État de l’art de la présence d’orthophonistes en soins palliatifs

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Orthophonie et soins palliatifs : où en sommes-nous ?

État de l’art de la présence d’orthophonistes en soins palliatifs

Afin d’établir un état des lieux des publications présentant l’intervention orthophonique en soins palliatifs, nous avons effectué des recherches sur les bases de données suivantes : PubMed (MEDLINE), Science Direct (Elsevier), Cairn et Google Scholar. Nous avons utilisé le MeSH afin de définir les termes de notre recherche. Conformément à la définition des soins palliatifs de la SFAP, nous avons décidé de ne pas utiliser les termes « end of life » ou « fin de vie ». Les mots-clés suivants donc ont été retenus : « palliative care » et « speech-language pathology » pour les recherches en anglais et « soins palliatifs » et « orthophonie » pour les recherches en français. Ces termes étaient reliés par l’opérateur booléen « ET » et ont été recherchés soit dans le titre, soit dans le sujet, soit dans le résumé de la publication, dès que cela était possible, afin d’obtenir une plus grande précision. Au total, 135 publications ont été trouvées dans les différentes bases de données (Tableau 1). Celles relatives aux soins palliatifs pédiatriques ont été supprimées, car le présent mémoire porte sur les soins palliatifs adultes. Ensuite, les doublons, les thèses et les mémoires ont été également supprimés. Enfin, les publications ne traitant pas directement de la pratique orthophonique n’ont pas été conservées. Finalement, 36 publications ont été conservées (Figure 2).

Formation aux soins palliatifs

La formation initiale en orthophonie s’organise autour de 12 modules dont le module 9 : « Santé publique »7. Ce module comprend l’UE 9.3 « Éthique et déontologie » qui aborde les grands concepts éthiques et déontologiques ainsi que les droits des patients. Les soins palliatifs sont donc abordés dans le cadre de cette UE. Les soins palliatifs et la fin de vie pourront également être abordés au cours de l’UE 8.3 « Communication avec le patient, l’entourage et les autres professionnels » afin de permettre à l’étudiant d’avoir une posture adaptée à l’accompagnement de fin vie. Selon Marcotte, si les enseignements concernant les maladies neuro-dégénératives se sont enrichis, ce n’est pas le cas des enseignements concernant les soins palliatifs. Les étudiants sont formés aux missions de soins, d’accompagnement et d’aide dans le cadre de prises en soin rééducatives et réadaptatives, mais non palliatives. Or, cette réflexion devrait être menée durant les études, afin de susciter le désir de soigner tout au long de la vie. Si cet enseignement semble indispensable, il apparait néanmoins important d’établir des liens avec les autres disciplines et de ne pas l’isoler des autres prises en soins (Marcotte, 2012). Coline Gréhalle nous confiait en effet lors de notre entretien (Annexe 2) que sa formation initiale en orthophonie l’avait préparée aux prises en soins rééducatives, mais qu’elle n’avait pas été préparée aux conditions d’exercice atypiques des soins palliatifs, ni à aborder les grandes questions éthiques et déontologiques qui y sont liées. Cependant, après avoir suivi une formation en ligne, elle envisage de se former à l’exercice orthophonique spécifique en soins palliatifs.
En effet, les orthophonistes, comme tous les professionnels de santé, ont une obligation de formation encadrée par l’Agence Nationale du Développement Professionnel Continu (ANDPC). Le Développement Professionnel Continu a été mis en place par la loi Hôpital, Patients, Santé et Territoires (HPST) en 2009 puis a été révisé par la loi de Modernisation du système de Santé en 2016. Il a pour objectif de permettre aux professionnels d’évaluer et d’améliorer leurs pratiques professionnelles ainsi que la gestion des risques, de maintenir et d’actualiser leurs connaissances et compétences et de prendre en compte les priorités de santé publique (Agence Nationale du Développement Professionnel Continu, 2020). Ainsi, les orthophonistes ont la possibilité de suivre la formation « Prises en charge orthophonique auprès de patients en soins palliatifs et lors de l’accompagnement de fin de vie » dispensée par Didier Lerond via la Fédération Nationale des Orthophonistes (FNO). D’autres formations, telles que les DU ou DIU dont la liste est diffusée sur le site de la SFAP, sont accessibles aux orthophonistes souhaitant se former aux soins palliatifs.

