Etat dentaire et parodontal des écoliers de Widou au ferlo (Sénégal)

L’Organisation mondiale de la Santé définit la santé bucco-dentaire comme l’absence de douleur buccale ou faciale, de lésions des tissus mous ou durs de la bouche et/ou du massif facial qui limite la capacité de mordre, mâcher sourire et parler d’une personne et donc de son bien-être psychosocial [90]. Ainsi, les affections dentaires et parodontales sont des maladies infectieuses les plus communes causées par l’interaction de bactéries et une réponse inappropriée de l’hôte. Les pathologies bucco-dentaires chez l’enfant revêtent des formes cliniques spécifiques. Soixante à 90% des enfants scolarisés dans le monde ont des caries qui entrainent souvent des douleurs et une sensation de gêne [90]. Plusieurs études, notamment au Sénégal, ont montré des taux de prévalence de la carie dentaire de plus en plus élevées surtout en zone rurale [27, 37, 38]. Les tissus parodontaux du jeune enfant sont différents de ceux de l’adulte de par leurs aspects cliniques et biologiques. Dans le monde, la pathologie parodontale la plus fréquemment rencontrée chez l’enfant est la gingivite [97, 19, 99]. De nombreuses études ont montré sa forte prévalence chez l’enfant et l’adolescent associée à un indice de plaque élevé [10, 27, 59, 99]. En denture temporaire, son évolution vers la parodontite est rare. Mais elle est sévère et très souvent associée à des complications systémiques. La perte prématurée des dents que peuvent entraîner ces affections sans traitement pourrait être à l’origine d’un handicap d’ordre fonctionnel, esthétique et même psychique. Cependant, elles peuvent être prévenues par des mesures préventives simples, car leurs déterminants sont pour la plupart liés aux comportements et au mode de vie [88]. Il apparait alors qu’à l’image de la santé générale, la santé bucco-dentaire est aussi déterminée essentiellement par des attitudes et comportements qui varient et changent en fonction des sociétés et de leur évolution [77]. Dans le Ferlo au Centre Est du Sénégal, localité enclavée où l’accès est difficile, les structures de prise en charge bucco-dentaire sont quasi inexistantes. Cette zone abrite le projet de la Grande Muraille Verte (GMV) lancé en 2005, et elle est essentiellement peuplée de Peulhs. Ces peuples constituent un mélange dont l’origine est tantôt Judaïque, Bohémienne, Hindoue, Roumaine et même Gauloise [71]. Ils cohabitent avec la nature, le bétail les troupeaux etc.., et ont comme principale activité l’élevage nomade [33]. Notre étude a porté sur les enfants en cycle primaire âgés entre 7 et 12 ans en général. Cette tranche d’âge revêt une importance particulière. En plus, ces enfants représentent une population réceptive au message pour l’éducation à l’hygiène bucco-dentaire et peuvent à leur tour transmettre à leur entourage les connaissances acquises sur la santé bucco-dentaire. L’objectif général de la présente étude est d’évaluer l’état dentaire et parodontal des enfants de Widou au Ferlo afin d’amener éventuellement les autorités sanitaires de la région à mener des actions pour la planification et la mise en place d’activités de prévention et de promotion de la santé buccodentaire encore inexistantes dans cette localité. A notre connaissance, peu d’études ont évalué l’état dentaire et parodontal des populations de cette zone encore moins celui des écoliers de Widou.

DONNEES SUR LE FERLO ET L’ORGANE DENTAIRE 

LE FERLO

Le Ferlo est une zone sylvo-pastorale semi-désertique au Nord Est du Sénégal, principalement constituée de savane arbustive et arborée très ouverte et périodiquement soumis à des feux de brousse. Elle est limitée au Sud par les frontières méridionales des départements de Linguère et Ranérou Ferlo, à l’Ouest par les communautés rurales de Sagata-Djolof, Keur Momar Sarr et Mbane, au Nord et à l’Est par le fleuve Sénégal [108].

HISTORIQUE

Etymologiquement, le Ferlo est une région où l’on émigre ; le radical « fer » en Pulaar signifie partir, émigrer. Traditionnellement, le Ferlo, était l’arrièrepays, la « non région », l’« espace sauvage » où les marginaux allaient se cacher de façon permanente ou temporaire, le lieu où certains exclus du pouvoir pouvaient reconstituer leurs forces. Il était le lieu de dissidence et de fuite mais aussi un espace de sécurité et de paix pour les groupes peu intéressés par l’exercice du pouvoir ou gênés par lui.

Dans le Nord du Sénégal colonial, les espaces étatisés étaient situés aux abords des vallées (fleuve Sénégal, lac de Guiers, vallée du Ferlo). Le royaume du Djolof, le royaume du Walo, le royaume du Fouta Toro étaient respectivement au Nord Est, Sud Est et Sud-Ouest, d’arrières pays. Ces derniers ne respectaient pas les critères de civilisation et d’humanité propres aux mythes de ce type de société. Ces arrières pays ont constitué le Ferlo. En s’éloignant ainsi chaque année des vallées pour pénétrer dans le Ferlo, les Peulhs disaient aller vers le « Kooya ». Ils allaient vers la « brousse vierge », donc vers la liberté d’échapper à la contrainte étatique Torodo ou Wolof et la possibilité de vivre leur idéal sans témoin, dans l’abondance et la disponibilité des ressources. Le Kooya n’était donc pas une « région » au sens géographique du terme mais son contraire ; un espace végétal inaccessible et abondant [12].

DONNEES GEOGRAPHIQUES 

Le Ferlo est l’entité éco-géographique la plus vaste du Sénégal. Il couvre une superficie de 57 269 km2 soit 29% du territoire national. L’ensemble de cette zone du Ferlo sableux est caractérisé géologiquement par des sédiments grésoargileux du Continental-Terminal et de l’éocène inférieur. Des sables compacts, en partie kaoliniques accompagnés de gravillons recouvrent une nappe d’eau souterraine fossile. Ces sédiments sont superficiellement couverts de sables éoliens qui ont en général peu d’épaisseur. La plupart des sols sont du groupe des sols sablo-argileux avec un déplacement d’argile plus ou moins prononcé dans le sous-sol. L’hydrographie de la zone ne présente aucune trace d’écoulement organisé. Elle est caractérisée en saison des pluies par la présence d’une multitude de petites mares endoréiques. Ce sont des sites particuliers en ce sens qu’ils sont à la base de la pratique pastorale dans le Ferlo. Le relief se présente sous forme de plateaux bas et monotones et de dépressions à peines esquissées que seuls les sols et la végétation parviennent à diversifier. Ce sont ces dépressions qui s’imbriquent et se relaient pour jouer un rôle dans la vie des hommes.

CLIMAT

La température dépasse parfois les 40 degrés Celsius; la chaleur fait partie des paramètres climatiques les plus importants de la zone. La température moyenne est dans l’ensemble de 28-30°C. Les vents forts sont relativement fréquents, soumettant la zone sylvo-pastorale à l’influence de trois masses d’air :
➤ les alizés maritimes provenant de l’anticyclone des Açores soufflant d’Octobre à Juin et adoucissant le climat grâce à leur fraîcheur sans provoquer de pluies sinon quelques pluies parasites appelées « heug ».
➤ l’harmattan, vent chaud et sec qui souffle la majeure partie de l’année, est plus actif de Janvier à Mai. Il souffle du Nord Est au Sud-Ouest, favorisant les vents de sable et la poussière et provoquant l’érosion éolienne et une forte évaporation.
➤ la mousson : elle souffle de Juillet à Septembre. De direction Sud SudOuest, elle apporte l’humidité et la pluie en refoulant progressivement l’air chaud et sec. Le régime des vents détermine ainsi deux saisons bien tranchées :
➤ une saison sèche de Novembre à Juin.
➤ une saison des pluies courte et instable de Juillet à Octobre.

La pluviométrie annuelle moyenne est comprise entre 300 et 500mm avec un maximum de 30 journées de pluies par an. Son déroulement est irrégulier et il peut se produire de courtes périodes sèches entraînant de fait de fortes variations aussi bien dans l’espace que dans le temps (5).

