Chaîne cinématique fermée
Dans le cas d’une chaîne cinématique fermée, l’un des membres, différent de la base, possède un degré de connexion supérieur ou égal à trois [5]. La figure 1.3 illustre les deux types des chaînes, l’une sérielle et l’autre parallèle. Dans le cas de la figure 1.3 gauche, les corps C1 , C2 , C3 et C4 forment une chaîne cinématique fermée. Parmi les manipulateurs à chaîne cinématique fermée, on peut citer les manipulateurs parallèles et les robots à câble. Les avantages des manipulateurs à chaîne cinématique fermée résident dans la rigidité et la faculté de pouvoir transporter des charges lourdes. En terme d’inconvénients, on note essentiellement un espace de travail restreint et un modèle de commande plus complexe.
Les robots parallèles offrent la possibilité de concevoir de multiples architectures dotées chacune d’avantages mais aussi d’inconvénients. Certains robots parallèles sont particulièrement adaptés pour des tâches d’usinage ou de simulation de mouvement. C’est leur propriété de forte rigidité qui les prédestine de la sorte. La figure 1.4 illustre ce type de robot. D’autres types de robots offrent une large gamme de précision, tel que le 6-ddl fabriqué par la société SmarAct, et ce avec une répétabilité mesurée à 200 nm.
La méthode Géométrique
Les limites de la méthode analytique découlent de la complexité à résoudre la matrice jacobienne parallèle lorsque l’on étudie des mécanismes spatiaux à 6 degrés de liberté. Pour palier à ce problème, Merlet utilise la géométrie de Grassmann qui repose sur l’utilisation des vecteurs de Plücker. Dans [40], Merlet propose une nouvelle méthode basée sur l’emploi d’une ligne géométrique afin de détecter les singularités. Dans [41], Merlet fournit un algorithme géométrique permettant de déterminer l’espace de travail pour différentes plates-formes parallèles de type planaire et dans [42], il détaille un formalisme d’approche numérique utilisé pour la détection des singularités.
Branches de singularités
Les branches de singularités sont les composantes connexes de l’ensemble des configurations singulières. Dans le cas d’un robot non-redondant, elles sont définies par l’équation det(J ) = 0. Les singularités étant indépendantes de la première articulation [33], on peut se contenter de les représenter dans l’espace articulaire privé de son premier axe.
Pour le robot plan à deux degrés de liberté comme illustré dans la figure 2.1, dont le déterminant de la matrice jacobienne est égal à L1.L 2.S 2 ou S2 = sin(θ 2 ), les branches de singularités en l’absence de butées sont définies par les droites θ 2 = 0 et θ 2 = ±π comme illustré dans la figure 2.6. L’espace de travailcorrespondant est présenté à la figure 2.7.
Manipulateurs de morphologie cuspidale
Pour changer de posture, un manipulateur non cuspidal doit franchir une singularité. Ce résultat a été démontré théoriquement par [43] en utilisant la notion d’aspects. Il existe cependant d’autres types de manipulateurs appelés manipulateurs cuspidaux qui peuvent changer de posture sans passer par une singularité [27], [45]. Ceci veut dire que le changement de posture peut s’effectuer au sein d’un même aspect [46]. Un manipulateur cuspidal doit avoir des singularités évitables [4].
Un manipulateur non cuspidal qui suit une trajectoire continue (lors de la réalisation d’une tâche de soudage à l’arc, par exemple) doit quitter la trajectoire pour changer de posture en allant sur la frontière de son espace de travail. Ce qui n’est pas forcément le cas pour un manipulateur cuspidal si toutes les postures le long de la trajectoire appartiennent à un même aspect. La figure 2.10 représente un exemple d’un manipulateur 3R cuspidal.
Principes d’amélioration de la précision
La description granulaire de l’espace de travail, a mis en évidence l’intérêt de travailler dans une zone proche du point central de l’espace de travail. Généralement ces zones sont évitées par les roboticiens car elles sont proches des singularités. L’observation des performances en répétabilité dans cette zone centrale a montré qu’il était possible de corriger une erreur de position de manière très fine dans une direction définie. Cette observation s’appuie sur le fait que la répétabilité et la résolution spatiale présentent d’excellentes performances dans la direction perpendiculaire au rayon.
L’étape suivante consiste à obtenir le même niveau de performance dans la direction du rayon. La figure 3.1 illustre la démarche à effectuer. La résolution spatiale dans la direction perpendiculaire au rayon est très réduite. Cela découle essentiellement du fait que le bras de levier entre l’axe 1 et l’extrémité terminale du robot est minime. Afin d’acquérir le même résultat que celui obtenu dans la direction du rayon, il suffit de positionner l’axe 2 au voisinage du point terminal.
