Étape logique dans une société de plus en plus cyber-connectée

TRANSPOSER LA CULTURE SUR LE WEB 2.0

Le profil de l’amateur

Il convient dans un premier temps de dresser le portrait de ces amateurs, qu’ils soient amateurs de football, de cyclisme ou encore d’histoire. Pour chaque discipline, l’amateur s’oppose au professionnel, dans le sens ou pour le second, il s’agit d’exercer une activite remuneree et de s’y consacrer a temps plein, ou presque, pour le premier il est question principalement de plaisir, de pratiquer une activite qui tient lieu de loisir, ce qui n’induit pas necessairement un taux d’expertise minimum que l’on attend du professionnel par exemple4. Si les amateurs de culture ont bien sur toujours existe, c’est a la fin du XXeme siecle que cette ≪ culture amateur ≫5 a veritablement progresse et a fini par s’affirmer. Selon Olivier Galland6, sociologue et directeur de recherche au CNRS, qui s’appuie sur les enquetes realisees par le ministere de la Culture et de la Communication sur les pratiques culturelles francaises, la frequence des Francais ayant pratique une activite en amateur est passee d’un individu sur dix en 1981, a un individu sur quatre en 1997. Par la suite, l’arrivee du numerique a bien evidemment contribue a alimenter cette acceleration des pratiques amateurs, permise grace a l’accessibilite facilitee pour les internautes a des outils habituellement utilises par des professionnels.

En 2008, toujours grace aux enquetes du ministere de la Culture et de la Communication, on remarque que ces pratiques concernent particulierement le domaine musical. En effet, 25% des internautes declarent utiliser leur ordinateur pour composer de la musique electronique. La photographie numerique est egalement tres prisee, puisque 60% des Francais declarent utiliser leur ordinateur pour cette activite, selon cette meme etude7. On constate ainsi qu’en 2008, plus de la moitie des individus ont declare avoir pratique une activite d’autoproduction sur leurs ordinateurs. En ce qui concerne les processus d’apprentissage de ces activites en amateur, il faut noter qu’elles sont generalement realisees pendant l’enfance et l’adolescence. Le passage a l’age adulte fait que de nombreux individus abandonnent leur activite. Parmi ceux qui perseverent, pres de la moitie declare ne plus pratiquer regulierement et regrettent cet etat de fait qu’ils attribuent au manque de temps8. La principale formation que possedent ces amateurs-producteurs est celle qu’ils ont recue lors de leur parcours scolaire.

On rencontre le principe d’autodidaxie dans la musique, ou s’il est plutot rare parmi les joueurs de piano qui ne sont que 5% a declarer avoir appris seuls, il est frequent parmi les joueurs de guitare qui sont 37% a se declarer autodidactes. Si l’on s’interesse de plus pres aux pratiques amateurs sur ordinateur que l’on a mentionnees precedemment, on remarque qu’elles se repartissent principalement parmi trois grands domaines, a savoir la musique electronique, la photographie numerique et l’ecriture numerique. En ce qui concerne la musique electronique, cette activite implique, pour celui que l’on appelle le DJ, d’utiliser une chaine hi-fi et une table de mixage, afin de melanger des morceaux et donc de realiser des mix. L’arrivee du numerique a ainsi permis de faciliter la pratique de cette activite, en ameliorant l’accessibilite aux musiques deja realisees et donc de developper ce que Patice Flichy appelle ≪ l’esthetique du braconnage ≫. De plus, l’ordinateur facilite egalement la pratique musicale amateur, dans le sens ou la musique electronique n’implique ≪ que ≫ la maitrise du copier-coller, par le biais de prelevement de sons, puis de recomposition, dans le but de creer une musique inedite au final. A l’inverse, les instruments traditionnels comme la guitare ou la batterie, necessitent un apprentissage prealable afin d’acquerir une certaine dexterite au fil des entrainements. Par ailleurs, on peut noter l’aspect individuel dans le processus de composition chez ces musiciens qui composent seuls sur leurs ordinateurs. En effet, ces musiciens composent d’abord pour eux, a l’inverse des professionnels qui sont soumis a de multiples contraintes de la part de leurs editeurs. Ce cote individuel ne les empeche cependant pas de diffuser leurs creations sur internet, par l’intermediaire de sites de partage, comme Facebook ou My Space par exemple. Enfin, on peut considerer que la frontiere entre la production amateur et la production professionnelle est tres mince, dans le sens ou l’ere numerique a permis a tous les possesseurs d’ordinateurs, d’avoir acces a des outils sophistiques, permettant des creations de qualite. La plateforme MySpace permet notamment aux musiciens amateurs et professionnels de cohabiter, bien qu’il existe une difference de traitement selon la notoriete des artistes.

