Estimation de l’évaporation par mesures de conductivité
Objectif
L’objectif de cette expérimentation est de mesurer la perte d’eau par évaporation directe (EP), qui se traduit par une diminution de la masse des gouttes, séparément de la composante de dérive (D), et ce à partir de la mesure de l’évolution de la conductivité électrique (CE) de l’eau dans des échantillons récoltés dans des collecteurs placés au sol. En effet, la concentration d’une eau naturelle en matières minérales, et par conséquent sa conductivité électrique, varie sous l’effet de l’évaporation. Une comparaison de la conductivité de l’eau mesurée à la sortie de la buse et aux différents points de collecte au niveau du sol après distribution par aspersion, renseignera sur la proportion de l’eau perdue du fait de l’évaporation, au cours du trajet de du jet dans l’air.
La conductivité électrique de l’eau : théorie et mesure
La conductivité est l’aptitude d’une solution à faire passer un courant électrique entre deux électrodes plongées dans un liquide. Le courant est transporté par les ions, c’est à dire que la conductivité augmente avec le nombre et la mobilité des ions présents en solution. Une solution contenant très peu d’ions ne favorise pas le transport du courant, elle est dite peu conductrice. L’inverse de la conductivité est la résistivité.
Typiquement, un conductimètre applique un courant alternatif I à une fréquence optimale aux bornes de deux électrodes actives, puis il mesure le potentiel V qui en résulte. Le courant et le potentiel vont tous deux être utilisés pour déterminer la conductance (I/V). Les électrodes sont caractérisées par une constante de cellule , exprimée en cm-1.
Influence de la température sur la mesure de la conductivité
Toutes choses égales par ailleurs, l’exactitude d’une mesure de conductivité peut être influencée par plusieurs paramètres notamment la température. Ces deux grandeurs varient dans le même sens et sont proportionnelles. Par exemple, pour une solution de KCl 0,01D , la conductivité est de 1273 µS/cm à 20°C et elle augmente à 1409 µS/cm à 25°C. (Radiometer Analytical SAS, 2004-05) Le conductimètre que nous avons utilisé mesure à la fois la conductivité et la température de l’échantillon. Une valeur de conductivité doit donc être associée à une température de référence, ce qui permet, après correction, de comparer des résultats obtenus à différentes températures. La température de référence est généralement soit 20°C soit 25°C.
Toute mesure de conductivité nécessite la connaissance de la température ; on utilisera une sonde de température séparée ou une cellule de conductivité avec une sonde de température intégrée. Suivant le type de solution et sa concentration, il existe différentes options pour effectuer une correction de température :
• Correction linéaire
• Correction non linéaire
• Compensation manuelle.
Correction linéaire de la température
Pour les solutions de conductivité moyenne ou forte (jusqu’à quelques siemens), il est possible de faire une correction de température fondée sur une équation linéaire qui introduit le coefficient de température (θ). Ce coefficient est généralement exprimé comme une variation de la conductivité en % par °C. On utilise la correction de température linéaire par exemple pour les solutions salines, les acides et les solutions de percolation.
Résultats des différents essais
1ère Campagne de Mesures au champ (été 2003)
Pour cette première expérimentation on a utilisé certains des collecteurs du maillage utilisé dans la mesure de la distribution pluviométrique, pour échantillonner une partie représentative de la surface mouillée (cf. Figure B-23). On a travaillé sur un asperseur isolé, ceci ne correspond pas aux conditions réelles de fonctionnement des asperseurs et tendra donc à surestimer les évaporations par rapport à ce qu’on peut observer au champ lorsqu’il y a recouvrement de plusieurs asperseurs. Cette mesure permet d’une part, de donner une limite supérieure à la perte par évaporation directe, et d’autre part, de mettre en évidence la sensibilité des gouttes à l’évaporation en fonction de la durée de leur vol et de leur granulométrie.
Conditions de mesure
Cette 1ère campagne de mesure s’est déroulée pendant la période estivale (canicule 2003) sur une parcelle expérimentale, située sur une zone ouverte (sans obstacles) du domaine du Merle (plaine de La Crau). On a essayé de travailler sous des conditions climatiques diverses: matinée, après midi, début de soirée et pleine nuit et homogène à l’échelle d’un essai. Le tableau ci-dessous précise les conditions climatiques respectives de chacun des essais. Les variables climatiques sont données en grandeurs moyennes pour la durée de l’essai dans le tableau ci-dessous (Tableau B-1). Les mesures ont été relevées à partir de l’eau collectée sur un maillage carré de points de 2mx2m. En chaque point on a disposé un collecteur (renvoyer au paragraphe de description). La parcelle est enherbée, il n’y a pas d’obstacle à l’écoulement du vent. L’asperseur est placé au centre du maillage carré de quatre cents collecteurs. Les mesures de CE sont faites à partir des échantillons recueillis dans les collecteurs se trouvant sur les 4 lignes centrées sur l’asperseur soit 40 collecteurs aux maximum. Ces 40 mesures représentent différentes situations par rapport à la direction du vent (au vent, sous le vent, perpendiculairement au vent).