Information des orthophonistes

Le peu d’orthophonistes en soins palliatifs pouvant s’expliquer par un manque d’information des professionnels, nous avons construit un questionnaire afin d’explorer leurs représentations des soins palliatifs. Ce questionnaire rapide était composé de 4 questions permettant d’appréhender le mode d’exercice, les prises en soins majoritaires et enfin les représentations associées aux soins palliatifs (Annexe 3). Ce questionnaire a été soumis aux orthophonistes via Facebook entre le 21/02/2022 et le 15/04/2022. Ce mode de diffusion a entrainé un biais de recrutement. En effet, le titre du questionnaire étant « orthophonie et soins palliatifs » les orthophonistes qui ont répondu étaient plus susceptibles d’être déjà sensibilisés à cette problématique. Cependant, l’analyse des résultats montre que l’échantillon (N = 49) est représentatif de la population générale des orthophonistes de France concernant les modes d’exercice : 81,6 % d’orthophonistes ayant répondu exercent en libéral ou en mixte et 18,4 % en salariat. Les orthophonistes interrogés prenaient en soin tout type de patients, des jeunes enfants aux personnes âgées (Figure 3). Les patients présentant des troubles des apprentissages constituent 18 % de la patientèle des orthophonistes interrogés, de même pour les patients présentant des troubles neurodégénératifs. Les patients présentant des séquelles post-AVC constituent 17 % de leur patientèle ains que les patients présentant des troubles neurodéveloppementaux. Si l’on regroupe les patients présentant des pathologies cancéreuses, ils constituent 8 % de la patientèle des orthophonistes interrogés. Enfin, les autres pathologies prises en soin par les orthophonistes relevaient principalement des troubles alimentaires pédiatriques (Figure 4).

L’intervention orthophonique

Comme nous l’avons décrit précédemment, d’après la littérature, l’intervention orthophonique apparait utile en soins palliatifs adultes. Les principales problématiques relevant de la prise en soin orthophonique sont les troubles de la communication et les troubles de la déglutition. De plus, Rossi-Bouchet en 2022, a mis en valeur l’importance de la prise en charge de la douleur par l’ensemble des acteurs de soins, y compris les orthophonistes (Rossi-Bouchet, 2022).
Si la pratique de l’orthophonie est souvent reconnue dans le champ de la rééducation, il conviendra, en soins palliatifs, de proposer une intervention orthophonique visant au maintien, à l’adaptation et à l’accompagnement. Nous allons donc décrire les différents domaines d’intervention possibles en orthophonie en expliquant leur implication dans la prise en soin palliative.

