Critères d’inclusion
Pour être inclus les enfants devaient respecter plusieurs critères. Chacun d’eux devaient appartenir à la fourchette d’âge préalablement définie, c’est-à-dire de 3 à 6 ans pour les DT, de 6 à 10 ans pour les TDL et de 6 à 13 ans et demi pour les TSA. Concernant les enfants avec un développement typique, ceux-ci ne devaient pas avoir de trouble du langage. Pour les deux populations cliniques (TSA et TDL), le diagnostic devait être posé. Le principal critère d’inclusion concerne les performances des enfants en théorie de l’Esprit (TdE) et en complétive au pré-test. En effet, pour être inclus l’enfant doit avoir un score inférieur à 80% aux tâches de TdE, c’est-à-dire qu’il doit échouer à au moins 4 items sur 24. Il doit également obtenir un score inférieur à 80% aux tâches portant sur les complétives, c’est-à-dire qu’il doit échouer à minimum 2 items sur 12. Ces échecs doivent être retrouvés dans les deux cas pour les items portant sur les fausses croyances. Les items de vraies croyances servent d’indice sur les capacités de maintien attentionnel de l’enfant. De plus, le niveau de langage doit être suffisant et l’enfant doit comprendre des phrases simples de type sujet-verbe-objet. Enfin, l’enfant doit manifester suffisamment d’attention pour pouvoir profiter de l’entraînement.
Théorie de l’esprit
La TdE est évaluée sur un total de 24 items. Sur ces 24 items, 12 concernent des tâches de TdE verbale (6 sont des vraies croyances et 6 autres sont des fausses croyances) et 12 autres concernent des tâches de TdE non verbale (6 sont des vraies croyances et 6 autres sont des fausses croyances). Il existe deux versions du test évaluant la TdE, il s’agit des mêmes items présentés dans un ordre différent. Ceci a pour but de vérifier qu’il n’y a pas d’effet de l’ordre de présentation des items. Pour chaque tâche présentée ci-dessous, l’enfant doit choisir entre trois propositions. Deux sont impliquées dans le scénario présenté et reflètent le conflit cognitif dans lequel se trouve l’enfant. Le troisième choix esttoujours sans rapport avec l’histoire et a pour rôle de contrôler que l’enfant ne répond pas « au hasard ». L’épreuve de TdE verbale est directement inspirée de l’épreuve du Sally-Ann (BaronCohen, Leslie et Frith, 1985) [2]. Pour cette tâche, l’enfant est confronté à un déplacement inattendu d’un objet à l’insu d’un des personnages. Chaque scène est présentée de façon animée, et les protagonistes sont des personnes ou des animaux. Par exemple, une des scènes proposées est : « Voici Anne. Voici Thomas. Anne a un panier. Thomas a une boîte. Anne a un ballon. Elle met le ballon dans son panier. Anne sort se promener (le personnage quitte l’écran). Thomas sort le ballon du panier et le met dans la boîte. Maintenant Anne revient, elle veut jouer avec le ballon. Où Anne va chercher son ballon ? ». L’enfant doit ensuite choisir parmi trois réponses : la position initiale (ici le panier), l’endroit où l’objet se trouve réellement (ici la boîte) et la position du milieu représentant un objet non impliqué dans l’histoire (ici un sac). Pour réussir la tâche, l’enfant doit prédire où Anne ira chercher le ballon à son retour en tenant compte de la représentation erronée d’Anne et en mettant de côté sa propre connaissance de la réalité. Pour cet exemple la bonne réponse est de choisir le panier puisqu’Anne n’a pas vu le déplacement opéré par Thomas. L’épreuve de TdE non verbale est inspirée des travaux de Woolfe, Want et Siegal, (2002) [22]. Pour cette tâche, le personnage de la scène est accompagné d’une bulle de pensée et cherche à obtenir un objet qu’il ne voit pas. Par exemple, une des scènes proposées est : « La maman a soif, elle veut prendre quelque chose à boire. Regarde, on cache les yeux de la maman. Elle ne voit pas ce qu’elle prend dans le placard. Clique pour voir ». En même temps que l’on indique à l’enfant que le personnage ne voit pas ce qu’il fait, un bandeau apparaît pour cacher les yeux du personnage. L’enfant clique ensuite pour voir ce qui est caché (ici derrière la porte du placard) et découvre que le personnage ne prend pas en réalité ce qu’il croit prendre (ici la maman prend un bocal à bonbons). On demande ensuite à l’enfant : « La maman pense prendre quoi dans le placard ? ». L’enfant doit alors choisir entre ce que pense prendre le personnage (ici la bouteille d’eau), ce qu’il prend réellement (ici le bocal à bonbons) et un objet n’ayant rien à voir avec l’histoire (ici un cartable). Cette tâche est dite non verbale car elle est plus imagée et donc implique moins de composantes verbales que la tâche de TdE verbale précédemment décrite.
