Pays du sud qui figure parmi les hotspots de la diversité biologique mondiale, Madagascar est reconnu par sa richesse en biodiversité (PRIMACK et RATSIRARSON, 2005) concentrée surtout dans les écosystèmes forestiers. Pour diverses raisons, cette diversité des organismes vivants est soumise à différentes pressions non négligeables. Dans plusieurs régions du pays, les activités des malagasy sont fortement liées à la forêt (RABEMAMPIANDRA, 2012). La déforestation au détriment des zones d’habitation, des terrains agricoles, et de l’exploitation proprement dite du bois pour des usages différents constitue le premier facteur à l’origine de la perte de la biodiversité. Elle fait perdre 0,9% de surface à la forêt malagasy chaque année (RAMBELOARISOA, 2007). Conséquemment, les forêts primaires ne représentent plus que le dixième de ce qu’elles étaient avant (RAMASINORO, 2015). La surface actuelle des forêts primaires restantes est estimée à 3 036 000 ha (FAO, 2010). Elles se trouvent en petits lambeaux forestiers éparpillés et cantonnés sur des terrains inaccessibles tels que les zones submergées de manière permanente ou les zones montagneuses. La région de Mandraka en fait partie.
La station forestière de Mandraka se situe sur la première falaise de l’Est malagasy dans la région bioclimatique centrale du vent. Le relief de la région est caractérisé par une forte pente et un bas-fond étroit si bien que la forêt y joue un rôle de protection contre l’érosion hydrique et l’envasement. La végétation de la station est formée principalement par deux formations forestières. D’une part, la forêt naturelle est une des vestiges des forêts denses humides de montagne (KOECHLIN et al., 1974, in ARITSARA, 2015) de la série à Weinmannia [CUNONIACEAE] et à Tambourissa [MONIMIACEAE] (HUMBERT, 1965). D’autre part, la forêt artificielle est constituée d’un arboretum à plusieurs espèces généralement introduites. L’ensemble de la forêt présente une diversité faunistique et floristique importante. Toutefois, la forêt de Mandraka est soumise à des menaces de dégradation. La station forestière recouverte auparavant de forêt primaire a perdu non seulement 71% de sa couverture végétale, mais aussi sa diversité biologique (RAJOELISON et al., 2007). Par ailleurs, les terres favorables à l’agriculture sont restreintes. Les activités de la population locale se focalisent, de ce fait, sur l’utilisation de la forêt aussi bien pour des fins d’extension de l’agriculture que pour un approvisionnement continu en produits forestiers tels le bois, le charbon, les tubercules (RAJAONERA, 2008). La forêt primaire ne couvre actuellement qu’une moindre surface dans la station forestière de la Mandraka. Elle tient cependant un rôle prépondérant pour l’ensemble de la communauté locale et de l’écosystème environnant : en tant que réservoir hydrique et abri des espèces originelles. Ainsi, des stratégies à adopter sont d’une grande importance pour mettre en œuvre des actions conservatoires au sein de la forêt primaire afin que celle-ci puisse retrouver ses caractéristiques primitives et garantir un équilibre stable pour l’ensemble de l’écosystème. Seulement, une telle amélioration n’est possible qu’en connaissant l’état réel actuel de la forêt primaire.
Superficie de la forêt primaire
La forêt primaire tend à régresser et est remplacée graduellement par la forêt secondaire. Auparavant, elle était constituée par 4 ilots forestiers (F1, F2, F3, F4) qui formaient une surface de 11,7ha. Actuellement, elle n’occupe que 9,91 ha de la station forestière répartie dans 3 reliquats qui sont : FP1, FP2 et FP3. La perte de 1,80 ha fait suite à des vastes incendies venant des terrains de culture en 1996 et en 2002. En effet, les espèces de forêt secondaire, généralement héliophiles de type pionnier, s’installent après la pratique des feux nécessaires pour les cultures itinérantes sur brûlis ou « tavy ».
Etat des pressions et des menaces sur la forêt
La proximité des habitations, routes, zones de cultures ou d’exploitation ne met pas la station forestière à l’abris de divers types de perturbations. Les pressions qui sont liées directement à l’activité humaine persistent encore malgré les diverses mesures déjà entreprises antérieurement. En outre, l’ampleur des aléas naturels s’accroit régulièrement. Ces pressions sont à l’origine des modifications des processus naturels au sein de la forêt primaire, conduisant à une diminution de ses aptitudes à assurer les services écosystémiques. Les pressions qui pèsent sur la forêt primaire de Mandraka sont constituées de : coupes illicites, passage de l’homme, mort des arbres sur pied, envahissement des lianes.
• Le passage de l’Homme
Toute la forêt est parcourue par la population environnante car la pénétration dans la forêt sert d’un raccourci pour rejoindre leur lieu de travail. En effet, l’emprunt des routes forestières déjà établies demande une durée de trajet assez longue. Les gens préfèrent créer progressivement des itinéraires en pleine forêt pour arriver rapidement à destination. Les bordures des chemins portent naturellement la plupart des traces de leur passage : empreintes des pieds, de tiges ou rameaux coupées afin de faciliter l’accès. Le passage fréquent de l’Homme représente un risque pour la dynamique des peuplements, d’autant que les régénérations naturelles sont les premières cibles .
• Les coupes illicites
Les coupes illicites ont été reconnues par la présences des souches laissées après abattage dans la forêt. La population locale dépend encore du matériel bois en matière de construction. Aussi, les bois de la forêt primaire présentent une dureté plus importante. De ce fait, dès la première occasion, les ménages qui ont besoin d’une construction sont incités à abattre les arbres notamment ceux qui ont de diamètre plus grand. Les essences exploitées sont généralement Uapaca densifolia [UAPACACEAE] et Ravensara sp. [LAURACEAE]. La technique d’abattage se fait traditionnellement car on remarque des coups de hache sur la souche . La principale conséquence de la coupe illicite des arbres est l’ouverture de la canopée qui est favorable au développement des lianes.
• L’envahissement des lianes
La présence des lianes est une des caractéristiques des forêts denses humides. Elles se développent encore mieux dans une forêt perturbée. L’ouverture de la canopée accélère la vitesse de prolifération des lianes héliophiles. La lumière pénètre au sol et active leur multiplication. Puis, elles utilisent d’autres arbres, pour monter vers la canopée bénéficiant d’un meilleur ensoleillement. La présence des lianes dont Danaïs fragans [RUBIACEAE] et Smilax sp. [SMILACACEAE] menace la pérennité de la forêt : les essences utilisées comme supports meurent et les régénérations sont étouffées par la concurrence d’autres plantes envahissantes ayant une grande affinité à la lumière .
• Mort des arbres sur pied
D’une manière générale, la sénescence des arbres est l’une des causes qui entrainent la mort de bois sur pied. Néanmoins, l’envahissement rapide des essences forestières par les lianes inhibe la croissance des arbres cibles en serrant leurs tiges et leurs feuilles. La photosynthèse et la respiration ne peuvent pas avoir lieu ; les supports meurent sur place. A ces causes peuvent s’ajouter la casse engendrée par la chute des arbres déjà morts et les effets dus à des dégâts d’origine anthropiques. La disparition des tiges par mort sur pied est un danger imminent qui s’exerce sur les essences forestières et qui peut menacer leur pérennité.
Ainsi, même les perturbations naturelles qui peuvent modifier la prospérité de la forêt primaire sont étroitement liées avec les pressions anthropiques. Elles ne sont pas indépendantes des activités humaines. Aussitôt, les coupes illicites sont moins fréquentes mais les arbres envahis par des lianes et morts sur place deviennent de plus en plus rencontrés.
Intensité et localisation des pressions
Chaque type de pression est plus intense dans un reliquat forestier que dans un autre selon les caractéristiques de ces derniers . En effet, les hommes passent surtout dans les reliquats qui emmènent vers la Route Nationale ou vers leurs habitations. C’est pourquoi, la cascade enregistre moins de passage crée par l’homme car elle se situe à un endroit opposé qui du chemin vers la sortie de la forêt. Par contre, on trouve presque régulièrement des lianes au sein de la cascade du fait de la grande taille des arbres s’y trouvant. La coupe illicite ainsi que la mort des arbres sur pied se trouvent dans tous les reliquats.
|
Table des matières
1. INTRODUCTION
2. METHODOLOGIE
2.1. Problématique et hypothèse
2.2. Etat de connaissances
2.2.1. Forêt primaire
2.2.2. Analyse sylvicole
2.2.3. Valeur d’usage
2.3. Présentation du milieu d’étude
2.3.1. Situation géographique
2.3.2. Climat
2.3.3. Géomorphologie
2.3.4. Hydrographie
2.3.5. Pédologie
2.3.6. Milieu biologique
2.3.7. Milieu Humain
2.4. Méthodes
2.4.1. Cartographie
2.4.2. Observation
2.4.3. Enquêtes
2.4.4. Inventaires
2.4.5. Analyse des données
2.5. Cadre opératoire
3. RESULTATS
3.1. Superficie de la forêt primaire
3.2. Description du peuplement naturel de la forêt primaire
3.2.1. Structure floristique
3.2.2. Structure spatiale
3.2.3. Structure totale
3.2.4. Stockage de carbone de la biomasse aérienne
3.2.5. Analyse de la régénération naturelle
3.2.6. Les essences principales
3.2.7. Tempérament des espèces
3.3. Etat des pressions et des menaces sur la forêt
3.3.1. Intensité et localisation des pressions
3.3.2. Carte des pressions
3.4. Les valeurs d’usage de la forêt
3.4.1. Valeurs d’usage direct
3.4.2. Valeurs d’usage indirect
4. DISCUSSIONS
4.1. Sur la méthodologie
4.2. Sur les résultats
4.3. Sur les hypothèses
4.4. Recommandations
4.4.1. Objectifs
4.4.2. Planification des actions d’aménagement
5. CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE