Sources d’ions
Les sources d’ions pour la propulsion spatiale ont été développées à la base, par l’URSS et les USA, lors de la course spatiale qui a eu lieu pendant la guerre froide. Au cours de cette course, de nouveaux besoins tels que la correction d’orbite d’un satellite ainsi que les contraintes sur la masse du combustible embarquée dans le propulseur ont été mis en évidence. Ces besoins ont motivé les chercheurs de l’URSS [Tve04] et de l’USA [Cur99] à imaginer un nouveau dispositif permettant de fournir une poussée suffisante pour la correction d’orbite en embarquant une faible quantité de combustible. Une vieille idée a alors refait surface, la propulsion électrique introduite par Konstantin Eduardovich Tsiolkovsky (1857- 1935) en 1903 dans « Investigation of Universal Space by Means of Reactive Devices ». Les premières sources, fonctionnant par le principe introduit par Tsiolkovsky, étaient développées aux alentours des années 1960. Vers le début des années 1970, une version commerciale d’une source à grille de type Kaufman a été commercialisée en France et aux Etats-Unis [Cum89]. Durant cette décennie, l’industrie des couches minces et du traitement de surface ont montré un fort intérêt pour ces sources du fait des nombreux avantages qu’offrent l’utilisation du faisceau ionique engendré (relativement aux procédés chimique et autres procédés plasma).
L’évolution des sources d’ions utilisées dans différentes applications industrielles a été fulgurante. En effet, depuis le début des années 1980 plusieurs types de sources d’ions sont disponibles pour diverses applications industrielles [Kau82]. Les sources les plus connues sont, sans doute, les sources à grilles, leur fonctionnement consiste à créer un plasma dans un premier temps ; puis à extraire un faisceau ionique à partir de ce plasma en utilisant des grilles dites « grilles d’extraction » polarisées négativement par rapport à ce dernier. Cette catégorie de sources est communément appelée « sources à grilles » (gridded ion source). Une autre catégorie des sources d’ions se distingue par l’absence de grilles d’extraction « sources d’ions sans grille » (gridless ion source). Cette catégorie regroupe plusieurs types de sources comme les sources à effet Hall par exemple. Les sources à effet Hall sont caractérisées par la présence du courant de Hall dans le plasma généré. Le fonctionnement de ces sources est basé sur la création d’un plasma dans un premier temps puis l’extraction d’un faisceau ionique à partir de ce plasma par le biais du champ électrique dû au gradient de potentiel plasma. On présentera dans ce chapitre, brièvement, le principe de fonctionnement des sources à grilles, discuterons leurs limites, ainsi que l’avantage des sources à effet Hall. Nous verrons deux types de sources à effet Hall, les sources de type « closed–drift ion source » utilisées dans le cadre de la propulsion spatiale ainsi que les sources de type « End-Hall Ion Source » (EHIS) utilisées dans les applications de traitement de surface. Cette dernière source représente le centre d’intérêt de cette thèse.
Sources à effet Hall
Les sources à effet Hall ont été développées, essentiellement, par les chercheurs de l’URSS pour satisfaire les besoins de la propulsion électrique. Ces sources permettent de dépasser la limitation du courant du faisceau ionique généré par les sources à grilles due à la charge d’espace qui limite le flux d’ion extrait du plasma. Dans les sources à effet Hall, la différence de potentiel électrique dans le plasma, nécessaire à l’accélération des électrons, à la création et au maintien du plasma, est maintenue à travers l’espace inter électrode par l’application d’un champ magnétique. Dans les plasmas magnétisés, les lignes équipotentielles se confondent quasiment avec les lignes du champ magnétique. La chute de conductivité électronique perpendiculaire au champ magnétique génère un champ électrique dans cette direction, cette composante du champ électrique assure l’extraction du faisceau ionique du plasma.
