ETUDE ANATOMIQUE DE LA MOELLE EPINIEREย
Embryologie
La moelle รฉpiniรจre dรฉrive de la partie caudale non renflรฉe du tube neural. Trรจs tรดt, le tube neural diffรฉrencie divers รฉlรฉments. Les lames basales donnent les cornes ventrales motrices de la substance grise et les lames alaires donnent les cornes dorsales sensitives. La partie de ces lames, voisine du sulcus limitans donne la substance intermรฉdiaire (substance grise pรฉri-รฉpendiculaire) qui est vรฉgรฉtative, alors que la cavitรฉ du tube neural donne en se rรฉtrรฉcissant le canal central (canal de lโรฉpendyme). Les lames alaires et basales donnent naissance aux crรชtes ganglionnaires qui donnent les nerfs spinaux. Autours de cet axe gris, les faisceaux blancs se dรฉveloppent successivement. Lโordre dโapparition des faisceaux blancs est ร la base de notions physiologiques importantes. Enfin dรฉs le deuxiรจme mois de la vie embryonnaire, la moelle sโรฉpaissit au niveau de la naissance des nerfs spinaux destinรฉs aux membres. Il donne ainsi les renflements cervical et lombaire. Ces renflements sont trรจs bien individualisรฉs au troisiรจme mois. Entre les deux renflements la moelle sโallonge. La croissance de la moelle rรฉsulte surtout de lโallongement du segment thoracique qui finit par รชtre deux fois plus haut que le segment cervical et le segment lombosacrรฉ. Le tube neural est flanquรฉ de part et dโautre dโune colonne para-axiale qui est le mรฉsoblaste. Le mรฉsoblaste se segmente parallรจlement en somites superposรฉs droit et gauche. Ces somites se divisent chacun en sclรฉrotome qui donnera enfin la colonne vertรฉbrale. La moelle รฉpiniรจre dรฉfinitive est ainsi un organe segmentaire composรฉ de segments superposรฉs [8].
Anatomie descriptiveย
Configuration externe
La moelle รฉpiniรจre est une tige cylindrique de coloration blanchรขtre mesurant 45 cm de long et 1 cm de large en moyenne. Elle est lรฉgรจrement aplatie dโavant en arriรจre. Elle occupe le canal vertรฉbral dont elle รฉpouse les courbures sagittales. Elle prรฉsente deux extrรฉmitรฉs : une extrรฉmitรฉ craniale (supรฉrieure) qui fait suite ร la moelle allongรฉe ou bulbe et une extrรฉmitรฉ caudale (inferieure) conique ou cรดne mรฉdullaire situรฉe en regard du bord supรฉrieur de la 2รจme vertรฉbre lombaire (L2). Le sommet du cรดne est reliรฉ ร lโextrรฉmitรฉ caudale du canal vertรฉbral par le filum terminal. La moelle รฉpiniรจre prรฉsente deux renflements : lโun cervical sโรฉtendant de la 3รจme vertรฉbre cervicale (C3) ร la 2รจme vertรฉbre thoracique (T2) et lโautre lombaire de qui va de la 9รจme vertรฉbre thoracique (T9) ร la 1รจre vertรฉbre lombaire. Ces renflements correspondent ร lโรฉmergence des racines nerveuses destinรฉes aux membres supรฉrieurs et infรฉrieurs. Ils mesurent chacun 10 cm de long. La tige mรฉdullaire prรฉsente ร sa surface des sillons longitudinaux mรฉdians et des sillons longitudinaux latรฉraux. Ces derniers subdivisent chaque moitiรฉ droite et gauche de la moelle en cordon ventral, latรฉral et dorsal. Les sillons latรฉraux ventraux รฉmergents les racines ventrales des nerfs spinaux et les sillons latรฉraux dorsaux รฉmergent les racines dorsales des nerfs spinaux [8]. Chez lโhomme on compte 31 paires de nerfs rachidiens ; dont 8 cervicales, 12 thoraciques, 5 lombaires, 5 sacrรฉes et 1 coccygienne. Chaque nerf innerve une partie du corps. Au dessus du cรดne mรฉdullaire, le canal rachidien ne contient plus quโun paquet serrรฉ de racines rachidiennes descendantes constituant la queue de cheval [6] (figure 1).
Configuration interne
Sur une coupe transversale de la moelle, on distingue deux substances de coloration diffรฉrente :
– Une substance grise centrale qui est formรฉe de deux croissants symรฉtriques en forme dโailes de papillon. Au centre de cette substance on a un fin canal qui existe de haut en bas jusque dans le filum terminal appelรฉ canal รฉpendimaire. La substance grise se divise en deux parties de part et dโautre de la ligne blanche. Chacune forme des saillies (cornes) ventrales et dorsales dans la substance blanche [8] (figure 2). Les cornes ventrales sont obliques en avant et en dehors, arrondies ou quadran- gulaires ร bord ventral dentelรฉ oรน se fait la sortie des racines ventrales des nerfs spinaux responsables de la motricitรฉ. Les cornes dorsales sont obliques en arriรจre et en dehors, allongรฉes et รฉtroites ร bords rรฉgulier. Elles correspondent ร lโรฉmergence des racines dorsales des nerfs spinaux responsables de la sensibilitรฉ.
– Une substance blanche pรฉriphรฉrique constituรฉe par les fibres de conduction de lโinflux groupรฉs en faisceaux. Elle est constituรฉe de trois cordons [6, 8] (figure 3). Un cordon latรฉral oรน descendent le faisceau pyramidal croisรฉ et le faisceau rubro-spinal mais รฉgalement oรน monte le faisceau spino-thalamique. Un cordon antรฉrieur oรน descendent le faisceau pyramidal direct et le faisceau vestibulo-spinal et oรน monte รฉgalement le faisceau spino-thalamique. Un cordon postรฉrieur oรน montent les faisceaux de GOLL et BURDACH.
Mรฉninges
La moelle รฉpiniรจre est entourรฉe par trois enveloppes [8] (figure 4).
– La dure-mรจre est superficielle, rรฉsistante et fibreuse. Elle joue un rรดle de protection. Elle forme autour lโaxe nerveux un manchon cylindrique de diamรจtre largement supรฉrieur ร celui de la moelle et nettement infรฉrieur ร celui du canal vertรฉbral. Le manchon dural est trรจs rapprochรฉ de la paroi antรฉrieure du canal osseux et des brides fibreuses lโunissant au ligament longitudinal postรฉrieur. Sur les flancs et en arriรจre du manchon se situe lโespace รฉpidural en forme de croissant ร la coupe, logeant donc la graisse fluide et les plexus veineux vertรฉbraux internes. Le manchon dural รฉmet des gaines fibreuses qui enveloppent les nerfs spinaux. Ces gaines isolรฉes mais accolรฉes accompagnent les racines jusquโau foramen intervertรฉbral (trou de conjugaison) oรน elles se continuent avec le pรฉrioste.
– Lโarachnoรฏde dont les deux feuillets sont sรฉparรฉs par un espace pratiquement virtuel. Elle est appliquรฉe ร la face profonde de la duremรจre.
– La pie-mรจre est intimement appliquรฉe ร la surface de la moelle et en รฉpouse tous les accidents.
Entre lโarachnoรฏde et la pie-mรจre se trouvent les espaces sous arachnoรฏdiens qui contiennent le liquide cรฉrรฉbro-spinal.
Vascularisation
Artรจres
La moelle รฉpiniรจre est vascularisรฉe par les artรจres intramรฉdullaires รฉmanรฉes du rรฉseau anastomotique superficiel prรฉ-mรฉrien qui lโenserre. Ce rรฉseau unit les artรจres spinales ventrales longitudinales et les artรจres spinales dorsolatรฉrales. Ces chaines reรงoivent les voies artรฉrielles dโapport ou artรจres radiculomรฉdullaires รฉmanรฉes de la plate forme aortico-sous-claviรฉre et supportรฉes par les nerfs spinaux et leurs racines. Il existe en moyenne 6 ร 8 artรจres radiculomรฉdullaires antรฉrieures et une vingtaine de postรฉrieures. Lโartรจre spinale ventrale reรงoit les branches antรฉrieures volumineuses des artรจres radiculomรฉdullaires et les artรจres spinales dorsolatรฉrales reรงoivent leurs branches postรฉrieures grรชles [8]. Fonctionnellement, la vascularisation de la moelle est ainsi organisรฉe sous la forme de trois territoires artรฉriels successifs (figure 5).
– Le territoire cervicothoracique est รฉtendu jusquโร la premiรจre vertรฉbre thoracique et dรฉpend essentiellement de lโartรจre vertรฉbrale.
– Le territoire thoracique est compris entre les myรฉlomรฉres T4-T9 (quatriรจme et neuviรจme vertรฉbre thoracique) et prรฉsente une alimentation fragile dโorigine intercostale.
– Le territoire distal thoracolombaire est situรฉ sous la dixiรจme vertรฉbre thoracique et irriguรฉ par une artรจre lombaire ou artรจre dโAdamkiewicz.
Veines
La vascularisation est assurรฉe par les veines spinales et mรฉdullaires. Elles naissent de la substance grise et rejoignent de faรงon radiaire le cercle veineux pรฉrimรฉdullaire et les six troncs veineux qui cheminent le long de chacun des sillons antรฉrieurs, postรฉrieurs et latรฉraux correspondants. Les variations individuelles sont trรจs importantes mais le rรฉseau est constituรฉ dโau moins une veine ventrale et de deux veines dorsales. Des branches horizontales naissent de ces troncs et du cercle pรฉrimรฉdullaire pour rejoindre les veines des trous de conjugaison et par lร les plexus veineux extrarachidiens. Ces axes veineux mรฉdullaires ne suivent pas les axes artรฉriels. Cโest le cas en particulier de la veine radiculomรฉdullaire principale qui nโa ni le mรชme trajet ni le mรชme trou de conjugaison que la branche artรฉrielle correspondante qui alimente lโartรจre spinale antรฉrieure [9].