La communication

« Communication is very important for all patient facing a life-timing illness. When patients facing a life-timing illness are unable to communicate verbally, their right to inclusion in health care decisions and their specific views may be overlooked or misunderstood. » (Pollens, 2020).8
Il nous semble donc important de commencer par la prise en soin des troubles pouvant entraver la communication. En effet, le maintien de la capacité de communication permettra notamment d’orienter les soins en suivant le principe éthique d’autonomie, selon lequel le patient est la personne la plus à même de prendre les décisions qui la concerne (Pollens, 2004).
Selon Cataix-Nègre, la communication est un échange d’informations de nature variée, intentionnel ou non-intentionnel, en utilisant tous les moyens mis à notre disposition. Ainsi, elle regroupe le langage mais également un ensemble de comportements non-verbaux et para-verbaux. Cataix-Nègre souligne également le fait que la communication est bidirectionnelle : elle met en jeu à la fois le versant expressif et le versant réceptif (Cataix-Nègre, 2017). Ainsi, la communication peut être entravée à différents niveaux. Au niveau réceptif, la communication peut être altérée par des dégradations sensorielles (audition, vue) et/ou des troubles neurocognitifs. Au niveau expressif, les troubles neurocognitifs peuvent également entraver la communication, ainsi qu’une atteinte du langage au sens large, de l’articulation et de la parole et/ou de la voix.
La distinction entre ces trois notions est importante puisque leur altération entrainera des troubles différents et donc des prises en soin différentes. Le langage est, d’un point de vue psycholinguistique, « une activité symbolique qui permet de construire un substitut détachable de la réalité : il correspond à une activité symbolique de signification » (Brin-Henry et al., 2021, p.192). D’un point de vue social, le langage est également un moyen d’entrer en communication avec notre entourage. Un trouble du langage acquis conduira en orthophonie à un diagnostic d’aphasie. L’articulation et la parole correspondent à la prosodie ainsi qu’au choix, à l’organisation et à la réalisation des phonèmes dans la chaîne parlée (Brin-Henry et al., 2021). Un trouble d’articulation et de parole d’origine acquise conduira l’orthophoniste à poser un diagnostic de dysarthrie ou d’apraxie de la parole. Enfin, la voix correspond au « souffle sonorisé par le larynx, amplifié et modulé par les cavités de résonance sus-laryngées, ayant toutes les caractéristiques du son : hauteur […], intensité […], timbre […], modulation […], débit » (Brin-Henry et al., 2021, p.396). Un trouble de la voix mènera l’orthophoniste à poser un diagnostic de dysphonie.
L’intervention orthophonique débutera donc par l’évaluation des troubles et des compétences du patient grâce au bilan orthophonique. Au cours du bilan, l’orthophoniste devra, en fonction de l’état du malade, de sa plainte et de la demande de bilan, avoir examiné : la bouche, la langue, les praxies bucco-faciales, les mimiques, la posture, les possibilités sensorielles, la respiration, la voix, la parole et le langage (oral et écrit, en réception et en expression) (Lerond, 2016). L’orthophoniste pourra demander des examens complémentaires, comme un examen ORL ou ophtalmologique pour s’assurer de l’intégrité des capacités sensorielles, ou un bilan neuropsychologique pour explorer le fonctionnement cognitif du patient.
Les troubles entravant la communication sont fréquemment rencontrés dans des pathologies neurologiques et/ou dégénératives telles que la maladie d’Alzheimer, la maladie de Parkinson et la sclérose latérale amyotrophique, des pathologies cardio-neuro-vasculaires ainsi que des cancers ORL, des tumeurs cérébrales et d’autres types d’atteintes tumorales. Ces pathologies sont parmi les plus représentées parmi les patients ayant eu recours aux soins palliatifs hospitaliers en 2013 (Poulalhon et al., 2017). Ainsi la cotation de la prise en soin orthophonique pour ces troubles selon la Nomenclature Générale des Actes Professionnels (NGAP) des orthophonistes correspond aux AMO 15,6 et 15,7 « rééducation et/ou maintien et/ou adaptation des fonctions de communication, du langage, des troubles cognitivo-linguistiques et des fonctions oro-myo-facials chez les patients atteints – de pathologies neuro-dégénératives (15,6) – de pathologies d’origine vasculaire, tumorale ou post-traumatique (15,7) ».
À partir du bilan, et des souhaits du patient, l’orthophoniste pourra définir les objectifs de la prise en soins. Ils viseront :
• Le maintien et l’amélioration des fonctions de communication au niveau de la voix, de la parole et du langage ;
• La sollicitation de la communication verbale, non verbale et paraverbale ;
• L’adaptation de moyens de communication alternative et augmentée ;
• L’information de l’entourage familial et soignant afin de faciliter la communication (Lerond, 2016, p. 183).

La déglutition : alimentation et hydratation

En soins palliatifs, la majorité des patients présente des problématiques d’alimentation et/ou d’hydratation. Ces dysfonctionnements peuvent être en lien avec des pathologies ORL, digestives, neurologiques ou une dégradation de l’état général (Brin-Henry et al., 2012). En effet, la dysphagie est un « trouble acquis de la déglutition, qui a de multiples origines possibles (tumeur, séquelles de chirurgie, accident vasculaire cérébral, compression du tube digestif, atteinte nerveuse…). » (Brin-Henry, 2020, p. 118). Ce trouble peut engendrer des dysfonctionnements sur l’ensemble de l’acheminement du bol alimentaire de la bouche à l’estomac. Ainsi, on distinguera les dysphagies oropharyngées, pour lesquelles l’orthophoniste peut proposer une intervention et les dysphagies œsophagiennes (Thibault & Pitrou, 2018). La déglutition entre en fonction à chaque repas, soit pendant 2 à 3 heures par jour, et est sollicitée tout au long de la journée par la déglutition de la salive. Les plaintes des patients peuvent être multiples, de la douleur lors de la déglutition (odynophagie) aux troubles mécaniques (Thibault & Pitrou, 2018).
Il sera également important d’informer les soignants sur les signaux d’alerte de dysphagie afin qu’ils puissent orienter le patient vers l’orthophoniste pour un bilan. Ainsi, il faudra être vigilant si le patient présente des difficultés à mastiquer, une lenteur, un bavage, des résidus en bouche, un blocage haut (dans la bouche), un blocage bas (pharynx, œsophage), une toux ou un étouffement avant, pendant ou après la déglutition, un reflux nasal, un essoufflement, un larmoiement, des modifications de la voix, etc. (Ilski et al., 2018). L’orthophoniste pourra également les informer par rapport à l’importance des soins de bouche. En effet, la bouche sert à manger et boire, à prendre ses médicaments, à parler (Le Berre, 2020), mais également à respirer pour certains patients. Il est important de conserver une bonne hygiène buccale afin de limiter le risque d’infections pulmonaires par inhalation.
Lors du bilan, l’orthophoniste devra observer 8 points : la mobilité linguale, la clarté de la voix, la tonicité labiale, la fermeture vélopharyngée, l’élévation et la projection laryngée, la capacité d’expulsion (ou toux), le bavage (Ilski et al., 2018). Cela lui permettra de déterminer si le trouble se situe pendant la phase préparatoire du bol alimentaire, pendant la phase de transport oral ou pendant la phase laryngée et ainsi d’adapter la prise en soin (Thibault & Pitrou, 2018).
La prise en soins orthophonique aura pour objectif de maintenir la qualité de vie du patient. Ainsi, elle visera la réduction des risques de dénutrition et d’infections pulmonaires liées aux fausses-routes par l’adaptation des textures grâce à l’IDDSI (Annexe 4), l’apprentissage de stratégies et de manœuvres de déglutition, le renforcement du tonus et du contrôle des muscles nécessaires à la déglutition (Thibault & Pitrou, 2018). L’alimentation assure également une fonction sociale, autour du partage du repas. La dysphagie peut créer une angoisse au moment des prises alimentaires, mais également des prises de médicaments, pour le patient et son entourage. L’orthophoniste veillera donc à informer l’entourage du patient, soignant et familial, sur les conduites à adopter afin de contribuer à l’amélioration du confort et la satisfaction du patient en matière d’alimentation et de promouvoir des interactions positives autour de l’alimentation (Pollens, 2004). Cette prise en soin est cotée AMO 11 « rééducation des dysphagies » à la NGAP des orthophonistes.
Cette prise en soin est pleinement pluridisciplinaire. En effet, il conviendra de veiller à l’équilibre des apports alimentaires en lien avec le diététicien afin d’éviter la dénutrition et la déshydratation. L’ergothérapeute pourra également intervenir afin de proposer des adaptations matérielles au patient et à son entourage comme l’utilisation d’un verre à encoche. Le kinésithérapeute interviendra auprès du patient pour l’installer dans la posture la plus confortable possible garantissant une déglutition en sécurité (Ilski et al., 2018). La coopération de ces différents professionnels, ainsi que des médecins, infirmiers et aides-soignants, permet d’appréhender le patient dans sa globalité. Ainsi, si l’état du patient le nécessite, l’équipe pourra lui proposer une alimentation entérale ou parentérale avec son consentement éclairé. Le rôle de l’orthophoniste relèvera alors du confort, en apportant au patient une « alimentation plaisir » (Brin-Henry et al., 2012).

La respiration et la phonation

Comme évoqué précédemment, la voix est un des éléments qui entrent en jeu dans la communication. Ainsi, les orthophonistes sont amenés à prendre en soin les patients présentant des dysphonies dans le cadre de l’AMO 11,4 « rééducation des troubles de la voix d’origine organique ou fonctionnelle et des dyskinésies laryngées », selon la NGAP en orthophonie. Ils peuvent également apprendre, aux patients ayant subi une laryngectomie, la voix oro-œsophagienne ou la voix trachéo-œsophagienne, actes cotés AMO 11,2 « éducation à l’acquisition et l’utilisation de la voix oro-œsophagienne et/ou trachéo-œsophagienne, avec ou sans prothèse phonatoire » toujours selon la NGAP.
La phonation est également étroitement liée à la fonction de respiration. En effet, la voix est le « souffle sonorisé par le larynx » (Brin-Henry et al., 2021), elle s’appuie donc sur la respiration. Pendant la rééducation des troubles de la phonation, l’orthophoniste sera amené à travailler sur la respiration avec le patient pour lui permettre de prendre conscience des mécanismes respiratoires et de les adapter (Tessier, 2016). Ainsi, les orthophonistes connaissent la physiologie de la respiration et les mécanismes qui y sont associés. Ils peuvent donc utiliser ces connaissances pour accompagner les patients présentant des dyspnées et des symptômes respiratoires en leur proposant des moments de relaxation pour prendre conscience de leur respiration.
La dyspnée et les symptômes respiratoires sont fréquents en situation palliative terminale. La dyspnée, selon l’American Thoracic Society, est « une expérience subjective d’inconfort respiratoire, qui consiste en des sensations quantitativement distinctes et d’intensité variable. L’expérience provient de l’interaction de multiples facteurs physiologiques, sociaux et environnementaux et peut induire des réactions physiologiques et comportementales. » (Le Berre, 2020, p. 461). Si des traitements étiologiques peuvent être proposés, en suivant les grands principes éthiques de non-malfaisance et de bienfaisance, lorsque la cause est connue, des mesures non-pharmacologiques peuvent également être efficaces. Parmi celles-ci, il convient de veiller à installer le patient dans une position confortable, de lui proposer une ambiance apaisante et calme ainsi qu’un environnement aéré, de lui prodiguer des soins de bouche fréquents et de lui proposer l’apprentissage de techniques de respiration ainsi que des approches complémentaires telles que l’hypnose, la relaxation, la méditation pleine conscience… (Perrot, 2021).