Cette action offre la possibilité de régler précisément et de manière découplée la position du robot suivant deux axes perpendiculaires. En contre partie, deux critères contraignants doivent être pris en considération :
1. La première contrainte concerne le réglage fin qui ne sera obtenu qu’au voisinage du point qui sera dénommé « point d’intérêt ». En s’éloignant de ce point, les déplacements deviennent couplés. La surface de travail intéressante n’est certes pas très importante mais suffit largement pour certaines applications.
2. La seconde contrainte découle de la réduction de taille du deuxième bras.
Dans ce cas, l’espace de travail deviendrait extrêmement faible, si la chaîne cinématique venait à être fermée directement. Pour pouvoir saisir les objets dans un espace de travail plus large, il est indispensable de rajouter un troisième axe. Le robot devient redondant et peut alors se déplacer dans une enveloppe de travail beaucoup plus importante.
L’ajout de ce troisième axe influe considérablement sur la résolution spatiale au voisinage du point d’intérêt. Cette précision pourra être obtenue en déplaçant les axes 1 et 2 par incrémentations avec un pas de faible amplitude. Lorsque le robot devient redondant, l’erreur finale de positionnement est surtout fonction de la répétabilité. Or la redondance ajoute un axe supplémentaire et dégrade donc la répétabilité en raison de l’ajout du troisième axe.
Pour résoudre ce problème, il faut proposer une démarche en deux étapes :
1. Dans un premier temps, un positionnement grossier est mis en œuvre. Dans cette démarche, tous les bras du robot sont actionnés simultanément afin d’approcher l’extrémité du robot au plus près du point d’intérêt.
2. Dans un second temps, l’axe 3 du robot est mécaniquement bloqué. Seuls les axes 1 et 2 sont sollicités afin de procéder au positionnement final. La notion de blocage mécanique de l’articulation 3 permet effectivement d’atteindre l’objectif visé. Ce blocage peut être obtenu par une action de freinage mécanique.
Structures innovantes à haute précision
Généralisation de l’invention
Les principes proposés précédemment se généralisent sans difficulté au cas tridimensionnel [2]. Pour ce faire un point particulier de l’espace de travail dit »point d’intérêt » est défini. Dans la zone proche de ce point, la résolution spatiale doit être fine et découplée, ce qui exige d’implanter trois articulations rotoïdes dans la chaîne cinématique. En outre, les dimensions des bras de levier entre le point d’intérêt et les axes des articulations sont faibles. On notera que les axes des articulations rotoïdes appartiennent à trois plans orthogonaux d’intersection. L’ensemble de ces principes est représenté par l’illustration de la figure 3.2. Lors de la première phase de déplacement qui doit aboutir à un positionnement grossier, tous les axes peuvent être sollicités. Dans la seconde phase qui privilégie un positionnement fin, seuls les axes dits secondaires et vérifiant les propriétés décrites précédemment peuvent être activés. Les autres axes sont alors bloqués mécaniquement.
Quelques exemples plans
Dans le plan, outre l’exemple développé précédemment, la figure 3.3 illustre le fait que les axes rotoïdes dit secondaires ne sont pas nécessairement les deux premiers axes, mais peuvent se trouver n’importe où dans la chaîne cinématique.
Ainsi dans ce cas particulier, le positionnement fin est acquis en actionnant les axes 1 et 3.
Pour répondre à certaines applications spécifiques qui nécessitent un espace de positionnement fin plus important, dénommé aussi « zone d’intérêt », des structures redondantes telles que celle proposée dans le cadre de la figure 3.4 peuvent être imaginées. Ce type de structures permet d’obtenir un réglage fin sur undisque qui possède un rayon égal à la somme des longueurs des bras 1 et 2.
Dimensionnement et construction du prototype
Introduction
Le plateau est constitué d’un carré d’aluminium d’épaisseur 10 mm mesurant 300 mm de côté. Ce choix a été finalisé à la suite d’une analyse marketing menée dans le domaine des robots manipulateurs. La surface délimitée par le plateau est adaptée à des applications du type « Pick and Place », qui permettent de saisir par exemple des composants électroniques disposés sur une palette et de les placer à l’endroit désiré sur une carte électronique.
Les performances des codeurs incrémentaux ainsi que le dimensionnement des bras doivent être en adéquation avec la résolution spatiale désirée fixée à deux microns autour du point d’intérêt. Les longueurs des bras 2 et 3 sont calculées de telle sorte que l’outil puisse se déplacer sur l’intégralité des points définis sur la surface du plateau. Les rapports dimensionnels entre les bras 1, 2 et 3 doivent aboutir à l’obtention d’un gain significatif sur la valeur de la répétabilité. C’est au regard de cette volonté d’atteindre ce résultat que la longueur du bras 1 a été calculée à 30 mm, les bras 2 et 3 sont mesurés à 120 mm.