PHYSIOLOGIE DE LA MOELLE EPINIEREย
La moelle รฉpiniรจre a pour rรดle le transport dโinflux nerveux. Elle joue un rรดle central dans le systรจme nerveux et elle est le point de dรฉpart de nombreuses fibres nerveuses qui innervent les diffรฉrents organes du corps. Elle assure le relais entre ces organes et le cerveau. Dans la substance blanche, les voies nerveuses ascendantes (faisceaux de Goll et de Burdach, faisceau spinothalamique, faisceaux spinocรฉrรฉbelleux dorsal et ventral) sont des voies sensitives et elles conduisent les informations relatives ร la perception de lโenvironnement vers les centres supรฉrieurs (tronc cรฉrรฉbral, cervelet, cerveau). Les voies nerveuses descendantes (voie pyramidale et voies extrapyramidales) sont des voies motrices et elles conduisent les influx moteurs provenant des centres supรฉrieurs. Dans la substance grise, la racine postรฉrieure conduit l’influx nerveux depuis les organes pรฉriphรฉriques jusqu’aux centres nerveux. La racine antรฉrieure conduit l’influx nerveux des centres nerveux vers les organes pรฉriphรฉriques en particulier vers les muscles : c’est une racine motrice. ร chaque racine correspond des territoires dรฉterminรฉs d’innervation de la peau, des muscles, des articulations et des viscรจres. Une partie de la substance grise a un fonctionnement autonome, elle assure les rรฉflexes (dans ce cas, les informations liรฉes ร la perception ne sont pas conduites au cerveau mais traitรฉes par la moelle รฉpiniรจre qui rรฉpond par une action rรฉflexe) [10].
|
Table des matiรจres
INTRODUCTION
1. GENERALITES
1.1. Dรฉfinition
1.2. Historique
1.3. Epidรฉmiologie
2. ETUDE ANATOMIQUE DELA MOELLE
2.1. Embryologie
2.2. Anatomie descriptive
2.2.1. Configuration externe
2.2.2. Configuration interne
2.3. Mรฉninges
2.4. Vascularisation
2.4.1. Artรจres
2.4.2. Veines
3. PHYSIOLOGIE DE LA MOELLE EPINIERE
4. PHYSIOPATHOLOGIE DES COMPRESSIONS MEDULLAIRES NON TRAUMATIQUES
5. DIAGNOSTIC POSITIF
5.1. Circonstance de dรฉcouverte
5.2. Clinique
5.2.1. Syndrome rachidien
5.2.2. Syndrome lรฉsionnel
5.2.3. Syndrome sous lรฉsionnel
5.3. Paraclinique
5.3.1. Examens biologiques
5.3.2. Examens morphologiques
5.3.2.1. Radiographie standard
5.3.2.2. Tomodensitomรฉtrie
5.3.2.3. Imagerie par rรฉsonnance magnรฉtique
5.3.2.4. Autres examens morphologiques
6. DIAGNOSTIC EVOLUTIF
7. DIAGNOSTIC TOPOGRAPHIQUE
7.1. Topographie en hauteur
7.1.1. Compressions cervicales hautes
7.1.2. Compressions cervicales basses
7.1.3. Compressions de la moelle dorsale
7.1.4. Compressions de la moelle lombosacrรฉe
7.2. Topographie en largeur
7.2.1. Compressions antรฉrieures
7.2.2. Compressions postรฉrieures
7.2.3. Compressions latรฉrales
8. DIAGNOSTIC DIFFERENTIEL
8.1. La polyradiculonรฉvrite aiguรซ
8.2. La sclรฉrose en plaque
8.3. La sclรฉrose latรฉrale amyotrophique
8.4. La sclรฉrose combinรฉe de la moelle
9. DIAGNOSTIC ETIOLOGIQUE
9.1. Causes extradurales
9.1.1. Les causes tumorales
9.1.2. Les causes infectieuses et parasitaires
9.1.3. La myรฉlopathie cervicarthrosique
9.1.4. La hernie discale
9.1.5. Lโhรฉmatome รฉpidural
9.2. Causes intradurales-extramรฉdullaire
9.3. Causes intramรฉdullaires
9.3.1. Les causes tumorales
9.3.2. Les malformations vasculaires
10. TRAITEMENT
10.1. Buts
10.2. Moyens
10.2.1. Mรฉdicaux
10.2.2. Radiothรฉrapie
10.2.3. Chirurgicaux
10.2.4. Kinรฉsithรฉrapie
10.3. Indications
11. EVOLUTION ET PRONOSTIC
11.1. Evolution
11.2. Pronostic
CONCLUSION