La douleur

La douleur est redéfinie par l’Association internationale pour l’étude de la douleur (IASP) en 2020 comme étant : « 1 Une expérience sensorielle et émotionnelle désagréable associée ou ressemblant à celle associée à une lésion tissulaire réelle ou potentielle. » (Raja et al., 2020, traduction libre). Cette définition partagée par les professionnels de santé envisage la douleur comme une expérience subjective influencée par de nombreux facteurs : biologiques, psychologiques et sociaux. Cette définition différencie la nociception de la douleur ce qui implique que cette dernière n’est pas nécessairement le résultat d’une activité neurosensorielle. Enfin, selon cette définition la douleur peut être exprimée de façon verbale ou non verbale (Raja et al., 2020). De plus, le concept de « douleur totale » introduit par Cicely Saunder en 1995 rend compte de la souffrance multidimensionnelle, inévaluable par le patient du fait de l’interaction des différents facteurs. L’approche pluridisciplinaire apparait alors comme indispensable pour appréhender le patient dans sa globalité, notamment en soins palliatifs où les patients font souvent face à des douleurs complexes.
Tout professionnel de santé a pour obligation légale d’évaluer et de prévenir la douleur, y compris les orthophonistes (Rossi-Bouchet, 2022). Cette évaluation diffèrera en fonction du niveau de communication du patient. Il est donc important de l’évaluer antérieurement afin de proposer l’évaluation la plus adaptée. L’équipe soignante pourra ainsi sélectionner des outils d’autoévaluation adaptés à la communication du patient pour évaluer l’intensité, la localisation et les caractéristiques de la douleur. Parmi ces outils, nous pouvons citer, pour les patients communicant : l’échelle visuelle analogique, l’échelle numérique, l’échelle verbale simple et l’échelle des visages (pour l’intensité de la douleur), les schémas corporels (pour la localisation, le questionnaire douleur St Antoine (QDSA) (pour caractériser la douleur) (Annexe 5). Pour les patients présentant un trouble de la communication majeur, il conviendra d’utiliser des outils d’hétéroévaluation. Parmi ceux-ci nous pouvons citer : l’échelle Algoplus (pour les douleurs aigües), l’échelle Doloplus (pour les douleurs chroniques, souvent rencontrées en soins palliatifs) (Annexe 6), l’échelle ECPA (pour les douleurs induites) (Rossi-Bouchet, 2022).

