ETHIOPATHOGENIE DU SYNDROME BRACHYCEPHALE
Hypoxie chronique
Induit par l’état d’hypoxémie (Figure 9), la moindre délivrance globale de dioxygène aux tissus définie un état d’hypoxie qui entraîne la mise en place de phénomènes d’acidose métabolique et d’anaérobiose. Hb, sO2 Par ailleurs, d’un point de vue physiopathologique, il est classiquement admis que les états d’hypoxie chronique sont à l’origine de répercussions morbides cardiaques, vasculaires, pulmonaires, susceptibles d’atteindre l’état général de l’animal. Certaines données expérimentales et cliniques récentes soulignent la place que peuvent prendre les modifications de sensibilité et/ou d’activité des chémorécepteurs dans la physiopathologie globale des atteintes associées au syndrome brachycéphale [21, 45].
Hypercapnie
L’hypercapnie ou augmentation de la quantité de dioxyde de carbone dans le plasma sanguin résulte d’une diminution de la ventilation pulmonaire. L’obstruction chronique des voies aériennes supérieures des chiens brachycéphales est responsable d’une diminution de cette ventilation et donc d’une hypercapnie chronique. L’hypercapnie pré existante s’avère susceptible d’induire une morbidité reposant sur une acidose respiratoire, une bradypnée, des dysrythmies, une vasoplégie ou encore une acidémie. Cette hypercapnie peut entre autre expliquer l’implication potentielle des chémorécepteurs centraux et périphériques dans la physiopathologie des obstructions des voies aériennes supérieures et leurs conséquences notamment cardiovasculaires [21, 24].
Remaniements musculaires
L’obstruction chronique des voies aériennes supérieures des chiens brachycéphales est responsable d’une augmentation des efforts inspiratoires et d’une hypoxie. Ces phénomènes entraînent des modifications musculaires à tous les étages de l’arbre respiratoire. Les muscles pharyngés peuvent être atteints, mais aussi le diaphragme ou encore le myocarde. Les efforts inspiratoires sont en outre à l’origine d’une fibrose des muscles intercostaux. Ces modifications histologiques gênent le déroulement des cycles respiratoires. Les animaux atteints ont plus de difficultés à compenser leurs malformations primaires respiratoires. Ces lésions musculaires peuvent constituer des facteurs aggravant l’hypoxémie chronique et l’hypoventilation [21, 24].
La sphère cardiovasculaire
Du fait de l’obstruction chronique des voies aériennes supérieures, la pression intra thoracique apparaît diminuée chez les chiens brachycéphales. Ce phénomène, associé à l’augmentation des efforts respiratoires est responsable d’une augmentation de la perméabilité vasculaire pulmonaire, d’une augmentation de la pression hydrostatique vasculaire pulmonaire et d’une stimulation du système nerveux sympathique. Ces différentes anomalies favorisent la formation d’oedème pulmonaire qui, associé à une ventilation pulmonaire insuffisante est responsable d’une diminution de la pression artérielle en oxygène (Figure 10).
L’hypoxie qui en découle entraîne une vasoconstriction pulmonaire plus ou moins localisée. Le sang situé dans les régions pulmonaires pauvrement ventilées s’avère chassé pour maintenir un ratio ventilation/perfusion correct. L’hypertension pulmonaire ainsi induite est responsable à terme d’un remaniement cardiaque à l’origine d’un « coeur pulmonaire » et éventuellement de l’apparition d’arythmies (Figure 11) [6, 11, 24]. c. La sphère digestive Les difficultés respiratoires liées à l’obstruction des voies aériennes supérieures ont également des répercussions au niveau gastro-intestinal.
En effet, celles-ci s’accompagnent souvent de troubles de l’ingestion. Les voies aériennes supérieures sont physiologiquement occluses lors SYNDROME BRACHYCEPHALE Hypoxie chronique Vasoconstriction pulmonaire (réorientation du sang provenant du tronc pulmonaire vers les zones les mieux ventilées) Surcharge en pression sur le coeur droit Augmentation de la pression hydrostatique dans les capillaires pulmonaires Hypertrophie concentrique du coeur droit de la déglutition. Chez les chiens brachycéphales, lorsqu’elles sont rétrécies, la déglutition engendre un problème de ventilation. Ces chiens présentent de ce fait des troubles de la déglutition et de salivation. Ils peuvent présenter des épisodes d’anorexie lors de crises respiratoires aiguës. Une étude rapporte une grande prévalence de signes digestifs lors de syndrome brachycéphale [40].
Ceux-ci constituent des facteurs aggravants et déclenchants de l’insuffisance respiratoire (Figure 12). Ils s’expliquent par la présence de lésions digestives anatomiques telles qu’une sténose du pylore (congénitale ou acquise), une hernie hiatale, un mégaoesophage, et par la présence de lésions fonctionnelles comme une hypomotilité oesophagienne, un syndrome de rétention gastrique ou encore une insuffisance du cardia. Les chiens présentant un syndrome obstructif des voies aériennes supérieures sont donc fréquemment atteints de troubles gastro-intestinaux : ptyalisme, régurgitation, vomissement, reflux gastro-oesophagien, hernie hiatale, hyperplasie de la muqueuse pylorique et sténose pylorique, gastrite folliculaire, duodénite. Ces atteintes digestives peuvent être responsables de l’aggravation des troubles respiratoires par fausse déglutition par exemple [29, 40].
Chez le chien, la thermolyse est essentiellement assurée par la ventilation et le halètement. Ce phénomène se révèle moins efficace chez les races brachycéphales dont les voies aériennes supérieures sont modifiées. Ainsi, tout facteur exogène (effort, température élevée, manipulations du vétérinaire) ou endogène (hyperthermie, infection respiratoire, anxiété, stress) à l’origine d’une polypnée accroît les contraintes sur les voies aériennes et peut donc entraîner une décompensation respiratoire brutale parfois fatale [24]. Ainsi, le syndrome brachycéphale est responsable d’une aggravation des malformations primitives des voies aériennes supérieures, d’un risque accru de développement d’oedème du poumon, de troubles secondaires cardiaques (hypertension pulmonaire, coeur pulmonaire), musculaires (fibrose des muscles respiratoires), et d’anomalies de la sphère gastro-intestinale (ptyalisme, régurgitation, vomissement, reflux gastrooesophagien, hernie hiatale…).
Signes cliniques
Le tableau clinique est dominé par les symptômes respiratoires toujours présents. Le ronflement (qui reste anormal chez un chien brachycéphale) constitue le motif de consultation le plus fréquent. A celui-ci s’ajoutent une intolérance à l’effort, à la chaleur et aux situations stressantes, une hyperthermie, une toux, des raclements de gorge, une ouverture excessive des narines à l’inspiration, une dyspnée inspiratoire ou mixte et des syncopes dans les cas les plus graves, voire des épisodes de cyanose qui peuvent conduire à la mort (Tableau 1). La dyspnée est inspiratoire lors d’obstruction isolée des voies aériennes supérieures, mais devient inspiratoire et expiratoire en cas d’oedème pulmonaire associé.
Dans ce dernier cas, la dyspnée est accompagnée d’une tachypnée [19, 36]. Plusieurs études rapportent une prévalence élevée des symptômes digestifs lors de syndrome brachycéphale [7, 29, 40]. Une série de 27 cas de syndrome brachycéphale rapporte 55,6 % de vomissements et 44,8 % de dysphagies (régurgitations après les repas ou à distance, salivation excessive, déglutitions fréquentes d’origine réflexe). Une relation significative entre la gravité des signes cliniques respiratoires et digestifs est également relevée [7, 40]. Par ailleurs, des vomissements et de la diarrhée accompagnent souvent une fièvre déclenchée par un stress lié aux difficultés respiratoires chroniques ou par une bronchopneumonie non traitée. De plus, les chiens en détresse respiratoire présentent très souvent une aérophagie avec une dilatation stomacale et des flatulences [7].
De manière générale, les chiens atteints de syndrome brachycéphale halètent très souvent (en particulier lors de sténose des narines), sont nerveux, agités et dorment mal (épisodes d’apnée du sommeil). Ils présentent même parfois un retard de développement [7]. Lorsqu’un animal ayant des difficultés respiratoires chroniques est soumis à des facteurs aggravants, une détresse respiratoire aiguë peut se mettre en place. Celle-ci doit alors être traitée en urgence afin d’éviter l’asphyxie et prévenir les complications cardio-pulmonaires.
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Table des matières
INTRODUCTION
PARTIE I : PRESENTATION DU SYNDROME BRACHYCEPHALE
I/ LE CHIEN BRACHYCEPHALE
1. Définition
2. Embryologie
3. Anatomie et morphologie
a. Aspect global
b. Morphologie du crâne
4. Pathogénie
II/ ETHIOPATHOGENIE DU SYNDROME BRACHYCEPHALE
1. Conséquences des malformations primitives
2. Cercle d’auto aggravation
3. Autres anomalies
III/ LE SYNDROME BRACHYCEPHALE
1. Définition
2. Conséquences physiopathologiques de l’obstruction des voies respiratoires supérieures
a. La sphère respiratoire
b. La sphère cardiovasculaire
c. La sphère digestive
d. La sphère métabolique
3. Signes cliniques
4. Diagnostic PARTIE
II : PRINCIPE ET FONCTIONNEMENT DES ENDOSCOPES
PARTIE II : PRINCIPE ET FONCTIONNEMENT DES ENDOSCOPES
I/ HISTORIQUE
II/ PRINCIPE DES ENDOSCOPES FLEXIBLES 1. La fibroscopie 2. La vidéo-endoscopie
III/ MATERIEL D’ENDOSCOPIE
1. L’endoscope
a. Guide lumière
b. Cordon de raccordement
c. Poignée de commande
d. Tube d’insertion
e. Extrémité distale
2. Le générateur de lumière
3. Le système de pompes
4. L’insufflateur
5. Le système vidéo
6. Le dispositif de documentation
7. Le matériel annexe
a. Pinces à biopsies
b. Brosses cytologiques
8. Entretien du matériel
PARTIE III : APPORT DE L’ENDOSCOPIE DANS LE DIAGNOSTIC DU SYNDROME BRACHYCEPHALE
I/ MATERIEL ET METHODES
1. Matériel
a. Animaux étudiés
b. Matériel d’endoscopie
2. Méthode
a. Préparation de l’animal
b. Méthode endoscopique
c. Paramètres évalués
II/ RESULTATS
1. Facteurs épidémiologiques
a. Races étudiées
b. Age et sexe des animaux étudiés
2. Symptomatologie
3. Les affections rencontrées
a. Bilan des affections respiratoires
b. Bilan des affections digestives
c. Bilan général
d. Traitement chirurgical envisagé
III/ DISCUSSION
1. Epidémiologie
a. Races affectées
b. Age et sexe
2. Symptomatologie
3. Tableau lésionnel
a. Bilan des affections respiratoires rencontrées
b. Bilan des affections digestives rencontrées
4. Importance de la détection des anomalies
5. Limites CONCLUSION ANNEXES
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