La présence simultanée de champ électrique et magnétique dans le plasma donne naissance à un courant électronique circulaire « le courant de Hall » dans la direction ExB, d’où l’appellation de ces sources « sources à effet Hall ». La géométrie à symétrie cylindrique des sources à effet Hall fut choisie pour permettre à ce courant (courant de Hall) de circuler librement dans la direction azimutale. La densité de courant du faisceau ionique généré par ces sources est nettement supérieure à celle obtenue par des sources à grilles. Cette capacité des sources à effet Hall à générer un faisceau ionique de haut courant et de faible énergie ionique répond aux besoins des applications de traitement de surface. Les géométries des sources à effet Hall peuvent être classées dans deux catégories. Dans un cas, le canal d’accélération forme une couronne autour de l’axe de symétrie (cas des propulseurs (closed-drift source)). Dans l’autre cas, le canal d’accélération a une forme conique (cas des End-Hall Ion Source « EHIS »).
État de l’art sur les sources EHIS
Depuis l’introduction des sources EHIS dans la littérature par H. R. Kaufman et coauteurs en 1987 [Kau87], [Kau89] très peu d’articles scientifiques ont été dédiés à l’étude de ce type de source. Par conséquent plusieurs questions concernant le mécanisme de fonctionnement de ce type de sources restent sans réponse. Notamment, des questions sur le flux de neutres rapides engendré par cette source, le courant de neutralisation, la cartographie des paramètres plasma, les trajectoires ioniques etc. Néanmoins, plusieurs questions ont été abordées et quelques réponses ont été apportées essentiellement par H. R. Kaufman et al [Kau87], L. Mahoney et al [Mah06], D. Gardner et al [Gar05] et V. V. Zhurin et al [Zhu07]. Le travail effectué depuis l’introduction de ce type de source a permis de répondre à bon nombre de questions qui concernent ce type de sources ainsi que leur fonctionnement. Le travail effectué jusque là se base plus sur la caractérisation de ces sources plutôt que sur la compréhension de leur mécanisme de fonctionnement. En effet, afin de faciliter et de vulgariser l’utilisation de ce type de sources comme outils dans un large éventail de procédés, notamment le traitement de surface et le dépôt de couches minces assisté par un faisceau ionique (IAD), plusieurs industriels comme Veeco Instruments (Colorado, USA) et Saintech Ion Beam Systems (Sydney, Australie) ont concentré leurs travaux sur la caractérisation du faisceau ionique généré par une source EHIS ainsi que les avantages qu’offre l’utilisation de ce faisceau dans divers procédés. Cependant, très peu d’articles (voir H. R. Kaufman et al & V. V. Zhurin et al) abordent des questions concernant le mécanisme de fonctionnement de ce type de sources. Le tableau ci dessous rend compte des contributions scientifiques que nous avons jugées pertinentes, dans l’état de l’art sur les sources EHIS. Ces travaux expérimentaux nous serviront pour des comparaisons « qualitatives » et peux nous donner une idée sur le fonctionnement de ce type de sources.
L’application IAD (Ion Assisted Deposition)
Une représentation schématique du dispositif expérimental permettant le dépôt de couches minces par assistance de faisceau ionique « IAD » est représentée dans la figure I. 10. L’application IAD a lieu dans une chambre à vide où la pression est de l’ordre de 10mPa. Cette application fait intervenir deux faisceaux lors du dépôt de couches minces. Un premier faisceau issu d’un évaporateur, les particules constituant ce faisceau seront déposées sur le substrat et formeront la couche mince. Un second faisceau constitué d’ions a pour rôle d’améliorer la qualité du dépôt en jouant sur la microstructure du film déposé. Cette technique rentre dans l’industrie du verre ophtalmologique et permet d’améliorer les propriétés optiques du verre traité par IAD.
Plusieurs études ont mené au fait que la qualité optique du verre, comme l’antiréflexion, qui fait l’objet de notre collaboration, dépendent essentiellement de la qualité du dépôt de la couche mince [Mar83], ceci est lié à la microstructure du film déposé. En effet, les films obtenus par simple évaporation, sans l’assistance d’un faisceau ionique, sont caractérisés par une microstructure désordonnée. Ce désordre se manifeste par une inhomogénéité dans la distribution de la densité du film et par des régions de lacunes. Ceci joue négativement sur les propriétés optiques du verre traité. L’IAD peut réduire le désordre de la microstructure du film par des effets mécaniques [Mül87]. En effet, l’apport d’énergie déposé par les ions sur le film permet de réduire les lacunes et d’homogénéiser la densité de ce film . Elle permet aussi d’obtenir un film dense et caractérisé par une surface lisse. Ceci améliore les qualités optiques du verre traité.
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Table des matières
Introduction générale
Chapitre I : Introduction
I. 1. Sources d’ions
I. 1. 1. Sources à grilles
I. 1. 2. Sources à effet Hall
I. 1. 2. A Propulseur à effet Hall (Closed-Drift ion source)
I. 1. 2. B End-Hall Ion Source “EHIS”
I. 2. État de l’art sur les sources EHIS
I. 3.L’application IAD (Ion Assited Deposition)
I. 4. Contexte & collaboration LAPLACE-Essilor
I. 5. Travail effectué lors de cette thèse
I. 6. Résumé du chapitre
Références du chapitre
Chapitre II : Description du modèle numérique
II.1. Introduction au modèle hybride 2D
II.2. Discrétisation spatiale (géométrie et grilles de calcul)
II. 3. Champ magnétique
II. 3. a. Calcul du champ magnétique
II. 3. b. Fonction λ (Fonction de flux du champ magnétique)
II. 4. Atomes
II. 4. a. Injection de neutres et pression résiduelle
II. 4. b. Réflexions des atomes par les parois
II. 5. Ions
II. 5. a. Transport ionique
II. 5. b. Interpolation du potentiel électrique et du champ magnétique
II. 5. c. Collisions
II. 5. c. 1 Collisions isotropes
II. 5. c. 2. Échange de charge (rétrodiffusion)
II. 6. Électron et champ électrique
II. 6. a. Description fluide
II. 6. b. Transport électronique le long des lignes de champs magnétiques
II. 6. c. Conservation du courant
II. 6. d. Équation d’énergie
II. 7. Modèle de gaine analytique
II. 8. Différents courants dans la source EHIS
II. 9. Résumé du chapitre
Références du chapitre
Chapitre III : Fonctionnement d’une source EHIS
III. 1. Conditions de simulation et conditions aux limites
III. 1. a. Domaine de calcul et conditions aux limites
III. 1. b. Distribution du champ magnétique
III. 2. Étude des principaux paramètres plasmas
III. 2. a. Distribution spatiale de la densité atomique
III. 2. b. Distribution spatiale du potentiel plasma
III. 2. c. Distribution spatiale de l’énergie électronique
III. 2. d. Distribution spatiale du terme source d’ionisation
III. 2. e. Trajectoires ioniques et distribution spatiale de la densité plasma
III. 3. Transport électronique dans les sources EHIS
III. 4. Caractéristiques du faisceau ionique et du flux de neutres non- thermiques
III. 5. Conclusion
Références du chapitre
Chapitre IV : Conservation du courant et influence sur la distribution du potentiel plasma
IV. A. Configuration du filament et énergie des électrons issus de la cathode
IV. A. 1. Étude de l’influence de la configuration cathodique
IV. A. 1. a. Effets sur la distribution du potentiel plasma
IV. A. 1. b. Effets sur a distribution de la densité du plasma
IV. A. 1. c. Effet sur les caractéristiques du faisceau ionique
IV. A. 1. d. Effets sur les caractéristiques du flux d’atomes non-thermiques
IV. A. 2. Influence de l’énergie des électrons émis par le filament sur le faisceau ionique
IV. A. 2. a. Influence sur le l’énergie cinétique électronique
IV. A. 2. b. Influence sur la distribution de potentiel plasma
IV. A. 2. c. Influence sur les caractéristiques du faisceau ionique
IV. B. Natures des parois en contact avec le plasma
IV. B. 1. Influence sur le courant de décharge
IV. B. 2. Influence sur la distribution du potentiel plasma
IV. B. 3. Influence sur les trajectoires ioniques
IV. B. 4. Influence du courant collecté par les parois externes sur le comportement de la source pour un courant d’anode constant
IV. B. 4. a. Courants collectés par les parois du caisson à vide
IV. B. 4. b. Caractéristiques du faisceau ionique
IV. C. Conclusion
Références du chapitre
Conclusion générale