Discussion

L’objectif de ce mémoire a été de montrer que l’orthophonie pouvait s’inscrire dans la prise en soin des patients adultes en soins palliatifs. Au travers de la littérature, nous avons pu mettre en avant la contribution de l’intervention orthophonique mais aussi les possibles freins à sa mise en place. L’étude de la littérature anglo-saxonne nous a montré que les orthophonistes doivent intégrer les équipes soignantes de soins palliatifs comme membre à part entière. Plusieurs rôles sont identifiés : dispenser des conseils aux patients et à leur entourage dans les champs de la communication, de la cognition et de la déglutition, soutenir les compétences de communication, limiter les symptômes de la dysphagie, communiquer avec les membres de l’équipe pluridisciplinaire (Pollens, 2004). Dans ce mémoire, nous avons décrit l’intervention orthophonique dans les domaines de la communication et de la déglutition, mais également dans ceux de la respiration, de la phonation et de la douleur. En effet, la prise en soin globale du patient, essentielle en soins palliatifs, nécessite la prise en compte de tous ces domaines :
• Aider le patient à communiquer « jusqu’au bout », ou le plus longtemps possible, permet notamment de respecter le principe d’autodétermination. Le patient pourra ainsi être acteur dans les décisions qui le concernent le plus longtemps possible et communiquer avec son entourage ;
• Maintenir les capacités de déglutition du patient ou lui proposer des adaptations l’aidera à conserver un certain plaisir à la prise des repas. Cela impactera également ses interactions sociales et/ou familiales car les repas constituent un moment d’échange et de partage (Pollens, 2004) ;
• Maintenir les capacités de respiration et de phonation du patient participera au maintien de la communication ainsi que du confort. L’intervention orthophonique autour de ces fonctions sera également l’occasion pour le patient d’apprendre des méthodes de relaxation qu’il pourra utiliser en autonomie (Tessier, 2016) ;
• Enfin, l’intervention orthophonique dans le domaine de la douleur est peu connue mais permettrait aux équipes soignantes de proposer des évaluations plus précises.
L’orthophoniste pourra en effet proposer des modalités d’évaluation adaptées au niveau de communication du patient et informer les soignants de l’outil le plus approprié (Rossi-Bouchet, 2022).
Les modes d’intervention de l’orthophoniste dans ces différents domaines en soins palliatifs pourraient être détaillés dans des études ultérieures. Cela serait l’occasion d’établir des bilans adaptés à ce contexte de soins et de mettre au point du matériel et/ou des techniques de soins plus appropriées aux problématiques des patients.
Notre travail montre également qu’il apparait important que les orthophonistes participent davantage aux échanges interdisciplinaires afin de sensibiliser les professionnels à leur rôle et de partager leurs observations à propos des patients, comme le montre également Pollens en 2004. L’interdisciplinarité est en effet essentielle dans l’exercice en soins palliatifs. C’est notamment grâce à leurs échanges que les différents professionnels peuvent mieux comprendre les différents traitements du patient et adapter leurs interventions en termes d’heure, de durée, d’activité, de support ou d’installation.
En nous interrogeant sur la formation et le niveau d’information des professionnels médicaux nous avons pu mettre en avant d’importantes hétérogénéités concernant les enseignements relatifs aux soins palliatifs et aux auxiliaires médicaux (Poinceaux et Texier, 2016). Cela pourrait expliquer, au moins en partie, le manque de prescription pour des prises en soin orthophoniques pour les patients en soins palliatifs. Ainsi, il semble important de mieux sensibiliser l’ensemble des équipes soignantes, notamment les médecins, aux rôles des orthophonistes. De plus, l’absence de réponse au questionnaire distribué aux professionnels de l’URSP renforce l’hypothèse d’un manque d’information des professionnels quant à l’intervention orthophonique. Une prochaine étude pourra faire l’objet d’une analyse plus précise des représentations des soignants afin de créer un support d’information (intervention menée par un orthophoniste, plaquette informative, …) leur permettant de mieux appréhender la place de l’orthophoniste. Il conviendra de proposer aux équipes un support de recueil d’informations qui s’intègre facilement à leur pratique professionnelle et prenne en compte les contraintes de leur exercice afin d’obtenir un nombre de réponses satisfaisant. Nous avons également relevé que les orthophonistes étaient peu formés aux soins palliatifs durant leurs études (Marcotte, 2012) et qu’ils associaient, en majorité, les soins palliatifs à la fin de vie. Ainsi, les orthophonistes éprouvent probablement des difficultés à identifier leur rôle auprès de ces patients. Si les orthophonistes qui ont participé à notre questionnaire disposaient de représentations justes concernant les soins palliatifs, le mode de diffusion constituait un biais de recrutement. Ainsi, les orthophonistes ayant répondu au questionnaire étaient plus susceptibles d’être déjà sensibilisés à ce sujet. Il serait donc utile d’effectuer une étude analysant les représentations des orthophonistes à propos des soins palliatifs dans le but d’établir un état des lieux des connaissances plus précis. Nous pourrions de cette manière mettre à disposition des orthophonistes différents supports d’information en fonction de leur niveau de connaissance.

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Table des matières

Introduction
Les soins palliatifs
Définitions
Organisation et professionnels
Formation et information des professionnels de santé
Orthophonie et soins palliatifs : où en sommes-nous ?
État de l’art de la présence d’orthophonistes en soins palliatifs
Formation aux soins palliatifs
Information des orthophonistes
L’intervention orthophonique
La communication
La déglutition : alimentation et hydratation
La respiration et la phonation
La douleur
Discussion
Conclusion
Bibliographie

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