Un déplacement de 1µm à l’extrémité d’un bras de levier mesurant 20 mm nécessite d’obtenir une résolution angulaire proche de 5.10−5 rad au niveau des codeurs incrémentaux fixés sur les axes 1 et 2. En tenant compte du rapport de réduction, un rapide calcul nous impose une production de 125600 impulsions par tours.
Le cahier des charges relatif aux contraintes à lever est maintenant finalisé suite aux calculs mis en œuvre dans ce processus de réflexion . Il devient nécessaire à présent de trouver sur le marché de l’instrumentation les différents organes électriques et mécaniques qui permettent lors de leur intégration sur la platine d’expérimentation d’atteindre les performances fixées dès le départ.
Nous allons à présent détailler chaque élément intervenant dans la mise en œuvre de la table micrométrique, à savoir : le bus CAN, le module EPOS2, le codeur incrémental, le servo-moteur, le moteur FHA, le moteur ECMAX30, le moteur pas à pas ST5918, le codeur émetteur d’impulsions, le module SMCI47-S,le capteur de proximité.
Le bus CAN
Le CAN (Controller Area Network, réseau local à contrôleur) est un protocole de communication série développé à la fin des années 1980 par l’entreprise allemande Robert Bosch. L’objectif était de fournir à l’industrie automobile un bus
peu coûteux pour l’électronique embarquée des véhicules, comme alternative aux encombrants et complexes câbles des modèles de l’époque. On pouvait compter en 2005 par véhicule jusqu’à cent contrôleurs de gestion séparés, deux mille mètres de câbles pour un poids de cent kilogrammes. Il devenait nécessaire et urgent de se conformer aux lois de réduction de la pollution de la consommation de plus en plus drastiques mais aussi de satisfaire les exigences des clients en matière de confort et de sécurité. C’est dans ce but que de nombreux systèmes électroniques ont été développés tels que : l’anti-patinage, le contrôle électronique du moteur, de l’air climatisé, la fermeture centralisée des portes, etc. Qui plus est, le nombre sans cesse croissant de connections et câbles pour mettre en œuvre ces matériels posait de sérieux problèmes de fiabilité et entraînait de fréquentes réparations.
Afin de palier à ces inconvénients, l’entreprise Bosch a défini le protocole CAN tout en autorisant de nombreux autres fabricants à développer des composants compatibles CAN qui permettent aux capteurs et actionneurs de communiquer entres eux sur deux fils à une vitesse pouvant aller jusqu’à 1 Mbits/s avec un très faible taux d’erreur. Aujourd’hui, l’efficacité et la robustesse de ce protocole l’ont amené à être utilisé dans de nombreuses autres applications industrielles dans des domaines aussi variés que l’agriculture, la marine, le matériel médical, les machines textiles. Il remplace avantageusement la boucle de courant analogique20 mA.
Le module EPOS2 (24/5)
Le projet de la table micrométrique nécessite l’utilisation de quatre modules EPOS2 dans le contexte de la commande des moteurs de type brushless. Ce module s’articule autour d’un contrôleur numérique de position adapté à la commande de moteurs continus et brushless munis d’encodeurs incrémentaux. Les performances de ces modules compacts évoluent dans une gamme allant de quelques watts, jusqu’à 700 W. Une grande variété de modes opératoires permet de mettre en œuvre toutes sortes de commandes de systèmes automatiques qui utilisent une régulation de vitesse, de courant ou un asservissement de position. Le module EPOS peut également être piloté par des données numériques de position.
Dans ce cas, un codeur incrémental est utilisé afin de produire les signaux digitaux à destination du contrôleur tout comme pourrait le faire un générateur d’impulsions.
Les codeurs rotatifs
Le contrôle du déplacement et de la position d’un mobile est un problème couramment rencontré sur un grand nombre de systèmes automatisés. Le codeur rotatif est un capteur de position angulaire. Lié mécaniquement à un arbre de transmission, la rotation de son axe fait tourner un disque qui lui est solidaire. Ce disque comporte une succession de parties opaques et transparentes. Une source de lumière émise par des Diodes Electro-Lumineuses, (DEL) traverse les fentes de ce disque et crée sur les photodiodes réceptrices un signal analogique. Une interface électronique inclue dans le codeur amplifie ce signal puis le convertit en un signal binaire qui est alors transmis à un système de traitement.
