« L’histoire enseigne aux hommes la difficulté des grandes tâches et la lenteur des accomplissements, mais elle justifie l’invincible espoir » cette citation de Jean Jaurès, humaniste engagé de la fin du XIXème et du début du XXème siècle, s’applique à la science. L’histoire nous montre en effet, que le cheminement scientifique a toujours été et est encore justifié par l’invincible espoir d’apporter à l’homme de plus en plus de bonheur, de bien-être par son épanouissement psychique et physique et par une aide matérielle. Dans cet esprit, ce cheminement s’est orienté vers la « grande tâche » de protection de sa santé, sous ses diverses formes qui débutent par la prévention qui se prolonge par le diagnostic et finalement par les soins. Dans ce domaine, nous observons là aussi « la lenteur des accomplissements ». L’évolution technologique devance les deux orientations, la santé (la grande tâche) et l’évolution des connaissances biologiques associées .
Le développement des nanotechnologies qui permettent de manipuler la matière avec une résolution nanométrique donc à une échelle adaptée à la biomolécule porte l’espoir de mieux comprendre les mécanismes fondamentaux qui gouvernent les interactions biologiques et donc d’accélérer les accomplissements concernant la prévention, le diagnostic et les soins. L’emploi parallèle des termes « nanobiotechnologies » et « bionanotechnologies » est significatif de ce rapprochement. Le premier traduit le comportement classique où les nanotechnologies tirent l’évolution des connaissances en biologie alors que le second, plus futuriste, montre que la biologie inspire de plus en plus les solutions technologiques. Ainsi cette lenteur des accomplissements se réduit, suscitant un invincible espoir d’améliorer la qualité de vie de l’homme.
La santé de l’homme repose d’abord sur la surveillance biologique continue. Pour cela, le médecin se base sur des analyses, le plus souvent sanguines, cherchant à détecter la présence mais aussi à quantifier des biomolécules spécifiques aux maladies appelées cibles. Ces biomolécules sont souvent soit de l’ADN qui révèle les anomalies génétiques soit des protéines, marqueurs d’une maladie. L’exemple le plus significatif concerne le diagnostic précoce. Plus la biodétection sera sensible, plus on détectera une faible concentration de ces molécules et plus la probabilité de survie du malade sera accrue. Cette détection s’effectue par interaction biologique de la cible recherchée sur un biocapteur comportant des sondes spécifiques.
ETAT DE L’ART SUR LA BIODETECTION
La sonde et ses méthodes de fixation sur un substrat
La détection de molécules cibles, présentes dans une solution, en utilisant le principe de leur immobilisation sur un substrat demande de définir sur ce dernier des sites favorisant leur accueil. Ces sites sont équipés de molécules sondes idéales adaptées aux cibles et retenues parce qu’elles présentent une très forte affinité spécifique avec elles . La nature des molécules sondes est imposée par la cible.
Ces molécules sondes idéales sont parfois, de par leur nature, incompatibles avec le substrat. Pour résoudre ce problème, les auteurs utilisent habituellement une molécule intermédiaire nommée « chimie de surface ». Cette molécule intermédiaire , doit présenter deux interactions fortes : la première avec le substrat et la seconde avec la sonde. Une approche complémentaire consiste à tapisser le substrat d’une chimie de surface incompatible, que l’on qualifiera de passivante, qui interdit toute fixation de la cible sur ce dernier. L’objet de ce paragraphe est d’une part de présenter les quelques choix possibles d’accroche de la cible, puis de détailler les chimies de surface classiques, utilisées pour fixer la sonde sur le substrat , enfin de donner quelques éléments sur la stratégie consistant à utiliser une chimie de surface passivante.
La fixation des sondes sur la chimie de surface
La fixation de la sonde dont la nature est imposée par la cible, sur la chimie de surface exploite selon sa composition chimique ou sa charge une interaction. Ses divers types sont détaillés ci-dessous :
• l’interaction électrostatique. Cette solution est utilisée si la sonde est chargée. Citons comme exemple l’ADN dont l’ossature est composée de groupements phosphates qui ont la particularité d’être chargés négativement . Ainsi, pour accrocher des brins d’ADN sur une lame de verre, les auteurs utilisent l’interaction électrostatique. Celle-ci consiste à silaniser la surface à l’aide d’aminopropyltrimétoxysilane (APTES), silane présentant un groupement amine en terminaison (Y=NH2). NH2 devient NH3+ dans une solution de PH=7. Il s’en suit une attraction électrostatique entre la charge positive de NH3+ et la charge négative des groupements phosphates.
• l’interaction covalente. Les sondes provenant de systèmes biologiques présentent dans leur majorité des groupements amine (exemple : les protéines sont faites d’acides aminés). Pour les fixer on utilise une interaction covalente qui cible ces groupements amine. Pour cela, plusieurs groupes terminaux de la chimie de surface (Y pour les silanes, R pour les thiols) sont utilisés. Citons comme exemple les groupements époxydes ou aldéhydes .
