Estimation in-situ des facteurs d’émission des polluants du trafic routier

Impacts de la pollution de l’air

Impacts sur la santé Selon l’organisation mondiale de la santé (OMS), dans la région européenne, en 2016, plus de 550 000 décès étaient liés à la pollution de l’air (OMS, 2019), toutes sources confondues. En France, l’agence nationale de la santé publique (ANSP) estime que 48 000 décès prématurés par an sont dus à la pollution aux particules fines (de taille inférieure à 2,5 µm), ce qui correspond à 9 % de la mortalité en France et à une perte d’espérance de vie à 30 ans pouvant dépasser 2 ans (ANSP, 2016). L’OMS a réalisé une étude dans 1 600 villes de 91 pays qui révèle que seulement 12 % de la population qui vit dans ces ensembles urbains respirent un air qui est conforme aux valeurs guides de l’OMS (OMS, 2014). Le centre international de recherche sur le cancer (CIRC) a classé la pollution de l’air comme étant carcinogène pour l’Homme. Les effets de la pollution atmosphérique observés sur la santé pour une exposition de quelques heures à quelques jours sont des irritations des voies respiratoires, des crises d’asthme, l’aggravation de troubles cardio-vasculaires et respiratoires (Pope et al., 2008). Pour une exposition sur le plus long terme (plusieurs années), les effets observés sont le développement ou l’aggravation de cancers, de pathologies cardiovasculaires et respiratoires, de troubles neurologiques (Sydbom et al., 2001 ; Pope et al., 2002 ; Lewtas et al., 2007). Concernant plus spécifiquement les transports, Silverman et al. (2012) a montré que les émissions directes des moteurs Diesel sont associées à un risque élevé de cancer du poumon.
Impacts sur l’environnement et le climat En plus des graves effets sur la santé humaine, la pollution atmosphérique a des effets néfastes sur l’environnement et le climat. Ces polluants atmosphériques ont de lourds impacts sur les cultures et les écosystèmes avec notamment un affaiblissement des organismes et un fort ralentissement de la croissance des cultures agricoles lors d’une période d’exposition prolongée à l’ozone. Les dioxydes d’azote (NOX) et le dioxyde de soufre (SO2) modifient les pluies, les neiges et le brouillard qui deviennent plus acides et altèrent les sols, les cours d’eaux et le fonctionnement général des écosystèmes (ATMO ARA, 2019). Ces polluants influencent également le climat, de manière directe avec les aérosols, les COV (composés organiques volatils) et les NOX qui ont des effets négatifs ou positifs sur le forçage radiatif (FR). Selon le rapport du GIEC (2013), le FR total de l’effet des aérosols dans l’atmosphère est de -0,9[-1,9 à -0,1] W.m-2 , et, pour les NOX et les COV, le FR total est respectivement de -0,15[-0,34 à -0,03] W.m-2 et 0,1[0,05 à 0,15] W.m-2. Les concentrations élevées de COV et NOX influencent également le climat de manière indirecte, car elles ne permettent pas la dégradation de l’ozone (O3), ce qui provoque son accumulation et réchauffe l’atmosphère.

