Histologie
ย ย La matrice et le lit de lโongle ont en commun lโabsence de couche granuleuse, sauf au cours des processus pathologiques. En revanche, la structure histologique de lโhyponychium est identique ร celle de lโรฉpithรฉlium cutanรฉ. Cโest ainsi quโil existe des cellules de Langerhans dans lโappareil unguรฉal ; en revanche les mรฉlanocytes sont rares et quiescents dans les conditions habituelles. Lors dโune avulsion unguรฉale, lโรฉpiderme du lit reste adhรฉrent ร la partie infรฉrieure de la tablette et met ร nu les papilles dermiques ordonnรฉes en sillons longitudinaux et parallรจles qui dessinent une tรดle ondulรฉe en coupe transversale. ร lโopposรฉ, la base de lโongle est peu adhรฉrente ร lโรฉpiderme de la matrice sauf aux angles postรฉro-latรฉraux, reliรฉs ร lโarticulation voisine par des attaches fibreuses. Le repli sus-unguรฉal ne se distingue histologiquement de la peau que par lโabsence de papilles dermiques et de poils. Les capillaires dont lโorientation est parallรจle ร la surface se prรฉsentent en plusieurs rangรฉes de boucles rรฉguliรจres ou lรฉgรจrement sinueuses, la plus distale รฉtant la plus intรฉressante pour lโexamen capillaroscopie.
Biologieย
ย ย La matrice unguรฉale manifeste une activitรฉ permanente (contrairement ร celle du cheveu). Toutefois, il existe des variations, en fonction de lโextrรฉmitรฉ : aux mains le remplacement dโun ongle demande 4 ร 5 mois ; au gros orteil, 10 ร 18 mois. La main dominante et les doigts les plus longs ont la croissance la plus rapide. Un ralentissement sโobserve chez le vieillard, au cours de lโimmobilisation (attelle), du froid, avec certaines mรฉdications (cytotoxiques), lors de certaines affections (syndrome xanthonychique). ร lโopposรฉ ciclosporine, lรฉvodopa, itraconazole, etc. accรฉlรจrent la croissance unguรฉale, certaines dermatoses รฉgalement : psoriasis, pityriasisrubra pilaire et รฉrythrodermie ichtyosiforme bulleuse. La mesure de la pousse unguรฉale possรจdenon seulement une valeur diagnostique comme dans certaines formes discrรจtes du syndromex anthonychique, mais encore pronostique puisquโelle permet de juger de lโefficacitรฉ du traitement.
Cultureย
ย ย La culture est un complรฉment indispensable de lโexamen direct. En effet, lโisolement en culture du champignon responsable et son identification (qui ne peut รชtre rรฉalisรฉe par le seul examen direct) sont importants, puisque le traitement peut รชtre diffรฉrent en fonction de lโespรจce isolรฉe. En raison de la prรฉsence frรฉquente de nombreuses bactรฉries et de champignons saprophytes ou commensaux au niveau de la peau ou des phanรจres, il est indispensable dโutiliser un milieu de culture sรฉlectif. Ainsi, le milieu de rรฉfรฉrence pour les dermatophytes est le milieu de Sabouraud, additionnรฉ dโantibiotique(s) (chloramphรฉnicol ยฑ gentamicine) et de 0,5 ร 1g/L de cycloheximide (Actidioneยฎ). Cette derniรจre molรฉcule inhibe en effet la croissance de la plupart des moisissures ainsi que de certaines espรจces de Candida telles que C. parapsilosis et C. famata et favorise donc lโisolement des seuls dermatophytes. Compte tenu de la possibilitรฉ dโune moisissure ou dโun pseudo dermatophyte potentiellement pathogรจne pour lโongle, il conviendra dโutiliser toujours un milieu sans Actidioneยฎ. Les cultures sont incubรฉes habituellement ร 20-25 ยฐC. Une durรฉe dโincubation de 4 semaines minimum doit รชtre respectรฉe avant de rendre des rรฉsultats nรฉgatifs. Les cultures sont observรฉes en gรฉnรฉral deux fois par semaine, soit le champignon est immรฉdiatement identifiรฉ, soit il est nรฉcessaire pour obtenir un pigment caractรฉristique ou des fructifications abondantes aprรจs un repiquage sur milieu spรฉcifique selon les situations. Pour les dermatophytes Les cultures doivent รชtre examinรฉes au minimum deux fois par semaine. Lโidentification se fait habituellement directement sur le milieu dโisolement de Sabouraud et repose sur un certain nombre de paramรจtres : vitesse de croissance, รฉvolution de la morphologie des colonies, aspects macroscopiques et microscopiques, production dโun pigment, etc. En cas de prรฉsence des critรจres culturaux macroscopiques ou microscopiques atypiques, le biologiste doit avoir recours ร des techniques complรฉmentaires et ร des repiquages sur desย milieux spรฉcifiques, dits ยซ dโidentification ยป qui favorisent la conidiogenรจse (formation des spores) et/ou la production dโun pigment caractรฉristique. De nombreux milieux ont รฉtรฉ mis au point : Le milieu de Borelli (milieu au lactrimel), le milieu ร lโurรฉe indole (gรฉlose ร lโurรฉe de Christensen) et le milieu au Bromocrรฉsol pourpre. Pour identifier certaines espรจces de Candida, lโรฉtude des caractรจres biochimiques peut รชtre associรฉe, tels que lโassimilation et la fermentation de certains sucres API.
