ESPACE LÉGAL ET MORAL DE L’ACTION POLICIÈRE DANS L’ÉTAT DE DROIT

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Toutes choses nÕŽtant pas Žgales par ailleursÉ

Un portrait croisŽ doit bien sÕŽtablir, mais dans le mouvement dÕune dŽmonstration qui ne sÕy rŽduit pas. La comparaison est ici con•ue comme une sŽrie dÕŽchos et dÕintersections. Il ne sÕagit pas dÕapprŽcier la situation respective des deux pays ˆ lÕaune dÕun patron prŽdŽfini ou dÕune multitude de variables, mais de privilŽgier les prises offertes par la spŽcificitŽ des expŽriences historiques nationales (Salle, 2009, 18).
SÕil est possible dÕouvrir un espace de comprŽhension des pratiques polici•res et des formes de problŽmatisation de la question minoritaire, il faut abandonner le projet de raisonner terme ˆ terme en neutralisant les variables contextuelles. Impossible donc de raisonner toutes choses Žgales par ailleurs. Pour notre part, la comparaison constituera une mise en perspective de cas diffŽrents au sein dÕun espace dÕintelligibilitŽ : comment comprendre lÕaction polici•re dans des territoires et aupr•s de populations ŽtiquetŽes comme Ç sensibles È ? Comment les acteurs policiers construisent-ils leur rapport ˆ la question minoritaire dans les deux contextes ŽtudiŽs ? Il sÕagit alors de comprendre comment des fonctionnaires de police agissant dans le cadre de lÕƒtat de droit et disposant dÕun mandat similaire construisent leur rapport ˆ lÕaltŽritŽ, et ce que celui-ci produit en pratique, dans des espaces urbains et aupr•s de populations considŽrŽes comme Ç problŽmatiques È. Dans ce qui suit, nous passerons en revue diffŽrents rŽfŽrents ˆ lÕaune desquels la comparaison peut •tre envisagŽe : national, institutionnel, probl•me public et pratiques des acteurs.
Le premier rŽflexe consiste ˆ dŽfinir les termes de la comparaison par les rŽfŽrents nationaux : la France dÕun c™tŽ, lÕAllemagne de lÕautre. Cette premi•re Žtape sÕav•re nŽcessaire mais non suffisante. En plus des traits gŽnŽraux mentionnŽs dans lÕintroduction de cette th•se qui tracent les contours dÕun espace moral commun ouvrant la voix dÕun Ç espace de comprŽhension È (Žconomie capitaliste, dŽmocratie reprŽsentative, ƒtat de droit ou encore illŽgitimitŽ de la race comme crit•re de lÕaction publique), le cadre national appara”t pertinent concernant lÕobjet policier. Tout dÕabord, la police de sŽcuritŽ publique, en tout cas pour les aspects qui nous prŽoccupent dans cette th•se, ne sÕinscrit pas dans un processus de transnationalisation ou dÕeuropŽanisation (RochŽ, 2004). Ensuite, lÕencadrement normatif du travail policier (Code pŽnal et Code de procŽdure pŽnale) est dŽfini au niveau national24. Enfin, en France comme en Allemagne, le statut de fonctionnaire des agents de police encadre leurs conditions de travail dÕune part, et dÕautre part, en fait les porteurs de certains attributs symboliques (leur lŽgitimitŽ Žmane de la souverainetŽ Žtatique) et matŽriels (ils sont armŽs et peuvent recourir sous certaines conditions ˆ un usage lŽgitime de la violence).