Principe de fonctionnement du codeur incrémental
Les codeurs incrémentaux sont destinés à des applications de positionnement et de contrôle de déplacement d’un mobile par comptage et décomptage des impulsions qu’ils délivrent. Le disque d’un codeur incrémental tel que celui illustré à la figure 3.10 comporte deux types de voie en quadrature dénommés A et B. La piste extérieure du codeur est divisée en « n » intervalles égaux, alternativement opaques et transparents. La quantité «n » est dénommée résolution ou nombre de périodes. Elle constitue le nombre d’impulsions qui seront délivrées par le codeur pour un tour complet de son disque. Elle représente une portion angulaire d’un tour équivalent à 360◦
|
Table des matières
I.État de l’art
1 État de l’art : Robots manipulateurs et précision
1.1 Introduction
1.2 Terminologie et définitions générales
1.2.1 Mécanismes de type manipulateur
1.2.2 Chaîne cinématique simple
1.2.3 Chaîne cinématique fermée
1.2.4 Espace articulaire et espace opérationnel
1.2.5 Les modèles géométriques direct et inverse, la matrice jacobienne
1.2.6 Espace de travail
1.2.7 La Redondance cinématique
1.3 Caractérisation des performances des robots manipulateurs en terme de précision
1.3.1 Critères de performances en terme de précision
1.3.2 Facteurs d’influence des performances en terme de précision
1.4 Commande des robots à l’échelle micrométrique
1.4.1 Le paradigme de l’espace granuleux
1.4.2 Structure granulaire en deux dimensions
1.4.3 Calcul de l’erreur maximale
1.5 Conclusions
2 État de l’art : Robots manipulateurs et singularités
2.1 Introduction
2.2 Les singularités
2.2.1 Singularités des manipulateurs sériels
2.2.2 Singularités des manipulateurs parallèles
2.3 Branches de singularités
2.4 Propriétés des manipulateurs
2.4.1 Le concept d’aspects
2.4.2 Notion de parcourabilité
2.4.3 Manipulateurs de morphologie cuspidale
2.5 Singularités liées aux manipulateurs redondants
2.6 Conclusions
II La table micrométrique
3 Amélioration des performances en terme de précision
3.1 Introduction
3.2 Principes d’amélioration de la précision
3.3 Structures innovantes à haute précision
3.3.1 Généralisation de l’invention
3.3.2 Quelques exemples plans
3.4 Table motorisée à commande micrométrique
3.5 Présentation et fonctionnement de la table micrométrique
3.5.1 Vue d’ensemble de la structure de la plate-forme
3.6 Dimensionnement et construction du prototype
3.6.1 Le bus CAN
3.6.2 Le module EPOS2 (24/5)
3.6.3 Les codeurs rotatifs
3.6.4 Le servomoteur
3.6.5 Le capteur de proximité
3.6.6 L’axe vertical et son moteur pas à pas
3.7 L’interface homme-machine
3.8 Modèle géométrique de la table micrométrique
3.8.1 Modèle géométrique direct
3.8.2 Modèle géométrique inverse
3.9 Conclusions
4 Caractérisation de la table micrométrique
4.1 Introduction
4.2 Estimation de la précision de la plate-forme en utilisant des comparateurs micrométriques
4.2.1 Acquisition des mesures
4.2.2 Caractérisation de la répétabilité en mode grossier
4.2.3 Caractérisation de la répétabilité en mode fin
4.2.4 Performances en résolution spatiale
4.3 Estimation de la précision de la plate-forme par métrologie optique
4.3.1 La caméra Basler
4.3.2 Réglage de la caméra pour estimer la position d’un objet
4.3.3 Processus d’estimation de la répétabilité en position
4.3.4 Caractérisation de la répétabilité en mode grossier
4.3.5 Caractérisation de la répétabilité en mode fin
4.3.6 Performances en terme de résolution spatiale
4.3.7 Discussion et conclusion
III Le problème cinématique au voisinage de singularités
5 Analyse des singularités de la plate-forme XY-Thêta
5.1 Introduction
5.2 Matrice jacobienne
5.2.1 Cas non redondant
5.2.2 Cas redondant
5.3 Lieux des singularités
5.3.1 Cas non redondant
5.3.2 Cas redondant
5.3.3 Discussion sur les contraintes de cinématiques induites par les singularités
5.4 Analyse de manipulabilité
5.4.1 Cas non redondant
5.4.2 Cas redondant
5.5 Conclusions
6 Gestion des singularités de la plate-forme micrométrique
6.1 Introduction
6.2 Influence des singularités sur les trajectoires
6.2.1 Trajectoires passant exactement par une singularité
6.2.2 Trajectoires passant à proximité d’une singularité
6.3 Stratégies de commande du robot
6.3.1 Exploitation de deux configurations d’intérêt
6.3.2 Méthodes et critères d’optimisation pour la commande d’un robot redondant
6.3.3 Implémentation d’une méthode d’optimisation
6.4 Conclusions