Etat de l’art en matière de connaissance du parc tertiaire français

Etat de l’art en matière de connaissance du parc tertiaire français

L’hétérogénéité du parc de bâtiments tertiaires

L’hétérogénéité du secteur tertiaire en général et son parc de bâtiments en particulier résulte de la diversité d’activités économiques que ce secteur englobe. D’où une première question : Comment pouvons-nous définir le secteur tertiaire ? Cette question ramène aux sciences économiques où existent plusieurs visions de la séparation en trois grands secteurs. La définition du secteur tertiaire commence à apparaître dans la littérature lors des travaux d’Allan Ficher [4] et de Colin Clark [5]. Les deux ont constaté un glissement de la population active vers les métiers de services. Ils proposent une division de la structure économique en trois secteurs d’activité : Primaire, Secondaire et Tertiaire. Secteurs primaire et secondaire font seuls l’objet d’une définition positive : au secteur primaire les activités de type agricole, au secondaire l’industrie. Le tertiaire regroupe l’ensemble des autres activités, quel qu’en soit l’objet. Par la suite, les travaux de Jean Fourastié sur la productivité [6] le conduiront à définir le secteur tertiaire comme l’ensemble des activités marquées par un progrès technique faible voire nul. La proposition de Fourastié constitue une première tentative de définition positive du tertiaire, bien fragile cependant.

De nombreux auteurs ont depuis tenté d’établir une définition positive du secteur tertiaire. Mais faute de succès flagrant, l’INSEE continue à définir le secteur tertiaire « par complémentarité avec les activités agricoles et industrielles (secteur primaire et secondaire) »[7]. Il en exclut donc les activités agricoles et industrielles dont la production et la distribution d’eau et d’énergie, la construction. Il y inclut le commerce (de gros et de détail), les services de réparation, l’hébergement, la restauration, les transports et la communication, les activités financières, immobilières, de location, les activités de services aux entreprises, l’administration publique, l’enseignement, la santé et l’action sociale, ainsi que les services collectifs, sociaux et personnels. Assimilé à celui des services, le secteur tertiaire persiste donc à se dérober à une définition générale. On notera d’ailleurs que les nombreux débats agitant la communauté des chercheurs concernant l’articulation entre biens et services invitent à se poser la question de l’universalité et de la pertinence de la tripartition de l’économie.

En absence de solution idéale, nous reprenons la définition du « secteur tertiaire » de l’INSEE qui permet de rester cohérent avec les travaux existants. La définition imprécise du secteur tertiaire introduit des difficultés certaines pour les études énergétiques. La raison principale est liée au fait que la définition « par complémentarité » introduit une grande hétérogénéité des activités économiques. La majorité des activités tertiaires se déroule au sein de bâtiments souvent conçus ou modifiés pour répondre à certains critères esthétiques et fonctionnels utiles à l’activité. Par exemple : les magasins sont souvent très vitrés pour satisfaire la demande de visibilité des clients. En conséquence, l’hétérogénéité des activités économiques du secteur tertiaire implique une grande diversité architecturale du parc, qui se traduit, en termes énergétiques, par différentes caractéristiques et performances thermiques. La description du parc de bâtiments se trouve encore complexifiée par l’existence des bâtiments multifonctionnels (galerie commerciale avec coiffeurs, boulangerie, cinémas, etc.) dans lesquels plusieurs activités cohabitent ; ceci s’étend au mélange tertiaire/résidentiel (cas des professions libérales en particulier). Les particularités liées à l’activité donnent également forme aux profils d’usages énergétiques au sein d’un bâtiment. Concrètement, la consommation de chaque usage dépend de la manière dont les occupants sollicitent le(s) système(s). Par contre, le choix des systèmes n’est pas dépendant que de la nature de l’activité économique, mais aussi d’autres aspects comme les ressources disponibles (techniques et financières), la règlementation ou la pratique locale.

