Essai d’identification mycologique et moléculaire des agents étiologiques de la chromoblastomycose dans l’environnement

La chromoblastomycose (CBM), aussi appelée chromomycose, est une maladie fongique d’implantation très répandue dans les régions tropicales et subtropicales où elle a été décrite pour la première fois au début du XXème siècle au Brésil, à Cuba et à Madagascar. L’agent infectieux pénètre par dans l’organisme le plus souvent après une piqure d’épines de plantes, ou lors d’une contamination d’une plaie existante au contact du sol (Queiroz-Telles et al., 2011). Elle affecte la peau et les tissus sous-cutanés et peut s’étendre à toute la partie atteinte, principalement les membres inférieurs, pour évoluer vers la chronicité en l’absence de traitement spécifique, et devenir très invalidante pour le malade. Les lésions de CBM peuvent également siéger et fortement défigurer le visage, mais les formes disséminées avec atteintes organiques sont rares voire exceptionnelles (Thomas et al., 2018).

La CBM touche essentiellement les agriculteurs ou toutes autres personnes travaillant au contact des plantes et sols comme les fabricants de charbon de bois et les forestiers. En raison de son caractère endémique dans les pays à ressources limitées où très peu de moyens sont mis en œuvre pour le diagnostic et la prise en charge des malades, l’Assemblée Mondiale de la Santé de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) a voté en juin 2017 l’inclusion de la CBM dans la liste des Maladies Tropicales Négligées (MTN). Les champignons responsables de la CBM présents dans l’environnement (matières organiques, sol, eau, plantes) (Marques et al., 2006) peuvent donc être une source de contamination humaine à Madagascar où la végétation est variée et près de 90% de la population vivent en milieu rural. Depuis 2013, le Centre d’Infectiologie Charles Mérieux (CICM) de l’Université d’Antananarivo, le service de dermatologie du Centre Hospitalier Universitaire de Joseph Raseta Befelatanana (CHUJRB), Antananarivo et l’Université de Grenoble-Alpes (UGA) conduisent une étude collaborative pour actualiser les données sur l’incidence et la répartition géographique des cas de la CBM à Madagascar et identifier les sources potentielles des agents causals dans l’environnement.

GENERALITES

Les agents pathogènes

Descriptions

Les agents pathogènes responsables de la CBM sont des champignons microscopiques (micromycètes) eucaryotes, hétérotrophes, saprophytes et parasites. Ils sont thallophytes, c’est-à-dire qu’ils se nourrissent à l’aide d’un appareil végétatif et reproductif appelé thalle qui peut être unicellulaire (levure) ou pluricellulaire (champignons filamenteux). Les champignons filamenteux possèdent un thalle constitué de filaments ou hyphes enchevêtrés les uns par rapport aux autres . Ils ont des spores qui peuvent être à l’intérieur (endospores) ou à l’extérieur (exospores = conidie) de la pycnide. Les conidies sont produites par un mécanisme appelé conidiogènese qui est assurée par les phialides ou les annélides. Les phialides sont fixés en dessous des conidiophores à l’aide de leur partie apicale appelée vésicule.

Les champignons responsables de CBM sont des phaeohyphomycètes (communément appelés dématiés) principalement représentés par Fonsecaea pedrosoi et Cladophialophora carrionii (Esterre et al., 1997). Ces champignons appartiennent au phylum des Ascomycètes majoritairement regroupés dans l’ordre des Chaetothyriales du règne fongique et dans la famille des Herpotrichiellaceae. Cette famille comprend les levures noires du genre Exophiala et les champignons filamenteux dématiés parmi lesquels on trouve les agents responsables de CBM: Fonsecaea spp., Phialophora verrucosa, Cladophialophora carrionii et Rhinocladiella aquaspersa (Rasamoelina et al., 2017).

Historique

Fonsecaea pedrosoi a principalement été isolé de plantes en décomposition et de sols (Gezuele et al., 1972). En 1911, Alexandrino Pedroso et Gomes (Pedroso, 1920) ont isolé cette espèce à partir des prélèvements biopsiques des 4 patients présentant un dermatite verruqueuse (Elgart, 1996). C’était l’année de la première observation de cas clinique dans la ville de Sao Paulo au Brésil. En 1914, Rudolph au Brésil a décrit également les cas cliniques de l’affection (Rudolph, 1914). En 1922, Brumpt a décrit ce champignon comme Hormodendrum pedrosoi. Le genre Fonsecaea a été établi en 1936 par Negroni (Negroni, 1936). Cladophialophora carrionii a initialement été trouvé dans la région aride d’Amérique du Sud, en Afrique et en Australie. En 1954, Trejos l’avait décrit sous le nom de Cladosporium carrionii (Barde and Singh, 2009). Les études taxonomiques récentes des espèces pathogènes ont changé la dénomination du genre en Cladophialophora (de Hoog et al., 1995). Rhinocladiella aquaspersa a été décrit par Borelli, Schell et al. en 1972 (Badali et al., 2010) sous le nom d’Arotheca aquaspersa (Borelli, 1972). Le genre Exophiala comprend 28 espèces. Il a été décrit par Kano en 1934 comme responsable du premier cas du CBM au Japon et l’a dénommé Hormiscium dermatitidis, actuellement connu sous le nom de Wangiella dermatitidis (Kano, 1937). L’espèce Phialophora verrucosa a été décrite en 1915 par Medlar à Boston (Medlar, 1915). Cette date marque la première observation de la maladie aux Etats-Unis d’Amérique. Il a été rapporté par certains auteurs comme agent de la CBM (El Mouhaddab et al., 2010) mais également à l’origine des kystes phaehyphomycotiques (Chabasse, 2011).

