Le développement technologique des techniques d’acquisition des images a été l’un des principaux facteurs de la motivation vers la recherche de méthodes permettant une meilleure exploitation de ces images. L’apparition de l’axe de recherche de la détection de changements a permis de tirer profit des images prises à différentes dates pour repérer des modifications et des altérations qui ont pu être apparues entre différentes périodes. Ces changements sont par la suite utilisés à des finalités qui varient d’un domaine d’application à un autre [Radke et al., 2005]. En conséquence, un ensemble de méthodes dédiées à cette thématique de recherches a été proposé et qui ne cesse d’augmenter. La détection du changement est un processus complexe qui nécessite une maitrise de certaines notions et spécificités des images. Ainsi, dans ce chapitre nous introduisons la détection de changements tout en dressant un état de l’art des différentes terminologies, notions, méthodes et l’ensemble de chaînes de traitement qu’y sont relatifs. Une discussion des différentes taxonomies des méthodes existantes a été établie suivie par quelques applications de la détection de changements.
Détection de changements
Mise en contexte et définitions
La détection de changements est un axe de recherche permettant d’exploiter un ensemble d’images et d’informations multi-temporelles. Elle est appliquée dans une multitude de domaines pour apprécier et quantifier les changements progressifs, de faible amplitude, et/ou touchant des superficies relativement petites [Rogan et al., 2002, Serra et al., 2003]. Elle permet d’acquérir des informations intéressantes sur l’évolution de l’état du sujet d’étude. Ces informations sont, par la suite, exploitées pour développer des solutions et prendre des décisions opérationnelles par exemple la surveillance de l’écosystème ou de l’environnement [Baker et al., 2007]. Par ailleurs, elle représente un outil intéressant permettant l’analyse quantitative de la distribution spatiale des objets du sujet d’étude. L’intérêt accordé à la détection de changements croit en parallèle avec l’évolution des technologies et des capteurs et aux besoins des méthodes permettant l’analyse des données complexes et même hétérogènes. La détection de changements a attiré l’attention des chercheurs dans une variété de domaines. Parmi les domaines d’application, nous citons principalement l’aide au diagnostique médical [Boisgontier, 2010], la vidéo surveillance [Miller et al., 2005], la détection sous-marine et la télédétection avec ses diverses applications telles que le contrôle environnemental, l’utilisation et l’occupation du sol et la gestion du risque [Lu et al., 2005, Hoang, 2007, Hu et Ban, 2008, Zhou et al., 2008]. La problématique de la détection de changements est définie dans un cadre assez général comme étant : “La détection de régions changées dans plusieurs images de la même scène prise à des instants différents”[Radke et al., 2005]. “La détection de changements consiste à identifier des différences dans l’état d’un objet ou un phénomène en l’observant à différents instants. Elle implique la capacité de quantifier ces effets temporels”[Singh, 1989]. Dans un cadre particulier, [Milne, 1988], défini le changement de la couverture forestière comme étant “ Une altération des composantes de surface de la couverture végétale”. Alors que [Lund, 1983] l’a définie “ Un mouvement spectral et spatial d’une entité végétale au cours du temps”. La détection du changement peut être vue comme l’identification et l’étude des changements et des modifications structurelles significatives à partir des prises de différentes dates d’un objet ou d’un sujet d’intérêt.
Dans le cas d’étude de la télédétection et le suivi de l’évolution de l’occupation du sol, la détection de changements implique l’identification des altérations et de leurs natures, la mesure des surfaces qu’ils affectent et la caractérisation de leurs organisations spatiales [Macleod et Congalton, 1998]. La détection du changement est un processus complexe qui implique une suite d’étapes et qui nécessite la prise en considération de certains critères et facteurs. Parmi eux, nous citons la nature du changement, les données considérées, les caractéristiques robustes de ces données, les méthodes de détection et d’analyse de changements et notamment l’évaluation afin d’obtenir une carte binaire de changements [Singh, 1989, Jianya Gong Qiming, 2008].
Définition 1.1 Une carte binaire de changements est une image ayant les mêmes dimensions que celles impliquées dans le processus de détection de changements et qui est formée par deux classes qui représentent le changement (désigné par le blanc) et le non-changement (désigné par le noir).
Ainsi, la précision de la carte de changements obtenue est guidée par : le choix des données selon l’application (y compris les caractéristiques spatiales et temporelles), la précision des corrections des effets radiométriques et atmosphériques et la capacité de la méthode choisie pour discriminer les changements qu’on vise à identifier (changements spectrale, transitions entre les classes, suivi du changement ou l’évolution d’un objet d’intérêt, changements dans une longue série temporelle…).
Facteurs de changements en télédétection
Nous introduisons cette section par une définition brève de la télédétection et ses intérêts globaux avant d’entamer les facteurs de changements. En effet, la télédétection est l’ensemble des techniques et instruments permettant d’obtenir des images d’une zone d’intérêt sans aucun contact direct avec la surface terrestre. Le radar, le Lidar, les capteurs aériens, les séismogrammes et les satellites sont parmi les instruments utilisés pour acquérir des images et des informations. L’objectif principal de la télédétection est cognitif. En effet, elle permet d’acquérir des connaissances géographiques, climatologiques, océaniques et même stratégiques et militaires [Wang et Atkinson, 2018, Vittorio et Georgakakos, 2018]. Par ailleurs, pour une détection fiable et précise des changements affectant une zone considérée, il est judicieux d’étudier et déterminer les facteurs et les causes des altérations. Ces derniers diffère d’une discipline à une autre en fonction des types des images. Dans cette section nous focalisons notre intérêt sur les natures des modifications et leurs causes en télédétection et qui ont été, à leur tour, l’objet de plusieurs publications [Zak et al., 2008, Jianya Gong Qiming, 2008].
Caractéristiques et natures de changements
Le mot changement reste une description générale des modifications qui se sont produites entre au moins deux instants. Cependant, la qualité du résultat dépend de l’objectif qui est intimement lié à la nature de changements. Les changements de la couverture terrestre peuvent être éphémères, inter-annuels ou semi-permanents/ permanents [Strahler et al., 2006].
• Changements éphémères : Ce sont les changements à court terme qui touchent la couverture terrestre, tels que les inondations, qui ne modifient pas de façon permanente la distribution dominante de l’occupation du sol ;
• Changements interannuels : Ce sont des variations de la couverture terrestre en grande partie dues à la variabilité climatique à long terme, telle que la réduction de la couverture forestière pour une région touchée par la sécheresse à long terme ;
• Changements semi-permanents/permanents : Ce sont des conversions de la couverture terrestre et comprennent de nouvelles constructions de surface telles que les événements de la déforestation, l’urbanisation ou l’expansion des terres agricoles.
D’un autre angle de vue, les changements peuvent avoir plusieurs types : rapide à court terme (inondation, incendie. . . ) et cyclique (cultures de blés, d’orges. . . ). D’un point de vue spatial, les changements peuvent être directionnels (étalement urbain) ou multi-directionnels (déforestation).
Facteurs de changements
Les changements affectant la surface terrestre peuvent être aussi classés en trois catégories selon leurs causes. En effet, les principaux facteurs agissant sur la couverture terrestre reviennent aux influences de l’homme, les faunes et les flores et les forces naturelles.
Activités et pression anthropiques L’activité humaine apparait comme l’un des facteurs principaux de la modification de la surface terrestre. L’homme agit de deux façons directe et indirecte sur la couverture et l’occupation du sol. L’étalement urbain est l’un des exemples les plus connus en tant que conséquence directe de l’influence de l’homme.
La participation de l’homme dans les transformations au cours du temps est décrite par indirecte si les changements survenus sont les conséquences des ses décisions et ses actions (désertification, réchauffement de la planète). En effet, l’évolution de la démographie et de la population et sa distribution spatiale est notamment l’un des facteurs les plus importants qui jouent un rôle important sur l’urbanisation et l’alternance de la couverture végétale (déforestation). Par ailleurs, l’évolution technologique et économique contribue fortement aux changements de l’occupation du sol. Ceci peut être déduit en suivant, à titre d’exemple, la gestion des ressources naturelles ou bien le développement des usines, des réseaux de transport, la demande de la matière première et organique et les guerres. La fabrication de certains produits de consommation qui utilisent des éléments végétaux (exemple : tomate, boit. . . ) contribue à la spécialisation des zones agricoles. D’autre coté, les usines versent généralement des déchets toxiques qui ont un mauvais impacte sur l’environnement. Les facteurs anthropiques sous-jacents participant à l’évolution de l’occupation du sol sont en réalité multiples et ont été détaillés dans [Lecerf, 2008].
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Table des matières
Introduction générale
1 État de l’art sur la détection de changements
1.1 Introduction
1.2 Détection de changements
1.2.1 Mise en contexte et définitions
1.2.2 Facteurs de changements en télédétection
1.2.2.1 Caractéristiques et natures de changements
1.2.2.2 Facteurs de changements
1.2.3 Considérations temporelles et spatiales des données
1.3 Pré-traitements
1.4 Techniques et méthodes de détection de changements
1.4.1 Méthodes basées sur les pixels
1.4.1.1 Différences des images
1.4.1.2 Ratio d’images
1.4.1.3 Régression d’images
1.4.1.4 Indice de végétation
1.4.1.5 Analyse par vecteur de changements
1.4.1.6 Analyses par composantes principales
1.4.1.7 Post-classification
1.4.2 Méthodes basées sur les objets
1.4.2.1 Comparaison des objets
1.4.2.2 Classification contextuelle
1.4.3 Méthodes avancées
1.4.3.1 Réseaux de neurones
1.4.3.2 Champs de Markov
1.4.3.3 Fusion des informations multi-sources
1.4.4 Méthodes hybrides
1.5 Choix d’une méthode de détection de changements
1.6 Validation, interprétation et évaluation
1.6.1 Matrice binaire de changements
1.6.2 Matrice de changements
1.6.3 Matrice de confusion
1.6.4 Matrice de transitions
1.6.5 Autres méthodes
1.6.6 Rappel-Précision
1.6.7 Calcul de la précision
1.7 Applications
1.7.1 Détection de changements dans la télédétection
1.7.2 Détection de changements dans les vidéos
1.7.3 Détection de changements dans les images médicales
1.8 Conclusion
2 Gestion des imperfections de l’information par les théories de l’incertain
2.1 Introduction
2.2 Qualités et caractéristiques de l’information
2.2.1 Définitions et terminologies liées à l’information
2.2.1.1 Données, information et connaissances
2.2.1.2 Sources d’information
2.2.1.3 Représentations des informations
2.2.2 Qualité de l’information
2.2.3 Imperfections de l’information
2.2.3.1 Incertitude
2.2.3.2 Imprécision
2.2.3.3 Ambiguïté
2.2.3.4 Incomplétude
2.2.3.5 Conflit
2.2.3.6 Autres terminologies des imperfections
2.2.3.7 Relations entre les imperfections
2.2.4 Causes des imperfections de l’information
2.3 Théories de l’incertain
2.3.1 Théorie des probabilités
2.3.2 Théorie des possibilités
2.3.2.1 Fondement de la théorie des ensembles flous
2.3.2.2 Fondement de la théorie des possibilités
2.3.3 Théorie de Dempster-Shafer
2.3.3.1 Modélisation et fonction de masse
2.3.3.2 Fonctions déduites de la fonction de masse
2.3.3.3 Critères de décision
2.3.4 Extensions de la théorie de Dempster-Shafer
2.3.4.1 Description brève du Modèle de Croyance Transferable
2.3.4.2 Description brève de la Théorie de Dezert et Smarandache
2.4 Fusion d’informations par la DST
2.4.1 Combinaison des sources fiables
2.4.2 Combinaison des sources non fiables
2.5 Théorie de Dempster-Shafer en détection de changements
2.6 Justification du choix de la théorie de Dempster-Shafer pour la détection de changements
2.7 Conclusion
3 Modélisation du problème de détection de changements par la DST
3.1 Introduction
3.2 Choix de l’algorithme de clustering Fuzzy C-Means
3.2.1 Aperçu général des algorithmes de clustering
3.2.1.1 Clustering hiérarchique
3.2.1.2 Clustering par regroupement (partitionnement)
3.2.2 Algorithme C-Moyennes-Floues (FCM)
3.3 État de l’art des indices de validité de clustering
3.3.1 Indices flous
3.3.1.1 Indice de Fukuyama-Sugeno (FS)
3.3.1.2 Indice de Xie-Beni (XB)
3.3.1.3 Coefficients de partition et d’entropie (PC et PE)
3.3.1.4 Indice de Kwon (Ko)
3.3.1.5 Indice de Tang (T)
3.3.1.6 Indice de Wu-Li (WL)
3.3.2 Indices durs (non flous)
3.3.2.1 Indice de Davis et Bouldin (DB)
3.3.2.2 Coefficient de silhouette (CS)
3.3.2.3 Indice de Dunn (DU)
3.3.2.4 Indice de Wemmert et Gançarski (WG)
3.3.3 Discussion des indices de validité de clustering internes
3.4 Approche proposée pour l’extraction du cadre de discernement
3.4.1 Détermination du nombre de classes
3.4.1.1 Indice proposé H
3.4.1.2 L’algorithme d’évaluation bi-indices
3.4.2 Algorithme de clustering multi-centroïdes basé sur le FCM
3.4.2.1 Détermination du nombre de classes optimal
3.4.2.2 Clusering des images caractéristiques
3.4.2.3 Sélection des centroïdes
3.4.2.4 Fusion des distributions d’appartenance
3.4.2.5 Avantages de l’algorithme proposé
Conclusion générale
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