Ces fonctions sont soit initialement greffées directement sur la surface en utilisant des silanes qui portent ces groupements ou fabriquées en modifiant une chimie de surface initiale par un plasma , un faisceau laser ou un rayonnement UV . Citons comme exemple Xue et al., qui accroche des anticorps (la sonde) sur une surface initialement recouverte d’OTS modifiée par un plasma. Ce dernier génère des groupements aldéhydes permettant une interaction covalente avec les anticorps .
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Table des matières
INTRODUCTION GENERALE
CHAPITRE I : ETAT DE L’ART SUR LA BIODETECTION
I. La sonde et ses méthodes de fixation sur un substrat
I.1. Le choix de la sonde
I.1.1. Premier choix
I.1.2. Second choix
I.2. Les chimies de surface adaptées aux substrats d’or et de SiO2/Si
I.2.1. Le substrat : Or
I.2.2. Le substrat SiO2/Si ou SiO2
I.3. La fixation des sondes sur la chimie de surface
I.4. Approche complémentaire par utilisation d’une chimie de surface passivante
II. Etat de l’art sur les méthodes de biodétection de l’accroche sonde-cible
II.1. Les méthodes de détection par marquage
II.1.1. La fluorescence
II.1.2. Les méthodes magnétiques
II.2. Les méthodes de détection sans marquage
II.2.1. Les méthodes mécaniques
II.2.2. Les méthodes électriques
II.2.3. Les méthodes optiques
III. Le multiplexage de la biodétection et de l’adressage : les biopuces
III.1. Les méthodes simples de réalisation des biopuces
III.1.1. Structuration par photolithographie
III.1.2. Structuration par le dépôt de gouttes
III.1.3. Structuration par une microfluidique à jet continu
III.1.4. Structuration par tamponnage moléculaire
III.2. Les méthodes complexes de réalisation de biopuces
III.3. Une solution astucieuse : le codage
IV. Qualité et défauts des techniques de biodétection développées
V. Le potentiel de la détection par diffraction couplé au tamponnage moléculaire
V.1. Des travaux préliminaires sont encourageants
V.2. Aucun modèle de diffraction ne prépare le développement de la biodétection au format biopuce
V.3. Le tamponnage moléculaire est la technique la plus adapté à la réalisation de biopuces diffractantes
CHAPITRE II : ETUDE THEORIQUE DE LA DETECTION SANS MARQUAGE PAR DES BIOPUCES DIFFRACTANTES
I. Rappel sur la diffraction dans le cas d’un réseau en transmission
II. Un modèle analytique simple d’un réseau en réflexion
II.1. Amplitude ) ,( 0 yx Ψ + émise par chaque point du réseau
II.2. Calcul de l’intensité diffractée
III. Simulation de la réponse d’un réseau dans le cadre d’une interaction spécifique idéale
III.1. Etude de l’influence des autres paramètres « maîtrisables » sur la puissance diffractée avant interaction spécifique
III.1.1. Influence de la largeur des lignes et de la période du réseau
III.1.2. Influence de l’épaisseur de la chimie de surface (dendrimères, streptavidine,…)
III.2. Etude du gain du signal lors d’une interaction sonde/cible
IV. Etude d’artefacts : les cas d’intervention d’une interaction non spécifique
IV.1. Les biomolécules cibles se déposent sur les lignes et les creux
IV.2. Les biomolécules cibles se déposent dans les creux
V. Influence de la taille de la molécule sonde par rapport à celle de la molécule cible
VI. Complexification du modèle : l’interaction entraîne une croissance latérale des lignes
VII. Les états « bio-logiques » et physiques de la biopuce diffractante
CHAPITRE III : DEVELOPPEMENT DE TECHNIQUES EXPERIMENTALES GENERIQUES
I. Mise au point du procédé de réalisation de réseaux de molécules (chimiques ou biologiques) par micro contact printing
I.1. Le moule
I.2. Le timbre en PDMS
I.3. L’encrage du timbre
I.4. Le dépôt de biomolécules par micro contact printing classique (µCP)
II. Construction d’un montage de diffraction
II.1. La récupération fibrée des signaux lumineux de référence et de l’ordre 1
II.2. La mesure de la puissance lumineuse collectée par chaque fibre
II.3. Le support du substrat
II.4. Vérification qualitative du fonctionnement du montage
II.5. Les perspectives ouvertes par un tel dispositif expérimental
III. Automatisation de la biodétection par diffraction
III.1. Automatisation générale
III.2. Procédure d’automatisation pour un mode de fonctionnement biocapteur
III.3. Vers une détection en mode biopuce – recherche de la position optimale de chaque réseau
III.3.1. Principe du positionnement du réseau
III.3.2. Centrage d’un réseau
III.3.3. Recherche de la réponse d’une biopuce (plusieurs réseaux)
III.4. Acquisition du signal de diffraction en temps réel (mode multi biocapteurs)
CHAPITRE IV : LA DETECTION BIOLOGIQUE PAR DIFFRACTION
CONCLUSION