Le cas particulier des fans

Pour apprehender au mieux le personnage du fan, il ne faut pas le considerer comme un producteur original de contenu, a l’image de l’amateur producteur, mais avant tout, plutot comme un consommateur de celui-ci. Le fan consomme ce que produisent ceux qu’il admire, voire idolatre et ce, en grande quantite. Il peut etre fan de peinture et d’un peintre en particulier, ou bien fan d’un groupe de musique. Il consacre une grande partie de sa vie a sa passion, ce qui le rapproche ici de l’amateur producteur. Neanmoins, le fan ne produit pas d’oeuvres inedites, il s’impregne des creations qu’il aime et avec lesquelles il ressent des emotions positives et se les approprie. Si l’amateur-producteur se situe dans une position inferieure a celle du professionnel, ou sa production n’atteint que rarement la meme qualite, le fan lui rejette cette hierarchie pre-etablie et se situe ≪ a cote ≫14. Sa fascination pour tel produit culturel le pousse a en detourner les creations, dans le but de glorifier l’objet de son admiration. En ce sens, sa production existe donc bel et bien, mais est detournee et, de fait, ne peut etre consideree comme legitime. Selon Patrice Flichy, le fan exprime sa passion de trois facons differentes. Tout d’abord, il peut se contenter de reinterpreter une oeuvre, devenant ainsi coproducteur.

De fait, il existe de nombreux internautes sur la plateforme de videos Youtube qui proposent leurs propres interpretations des compositions de leurs idoles dans le domaine de la musique par exemple. La seconde caracteristique du fan est sa propension a se regrouper autour d’autres individus nourrissant la meme passion que lui. C’est ainsi que des communautes se forment sur internet, par le biais de forums ou de groupes sur Facebook, permettant ainsi a ces fans de dialoguer entre eux sur cette activite. Enfin, le troisieme degre caracterisant les fans est l’exercice constituant a detourner le produit culturel aime. Par exemple, sur Youtube, des internautes constituent des playlists15 d’artistes qu’ils adorent, sans aucune coherence officielle, dans le seul but de faire partager leur passion. En agissant ainsi, le fan se construit sa propre identite, avec comme objectif de promouvoir sa passion aupres des autres. Si l’on s’attarde sur les collectifs de fans, on remarque que ceux-ci se sont organises a travers des journaux, des fanzines16, ou encore des reunions, voire des conventions. Les communautes de fans de series televisees et de films ont connu leur premiere grande progression avec l’arrivee du magnetoscope, qui leur a permis d’enrichir leur culture et ainsi d’acceder a des oeuvres qu’ils n’avaient pas eu l’occasion de voir, par le biais d’echanges entre eux. Avec l’arrivee d’internet, l’activite de ces communautes a veritablement explose, le web permettant d’acceder quasiment instantanement a n’importe quelle oeuvre, que ce soit de maniere legale ou non17.

Des series televisees ont alors connu un engouement sans precedents, on peut notamment citer l’exemple recent de la serie americaine Game Of Thrones. Internet a donc permis aux fans de mieux s’organiser et de mieux communiquer. Il permet ainsi de connecter des communautes de fans a travers le monde entier, les fans se regroupant autour de blogs et de forums specialises. En ce qui concerne les series americaines, on constate l’existence de plusieurs communautes de fans europeens qui cooperent pour traduire dans leur langue maternelle, le contenu de ces series qui sont en anglais, une fois que les episodes sont sortis, afin d’en faire profiter d’autres qui ne maitrisent pas la langue et qui n’ont donc pas leurs capacites de traduction ou encore de codage informatique. En ce qui concerne l’aspect creatif des fans, nous avons mentionne leur capacite a detourner, a s’approprier les oeuvres. En effet, certains d’entre eux entreprennent de les prolonger, en proposant une eventuelle suite a un roman ou a une serie, ce que l’on va appeler les fanfictions. Il s’agit d’un neologisme renvoyant au fait d’ecrire un recit reprenant l’univers d’un produit existant, que ce soit un roman, un jeu video ou bien un film18.

On pense notamment a la saga Harry Potter qui a ete la premiere source de fanfictions dans les annees 2000, les fameuses potterfictions19. Ces ecrits fictifs qui etaient auparavant publies dans les fanzines, le sont maintenant sur les sites web prevus specialement pour cet effet et connaissent ainsi une diffusion a plus grande echelle. Les lecteurs peuvent alors commenter la fiction et la noter, en fonction de leur appreciation. Cette activite sert de publicite pour de nombreuses sagas, mais bien souvent, les producteurs cherchent a interdire ces fanfictions qui peuvent detourner le sens meme d’une oeuvre et ainsi donner une image totalement differente de celle que l’on souhaite donner au public. Les producteurs redoutent egalement que le fan, auteur de fanfiction, ne devienne un veritable expert de la serie, au point de maitriser d’avantage l’univers en question, que les scenaristes euxmemes. Pour conclure, on retrouve une experience similaire dans les jeux videos, ou certains joueurs s’approprient un jeu et proposent ainsi des mods, qui en theorie renvoient a l’elaboration d’un jeu, a partir d’un autre, visant a proposer du contenu supplementaire qu’ils ont eux memes cree. On peut prendre pour exemple les celebres jeux en ligne World Of Warcraft et Minecraft, qui se sont vu agrementes d’un nombre important de contenus amateurs. En agissant de la sorte, ces fans utilisent leurs competences en programmation et se rapprochent ainsi des professionnels. En cela, ils deviennent les ≪ professionnels-amateurs ≫.