Les répartitions spatiales (mitoyenneté par exemple) et temporelles (constructions simultanées de type ZAC ou dispersées) sont aussi des paramètres importants à prendre en compte dans la description du parc. Car elles ont des impacts non négligeables sur les bâtiments et les systèmes :
• Implantation spatiale :
o Les bâtiments abritant la même activité peuvent être conçus différemment selon le lieu
où ils se trouvent. Un supermarché au centre-ville n’a pas la même architecture qu’un supermarché sur une zone commerciale en périphérie. L’environnement de construction limite aussi certains choix comme les systèmes, par exemple : la connexion aux réseaux de chaleur est souvent inaccessible en dehors du centre-ville.
o Les conditions climatiques locales conditionnent le profil de la demande d’énergie.
• Répartition temporelle :
o Les modes constructifs diffèrent d’une époque à une autre. Ils sont liés non seulement au style d’architecture répandu à chaque époque, mais aussi à la règlementation de la construction. En termes énergétiques, les marques de changement au fil du temps sont directement liées à l’évolution de la règlementation thermique.
o L’évolution technologique introduit progressivement des systèmes de plus en plus efficaces pour un usage donné, et en même temps fait apparaître des nouveaux usages énergétiques. Etant donné que le rythme d’installation et de changement des systèmes dépend de beaucoup de facteurs (panne, dégradation, technologie dépassée, etc.) et parfois de nombreux acteurs, l’état des systèmes existants dans le parc est extrêmement disparate .

Pour résumer, l’hétérogénéité du secteur tertiaire résulte des activités économiques, des caractéristiques des bâtiments et des systèmes. Ces couplages sont complexifiés par la répartition spatiale et temporelle. Dans ce qui suit, nous cherchons dans la littérature quelles sont les méthodes de représentation d’une cible si complexe.

Les différentes méthodes de modélisation d’un parc de bâtiments 

La littérature scientifique abonde d’articles traitant de bâtiments du secteur tertiaire, même si cette quantité est largement inférieure à celle du résidentiel. La plupart cependant traitent de cas particuliers (suivi d’opérations exemplaires, en neuf comme en rénovation, focus sur des usages ou segments de parc particuliers) et rares sont ceux qui abordent le parc de bâtiments lui-même, c’est-à-dire l’ensemble des bâtiments abritant des activités tertiaires à l’échelle d’un pays ou d’une région. De même, les statistiques ou études portant spécifiquement sur les bâtiments du secteur tertiaire sont rares. La maille géographique considérée a une grande importance sur la façon dont est représenté le parc de bâtiments : plus vaste est le territoire couvert, plus grossières sont la description et la représentation du parc et plus l’évaluation de sa consommation d’énergie découle d’approches statistiques. On peut ainsi distinguer 3 modes principaux de représentation du parc tertiaire :
• Une représentation sous la forme de segments réputés homogènes, auxquels sont associés des surfaces. Ces segments sont principalement définis par la nature des activités exercées (activités de bureau, santé, …), et affinés en tenant compte par exemple de l’énergie principale de chauffage. Cette représentation est la plus commune lorsque le territoire couvert est vaste (pays, région, voire département). Les consommations d’énergie sont alors calculées à partir de ratios donnés par unité de surface, déduits de méthodes statistiques. C’est l’approche privilégiée par le CEREN [8] (Centre d’Études et de Recherches Économiques sur l’Énergie).
• Une représentation sous forme d’archétypes de bâtiments. Cette représentation dérive de la précédente, mais ajoute à la prise en compte des types d’activités, certaines caractéristiques physiques du bâtiment. La possibilité d’une représentation explicite de la demande d’énergie est renforcée, au prix cependant d’une multiplication des segments dont la représentativité peut être difficile à établir. C’est l’approche privilégiée par le bureau d’études Energie Demain avec son modèle ENERTER [9].
• Une représentation sous la forme d’une population de bâtiments plus ou moins précisément caractérisés, et dont la consommation d’énergie peut être évaluée sur la base de ratios ou faire l’objet de simulations. Cette représentation est compatible avec l’utilisation de la méthode des archétypes. Cette représentation est la plus courante lorsque l’échelle territoriale est restreinte (du quartier à la commune) .