Pseudodermatophytes :
ย Ces moisissures prรฉsentent des similitudes avec les dermatophytes dans leur mode dโattaque de lโongle, leur kรฉratinophilie et les aspects cliniques rรฉsultant de leur infection. Parmi ces pathogรจnes, deux genres sont susceptibles de causer des onychomycoses : Scytalidium sp. (Scytalidium hyalinum et Neoscytalidium dimidiatum) et Onychocola canadensis. Contrairement aux autres moisissures cosmopolites, ces pseudodermatophytes ont une rรฉpartition gรฉographique assez spรฉcifique dans les zones tropicales ou subtropicales. Neoscytalidium dimidiatum (Figure 26) et Scytalidium hyalinum sont responsables dโonychomycoses des pieds et des mains avec une prรฉdominance des atteintes des pieds. Ces champignons sont aussi impliquรฉs dans dโautres pathologies telles que des lรฉsions souscutanรฉes, des intertrigos, hyperkรฉratoses palmo-plantaires [15] et des atteintes plus rares telles que des infections dissรฉminรฉes chez les patients immunodรฉprimรฉs [16]. En cas dโonychomycose, dโautres lรฉsions possibles doivent รชtre recherchรฉes.
Frรฉquence des onychomycoses :
ย ย Les onychomycoses sont les affections de lโongle les plus communes et les plus rรฉpandues, dans les รฉtudes publiรฉes, les taux de prรฉvalence oscillent entre 2 et 18% selon les populations examinรฉes [8]. Elles englobent schรฉmatiquement les onyxis ร dermatophytes (prรฉdominent aux pieds), ร levures (prรฉdominent aux mains) et ร moisissures. Les onychomycoses sont la principale รฉtiologie des onychopathies, 18 ร 50% selon les รฉtudes [61,62], lโatteinte unguรฉale reprรฉsente aussi la principale localisation des mycoses superficielles : 30% ร 40% de lโensemble des dermatophyties [63], la frรฉquence des onychomycoses varie dans la population gรฉnรฉrale, selon quโ โelle est suspectรฉe cliniquement ou confirmรฉe par lโexamen mycologique. Les taux de prรฉvalence basรฉs sur lโaspect clinique uniquement oscillent entre 1,6 et 26,3% des cas selon le recrutement (enquรชte dans la population gรฉnรฉrale ou consultant en dermatologie). Lorsquโun examen mycologique est pratiquรฉ, les taux oscillent entre 9 et 67% [8]. En rรฉalitรฉ, il est difficile de se faire une idรฉe exacte sur la frรฉquence des onychomycoses, compte tenu de lโhรฉtรฉrogรฉnรฉitรฉ des populations รฉtudiรฉes. Dans notre รฉtude, lโonychomycose รฉtait confirmรฉe dans 76,92% des cas. Ce chiffre รฉlevรฉ observรฉ dans notre รฉtude par rapport ร des autres รฉtudes (Tableau XV) peut รชtre expliquรฉ, parlโabsence dโinformations suffisantes sur lโimportance de lโhygiรจne des pieds, lโutilisation de douches communes qui favorisent la contamination fongique dโune part et dโautre part , par lโaugmentation de la frรฉquence des facteurs favorisants des onychomycoses surtout les atteintes mycosiques superficielles associรฉes puisque 54% de nos patients avaient au moins une atteinte mycosique superficielle associรฉe. Au Maroc, la frรฉquence rรฉelle des onychomycoses est certainement sous-estimรฉe du fait du coรปt รฉlevรฉe de leur prise en charge entrainant une restriction ร la prescription de lโexamen mycologique, dโoรน un dรฉfaut de confirmation de lโรฉtiologie de ces atteintes unguรฉales [1].
Rรฉpartition mondiale des pseudodermatophytes :
– Onychocola canadensis : Des cas sporadiques dโonychomycoses ร Onychocola canadensis ont รฉtรฉ rapportรฉs sur le continent nord-amรฉricain, au Canada , en Europe dans les pays suivants : France, Royaume-Uni, Italie, Belgique, Espagne, Rรฉpublique Tchรจque [68] et en Ocรฉanie: Nouvelle Zรฉlande [69]. Jusquโร maintenant, ce pathogรจne nโa รฉtรฉ retrouvรฉ quโen pays tempรฉrรฉs, mais selon certains auteurs [70], la distribution gรฉographique des cas rapportรฉs pourrait รชtre influencรฉ par celle des laboratoires ayant les moyens techniques et humains dโidentifier ce pathogรจne.
– Scytalidiumsp :Scytalidium sp. est une moisissure mise en รฉvidence dans les cas dโonychomycoses sur les continents amรฉricains (Figure 28): Martinique [71], Colombie [72], Brรฉsil [73] ; sur le continent asiatique : Inde [74], Thaรฏlande [75], Singapour [22] ; en Afrique : Gabon [77] et en Europe : France [78]. Les espรจces de Scytalidium รฉtant isolรฉes des plantes et arbres en milieu tropical ou subtropical , certains cas rapportรฉs dans des pays tempรฉrรฉs, tels que les Etats-Unis, le Canada, lโAngleterre et la France, seraient dรป ร lโimmigration et au tourisme en zone dโendรฉmie. Cโest notamment le cas ร Paris, en France [78], oรน sur 236 cas dโinfections ร Scytalidium rรฉpertoriรฉes, 113 patients provenaient des Antilles, 98 patients de lโAfrique subsaharienne, 10 patients des รฎles de lโOcรฉan Indien (Maurice, Rรฉunion, Comores), 6 patients de la Guyane Franรงaise, 3 patients dโAfrique du Nord et 3 patients dโAsie. Chez 3 rรฉsidents franรงais, des voyages en zones tropicales ou subtropicales ont รฉtรฉ rapportรฉs.
Onychodystrophie totale
ย Onychodystrophie totale secondaire reprรฉsente la forme culminante de toutes les formes cliniques dโonychomycoses. Lโongle sโeffrite et finit par disparaitre, laissant un lit parsemรฉ de dรฉbris de kรฉratine anormale. Contrairement ร la forme secondaire dโonychodystrophie totale la variรฉtรฉ primaire se rencontre seulement chez les patients atteints de candidose cutanรฉo-muqueuse chronique ou au cours dโautres dรฉficits immunitaires. Lโenvahissement candidosique sโeffectue rapidement sur tous les tissus de lโappareil unguรฉal, leur รฉpaississement entraine un gonflement de la phalange distale qui rend une forme plus bulbeuse quโhippocratique et la tablette est fortement รฉpaissie, opaque, jaune brun. Des zones hypรฉrkeratosiques, secondaires ร lโenvahissement candidosique de la peau se dรฉveloppent, adjacentes ou non ร la tablette unguรฉale. Une candidose unguรฉale isolรฉe a รฉtรฉ dรฉcrite avec un dรฉficit en ICAM-1[4]. Lโonychodystrophie totale รฉtait dans 39% des cas de nos patients, ce taux qui est relativement รฉlevรฉ et ne peut รชtre que la consรฉquence du retard de consultation et une durรฉe dโรฉvolution qui dรฉpasse souvent plusieurs annรฉes. Ce rรฉsultat est proche de celui trouvรฉ par Akammar S [40], par contre lโonychodystrophie totale รฉtait la forme la plus frรฉquente trouvรฉ par Sbay A (52%) [55] (Tableau XX).
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Table des matiรจres
INTRODUCTION
RAPPEL SUR LโAPPAREIL UNGUEAL
PATIENTS ET METHODES
I. Type de lโรฉtude
II. Population de lโรฉtude
III. Recueil des donnรฉes
IV. Etapes de lโexamen mycologique au sein du service de parasitologie-mycologie mรฉdicale ร lโhรดpital militaire Avicenne, Mar
V. Analyse des rรฉsultats
RESULTATS
I. Donnรฉes รฉpidรฉmiologiques
1. Rรฉpartition des cas selon les annรฉes
2. Sexe
3. Age
4. Facteurs favorisants
II. Donnรฉes cliniques
1. Analyse sรฉmiologique des lรฉsions
2. Lรฉsions dermatologiques associรฉes
III. Donnรฉes mycologiques
1. Analyse gรฉnรฉrale des rรฉsultats mycologiques
2. Examen direct
3. Culture
IV. Donnรฉes thรฉrapeutiques
1. Traitement prescrit
2. Molรฉcules utilisรฉes
V. Donnรฉes รฉvolutives
1. Dรฉlai de contrรดle
2. Evolution clinique
DISCUSSION
I. Dรฉfinition des onychomycoses
II. Physiopathologie -Facteurs favorisants
III. Epidรฉmiologie
IV. Etude clinique des onychomycoses
1. Formes clinique des onychomycoses
2. Localisation des atteintes
V. Diagnostic diffรฉrentiel
VII. Modalitรฉs thรฉrapeutiques
1. Principe du traitement
2. Moyens thรฉrapeutiques
2.1 Mรฉdicaments systรฉmiques
2.2 Mรฉdicaments topiques
2.3 Autres traitements
3. Conseils hygiรฉno-diรฉtรฉtiques
4. Indications
VIII. Evolution et pronostic
IX. Complications des onychomycoses
X. Prรฉvention
CONCLUSION
ANNEXES
RESUMES
BIBLIOGRAPHIE
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