Taxonomie

Il est admis actuellement que le principe directeur pour étudier les relations taxonomiques entre ces différents champignons repose sur la phylogénie moléculaire de séquences suffisamment conservées de la grande sous unité de l’Acide Désoxyribonucléique ribosomique (ADNr) (Queiroz-Telles et al., 2017) (Figure 2). Les 5 genres de champignons responsables de CBM sont répartis en trois grappes (« cluster ») :

Cluster 1 : une grappe de Fonsecaea, regroupée dans le « clade du bantiana » (Sun et al., 2012) qui contient les agents prédominants de la CBM, Fonsecaea pedrosoi et F. monophora (Najafzadeh et al., 2010) . Les agents récemment découverts dans ce clade sont F. nubica et F. pugnacius (de Azevedo et al., 2015). Le genre Fonsecaea présente un développement optimal à 33 ° C, avec une thermo tolérance de croissance à 37 ° C. Une étude récente décrit deux nouvelles espèces isolées à partir des plantes épineuses : F. erecta et F. minima (Vicente et al., 2014).

Cluster 2 : l’espèce Cladophialophora carrionii (Schmoldt et al., 1975; Badali et al., 2008) est situé dans le « clade de Carrionii » avec l’espèce récemment décrite C. samoensis, provoquant la chromoblastomycose au Samoa (de Hoog et al., 2007). La croissance des genres Cladophialophora sp. est optimum à 25°C et peut être plus ou moins freinée par le Cyclohéximide qui est un antifongique (Chabasse et al., 2008).

Le clade de Carrionii comprend également Phialophora verrucosa (Queiroz-Telles et al., 2017), qui a une température de croissance optimale de 30 °C.

Cluster non assignés : Rhinocladiella aquaspersa, (González et al., 2013) est situé à une distance significative des deux clades et actuellement n’est pas attribué à un clade au sein des Herpotrichiellaceae.

Exophiala est le seul genre des Chaetotyriales qui produit une phase de levure avec une température de croissance entre 25 à 37°C (Chabasse et al., 2008). Les espèces Exophiala jeanselmei, E. dermatitidis et E. spinifera sont situés dans des clades séparés , et ils provoquent de la CBM occasionnellement, mais peuvent aussi provoquer d’autres infections (Queiroz-Telles et al., 2003).

Epidémiologie et distribution géographique

Dans le monde, la maladie est répandue dans les régions tropicales et subtropicales d’Amérique, d’Asie et d’Afrique, principalement entre les latitudes 30° Nord et 30° Sud (Krzyściak et al., 2014).

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Table des matières

I. INTRODUCTION
II. GENERALITES
II.1. Les agents pathogènes
II.1.1. Descriptions
II.1.2. Historique
II.1.3. Taxonomie
II.1.4. Epidémiologie et distribution géographique
II.1.4.1. Sources environnementales probables dans le monde
II.1.4.2. Sources environnementales potentielles à Madagascar
II.1.5. Mode de contamination
II.1.6. Caractéristiques mycologiques
II.2. La chromoblastomycose
II.2.1. Définition et Nomenclature
II.2.2. Manifestation clinique
II.2.3. Diagnostic Clinique
II.2.4. Traitement
II.2.5. Situation actuelle
III. MATERIELS ET METHODES
III.1. Contexte
III.2. Lieu de stage
III.3. Description des sites de collecte
III.4. Mode de prélèvement
III.5. Identification des échantillons
III.6. Caractéristiques et localisation des échantillons
III.7. Traitement des échantillons
III.8. Ensemencement et repiquage
III.9. Observation macroscopique et microscopique des échantillons
III.10. Extraction d’ADN
III.11. Quantification des ADN
III.12. PCR spécifique et universelle
III.12.1. La PCR ou Polymerase Chain Reaction
III.12.1.1. Principe
III.12.1.2. Composition du milieu réactionnel
III.12.1.3. Les étapes de la PCR
III.12.2. PCR des ADN ribosomaux
III.12.2.1. Structure des ADNr des eucaryotes
III.12.2.2. Sélection des amorces
III.12.2.3. Composition du Mix PCR
III.13. Electrophorèse sur gels d’agarose
III.14. Séquençage
III.14.1. Analyse des données sur Bioedit
III.14.2. Soumission des séquences sur les sites NCBI et ISHAM ITS
IV. RESULTATS
IV.1. Culture
IV.2. Observation macroscopique et microscopique
IV.3. Quantification des ADN
IV.4. PCR universelle
IV.5. PCR spécifique
IV.6. Analyse des séquences
IV.6.1. ADN amplifiés soumis au séquençage
IV.6.2. Soumission des séquences
IV.6.3. Analyse phylogénétique
V. DISCUSSION
CONCLUSION
VI. REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
ANNEXE 1 : TRAITEMENT DES ECHANTILLONS ENVIRONNEMENTAUX
ANNEXE 2 : CULTURE DES CHAMPIGNONS
ANNEXE 3 : EXTRACTION D’ADN DES CHAMPIGNONS
ANNEXE 4 : QUANTIFICATION D’ADN
ANNEXE 5 : PCR MYCOSES
ANNEXE 6 : ELECTROPHORESE
ANNEXE 7 : ECHANTILLONS DES PLANTES COLLECTEES

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