Système LPV
La notion de système linéaire à paramètres variants dans le temps (LPV) a été introduite pour la première fois dans [61]. D’après cette première appellation, un système LPV est un système linéaire qui varie dans le temps et dont les matrices de la représentation d’état sont des fonctions dépendant d’un vecteur de paramètres p(t). D’un point de vue pratique, les systèmes LPV peuvent être interprétés de deux manières: r> Ils peuvent être vus comme des systèmes linéaires à temps invariant (LTI) sujets à des incertitudes paramétriques variants dans le temps. Dans ce cas, ces systèmes font l’objet de techniques d’analyse et de synthèse robustes pour les systèmes LTI. r> Les systèmes LPV peuvent aussi représenter des modèles issus de la modélisation de processus linéaires variants dans le temps ou de la linéarisation d’un processus non linéaire le long des trajectoires des paramètres. Dans ce cas, les paramètres ne sont plus incertains et ils peuvent être mesurés en temps réel durant le fonctionnement du processus. Par conséquent, une stratégie d’analyse et de synthèse peut exploiter la mesurabilité de ces paramètres. Il est important de noter que, contrairement au cas LTI, les systèmes LPV possèdent plusieurs types de propriétés pouvant être classifiées en propriétés LPV et propriétésLTI. Les propriétés LPV sont globales et concernent les caractéristiques du système le long de toutes les trajectoires paramétriques possibles. Par contre, les propriétés LTI sont seulement locales et elles concernent les caractéristiques du système pour une valeur particulière des paramètres. Un système LPV est la généralisation des systèmes LTI et des systèmes linéaires à temps variant (LTV) (voir figure 1.1). En effet, un système LTI peut être vu comme un système LPV dont les paramètres sont figés sur une valeur fixe ou comme un système LTV dont les matrices de la représentation d’état sont figées dans le temps. De même, un système LTV peut être interprété comme un système LPV avec une trajectoire prédéfinie. Les modèles LPV interviennent souvent dans des applications où l’évolution des paramètres est inconnue a priori mais peut être mesurée en temps réel. Par opposition à un système LTV dont l’évolution temporelle est entièrement décrite par les équations, un système LPV a autant de comportements différents qu’il y a de trajectoires paramétriques admissibles. Une propriété importante de ces trois classes de systèmes linéaires réside dans le fait qu’ils obéissent au principe de superposition :
• Superposition des effets :La sortie d’un système linéaire se décompose en deux composantes, une composante libre due aux conditions initiales lorsque la commande est nulle et une composante forcée pour des conditions initiales nulles.
• Superposition des entrées :Si y1 et y2 représentent l’évolution des sorties d’un processus respectivement pour les entrées u1 et u2 sur un horizon temporel et pour un même état initial donné, alors à l’entrée u = au1 + f3u 2 correspond la sortie y = ay1 + f3y2 sur le même horizon et pour les mêmes conditions initiales.
Fonctions de Lyapunov dépendant des paramètres
Nous définissons la notion de stabilité quadratique dépendant des paramètres (QDP) pour un système LPV comme une généralisation de la notion de stabilité quadratique classique. En utilisant la notion de stabilité quadratique dépendant des paramètres, on cherche une fonction de Lyapunov dépendant des paramètres qui assure la stabilité de la dynamique du système LPV. Les conditions d’existence d’une telle fonction sont moins restrictives que celles obtenues pour une stabilité quadratique utilisant une fonction de Lyapunov unique assurant la stabilité sur tout le domaine de variation des paramètres (voir [16]). En effet, on démontre généralement que l’ensemble des solutions fourni par la condition de stabilité quadratique dépendant des paramètres englobe l’ensemble des solutions fourni par le cas quadratique qui sont donc des solutions particulières du cas QDP.
Performance et analyse des systèmes LPV
Nous présentons quelques réflexions sur la notion de performance d’un système. Il est bien connu qu’une loi de commande doit satisfaire, en plus de l’exigence de stabilité en boucle fermée, certaines performances par exemple des performances liées à des critères énergetiques, au rejet de perturbations, à des exigences temporelles en terme de temps de réponse ou de temps de montée … Dans le cas des systèmes LTI, afin de formuler mathématiquement les indices de performance associés à certaines exigences, on relie par exemple la notion de performance à l’existence d’une borne sur la norme 1-loo ou 1-l2 de la fonction de transfert ou à la localisation de ses pôles. D’une façon générale, on peut formuler un problème de synthèse de correcteurs avec une contrainte de performance en spécifiant un critère de performance à optimiser. Un tel critère peut être par exemple la norme de la matrice de transfert du système en boucle fermée. Les normes les plus utilisées sont les normes 1-loo et 1-l2 • Une norme est aussi bien un outil d’analyse que de synthèse qui permet de caractériser en plus de la stabilité, exigence nécessaire, un certain niveau de performance. Nous rappelons ici la définition de la norme 1-l00 • Nous ne présentons par la suite que le critère 1-loo étant donné le lien étroit entre la commande de type « ‘Y-performance » abordée à la fin du chapitre 3 et ce type de critère.
Inégalités linéaires matricielles
Un grand nombre de problèmes de l’automatique concernant la stabilité, l’analyse et la synthèse des systèmes dynamiques ainsi que les spécifications de robustesse ou de performance peuvent se traduire sous la forme d’une optimisation convexe avec des contraintes inégalité. Des problèmes qui apparaîssent difficiles voire impossibles à résoudre de manière analytique peuvent être formulés par l’approche LMI et donc numériquement résolus. En effet, le développement de « solveurs » de plus en plus puissants ont rendu ce type d’approche facilement exploitable numériquement.
Caractéristiques du séquencement de gain
Nous présentons les caractéristiques générales du séquencement de gain qui peuvent être soit des avantages soit des inconvénients [57, 58]:
– L’avantage principal de l’approche par séquencement de gain réside dans l’utilisation d’outils puissants de synthèse linéaire pour des problèmes non linéaires difficiles. La plupart des spécifications de performance sont formulées dans le cas linéaire et des notions du domaine fréquentiel, par exemple, deviennent directement exploitables. Ainsi, beaucoup de techniques qui ne sont pas assez bien définies dans un contexte non linéaire deviennent applicables dans une approche par séquencement de gain.
– Cette approche ne nécessite pas d’hypothèse structurelle sévère sur le modèle du processus et elle peut être appliquée même en l’absence d’un modèle complet (par exemple lorsqu’on dispose seulement de la connaissance de quelques points d’équilibre et des linéarisations correspondantes).
– Un autre avantage réside dans le fait que cette approche permet au contrôleur de répondre rapidement aux changements du processus. Pourtant cet avantage introduit certaines difficultés. Une des difficultés concerne la sélection des variables de séquencement appropriées: il est très important que les variables de séquencement traduisent les changements de la dynamique du système comme des changements de points de fonctionnement. Une autre difficulté importante est la sélection de la procédure de séquencement. L’interpolation linéaire s’est avérée être la procédure standard.
– Un autre aspect du séquencement de gain est le fait qu’il est local par sa nature. En effet, la stabilité peut être assurée localement et seulement pour des variations lentes des paramètres. Il n’y a pas de garantie de performance globale. Celle-ci doit être vérifiée par des études de simulation approfondies, ce qui est la contrepartie des avantages de l’utilisation des méthodes de synthèse linéaires. Par contre l’approche quasi-LPV, décrite plus loin, offre des garanties de performance et de stabilité. Nous avons présenté le séquencement de gain comme étant une technique qui permet de résoudre les problèmes non linéaires par décomposition en un nombre fini de sous problèmes linéaires. Mais, la synthèse par séquencement de gain est aussi une technique attractive qui permet de concevoir des contrôleurs pour des systèmes soumis à des variations paramétriques. Le principe de base consiste à choisir les paramètres du contrôleur en ligne comme des fonctions des paramètres du système. Lorsque les paramètres sont incertains et disponibles en temps réel pour le contrôleur, nous pouvons construire des contrôleurs en appliquant des techniques de synthèse par séquencement de gain ou des techniques de synthèse robuste. De plus, la stabilité et les performances des contrôleurs à gain séquencé peuvent être analysées en utilisant des critères de robustesse. Un lien intéressant entre les deux types de technique de synthèse est présenté par la suite.
Méthodes LFT du faible gain
Dans certains cas, on peut modéliser la dépendance paramétrique d’un système LPV comme une transformation linéaire fractionnaire (LFT). En effet, une représentation LFT est un cas particulier des systèmes LPV qui se présente comme un système LTI avec une boucle fermée contenant la dépendance paramétrique sous forme bloc-diagonale. Cette forme est exploitée en utilisant le théorème du faible gain afin de déduire des méthodes particulières de séquencement de gain. La procédure de synthèse consiste à regarder temporairement les paramètres comme des perturbations inconnues et à utiliser des méthodes d’optimisation LTI en accord avec l’analyse du faible gain afin de construire la partie LTI du contrôleur. Les paramètres sont incorporés par la suite dans cette partie LTI pour produire le contrôleur LPV. Cette idée a été développée dans [54] et [3]. L’utilisation des opérateurs de mise à l’échelle ( « scalings ») permet de réduire le conservatisme des conditions de synthèse. Il faut noter qu’avec une représentation de type LFT on peut construire un contrôleur en utilisant des conditions de type LMI moins complexes que dans le cas général LPV [3, 36]. Dans [36], les résultats de synthèse sont valides non seulement pour des paramètres externes mais aussi pour le cas plus général où les paramètres dépendent de l’état du système. Cependant cette approche a une limitation importante: le contrôleur à gain séquencé peut être conservatif dans le sens où il garantit les performances désirées non seulement pour toutes les trajectoires paramétriques admissibles mais aussi pour des dynamiques allant au-delà des dynamiques imposées par les trajectoires paramétriques admissibles.
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Table des matières
Introduction générale
Chapitre 1 Contexte et motivations
1.1 Introduction
1.1.1 Système LPV
1.1.2 Stabilité des systèmes LPV
1.1.3 Performance et analyse des systèmes LPV
1.1.4 Le problème de l’estimation d’état
1.1.5 Le problème de la commande par retour d’état
1.2 Inégalités linéaires matricielles
1.2.1 Introduction
1.2.2 LMI avec contrainte de rang
1.2.3 LMI dépendant des paramètres
1.3 Contexte du séquencement de gain: un état de l’art
1.3.1 Introduction
1.3.2 Approche conventionnelle du séquencement de gain
1.3.3 Approches récentes du séquencement de gain
1.4 Techniques LPV
1.5 Conclusion
Chapitre 2 Synthèse d’observateurs LPV à temps continu: approche par interpolation
2.1 Introduction
2.2 Approche par interpolation polynomiale
2.2.1 Formulation du problème
2.2.2 Observateur d’ordre plein
2.2.3 Exemple numérique
2.2.4 Conclusion
2.3 Approche par interpolation linéaire
2.3.1 Positionnement du problème
2.3.2 Méthode d’interpolation
2.3.3 Synthèse de l’observateur LPV
2.3.4 Conditions LMI sous contrainte de rang pour la synthèse de l’observateur
2.3.5 Conditions LMI pour la synthèse de l’observateur
2.3.6 Applications numériques
2.4 Conclusion
Chapitre 3 Synthèse d’observateurs LPV à temps continu: approche LPV
3.1 Introduction
3.2 Synthèse d’observateurs LPV
3.2.1 Positionnement du problème
3.2.2 Synthèse de l’observateur
3.2.3 Implémentation numérique
3.2.4 Exemple numérique
3.2.5 Conclusion
3.3 Lien entre l’approche par interpolation linéaire et l’approche LPV
3.4 Problème dual: la commande par retour d’état
3.4.1 Formulation du problème
3.4.2 Synthèse du contrôleur
3.4.3 Exemple numérique
3.5 Application à la commande par retour d’état basée observateur.
3.6 Conclusion
Chapitre 4 Synthèse d’observateurs LPV à temps discret
4.1 Introduction
4.2 Synthèse d’observateurs LPV pour des systèmes affines
4.2.1 Formulation du problème
4.2.2 Première solution
4.2.3 Deuxième solution
4.3 Application à l’estimation d’état des systèmes à commutation
4.4 Exemples numériques
4.5 Conclusion
Conclusion générale
Annexes
Annexe A Algèbre linéaire
A.1 Théorie des matrices
A.l.1 Complément de Schur
A.l.2 Élimination des matrices
A.2 Conditions de rang pour la résolution d’un système d’équations
Annexe B Théorie des systèmes
B.1 Stabilité des systèmes dynamiques
B.l.1 Stabilité au sens de Lyapunov
B.l.2 Méthode directe de Lyapunov
Annexe C Analyse convexe
C.1 Rappels sur la convexité
Références bibliographiques
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