L’avènement du « professionnel-amateur »

L’individu que l’on qualifie de ≪ professionnel-amateur ≫ s’investit totalement dans sa passion, au point d’en maitriser les competences et les techniques aussi bien qu’un professionnel. Ces individus ont ainsi atteint un taux d’expertise digne d’un professionnel et leur nombre de plus en plus consequent pousse le monde professionnel a les considerer. En effet, alors que certaines taches sont souvent delaissees par les specialistes, faute de temps, la presence d’une main-d’oeuvre amateur finit par etre prise en compte. De fait, ces amateurs, en plus d’avoir des competences certaines, possedent un atout sur ces professionnels, ils ont du temps libre pour se consacrer a cette activite. On peut d’ores et deja noter que le facteur temps est preponderant. L’expression ≪Pro- Am ≫ a ete popularise par Charles Leadbeater en 200420. Il est la contraction des termes ≪ professionnel ≫ et ≪ amateur ≫. Ce neologisme designe donc les amateurs utilisant des outils analogues a ceux des professionnels qui sont desormais accessibles sur internet. Pour illustrer cette categorie d’individus a la frontiere entre professionnel et amateur, on peut prendre pour exemple le cas du systeme d’exploitation Linux, qui a vu le jour en 1991, de l’idee d’un etudiant finlandais, Linus Torvalds. Ce dernier a publie le code source de son systeme sur un forum specialise sur internet et a incite publiquement d’autres amateurs a emettre des critiques et a proposer des ameliorations de son travail.

Cette initiative a declenche un processus de masse et de nombreux programmeurs amateurs ont repondu a son appel et se sont impliques personnellement dans ce projet qui est ainsi devenu pleinement collaboratif. Avec le lancement de Linux, de nombreuses communautes se sont constituees. En 2004, alors que le systeme d’exploitation comptait 20 millions d’usagers, on denombrait 430 communautes d’utilisateurs reparties dans 72 pays21. Toujours dans le domaine informatique, une grande partie des sites web dependent de la licence Apache22 developpee par une communaute de professionnels-amateurs. Le serveur de messagerie electronique Sendmail a lui aussi ete cree par une communaute de programmeurs amateurs, de veritables ≪ pro-am ≫. Un autre exemple peut etre donne avec le cas de Usenet23, qui fut cree en 1979, par l’initiative d’un groupe d’etudiants originaires de Caroline du Nord. Ce systeme fut ameliore dans les annee 1990 par le programme INN, prevu pour une meilleure adaptation a l’architecture du web, concu lui aussi par des professionnels-amateurs. Dans le domaine politique a present, Charles Leadbeater et Paul Miller font mention de l’importance des groupes de pression composes de militants professionnels-amateurs a la fin du XXeme siecle et au debut du XXIeme..

Le rapport de stage ou le pfe est un document d’analyse, de synthèse et d’évaluation de votre apprentissage, c’est pour cela rapport gratuit propose le téléchargement des modèles gratuits de projet de fin d’étude, rapport de stage, mémoire, pfe, thèse, pour connaître la méthodologie à avoir et savoir comment construire les parties d’un projet de fin d’étude.

Table des matières

INTRODUCTION GÉNÉRALE
PREMIÈRE PARTIE : TRANSPOSER LA CULTURE SUR LE WEB 2.0 : UNE
ÉTAPE LOGIQUE DANS UNE SOCIÉTÉ DE PLUS EN PLUS CYBER-CONNECTÉE
1Culture et amateurisme
2Avènement du web 2.0 et des premiers projets collaboratifs
3La culture dans le web 2.0 : l’exemple des musées et des bibliothèques
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE
ÉTAT DES SOURCES
1Sources orales
2Les supports 2.0 en ligne
SECONDE PARTIE : L’APPROPRIATION DU WEB 2.0 PAR LES SERVICES D’ARCHIVES : UNE EXPÉRIENCE AUTHENTIQUE
1La singularité des services d’archives dans ce web
2Réflexion sur ce web 2.0 en archives
3De l’ archivistique 2.0 ?
CONCLUSION GÉNÉRALE
ANNEXES

Rapport PFE, mémoire et thèse PDFTélécharger le rapport complet

Télécharger aussi :

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *