Bien que les métaux liquides se rencontrent dans de nombreux domaines (métallurgie, centrales nucléaires, générateurs magnétohydrodynamiques, géophysique…), l’étude de cet état est pourtant restée longtemps en retard par rapport à celles des gaz et des solides. Cela tient aux difficultés rencontrées pour établir une théorie unifiée de la matière dense désordonnée. Pendant longtemps, le liquide était étudié soit comme un gaz très dense, soit comme un solide cristallin fortement désordonné. Cependant les liquides n’ont ni la structure géométrique rigide simple des solides, ni le désordre presque parfait des gaz. De ce fait, ils ne peuvent pas être traités par les méthodes géométriques de la cristallographie ou par les méthodes purement statistiques utilisées pour les gaz. Les liquides correspondent à un état intermédiaire entre le solide cristallin et le gaz. Il est bien admis que la détermination théorique des propriétés telles que la résistivité électrique et le pouvoir thermoélectrique des métaux liquides peut être obtenue de manière satisfaisante grâce au formalisme de Ziman (1961) pour les corps simples et de Faber-Ziman (1965) pour les alliages. Cependant, cette approche est apparue inapte à décrire l’évolution en température de la résistivité de l’aluminium, du sodium et du plomb. En outre elle s’est révélée insuffisante pour les métaux de transition dont la configuration atomique présente une couche d incomplète. Compte tenu de l’existence des niveaux d pour ces métaux il n’est plus possible d’appliquer le modèle des pseudopotentiels. Une approche équivalente due à Evans et al. (1971) permet d’étendre la méthode de Faber-Ziman aux métaux de transition. La méthode consiste à remplacer le pseudopotentiel dans la formule de la résistivité par l’expression exacte de la matrice t calculée à partir des déphasages et porte le nom de méthode de Ziman étendue. Cette méthode plus générale est applicable à tous les éléments. La méthode de Ziman étendue ne fournit pas systématiquement le résultat expérimental et nécessite des corrections au niveau de la densité d’états pour l’aluminium (Ben Abdellah et al 2005) et pour le plomb (Ben Abdellah et al 2003) alors qu’elle n’a pas été appliquée au sodium à notre connaissance .
Structure électronique des liquides
De nombreuses méthodes ont été développées pour calculer la structure électronique des solides, toutes prenant en compte la périodicité du réseau. Elle permet de réduire la dimension de l’hamiltonien à résoudre numériquement. Parmi les méthodes on peut distinguer entre celles qui utilisent le vrai potentiel de celles qui sont basées sur un pseudopotentiel. Ces résultats initialement appliquées aux solides parfaits ont ensuite été étendues aux systèmes désordonnés. Dans notre étude sur les liquides nous avons porté notre choix sur une méthode de pseudopotentiel.
Equations de transport électronique
Pour étudier les propriétés de transport d’un liquide, on cherche souvent à construire, puis à résoudre une « équation de transport » satisfaite par la fonction de distribution des particules du système. Par exemple, le comportement d’un gaz classique de particules libres est régit par l’équation de Boltzmann. Lorsque les particules forment un « liquide quantique » (par exemple les électrons d’un métal à basse température), l’équation de transport devient délicate à établir, car il faut tenir compte d’une part, des effets quantiques, d’autre part, de l’interaction entre les particules. De nombreux auteurs se sont intéressés au problème de l’équation de transport pour un système quantique. Kohn et Luttinger (1957), puis parallèlement Greenwood (1958) dérivent l’équation de transport à partir de l’équation de mouvement de la matrice densité.
Cas général : formule de Kubo-Greenwood
La formule de Kubo-Greenwood (1957) est une expression exacte de la conductivité d’un système à une température quelconque. La conductivité est obtenue par la théorie de la réponse d’un système à une petite perturbation, en fonction des propriétés de ce système à l’équilibre thermique. Nous donnons ici les principales étapes d’une démonstration assez simple de la formule de Kubo-Greenwood, due à Mott (1967).
La méthode de Mott consiste à calculer la puissance moyenne absorbée par le système lorsqu’il est soumis à un champ électrique sinusoïdal. Le champ électrique est considéré comme une petite perturbation de l’hamiltonien qui provoque des transitions entre les états électroniques. Les probabilités de transition sont calculées au premier ordre de perturbation et l’on en déduit l’énergie gagnée par unité de temps par le système.
Aspects techniques
La plupart de nos calculs sont réalisés avec le code SIESTA (Ordejòn et al 1996), qui n’a jamais été utilisé jusqu’à ce jour dans le calcul de transport électronique. Les concepteurs du code affirment qu’il permet de faire des calculs plus rapides et avec une bonne précision du fait de l’utilisation d’une base d’orbitales atomiques et de boîtes de simulation de quelques dizaines d’atomes. Le code utilise la dynamique moléculaire ce qui permet le calcul de configurations relaxées. Le code SIESTA utilise un pseudo-potentiel pour représenter de façon efficace les interactions électron-ion. Chaque type d’atome a son propre pseudo-potentiel. Ce pseudo potentiel est généré pour reproduire les propriétés de diffusion des ondes électroniques des atomes isolés. Les points importants qui conditionnent la qualité et le coût du calcul sont : la taille de la supercellule, le nombre de points k et la base.
Taille de la super cellule
Un des problèmes qui se posent pour les calculs de structure électronique des systèmes non ordonnés est le choix de la taille de la supercellule. Elle est conditionnée par les moyens informatiques à disposition et le problème physique à traiter. Lorsqu’on traite les calculs avec des potentiels empiriques on n’a pas besoin de restreindre grandement la taille de la cellule. Au contraire, les calculs ab-initio sont beaucoup plus longs à cause de la détermination autocohérente des potentiels. Dans ce cas la taille des super cellules devient très vite limitée (de l’ordre de quelques dizaines d’atomes). En général on s’appuie sur le critère de convergence de l’énergie totale pour déterminer une taille raisonnable de cellule. Comme la rapidité de la convergence dépend de la taille de la supercellule, on a tout intérêt à choisir des cellules réduites à qualité de résultat égal. L’autre aspect, celui de la convergence des résultats vers une limite en fonction de la taille de la cellule est déterminé en considérant la valeur asymptotique pour des cellules de taille croissante.
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Table des matières
Introduction générale
Bilbliographie
I. Cadre théorique
1. Théories du phénomène de transport électronique et aspects
numériques
1.1 Introduction
1.2 Structure électronique des liquides
1.2.1 Métaux liquides et théorie du pseudopotentiel
1.2.2 Théorie électronique quantique
1.3 Equations de transport électronique
1.3.1 Equation de Boltzmann
1.3.2 Temps de relaxation
1.3.3 Théorie de Ziman
1.3.4 Cas général : formule de Kubo-Greenwood
1.3.5 Conductivité généralisée diélectrique
1.4 Méthode numérique
1.4.1 Schéma de principe
1.4.2 Correction des éléments de matrice dipolaire
1.5 Aspects techniques
1.5.1 Taille de la supercellule
1.5.2 Grille de points k et pseudopotentiel
1.5.3 Choix de la base
1.5.4 Précision globale attendue (meilleur compromis)
2. Théorie du pseudopotentiel
2.1 Introduction
2.2 Du potentiel au pseudopotentiel
2.2.1 Pseudopotentiel à norme conservé
a. Condition de la norme conservée
b. Pseudopotentiel à norme conservée dépendant du moment cinétique
c. Correction de cœur non linéaire (NLCC)
d. Séparation de Kleinmann-Bylander
2.2.2 Pseudopotentiel de Vanderbit (Ultrasoft)
3. Théorie de la fonctionnelle de densité et de la dynamique moléculaire
3.1 Problématique
3.2 Théorie de la fonctionnelle de densité
3.2.1 Approximation de la densité locale
3.2.2 Approximation du gradient généralisé
3.3 Résolution des équations de Scrodinger
3.4 Dynamique moléculaire ab initio
3.4.1 Dynamique moléculaire « Ehrenfest »
3.4.2 Dynamique moléculaire « Born-Oppenheimer »
3.4.3 Dynamique moléculaire « Car-Parrinello »
3.4.4 Algorithme de Verlet
II. Application aux métaux liquides
4. Calcul ab initio de la résistivité dc de l’Al, Na et le Pb en phase liquide
4.1 Introduction
4.2 Modèle théorique
4.3 Détails de calcul
4.4 Aluminium solide
4.4.1 Etude de la phase cubique à faces centrées
4.4.2 Cas d’un agrégat (Cluster)
4.5 Etude de l’Al, du Na et du Pb en phase liquide
4.5.1 Densités d’états des trois métaux
4.5.2 Conductivité optique
4.6 Discussion
4.7 Dépendance en température
4.7.1 Conductivité optique
4.7.2 Résistivité électrique
4.8 Conclusion
5. Etude de la résistivité du manganèse en phase liquide par la méthode de Ziman et de Greenwood-Kubo
5.1 Introduction
5.2 Approche Ziman ‘classique’
5.2.1 Considérations générales
5.2.2 Théorie et aspects pratiques de la méthode de Ziman étendue
5.2.3 Application au manganèse
5.4 Approche Ziman ‘auto-cohérente ‘ en phase solide
5.5 Traitement ab initio par le code SIESTA
5.5.1 Approche Greenwood-Kubo
5.5.2 Calcul ab initio
a) Détails techniques
b) Dynamique des atomes
5.5.3 Densité d’états
5.5.4 Conductivité optique
5.6 Discussion
5.7 Conclusion
Conclusion générale
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