Efficacité de l’entraînement cible
Nous avons commencé par analyser les performances de nos participants en comparant en intragroupe les scores aux pré-tests et ceux aux post-tests selon les deux entraînements proposés : l’entraînement syntaxique (cible) et l’entraînement lexical (contrôle). Nous nous sommes tout d’abord intéressées aux performances en complétives, l’amélioration des performances à cette tâche étant ciblée par notre entraînement. Pour les sujets ayant reçu l’entraînement cible, au regard de la population totale, dans l’échantillon DT comme dans l’échantillon clinique TDL, la structure que nous avons entraînée (complétive) s’est améliorée de façon hautement significative (p ≤ 0.0001***), et de façon très significative chez la population clinique TSA (p = 0.0013**) (Tableau 1). En ce qui concerne le groupe ayant bénéficié de l’entraînement contrôle lexical, on ne relève aucune amélioration en complétives que ce soit pour la cohorte contrôle entière (p = 0.21), pour l’échantillon contrôle DT (p = 0.39) ou pour les échantillons cliniques contrôles TDL (p = 0.23) et TSA (p = 0.52). Nous avons ensuite analysé l’évolution des performances en TdE. Là encore, dans tous les échantillons ayant profité de l’entraînement cible, au sein de l’échantillon DT(p < 0.0001***), comme dans les échantillons cliniques TDL et TSA (p = 0.0002***), les performances en TdE se sont améliorées de manière hautement significative (Tableau 2). A contrario, aucune significativité n’a été retrouvée pour les enfants ayant bénéficié de l’entraînement lexical, qu’il s’agisse de la cohorte contrôle entière (p = 0.61), de l’échantillon contrôle DT (p = 0.78) ou des échantillons cliniques contrôles TDL (p = 0.53) et TSA (p = 0.07). Les enfants ayant bénéficié de l’entraînement cible, qu’ils soient dans l’échantillon typique ou dans les échantillons cliniques, voient leurs performances en complétives et en TdE s’améliorer très significativement (**) voire hautement significativement (***) après l’entraînement syntaxique des phrases enchâssées. À la différence de cela, nous ne constatons aucune amélioration significative en complétive et en TdE pour les cohortes d’enfants contrôles (DT contrôles, TDL contrôles et TSA contrôles) ayant reçu l’entraînement lexical (Tableaux 1 et 2).
Evolution des performances en complétive après l’entraînement cible
L’entraînement que nous avons proposé portait exclusivement sur la structure enchâssée. Comme nous l’envisagions, la comparaison des scores pré et post-tests en complétive révèle une différence très significative des performances pour l’échantillon clinique TSA, et hautement significative au regard de la population totale, de l’échantillon typique et de l’échantillon clinique TDL (Tableau 1). Les trois échantillons d’enfants (DT, TDL et TSA) ayant reçu l’entraînement cible témoignent d’une amélioration considérable de leurs performances pour cette tâche en complétive, contrairement aux enfants contrôles n’ayant pas reçu cet entraînement cible et ayant profité d’un entraînement contrôle lexical. Cet accroissement de performances n’est donc pas dû au hasard et illustre l’impact de l’entraînement syntaxique sur la tâche de complétive. Cette évolution, bien que très satisfaisante en soit, n’était pas notre objectif final. L’intérêt est de savoir si cette progression des performances en complétive entraîne une progression des performances en TdE. Et par là-même, si progression il y a, qu’elle en est sa teneur, connaît-elle une transformation équivalente ou supérieure à celle des performances dans la tâche que nous avons entraînée ?
Comparaison DT vs TDL
L’entraînement a permis conjointement l’amélioration des performances en complétive et en TdE non verbale chez les DT comme chez les TDL. En revanche nous notons une dissociation dans l’amélioration des performances en TdE globale et verbale entre ces deux populations. Cette dissociation révèle que ces deux populations ont évolué différemment pour la TdE verbale, la dissociation retrouvée en TdE globale étant certainement influencée par la TdE verbale. Les enfants TDL et ceux appariés en âge langagier présentent des performances équivalentes à la tâche de TdE, mais lorsqu’ils sont appariés à des enfants typiques de même âge chronologique les enfants TDL présentent alors des performances inférieures en TdE (Andrés-Roqueta et al., 2013 cités par Jacob et Maintenant, 2017 [13] ; Nilsson et Jensen de López, 2016 [16]). De plus, les enfants TDL présentent un trouble structurel du langage oral, contrairement aux enfants DT, la TdE verbale nécessitant davantage de langage nous supposons que cette tâche a été plus difficile du fait des difficultés langagières qui impacteraient le développement de la TdE (Spanoudis, 2016) [19].
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Table des matières
Remerciements
Engagement de non-plagiat
Introduction
Méthodes
Résultats
1. Amélioration des performances en théorie de l’Esprit
2. Existence de différences de performances entre chaque groupe
3. Maintien des gains après l’entraînement
Discussion
1. Amélioration des performances en théorie de l’Esprit
2. Existence de différences intergroupes
3. Maintien des gains après l’entraînement
Conclusion
Bibliographie
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