Le rŽfŽrent national prŽsente cependant des limites. Au-delˆ de lÕopposition entre tradition centralisatrice fran•aise et architecture fŽdŽrale allemande, le recours aux monographies implique aussi de prendre en compte les caractŽristiques locales des terrains dÕenqu•te. Ce caract•re infranational de notre objet implique de lever une premi•re illusion concernant la France selon laquelle la loi et les fonctionnaires verraient leur action se rŽaliser de mani•re uniforme sur lÕensemble du territoire national. Cette illusion tient ˆ la prŽgnance du discours abstrait sur lÕunitŽ rŽpublicaine, ˆ la mani•re dont sont dŽfinies et mises en Ïuvre les politiques publiques, mais aussi ˆ la surreprŽsentation des terrains dÕenqu•te parisiens dans la sociologie de la police. Ë notre connaissance, il nÕexiste pas dÕenqu•tes comparant systŽmatiquement lÕaction polici•re dans diffŽrentes localitŽs fran•aises. Les donnŽes issues de notre enqu•te de terrain fran•aise ne sont pas reprŽsentatives de lÕŽchelle nationale ; si elles disent quelque chose de lÕaction polici•re en France, celle-ci doit •tre associŽe aux spŽcificitŽs locales : proche banlieue de la capitale, mairie communiste et prŽsence sur le territoire de la commune de Ç citŽs sensibles È. Du c™tŽ allemand, les limites du raisonnement ˆ partir du rŽfŽrent national semblent plus Žvidentes, le fŽdŽralisme imputant aux LŠnder la compŽtence en mati•re de sŽcuritŽ publique. De plus, ˆ Berlin, les problŽmatiques de sŽcuritŽ publique prŽsentent des spŽcificitŽs par rapport aux autres rŽgions allemandes : sŽparation puis rŽunification gŽographique et administrative25, prŽgnance de la contestation dÕextr•me gauche comme probl•me de sŽcuritŽ publique, coalition Ç rouge-rouge È26 au SŽnat de Berlin ou encore contraintes budgŽtaires fortes. Garder ˆ lÕesprit la pertinence et les limites du rŽfŽrentiel national permettra dÕŽviter le double Žcueil de la Ç rŽgression vers la singularitŽ È et de la Ç gŽnŽralisation abusive È (Perrier, 2010, 72) : bien quÕinfluencŽ par des spŽcificitŽs
LÕexistence dÕune loi de police propre ˆ la ville-ƒtat de Berlin vient toutefois nuancer ce point.
Sur la rŽunification des polices berlinoises, voir les travaux de David Glaeser (Glaeser, 2000) et de Fabien Jobard (Jobard, 2003).
SPD-Die Linke locales, lÕaction polici•re sÕinscrit dans le cadre de lÕƒtat de droit et constitue lÕinstitution rŽgalienne par excellence.
Le deuxi•me rŽfŽrent envisageable est celui de lÕinstitution et/ou de lÕorganisation polici•re : il sÕagit de comparer Ç la police È dans les deux contextes. En France comme en Allemagne, le travail policier sÕinscrit dans le cadre dÕune institution chargŽe de mettre en Ïuvre les politiques publiques de sŽcuritŽ dŽcidŽes par le pouvoir exŽcutif, quÕil soit national ou rŽgional. La diffŽrence principale entre les deux contextes tient Žvidemment ˆ lÕancrage institutionnel rŽgional du c™tŽ berlinois, et ˆ la centralisation du c™tŽ parisien (voir infra). Par ailleurs, la police peut Žgalement •tre comprise comme une organisation hiŽrarchisŽe au sein de laquelle le travail est organisŽ selon des schŽmas qui apparaissent semblables dans les deux contextes : Žchelle territoriale la plus petite correspondant au commissariat de circonscription, dirigŽ par un commissaire supervisant des officiers, eux-m•mes en rapport direct avec des brigadiers qui encadrent les brigades de sŽcuritŽ publique. Cette description sÕinscrit donc dans la lignŽe du constat de Dominique Monjardet qui a montrŽ que si les appareils policiers nationaux prŽsentent de fortes spŽcificitŽs institutionnelles au sein des pays occidentaux, les relations de pouvoir entre les diffŽrents niveaux hiŽrarchiques dans les commissariats sont tr•s semblables (Monjardet, 1989). Enfin, au sein de lÕorganisation, les policiers partagent un mŽtier prŽsentant de nombreuses similitudes. Ë ce titre, les policiers des deux pays se consid•rent rŽciproquement comme des Ç coll•gues È. ƒvidemment, lÕapproche comparative ne doit pas se concentrer sur les seules similitudes, cÕest pourquoi lÕapproche totale englobant les policiers berlinois et parisiens sera dans un deuxi•me temps nuancŽe et les diffŽrences approfondies.