Évolution des motorisations et technologies de dépollution

    Les limites d’émission des polluants réglementés, imposées par l’UE, sont de plus en plus strictes à chaque entrée en application d’une nouvelle norme Euro. Les constructeurs ont donc développé, à partir de certaines normes, des technologies de dépollution ou des nouvelles motorisations afin de réduire les émissions de leurs véhicules et les ramener en dessous des niveaux réglementaires. Les véhicules essence légers (particuliers et utilitaires avec un PTAC inférieur à 3,5 tonnes) ont tous été équipés d’un catalyseur trois voies (appelé généralement pot catalytique) à partir de 1993 avec la mise en application de la norme Euro 1. Cette technologie de dépollution permet de réduire considérablement les émissions de CO, de HC et de NOX des véhicules essence (Miyoshi et al, 1995). Pour réduire la consommation de carburant, les constructeurs ont développé une motorisation essence à injection directe à partir de la norme Euro 4 et qui se généralise pour les normes Euro 5 et Euro 6. Cette injection directe, qui consiste à injecter le carburant à haute pression directement dans la chambre de combustion, permet un gain de performance et de rendement. Pour les véhicules Diesel, une première technologie de dépollution rendue obligatoire en 1998 pour tous les véhicules est le catalyseur d’oxydation Diesel (DOC). Ce dispositif permet de réduire les émissions de CO et de HC par des réactions d’oxydation. La réduction des émissions de particules afin de se conformer aux limites d’émissions de PM et de PN de plus en plus strictes nécessite un filtre à particule (FAP) qui permet de réduire considérablement les émissions en masse des particules (environ 95 %). Les FAP sont utilisés dans la production de véhicules depuis 2000 et ils seront obligatoires pour satisfaire la norme Euro 5. Ils éliminent les particules des gaz d’échappement par filtration physique. Deux technologies de filtres sont employées actuellement : les FAP additivés et catalysés. La différence entre ces deux types de filtres est la méthode de catalyse lors des régénérations (phénomènes permettant de nettoyer les filtres pendant leur utilisation). Pour le FAP catalysé, un catalyseur de réchauffement des gaz est ajouté dans le filtre afin de faciliter l’élimination des particules en abaissant leur température de combustion. Tandis que pour le FAP additivé, c’est un additif ajouté au carburant qui permet d’abaisser la température de combustion des particules piégées dans le filtre. Pour contrôler les émissions de NOX des véhicules Diesel, différents systèmes sont proposés par les constructeurs dont la recirculation des gaz d’échappement (RGE), qui par ajout au mélange frais permettent une baisse de la température dans la chambre de combustion et donc une réduction de la formation de NOX. À partir de la norme Euro 6, la RGE ne permet pas de réduire suffisamment les émissions de NOX pour satisfaire la valeur limite d’émission plus faible, et les constructeurs ont donc développé deux dispositifs de réduction des NOX, le LNT (Lean NOX Trap) et le SCR (Selective Catalytic Reduction) (Prasad et al., 2011 ; Reşitoğlu et al., 2015 ; Louis, 2018). Bien que ces technologies permettent de réduire significativement les émissions de composés réglementés, elles peuvent affecter (positivement ou négativement) les émissions de certains autres polluants dit non-réglementés (dont les émissions ne sont pas limitées par les normes Euro). Ainsi par exemple, les FAP réduisent les émissions massiques de particules, avec une efficacité d’environ 95 %, mais ils peuvent induire une augmentation des émissions de particules fines et ultrafines (émissions en nombre) et affecter les émissions de NO2, de composés organiques volatils (COV), d’hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP), de BTEX (benzène, toluène, éthylbenzène et xylène) et de BC (Hall et al., 1998 ; Sluder et al., 2000 ; Mohr et al., 2006 ; Fino et al., 2007 ; Bach et al., 2008 ; Ravindra et al., 2008 ; Louis et al., 2016 ; Louis et al., 2016). L’étude récente de Louis et al (2016) a montré que les véhicules avec un FAP catalysé émettent environ 3 fois plus de composés carbonylés et 10 fois plus de particules que les véhicules avec un FAP additivé pendant les cycles de conduite urbains, tandis que les véhicules avec un FAP additivé émettent 2 fois plus de BTEX et 5 fois plus de composés carbonylés pendant les cycles de conduite autoroutiers. Pour les VP essence, l’introduction des moteurs à injection directe entraîne des émissions importantes de PN et de BC (Köhler et al., 2013 ; Liang et al., 2013 ; Louis et al., 2016 ; Martinet et al., 2017).

Remote Sensing

     Les deux méthodes de mesure des émissions, sur banc à rouleau et embarquée, sont appliquées pour mesurer les émissions d’un unique véhicule, ce qui restreint le nombre de véhicules étudiés et limite la représentativité par rapport au parc automobile en circulation, notamment avec la présence de véhicules plus ou moins bien entretenus ou des conditions de conduite différentes en fonction des conducteurs. Le Remote Sensing (ou télédétection) est une méthode qui permet de mesurer les émissions des polluants réglementés (CO, HC et NOX) en bord de route d’un grand nombre de véhicules (jusqu’à des milliers par jour) et offre la résolution nécessaire pour identifier les niveaux d’émission des véhicules individuels (Franco et al., 2013). Cependant, le Remote Sensing ne permet pas de quantifier les émissions réelles du trafic (conditions de fonctionnement au passage des véhicules très spécifiques) et trouve plutôt son application dans la détection de véhicules polluants.

Analyse de variance (ANOVA)

    Pour étudier l’impact de la composition du parc sur les facteurs d’émission in-situ estimés pour les différents polluants, une analyse de variance (ANOVA) a été effectuée à l’aide du logiciel SPAD (logiciel d’analyse et d’exploration de données). L’analyse de variance (ANOVA) est une technique statistique permettant d’évaluer les différences entre une ou plusieurs variables dépendantes, qui dans ce cas sont les facteurs d’émission, et une variable nominale à plusieurs catégories, qui sont les différentes compositions du parc. L’ANOVA se base sur la variance (somme des carrés des écarts par rapport à la moyenne) et teste si les différences de variation dans chaque groupe s’écartent de manière statistiquement significative de la valeur 0. Plus précisément, l’hypothèse nulle (H0) pour l’analyse représente le fait qu’il n’y a pas de différence significative entre les moyennes des groupes car leur variance est proche de 0. Tandis que l’hypothèse alternative (H1) considère qu’il y a au moins une différence significative entre les moyennes des groupes. Dans cette analyse, la variabilité est divisée en deux parties : la variabilité dans un groupe autour de la moyenne de chaque groupe, appelée variabilité intra-groupe, et la variabilité entre les moyennes des groupes, appelée variabilité intergroupe. Le rapport F produit par l’ANOVA est le rapport entre la variabilité intergroupe et la variabilité intra-groupe et est associé à une valeur de probabilité (pvalue). Si la p-value est inférieure ou égale à 0,05, alors l’hypothèse nulle H0 est rejetée et l’hypothèse alternative H1 est retenue (Fanelli et al., 2018) et cela implique que les moyennes de tous les groupes ne sont pas égales et qu’il est possible de déterminer quels groupes sont différents des autres (Wildt et Ahtola, 1978). Pour augmenter la puissance de l’analyse ANOVA, il est possible de considérer qu’un résultat avec une p-value comprise entre 0,05 et 0,1 est significatif mais avec une grande incertitude et cette analyse doit être lue avec une attention particulière.

