœufs viennent en grand nombre ». L’adverbe tena indique la répétition tulimsifu tena « nous le louons encore ». Les adverbes comme hasa « particulièrement » et labda «peut-être » semblent déterminer une phrase entière ou du moins un groupe de mots à dominance verbale. Labda alikuwa mui « peut-être était-il un méchant homme » ; Jirani wangu ni taratibu, hasa kazini « mon voisin est méticuleux, surtout au travail ». On peut ajouter l’adverbe kuhusu « à propos de » qui semble être un dérivé. Bibi anataka kumwona kuhusu adui yake « La dame est venue à propos de son ennemie ». Il existe en swahili des adverbes qui dérivent des verbes et des adjectifs. Parmi les premiers, on peut citer ceux qui sont formés sur les préfixes –ye et –we comme baadaye « avant cela, hatimaye « après cela », mwishowe « la fin ». Ces adverbes s’analysent réciproquement baada yake, hatima yake, mwisho wake ; ils comprennent les noms baada « l’avant », hatima « l’après » et mwisho « fin » et les adjectifs possessifs yake « de lui » et wake « de lui », eux-mêmes comprenant les marques d’accord i et u- et le possessif –ake de la classe m-/wa- au singulier ; mais pour la formation des adverbes de temps, il y a eu chute de la suite –ak- et combinaison des éléments restants en un seul terme. La forme –ake de yake et de wake est certainement désémantisée puisqu’elle ne réfère nullement à un propriétaire humain. Le préfixe ki- s’adjoint également au nom pour former des adverbes qui expriment la manière. Le mot kifaransa, formé sur le nom Faransa « France » signifie « à la manière fraçaise, à la française » ; le groupe de mots mkate kifaransa veut dire « un pain fabriqué à la française » ; le mot kifudifudi, formé sur le nom fudifudi « face contre terre », qui semble luimême formé sur le mot simple fudi inusité, signifie la « manière de se tenir la face contre le sol » ; il s’emploie par, exemple, dans kulala kifudigfudi « s’allonger face contre terre ». L’adverbe kishujaa, formé sur le nom shujaa « guerrier », signifie « d’une manière courageuse, courageusement » ; il s’emploie dans l’expression kugombana kishujaa « se battre courageusement ». Les adjectifs prennent le préfixe ki- ou le préfixe vi- pour former des adverbes qui indiquent également la manière. La liste des adjectifs qui prenent l’uin ou l’autre préfixe n’est pas prévisible. Ainsi, on dit kidogo « un peu », vizuri « bien » ; ces adverbes s’emploient dans amesema kidogo « il a parlé un peu » et amesema vizuri « il a bien parlé ». Nous signalons enfin l’emploi de tournures ou des mots d’autres espèces qui ont valeurs d’adverbe. Les mots mwisho, kisha, kwanza, qui ont l’air d’être des noms, signifiant « fin » pour les deux premiers et « commencement » pour le dernier, signifient bien souvent « à la fin » pour les deux premiers et « d’abord » pour le dernier. Ils s’emploient dans les phrases Mwisho (kisha), anaondoka « à la fin, il s’en va » ; Kwanza tunakaa pale « d’abord, nous nous asseyons là ». La concaténation d’une préposition, notamment de la préposition kwa, avec un nom à valeur d’adverbe. On dit, par exemple, kwa urahisi « avec facilicité ». Enfin l’infixe –vyo- contenu dans un verbe exprime la manière. Kama ulivyosema ninajaribu kujifunza Kiswahili « comme tu l’as dit , j’apprends le swahli ».
La forme neutre/emphatique
Cette forme verbale se présente différemment en swahili et en malgache. Dans la première langue, la phrase neutre est une phrase dont l’ordre des mots est sujet-verbecomplément ; dans la seconde, elle a l’ordre verbe-complément-sujet. L’ordre est l’ordre des énoncés communs de la langue concernée. La phrase emphatique est une phrase qui insiste sur un des éléments de la phrase en le mettant en relief. Elle résulte de la transformation de la phrase neutre. Cette transformation résulte d’un déplacement d’un membre de phrase et par l’emploi des copules en malgache. C’est d’ailleurs dans cette langue que la phrase emphatique est sentie le plus nettement. Nous avons signalé ses structures avec l’étude des copules dia et no au § II.12.
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Table des matières
REMERCIEMENTS
INTRODUCTION
PREMIÈRE PARTIE : MÉTHODOLOGIE DE LA FUTURE THÈSE
I.1 – Choix du sujet
I.2 – La problématique du sujet
I.3 – Méthodologie
I.3.1 – Les travaux des documentations
I.3.2- Les enquêtes sur le terrain
I.3.3 – L’élaboration des différentes cartes
I.3.4 – Plan du travail
DEUXIÈME PARTIE : LA PHRASE AU NIVEAU CATÉGORIEL
II.1 – Le nom
II.1.1- Le nom en malgache
II.1.2 – Le nom en swahili
II.2 – Le verbe
II.2.1- Le verbe en malgache
II.2.1.1- Forme ou voix
II.2.1.2 – Le mode
II.2.1.3 – Le temps
II.2.2 – Le verbe en swahili
II.2.2.1 – La voix
II 2 2 2- Les modes
II.3 – Les pronoms personnels
II.3.1- Les pronoms personnels en malgache
II.3.2 – Les pronoms personnels en swahili
II.4- Les adjectifs
II.4.1 – Les adjectifs en malgache
II.4.1.1 – Les adjectifs numéraux
II.4.1.2-Les adjectifs démonstratifs
II.4.2- Les adjectifs en swahili
II.4.2.1 – Les adjectifs qualificatifs
II.4.2.2 – Les adjectifs numéraux en swahili
II.4.2.3 – Les adjectifs démonstratifs en swahili
II.5 -Les substituts locatifs
II.6 – Les présentatifs démonstratifs
II.7 – Les adverbes
II.7.1 – Les adverbes en malgache
II.7.2 – Les adverbes en swahili
II.8 – Les mots interrogatifs
II.8.1 – Les pronoms interrogatifs en malgache
II.8.2 – Les mots interrogatifs en swahili
II.9- L’article
II.10 – Les conjonctions
II.10.1 – Les conjonctions en malgache
II.10.2 – Les conjonctions en swahili
II.11 – Les auxiliaires
II.11.1 – Les auxiliaires en malgache
II 11.2 – Les auxiliaires en swahili
II 12 – La copule
II.13 – Les prépositions
II.13.1 – Les prépositions en malgache
II.13.2 – Les prépositions en swahili
II.14 – Les interjections
TROISIÈME PARTIE : ETUDE DE LA PHRASE AU NIVEAU FONCTIONNEL
III.1 – Le prédicat
III.1.1 – Le prédicat en malgache
III.1.2 – Le prédicat en swahili
III.2 – Le sujet
III.2.1 – Le sujet en malgache
III.2.2 – Le sujet en swahili
III.3 – Le complément
III.3.1 – Le complément en malgache
III.3.2 – Le complément en swahili
QUATRIÈME PARTIE : LES TYPES DE PHRASE ET FORMES DE PHRASE
IV.1 – Les types de phrase
IV.2 – Les formes de phrase
IV.2.1 – La forme affirmative/négative
IV.2.1.1 – La forme affirmative/négative en malgache
IV.2.1.2 – La forme affirmative/négative en swahili
IV.2.2 – La forme active/passive
IV.2.2.1 – La forme active/passive en malgache
IV.2.2.2 – La forme active/passive en swahili
IV.2.3 – La forme neutre/emphatique
CINQUIÈME PARTIE : BIBLIOGRAPHIES
V.1 – Bibliographie commentée
V.2– Bibliographie non commentée
V.2.1-Dictionnaires
V.2.2 – Ouvrages généraux
V.2.3- Webographie
CONCLUSION
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