ÉTAT DES RÉSEAUX DE TÉLÉCOMMUNICATION
Présentation des pistes optiques
Une simple façon de faire consiste à créer une ressource exclusive (i.e. une porteuse optique) entre une paire de noeuds émetteur et récepteur lors de l’établissement d’une connexion : un chemin optique (lightpath). Plus récemment, ce principe a été étendu au concept de piste optique ou light-trail (Gumaste et al., 2004). Une piste optique constitue ainsi un bus optique où les noeuds intermédiaires peuvent obtenir un accès à une porteuse optique donnée, c’est-à-dire que nonobstant un protocole de synchronisation donné, du multiplexage temporel peut être effectué entre divers noeuds sur un chemin optique, d’où un surcroît potentiel d’efficacité. Si l’on appelle collision de longueur d’onde la situation où deux instances d’une même longueur d’onde transitent sur un même lien optique (Cao et al., 2009), alors deux chemins optiques qui ne sont pas disjoints doivent utiliser deux longueurs d’onde différentes pour éviter ces collisions. En revanche, il est possible qu’une piste optique concatène plusieurs connexions sur une même longueur d’onde.
La figure 1.7 illustre cette différence de concept (Fang et Somani, 2004). L’usage exclusif d’un chemin optique pousse à éviter une collision. Par exemple, en (a), le noeud A gère deux chemins optiques rouge et vert pour deux destinataires différents, respectivement B et D. Chacun des deux canaux devra donc utiliser une longueur d’onde différente pour éviter toute collision, notamment avec la connexion entre C et D. Si les transmissions issues des couches supérieures ont un débit inférieur à celui des lasers offerts par A, alors, nous constatons que des ressources sont perdues. Imaginons le cas de figure suivant :
– les lasers ont un débit de 10 Gbit/s, – les connexions véhiculent chacune un signal Ethernet à 1 Gbit/s.
L’usage exclusif d’un chemin optique est remplacé par le concept du bus optique de la figure 1.7, en (b), où une seule longueur d’onde est employée par A et par C pour joindre B et D pour grouper leurs transmissions. Dans ce cas de figure, en effet, les 10 Gbit/s offerts par la couche optique ont été partagés par les trois transmissions Ethernet à 1 Gbit/s. Une trace optique permet une réduction du nombre de longueurs d’onde convoyées dans la fibre optique (Ye, Wosner et Chlamtac, 2006).
Le partage des longueurs d’onde peut se faire par une approche analogue aux réseaux optiques passifs (PON), mais portée à 1500 km avec plusieurs longueurs d’onde, c’est-à-dire par un protocole qui permet à chaque noeud de posséder une tranche de temps exclusive pour transmettre sur une piste optique (Gumaste et al.,2009), ou par le moyen du protocole de contrôle multi point (MPCP). La figure 1.8 illustre ce principe. En (a), le terminal optique d’un PON (OLT) sert de maître pour assigner des tranches de temps à chaque unité de réseau (ONT) de façon à prévenir toute collision dans le sens montant des connexions (upstream), (Gaglianello, 2012). Pareille approche pourrait être implémentée avec les traces optiques (en b) pour peu qu’un noeud soit déclaré (i.e. administrativement), maître d’une trace.
Présentation d’un réseau optique sans filtre
Dans le cas des réseaux optiques sans filtre, ces commutateurs actifs qui permettent le maintien des circuits sont remplacés par des coupleurs de puissance optique passifs. Le signal se propage ainsi à travers le réseau sans la moindre commutation active. Les circuits sont ainsi commutés par la manière même dont les différentes interfaces nodales sont interconnectées. La figure 2.2 présente un réseau optique sans filtre couvrant le même réseau de référence. Notez que les WSS qui étaient présents à Hannover et Dresden sur la figure 2.1 ont été supprimés et remplacés par des interconnexions faites de fibre optique (liens pointillés) reliant les différents ports. Ainsi est faite la commutation passive. L’ensemble des liens entre les noeuds et des interconnexions passives intra nodales permet de constituer un arbre passif, comme illustré en vert. Un réseau optique sans filtre est ultimement produit à partir d’un ensemble d’arbres passifs. Nous en dénombrons trois sur la figure 2.2. Notez que chaque noeud intermédiaire peut aussi accéder passivement à l’arbre qui le traverse. De ce fait, pour permettre l’établissement des canaux entre Bremen et Berlin, on utilisera l’arbre bleu puisque celui-ci, rendu à Hannover possède un schéma d’interconnexion tel que les signaux issus de Bremen sont passivement acheminés en direction de Berlin.
La commutation est ici passive et est totalement indépendante de la longueur d’onde. Quel que soit le canal, celui sera toujours acheminé en fonction des interconnexions nodales jusqu’à la (aux) terminaison(s) de l’arbre. L’objectif du choix des arbres couvrant une topologie donnée dépend du besoin de protéger les noeuds, c’est-à-dire de permettre qu’il existe au moins deux arbres possibles pour relier deux noeuds du réseau. De ce fait, il n’est pas nécessaire qu’un arbre parcoure tous les noeuds de la topologie. Il est important de noter que ces réseaux sont de type diffusif. En effet, en prenant une connexion issue de Hamburg sur l’arbre bleu, nous constatons qu’elle sera reçue à Bremen, mais aussi, par diffusion passive, à Hanover, puis à Berlin, Dresden, Frankfurt et Nürnberg. Ce sont ces caractéristiques précises qui vont déterminer les stratégies de sélection de chemin et de longueur d’onde dont nous faisons l’étude à travers la suite de ce document.
Assignation de longueurs d’onde
En second lieu, un algorithme de recherche taboue effectue l’assignation optimisée des longueurs d’onde à partir de la matrice de trafic et sur la topologie précédemment obtenue. Il s’agit d’un algorithme optimisé statique (cf. chapitre quatre) démarrant d’une connaissance totale des connexions à établir. Ce placement tient compte des connexions à construire simultanément, l’enchaînement séquentiel des connexions sur un réseau opérant est une affaire de plan de contrôle. La figure 2.11 présente sur un réseau allemand à sept noeuds une telle solution (Tremblay, Gagnon et Châtelain, 2006). Cette solution permet la définition de deux arbres passifs en rouge et en pointillé bleu. Les distances physiques entre les noeuds figurent sur les liens. Le résultat de l’assignation des longueurs d’onde est donné par les chiffres dans les boîtes. Il s’agit de la contrepartie sans filtre de la figure 2.1. La demande de trafic est exactement la même entre les deux solutions.
Nous avions vu que les transmissions de Bremen à Berlin occupaient deux longueurs d’onde (numérotées 4 et 5) et étaient commutées à Hannover. Dans le cas de cette solution optique sans filtre, on remarque que Berlin n’est en aval de Bremen que par l’intermédiaire de l’arbre bleu. C’est donc à travers Hamburg que vont transiter ces données. Les longueurs d’onde choisies ici sont les 30 et 31. Nous rappelons que les longueurs d’onde 32 et 33 de Brême destinées à Hamburg se propagent tout de même jusqu’à Berlin, puis Leipzig, Frankfurt, Hannover, avant de revenir une dernière fois à Hamburg. Pour éviter la moindre collision de longueur d’onde entre ces transmissions et celles issues de ces noeuds, prenez note que ces longueurs d’onde ne peuvent être réassignées. Il s’ensuit que dans cet exemple, nous nécessitons 75 longueurs d’onde, contre 17 pour la figure 2.1. Il est important de trouver des mécanismes pour réduire cet usage important, comme nous le verrons dans le reste de cette thèse.
|
Table des matières
INTRODUCTION
CHAPITRE 1 ÉTAT DES RÉSEAUX DE TÉLÉCOMMUNICATION
1.1 Le succès d’Internet
1.2 Le potentiel de la fibre optique
1.3 Développement de solutions flexibles
1.3.1 Réseaux opaques
1.3.2 Réseaux transparents
1.3.3 Définition d’un commutateur sélectif en longueur d’onde
1.3.4 Présentation des pistes optiques
1.4 Plans de contrôle
1.4.1 Les fonctions des plans de contrôle
1.4.2 Grandes familles de protocoles de contrôle
1.4.3 Architectures de plan de contrôle
1.5 Conclusion
CHAPITRE 2 PRÉSENTATION DES RÉSEAUX OPTIQUES SANS FILTRE
2.1 Présentation d’un réseau optique sans filtre
2.1.1 Comparaison avec un réseau photonique actif transparent
2.1.2 Présentation d’un réseau optique sans filtre
2.2 Définition d’un réseau optique sans filtre
2.2.1 Présentation des concepts
2.2.1.1 Réseau de diffusion passive
2.2.1.2 Canal de contrôle, lasers accordables et récepteurs cohérents
2.2.1.3 Connexions en un saut
2.2.2 Technologies habilitantes
2.2.3 Présentation d’une architecture nodale optique sans filtre
2.3 Étapes de conception d’un réseau sans filtre
2.3.1 Routage
2.3.2 Assignation de longueurs d’onde
2.3.3 Présentation des réseaux optiques semi sans filtre
2.3.4 Validation physique
2.4 Problématique associée aux réseaux optiques sans filtre
2.4.1 Notion de canal non filtré
2.4.2 Gestion des collisions de longueur d’onde
2.4.3 Formation de boucles lasers
2.4.4 Insertion d’un nœud dans une topologie existante
2.4.5 Insertion de contenu local
2.4.6 Réutilisation des longueurs d’onde
2.5 Conclusion
CHAPITRE 3 PRÉSENTATION D’UN PLAN DE CONTRÔLE POUR LES RÉSEAUX OPTIQUES SANS FILTRE
3.1 Choix de l’architecture de plan de contrôle
3.1.1 Solution centralisée, solution distribuée
3.1.2 Quantité de données de contrôle à échanger
3.1.3 Routage centralisé, signalisation distribuée et explicite
3.1.4 Solution retenue pour les réseaux optiques sans filtre
3.2 Choix de l’élément de calcul de chemin
3.3 Un modèle de plan de contrôle de type overlay pour les réseaux optiques sans filtre
3.4 Détection des boucles laser
3.4.1 Canal de contrôle régénéré à chaque nœud
3.4.2 Port de sortie déconnecté
3.4.3 Découverte du voisinage interne
3.4.4 Découverte du voisinage et insertion d’un nouveau nœud
3.4.5 Procédé de mise à jour de la topologie
3.5 Routage, assignation de longueur d’onde et gestion des canaux non filtrés
3.5.1 Caractéristiques des réseaux optiques passifs
3.5.2 Règles sur le choix d’un arbre et de la sélection de la longueur d’onde
3.5.2.1 Définition des ports émetteurs en amont et en aval
3.5.2.2 Gestion de la sélection des longueurs d’onde pour éviter les collisions de longueur d’onde
3.5.2.3 Algorithme de détermination des ports émetteurs en amont et en aval
3.5.3 Routage par arbre
3.5.4 Protection
3.5.5 Assignation des longueurs d’onde
3.6 Validation physique
3.6.1 Stratégie du pire en premier
3.6.2 Hypothèses sur une ligne de transmission optique sans filtre
3.6.2.1 Rappel d’une ligne de transmission optique sans filtre
3.6.2.2 Contraintes physiques susceptibles de dégrader le signal
3.6.2.3 Hypothèses du modèle utilisé
3.6.3 Étapes de la validation physique
3.6.3.1 Détermination du taux d’erreur binaire à la réception d’une ligne de transmission optique sans filtre
3.6.3.2 Calibration des puissances de transmission maximales pour demeurer en régime linéaire
3.6.4 Éléments du plan de contrôle et établissement d’une connexion
3.7 Présentation du simulateur de plan de contrôle optique passif
3.7.1 Vue du réseau
3.7.2 Gestion des connexions
3.7.2.1 Établissement des connexions et prise en compte du partage des ports
3.7.2.2 Validation de la couche physique
3.7.2.3 Maintien des connexions préalablement établies pour gestion des collisions
3.7.3 Gestion des trailed light-trees
3.7.4 Processus de capture de trace protocolaire
3.8 Conclusion
CHAPITRE 4 VALIDATION DES CONCEPTS DU CONTRÔLE OPTIQUE SANS FILTRE
4.1 Définition d’une plate-forme optique sans filtre
4.2 Sélection d’une solution optique sans filtre optique
4.2.1 Différence avec les algorithmes RWA statiques
4.2.2 Validation du simulateur de plan de contrôle optique sans filtre
4.2.2.1 Rappel des stratégies du simulateur de plan de contrôle optique sans filtre
4.2.2.2 Gestion des collisions et de l’équilibrage de charge
4.2.3 Définition de la validation
4.2.3.1 Matrices utilisées
4.2.3.2 Définition des critères de performances pour la sélection des meilleures solutions topologiques issues de l’outil de design sans filtre
4.2.3.3 Définition des critères de performances pour les solutions optiques sans filtre
4.3 Résultats
4.3.1 Réseau allemand à sept nœuds
4.3.1.1 Présentation du réseau
4.3.1.2 Réponse à une matrice de trafic
4.3.1.3 Probabilité de blocage
4.3.2 Réseau italien à dix nœuds
4.3.2.1 Présentation du réseau
4.3.2.2 Réponse à une matrice de trafic
4.3.2.3 Probabilité de blocage
4.3.3 Réseau allemand à dix-sept nœuds
4.3.3.1 Réponse à une matrice de trafic
4.3.3.2 Probabilité de blocage
4.3.4 Analyse des résultats
4.3.4.1 Performances de cinquante sept solutions sans filtre pour le réseau allemand à sept nœuds
4.3.4.2 Sélection de la meilleure solution du réseau allemand à sept nœuds
4.3.4.3 Comparaison avec les solutions des travaux précédents
4.3.4.4 Performance de vingt deux solutions sans filtre pour le réseau italien à dix nœuds
4.3.4.5 Cas des réseaux à grand nombre de nœuds
4.3.4.6 Parallèle avec les réseaux optiques semi sans filtre
4.3.5 Généralisation de la méthode à un ensemble de réseaux
CHAPITRE 5 ÉTUDE DES COÛTS ET DE LA CONSOMMATION ÉLECTRIQUE DES RÉSEAUX OPTIQUES SANS FILTRE
5.1 Règles de calcul des différents composants de chaque réseau
5.1.1 Nombre de transpondeurs dans un réseau
5.1.2 Nombre d’amplificateurs optiques dans un réseau
5.1.3 Hypothèses sur la commutation
5.2 Définition des règles de coût
5.3 Détermination du nombre de connexions à partir duquel un réseau sans filtre
possède un coût supérieur à un réseau optique actif
5.4 Coût des composants
5.5 Consommation électrique des composants
5.6 Étude comparative des coûts et consommation électrique des solutions optiques sans filtre et active en fonction des six réseaux de références
5.6.1 Cas du réseau allemand à sept nœuds
5.6.1.1 Rappel des particularités du réseau
5.6.1.2 Coût du réseau allemand à sept nœuds
5.6.1.3 Consommation électrique du réseau allemand à sept nœuds
5.6.2 Cas du réseau italien à dix nœuds
5.6.2.1 Rappel des particularités du réseau
5.6.2.2 Coût du réseau italien à dix nœuds
5.6.2.3 Consommation électrique du réseau italien à dix nœuds
5.6.3 Cas du réseau allemand à dix-sept nœuds
5.6.3.1 Rappel des particularités du réseau
5.6.3.2 Coût du réseau allemand à dix-sept nœuds
5.6.3.3 Consommation électrique du réseau allemand à dix-sept nœuds
5.6.4 Généralisation à un ensemble de réseaux
5.6.5 Consommation électrique de la couche physique et de la couche IP
CONCLUSION
RECOMMANDATIONS
ANNEXE I UNE MESURE DE LA CAPACITÉ MAXIMALE THÉORIQUE D’UN CANAL
ANNEXE II ALGORITHMES DU PLAN DE CONTRÔLE
ANNEXE III VALIDATION DU SIMULATEUR
LISTE DE RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES
Télécharger le rapport complet