Les mesures ont été relevées à partir de l’eau collectée sur un maillage carré de points de 2mx2m. En chaque point on a disposé un collecteur (renvoyer au paragraphe de description). La parcelle est enherbée, il n’y a pas d’obstacle à l’écoulement du vent. L’asperseur est placé au centre du maillage carré de quatre cents collecteurs. Les mesures de CE sont faites à partir des échantillons recueillis dans les collecteurs se trouvant sur les 4 lignes centrées sur l’asperseur soit 40 collecteurs aux maximum. Ces 40 mesures représentent différentes situations par rapport à la direction du vent (au vent, sous le vent, perpendiculairement au vent). Nous avons travaillé avec deux pressions de fonctionnement à l’asperseur 2.5 et 3.5bar, nous verrons plus tard que les résultats obtenus sur les mesures de 2003 étant assez proches, la deuxième série de mesures a été conduite à la seule pression de 3.5bar.
Résultats
L’eau utilisée est une eau brute de bonne qualité approchant celle de l’eau potable, sa conductivité initiale est proche de 400 µSm/cm ±10. Le coefficient de température θ correspondant varie de 2.13% à 2.28%. Après avoir appliqué le calibrage nécessaire (i.e. corrigé les valeurs), on obtient la droite d’ajustement de l’EP en fonction de la CE suivante : EP% = 0.6 CE% Cette valeur doit ensuite être corrigée de l’erreur due à la perte d’eau sur les parois du collecteur ; cette source d’erreur a été évaluée grâce à des mesures effectuées par ailleurs (cf. I.3.2.d). Les portées varient lorsque l’on est placé au vent ou sous le vent de l’asperseur, et conformément à ce que nous dit la modélisation balistique et thermodynamique, la perte de masse d’une goutte est directement liée à la durée de son exposition. Or les gouttes les plus grosses sont celles qui sont projetées le plus loin et qui sont donc soumises plus longuement à l’évaporation. On obtient une perte locale d’eau qui prend l’allure de la distribution du nuage de point ci-dessous.
2ème et 3ème campagne de mesures (étés 2004 et 2005)
Cette deuxième campagne était menée sous des conditions réelles, néanmoins le milieu est un peu mieux contrôlé que lors de la campagne de mesure précédente. Nous sommes placés entre un bâtiment et une haie (cf. Figure B-9), donc pratiquement protégé contre le vent, ce qui nous a permis de réduire considérablement la complexité des manipulations. En absence de vent, on suppose que la portée est uniforme sur toute la zone irriguée, ainsi on se contente de faire la mesure de CE sur un rayon unique, ou sur quelques points caractéristiques d’une maille d’asperseurs.
Mesure avec un seul asperseur
Cette mesure a été conduite dans la même optique que celle réalisée en été 2003 (cf.Chapitre B :I.3.1 : 1ère Campagne de Mesures au champ (été 2003)) mais en travaillant sur un rayon unique avec des collecteurs à faible écartement. Ces mesures ont été reconduites en 2004 et en 2005 afin d’accroître le nombre d’échantillons pour pouvoir appliquer une approche statistique sur les données récoltées. Deux expérimentations ont été conduites, d’une part avec un jet tournant sans entrave, d’autre part avec un jet dont on a bloqué le batteur donc la rotation, pour s’affranchir au maximum des pertes sur les parois du collecteur.
Description
On dispose d’une ligne de paires de pluviomètres disposés tous les 50 cm, placée le long de la portée. Ces pluviomètres servent de collecteurs d’eau en vue d’y mesurer la conductivité électrique. Etant donné que les volumes collectés peuvent être faibles, nous avons intercalé dans les collecteurs un pot cylindrique de volume ½ litre. Ceci permet d’éviter les évaporations parasites en réduisant la surface libre de contact avec l’air.
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Table des matières
INTRODUCTION
CHAPITRE A : PROBLEMATIQUE ET ETAT DES CONNAISSANCES
I. INTRODUCTION
I.1 Contexte général
I.2 Objectif
II. DESCRIPTION DU JET D’ASPERSEUR
III. ETAT DE L’ART
III.1 Etudes expérimentales antérieures
III.2 Approches de modélisations utilisées
III.3 Contraintes et limites des études
CHAPITRE B : ETUDE EXPERIMENTALE
I. ESTIMATION DE L’EVAPORATION PAR MESURES DE CONDUCTIVITE
I.1 Objectif
I.2 La conductivité électrique de l’eau : théorie et mesure
I.2.1 Influence de la température sur la mesure de la conductivité
I.2.2 Calibrage de la mesure de l’évaporation directe
I.3 Résultats des différents essais
I.3.1 1 Campagne de Mesures au champ (été 2003)
I.3.2 2 et 3 campagne de mesures (étés 2004 et 2005)
I.3.3 Incertitude de mesure
I.4 Approche statistique global de l’évaporation directe (EP cumulée)
I.4.1 Modèle d’ajustement global pour tous les essais
I.4.2 «Restriction» du modèle d’ajustement global
I.5 Approche statistique détaillée des pertes par EP directe
I.5.1 Qu’est ce qui explique le plus l’évaporation directe ?
I.5.2 Faut-il garder V et I comme variables explicatives?
I.5.3 Tentative d’amélioration du modèle linéaire
I.6 Conclusion sur la mesure de l’évaporation directe
II. MESURE DE LA PERTE GLOBALE
II.1 Conditions & description des mesures
II.2 Procédure
II.3 Résultats & discussions
II.3.1 Pesée de la masse d’eau initiale
II.3.2 Evaluation de l’évaporation dans les pluviomètres témoins
II.3.3 Reconstitution de volume
II.3.4 Résultats et interprétations
II.4 Conclusion
III. LA GRANULOMETRIE DU JET
III.1 Utilisation du spectropluviomètre bi faisceau infrarouge (DBS)
III.1.1 Description de l’appareil
III.1.2 Détermination du diamètre
III.1.3 Détermination de la vitesse de chute
III.1.4 Correction de la forme
III.2 Etalonnage de l’appareil
III.2.1 Étalonnage de base avec des billes d’acier calibrées
III.2.2 Étalonnage avec des gouttes de masses contrôlées : Validation de la correction de l’ellipticité
III.2.3 Autres sources d’erreurs
III.3 Caractérisation de la distribution granulométrique du jet
III.3.1 Indicateurs de tendance centrale
III.3.2 Les indicateurs de dispersion
III.3.3 Fonctions de distribution granulométrique
III.4 Interprétation des résultats
III.4.1 Variation de la granulométrie avec la portée
III.4.2 L’importance volumique des grosses gouttes
III.4.3 Discontinuité de la granulométrie en bout de jet
III.5 Conclusion
CHAPITRE C : MODELISATION DES PHENOMENES
I. L’ASPERSEUR ET SA MODELISATION
I.1 Géométrie de l’asperseur et paramètres du calcul
I.1.1 Caractéristiques techniques de l’asperseur : RBE Série 46HLUS
I.1.2 Maillage de la géométrie
I.1.3 Paramètres du calcul
I.2 Résultats du calcul
I.2.1 Effet de la pression sur l’écoulement
I.2.2 Effet des ailettes sur l’écoulement
I.2.3 Résultats importants pour l’aspersion
I.3 Conclusion sur la modélisation de l’asperseur
II. THEORIE GENERALE DES JETS ET CHOIX DES APPROCHES DE MODELISATIONS
II.1 Rupture des jets et formation des gouttes
II.1.1 Instabilité à l’interface : désagrégation du jet liquide
II.1.2 Atomisation secondaire des gouttes
II.2 Introduction aux modèles multiphasiques
II.2.1 Approche d’Euler
II.2.2 Approche multiphasique d’Euler-Lagrange
II.2.3 Choix du modèle multiphasique adéquat
II.3 Présentation du problème
II.3.1 Approche proposée
II.3.2 Hypothèses
III. TENTATIVE DE MODELISATION NUMERIQUE DE LA PARTIE COMPACTE DU JET
III.1 Paramétrage du modèle VOF dans Fluent
III.2 Résultats des simulations
III.3 Conclusion sur la tentative de modélisation « VOF »
IV. MODELISATION DU JET DISPERSE
IV.1 Principe du modèle DPM
IV.1.1 Equations de la phase continue
IV.1.2 Equations de la phase liquide dispersée
IV.1.3 Couplage entre les deux phases
IV.2 Simulations dans le nuage de gouttes
IV.2.1 Paramètres de calcul utilisés
IV.2.2 Résultats – Analyse
IV.3 Conclusion sur la modélisation « DPM »
CONCLUSION GENERALE