En France, la source la plus pertinente à l’échelle nationale est le CEREN qui produit régulièrement des statistiques via les enquêtes annuelles . Les modèles énergétiques et prospectifs reposent très souvent sur le découpage du CEREN, sous forme de segments de surface chauffée. Cette méthode de représentation est adoptée par plusieurs organismes, notamment l’ADEME. Cela reflète le fait que le CEREN est considéré comme la référence principale des informations sur le parc tertiaire à l’échelle nationale. La représentation privilégiée par le CEREN permet de donner une vision globale du parc. Une majeure partie des publications sur le parc tertiaire français est basée sur ses statistiques.

Aux États-Unis, la représentation sous forme de segments de surface est aussi utilisée par le modèle NEMS (National Energy Modeling System) développé par le DOE (U.S. Department of Energy) au début des années 90s. NEMS est un modèle économétrique très complet portant sur la production, la demande et le marché énergétique. Il est pionnier dans la modélisation de la demande énergétique du parc de bâtiments et de son évolution prospective. Il couvre un spectre très large avec les modules spécifiques pour chaque sujet traité . Il existe plusieurs articles sur NEMS, sa structure globale est décrite dans [10]. La demande énergétique du parc de bâtiments fait partie de ce modèle et est divisée en deux modules distincts : résidentiel et tertiaire. Les documentations du module tertiaire et des autres modules de NEMS sont publiques et mises à jours régulièrement, elles sont disponibles dans [11] et [12].

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Table des matières

I. Introduction
1. Contexte
2. Objectifs de la thèse
II. Etat de l’art en matière de connaissance du parc tertiaire français
1. L’hétérogénéité du parc de bâtiments tertiaires
2. Les différentes méthodes de modélisation d’un parc de bâtiments
3. Synthèse de l’étude des modèles existants
III. Méthodologie – Reconstitution et enrichissement du parc
1. Etape 1 : Collecte de données
2. Etape 2 : Identification des bâtiments et estimation de surface
2.1. Identification des bâtiments abritant des activités tertiaires avec le SIG
2.2. Méthodes d’estimation des surfaces
2.3. Eléments de validation par sondage in situ
2.4. Traitement des problèmes spécifiques : sièges sociaux, sites multi-bâtiments et absence de données géométriques
3. Etape 3 : Caractérisation thermique de l’enveloppe des bâtiments
3.1. Distribution de la date de construction
3.2. Distribution de la date et la nature des derniers travaux
3.3. Distribution du taux de vitrage
3.4. Calcul de la surface mitoyenne et la surface déperditive
3.5. Estimation de la forme et de la surface de toiture
3.6. Calcul des masques solaires
3.7. Distribution des coefficients de transfert thermique U et du débit d’infiltration
4. Etape 4 : Enrichissement des données des systèmes énergétiques
4.1. Les usages importants à modéliser
4.2. Présence des usages au sein de chaque bâtiment
4.3. Distribution des sources d’énergie
4.4. Caractérisation des systèmes
5. Etape 5 : Caractérisation des profils d’occupation
IV. Résultats, comparaisons et analyse de sensibilité
1. Résultats concernant la description du parc
1.1. Quelques illustrations des résultats : description des surfaces
1.2. Comparaison de notre évaluation des surfaces avec les sources externes
2. Résultats concernant la consommation d’énergie
2.1. Comparaison des résultats de la simulation énergétique avec des sources externes
2.2. Quelques illustrations des résultats : courbes de charge
3. Analyse de sensibilité et discussion des hypothèses
3.1. Analyse de sensibilité des paramètres de la reconstitution du parc
3.2. Analyse des hypothèses de la simulation énergétique
3.3. Discussion des hypothèses
V. Applications de la méthode de reconstitution du parc
1. Evaluation des gisements d’économie d’énergie pour le chauffage en Île-de-France
2. Evaluation du potentiel d’autoconsommation photovoltaïque des bâtiments du secteur tertiaire dans l’Agglomération d’Orléans
VI. Conclusion et Perspectives
VII. Bibliographie
VIII. Annexes 

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