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Table des matières

Introduction
Chapitre 1 : Pollution de l’air des transports : État de l’art
1. Pollution de l’air
1.1. Impacts de la pollution de l’air
1.1.1. Impacts sur la santé
1.1.2. Impacts sur l’environnement et le climat
1.2. Sources de pollution
2. Pollution de l’air liée au transport routier
2.1. Polluants réglementés et réglementations
2.1.1. Polluants réglementés
2.1.2. Réglementation des véhicules particuliers et des véhicules utilitaires légers
2.1.3. Réglementations des poids lourds, bus et autocars
2.2. Évolution des motorisations et technologies de dépollution
2.3. Polluants non-réglementés
2.3.1. Particules
2.3.1.1. Particules ultrafines
2.3.1.2. Carbone suie
2.3.2. Composés organiques
2.3.2.1. Composés aromatiques
2.3.2.2. Composés aliphatiques
2.3.2.3. Composés carbonylés
3. Métrologie des émissions de polluants des véhicules
3.1. Mesures sur banc à rouleau
3.1.1. Description du banc à rouleau
3.1.2. Cycles de conduite
3.1.3. Facteurs d’émission calculés sur banc à rouleau
3.1.4. Avantages et inconvénients
3.2. Mesures alternatives au banc à rouleau
3.2.1. Mesures embarquées (PEMS)
3.2.1.1. Description du PEMS
3.2.1.2. Facteurs d’émission calculés avec un PEMS
3.2.1.3. Avantages et inconvénients
3.2.2. Remote Sensing
3.2.2.1. Description du Remote Sensing
3.2.2.2. Méthode de calcul des facteurs d’émission
3.2.2.3. Facteurs d’émission calculés avec le Remote Sensing
3.2.2.4. Avantages et inconvénients
3.3. Méthodes de mesure in-situ
3.3.1. En bord de route
3.3.2. En tunnel
3.3.3. Poursuite d’un véhicule
3.3.4. Calcul des facteurs d’émission
3.3.4.1. Méthode des NOX
3.3.4.2. Méthode en tunnel
3.3.4.3. Méthode du CO2
3.3.5. Facteurs d’émission calculés avec les mesures in-situ
4. Résumé
5. Objectifs
Chapitre 2 : Matériels et méthodes
1. Introduction
2. Description des sites de mesure
2.1. Site ouvert en bord de route à Nantes
2.2. Site ouvert en bord de route à Lyon
2.3. Site confiné dans le tunnel de la Défense à Nanterre
3. Protocole expérimental
3.1. Site ouvert
3.2. Site confiné
4. Mesures des concentrations de polluants
4.1. Analyseurs en ligne
4.2. Cartouches de prélèvement
5. Observation du parc en circulation, du trafic et des conditions de circulation
5.1. Comptage des véhicules et mesure des vitesses moyennes
5.2. Enregistrements vidéo des plaques d’immatriculation
5.3. Observation sur les sites ouverts
5.4. Observation sur le site confiné
5.5. Station météorologique
6. Méthode de calcul des facteurs d’émission
6.1. Site Ouvert
6.1.1. Nantes
6.1.2. Lyon
6.2. Site confiné
7. Méthode de caractérisation des parcs roulants
8. Analyse de variance (ANOVA)
9. Récapitulatif des méthodes pour chaque site de mesure
Chapitre 3 : Caractérisation des parcs roulants et des conditions de conduite sur les différents sites de mesure
1. Introduction
2. Volumes et vitesses moyennes du trafic routier sur les sites de mesure
3. Caractérisation des parcs roulants sur les différents sites de mesure
3.1. Compositions des parcs roulants par famille de véhicules
3.2. Compositions des parcs par motorisations et par normes Euro pour chaque famille de véhicules
3.2.1. Véhicules particuliers
3.2.2. Véhicules utilitaires légers
3.2.3. Poids lourds et bus
3.3. Variations temporelles des compositions des parcs sur les sites de Nantes et du tunnel de La Défense
3.3.1. Nantes
3.3.1.1. Parc global
3.3.1.2. Véhicules particuliers
3.3.2. Tunnel
3.3.2.1. Parc global
3.3.2.2. Véhicules particuliers
4. Conclusion
Chapitre 4 : Estimation des facteurs d’émission – Site ouvert en bord de route
1. Introduction
2. Estimation des facteurs d’émission avec la méthode des NOX
2.1. Nantes
2.1.1. Bruit de fond des particules et du carbone suie
2.1.2. Bruit de fond des BTEX, alcanes et composés carbonylés
2.1.3. Facteurs d’émission des polluants étudiés
2.1.3.1. Résumé de l’article
2.1.3.2. Article : In-situ Estimation of Non-Regulated Pollutant Emission Factors in an Urban Area with Fleet Composition Characterization
2.1.4. Analyses complémentaires
2.1.4.1. Sources d’émission des BTEX
2.1.4.2. Impact des points d’échantillonnage sur les PN
2.2. Facteurs d’émission des COVI en bord de route à Lyon
2.2.1. Facteurs d’émissions des polluants étudiés
3. Conclusion
Chapitre 5 : Estimation des facteurs d’émission – Site confiné en tunnel
1. Introduction
2. Source d’émission dans le tunnel
2.1. Corrélations entre les PN, les PM et le BC
2.2. Corrélations entre les composés aromatiques, aliphatiques, carbonylés et les NOX
3. Estimation des facteurs d’émission avec la méthode des NOX
3.1. Calcul des facteurs d’émission de NOX à partir de COPERT 5
3.2. Facteurs d’émission par véhicule
3.3. Corrélations des facteurs d’émission
3.4. Facteurs d’émission globaux du trafic
3.4.1. Particules et carbone suie
3.4.2. Composés aromatiques, aliphatiques et carbonylés
3.4.3. Impact de la composition du parc sur les facteurs d’émission
4. Conclusion
Chapitre 6 : Validation et comparaison des facteurs d’émission
1. Introduction
2. Comparaison des facteurs d’émission calculés avec COPERT 4 et COPERT 5
3. Comparaison des facteurs d’émission
3.1. Comparaison des facteurs d’émission par véhicule estimés entre les différents sites de mesure et avec des facteurs d’émission estimés sur banc à rouleau
3.2. Comparaison avec des facteurs d’émission d’autres études in-situ
3.3. Comparaison de la proportion des BTEX
4. Linéarité des facteurs d’émission
4.1. Linéarité entre BTEX et C9-C11
4.2. Linéarité entre BC et PN
5. Conclusion
Conclusion générale

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