POPULATION

La densité de population varie entre 10 et 30 habitants/km2 par rapport à l’Ouest du Sénégal où elle varie entre 50 et 400 habitants/km2. Cette zone est faiblement dotée en infrastructures telles que les routes et les industries [5]. Le Ferlo est peuplé majoritairement par des Peulhs (95%), de Wolof, de Maures et de Sérères. Deux grands ensembles migratoires se dégagent : les Peulhs de la vallée du Sénégal ou Waalwaalbe et les Peulhs du Dieri ou Jeerinkoobe. Selon les milieux d’accueil, chaque entité se subdivise. Les Waalwaalbe se fractionnent en Fulbe du Fouta-Tooro et Fulbe du Waalo. Les Jeerinkoobe se fractionnent quant à eux en Peulh du Ferlo ou du Jolof.

Les Peulhs sont traditionnellement un peuple de pasteurs, dont l’origine historique est assez controversée, mais remonterait à l’époque médiévale [108]. Ils seraient venus du Nil et de l’Ethiopie jusqu’en Afrique occidentale, à la recherche de pâturages [12]. Présents dans toute l’Afrique de l’Ouest, les Peulhs sont considérés par les autres ethnies et se définissent eux-mêmes comme des spécialistes de l’élevage, et en particulier de l’élevage bovin [9]. « Nous vivons pour le troupeau, nous vivons par le troupeau » disent-ils eux-mêmes [70]. Ils sont le « peuple du bétail» [29]. Traditionnellement, l’élevage est un mode de vie, il se transmet de père en fils. La connaissance des bovins est très poussée (pathologies, besoins physiologiques, comportements, génétique…). La domestication parfaite des animaux, les mythes liés aux bovins, les critères de description morphologiques très variés des animaux font ainsi partie intégrante de la culture Peulh [12]. La vache occupe donc dans la culture et l’identité Peulh une place absolument centrale. Les politiques d’hydrauliques pastorales menées dans les années 1950 ont encouragé une sédentarisation de la population, qui s’est regroupée autour des points d’eau permanents que constituent les lieux de forage.

CARACTERISTIQUES DE LA POPULATION 

Alphabétisation

Le Ferlo est une zone qui a d’énormes difficultés liées à la faiblesse des infrastructures sociales de base et au faible taux d’alphabétisation. La transhumance comme système de production pastorale est un obstacle à la scolarisation des enfants et à l’alphabétisation des adultes telle qu’actuellement conçue [78]. Les premières écoles ont été ouvertes dans les années 80. La plupart d’entre elles ont connu des périodes de fermeture pendant quelques années du fait des abandons massifs liés à la transhumance, au travail des enfants et aux mariages précoces. Les Peulhs inscrivent moins du tiers de leurs enfants. Les Wolofs et les Maures sont sédentaires et vivent au niveau des centres urbains. Les difficultés identifiées pour une scolarisation maximale des enfants de la zone sont, entre autres :
➤ la réticence des parents pour scolariser leurs enfants ;
➤ le défaut de tuteur pour les enfants venant des hameaux environnants ;
➤ le manque de matériels didactiques ;
➤ les abandons liés à la transhumance, aux mariages précoces, aux conflits entre époux ;
➤ les distances à parcourir entre les hameaux et l’école (entre 03 et 09 km) ;
➤ les perceptions des populations : l’école rend l’enfant mécréant, « un enfant d’éleveur n’aura rien à l’école » [78].

Activités économiques 

L’élevage
Il constitue l’activité dominante des populations. Il reste dans l’ensemble de type extensif et sa productivité est très faible. Son mode de gestion est encore sous l’emprise des pratiques traditionnelles et de la modeste valorisation des produits et sous-produits dérivés. L’élevage fournit 27% des bovins et 33% des petits ruminants du pays.

Agriculture
La culture du mil, du sorgho et l’exploitation des produits de cueillette (gomme arabique, jujubes, paille et bois de feu) sont les autres activités pratiquées dans la zone.

Commerce
Les produits manufacturés sont la plupart du temps apportés par des marchands ambulants, communément appelés « banabana », venant des régions limitrophes. Ils sont troqués contre des produits locaux tels que le mil, le pain de singe et le beurre de lait. Le commerce du bétail contribuerait à la structuration du Ferlo en un système régional cohérant à travers les liens entre ces marchés et les villes et villages qui les abritent, même si le rapport à l’espace est marqué par la fluidité.

FLORE ET FAUNE

La zone est marquée sur le plan physionomique par une végétation de type pseudo-steppe arbustive à Acacia radiana et Balanites aegyptiaca. Suivant les sols et la topographie, des espèces telles que Acacia senegal, Commiphora africana et Combretum glutinosum apparaissent et peuvent même prédominer. Les graminées les plus communes y sont Cencrhus biflorus, Schoenefeldia gracilis et Dactylotenium aegyptium.

Jusque vers la fin des années 50, la zone sylvo-pastorale était encore le domaine des hyènes et des cynhyènes, des ratels, des léopards ou panthères, des chacals et des mangoustes, des rats, de la civette, des iguanes et des serpents. Aujourd’hui, seul le tisserand, la tourterelle, le grand calao et le lièvre y vivent [5].

SITUATION SANITAIRE 

Le Ferlo couvre deux régions celles de Louga et de Saint louis. On y trouve trois chefs- lieux de départements : Linguère Dahra et Ranérou. Chaque département possède un district de santé assurant la couverture médicale de l’espace. Ces districts offrent également des soins bucco-dentaires ; ainsi on trouve un chirurgien-dentiste dans les districts de Linguère et de Ranérou et un technicien supérieur dans le district de Dahra. La faiblesse de la couverture des structures de santé dans le Ferlo rend impossible toute activité de protection sanitaire crédible des populations de cette zone et en particulier des collectivités nomades et semi-nomades. Les maladies qu’on rencontre sont entre autres le paludisme, les maladies de la peau, les insuffisances respiratoires chroniques, la dysenterie, écoulement génital, les affections bucco-dentaires, et l’hypertension artérielle [27].

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Table des matières

INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : DONNEES SUR LE FERLO ET L’ORGANE DENTAIRE
Chapitre 1 : LE FERLO
1.1. HISTORIQUE
1.2. DONNEES GEOGRAPHIQUES
Chapitre 2 : LA GRANDE MURAILLE VERTE
2.1. CONTEXTE
2.2. OBJECTIFS DU PROJET
2.3. EFFETS ET IMPACTS ATTENDUS
Chapitre 3 : GENERALITES SUR L’ORGANE DENTAIRE
3.1. RAPPELS SUR L’EMBRYOLOGIE, L’ANATOMIE, L’HISTOLOGIE ET
LA PHYSIOLOGIE
3.2. LA CARIE DENTAIRE
3.3. LE PARODONTE ET LES MALADIES PARODONTALES
DEUXIEME PARTIE : EVALUATION DE L’ETAT DENTAIRE ET PARODONTAL DES ECOLIERS DE WIDOU AU FERLO (SENEGAL)
I. CONTEXTE ET JUSTIFICATION
II. OBJECTIFS
2.1. Objectif général
2.2. Objectifs spécifiques
III. METHODOLOGIE
3.1. Type d’étude
3.2. Cadre d’étude
3.3. Population d’étude
3.4. Critères de sélection
3.5. Taille de l’échantillon et échantillonnage
3.6. Collecte de données et variables étudiées avec leurs mesures
3.7. Considérations éthiques
3.8. Analyse des données
IV. RESULTATS
4.1. Caractéristiques sociodémographiques
4.2. Habitudes d’hygiène bucco-dentaire
4.3. Données cliniques
V. DISCUSSION
5.1. Limites et considérations méthodologiques
5.2. Profil socio-démographique
5.3. Habitudes d’hygiène
5.4. Etat de santé des dents et du parodonte
CONCLUSION
RECOMMANDATIONS
ANNEXE

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