Le troisi•me rŽfŽrent est celui de la formulation des probl•mes publics de sŽcuritŽ, cÕest-ˆ-dire la mani•re par laquelle les questions relatives aux policing ont ŽtŽ construites comme des prŽoccupations sociŽtales sur lesquelles les acteurs publics et les institutions sont susceptibles dÕagir (Gusfield, 1984, 3)27. Dans lÕintroduction dÕun numŽro spŽcial de la revue DŽviance & SociŽtŽ, Fabien Jobard et Axel Groenemeyer sÕŽtonnent de la Ç part hŽgŽmonique È des Žtudes comparant des pays europŽens avec lÕAngleterre ou les ƒtats-Unis. En effet, lÕŽcart entre le droit anglo-saxon et le droit continental appara”t Ç abyssal È et certaines variables de premier plan (la lŽgislation concernant les armes ˆ feu par exemple) varient considŽrablement. DÕapr•s les auteurs, la France et lÕAllemagne prŽsenteraient une comparabilitŽ bien supŽrieure pour trois raisons : les traditions juridiques, lÕŽpaisseur de la Ç dŽlinquance ordinaire È, et les rŽponses institutionnelles. Tout dÕabord, le Code pŽnal allemand trouve ses origines dans le Code napolŽonien. Ensuite, on constate dans les deux pays une Ç augmentation depuis la fin des annŽes 1960 [É], des atteintes aux biens et des infractions liŽes ˆ la circulation routi•re, apparition dans les annŽes 1970 des infractions liŽes aux stupŽfiants, augmentation durant les annŽes 1980 des dŽlits de coups et blessures, vols avec violence, destruction-dŽgradation, inquiŽtudes dans les annŽes 1990 liŽes tant aux dŽlinquances juvŽniles ou ˆ la part des Ç jeunes È dans les dŽviances pŽnales, quÕau terrorisme, au crime organisŽ ou aux dŽlinquances ˆ caract•re sexuel È. Enfin, on observe par exemple dans les deux pays un Ç mouvement contradictoire de professionnalisation et de bureaucratisation des forces de police dans les annŽes 1970, avant la redŽcouverte des vertus de la police de proximitŽ È, la Ç fermeture des fronti•res ˆ lÕimmigration laborieuse en 1974 et 1975, pla•ant la justice pŽnale face ˆ lÕexistence dÕune nouvelle classe dÕinfractions de masse, celle liŽe ˆ lÕentrŽe et au sŽjour des Žtrangers È, un Ç dŽploiement dans les annŽes 1980 des politiques de prŽvention, lˆ aussi plus prononcŽ en Allemagne quÕen France È ainsi quÕune Ç rŽorganisation, face ˆ la dŽlinquance de masse, de la justice correctionnelle avec lÕintroduction du Ç temps rŽel È et les alternatives aux incarcŽrations È (Jobard et Groenemeyer, 2005, 235Ð236). Au-delˆ de cette contextualisation de moyen terme, le policing contemporain est prŽsentŽ dans les deux pays comme mis ˆ lÕŽpreuve par des territoires et des populations Ç difficiles È ou Ç sensibles È. Les territoires sont caractŽrisŽs par la pauvretŽ Žconomique, un environnement urbain dŽgradŽ et la concentration de populations issues de lÕimmigration. Les populations prŽsentŽes comme posant probl•me ˆ lÕordre public sont caractŽrisŽes par des dŽviances spŽcifiques, leur jeunesse et leur masculinitŽ, et bien souvent leur origine immigrŽe. La question de lÕorigine est un autre point commun dans la mani•re dont est formulŽe la question de la dŽviance urbaine. Ç Racialisation È en France ou Ç ethnicisation È en Allemagne, la question sociale tend dans les deux pays ˆ se reformuler en intŽgrant des catŽgories dÕorigine, dÕethnicitŽ ou encore dÕapparence. Un des objectifs de cette th•se est justement dÕexaminer, au prisme de lÕaction polici•re, comment lÕaction publique int•gre ces catŽgories dÕaction. Dans les discours publics et dans la bouche des acteurs, ces territoires et ces populations nŽcessiteraient une action polici•re spŽcifique caractŽrisŽe par une vigilance et une sŽvŽritŽ accrues. Nos deux terrains dÕenqu•tes peuvent donc •tre identifiŽs au sein dÕun rŽfŽrentiel comparable de probl•me public.
Enfin, les pratiques des acteurs, Žchelle dÕanalyse privilŽgiŽe de cette th•se, constituent le quatri•me rŽfŽrentiel possible pour construire la comparaison. Notre dŽmarche se distingue en cela dÕune comparaison des politiques publiques gŽnŽralement fondŽe sur lÕanalyse des rŽgimes institutionnels, des variables culturelles et Žconomiques (Perrier, 2010, 71). Il sÕagira pour notre part dÕanalyser la mani•re dont sÕexerce lÕaction polici•re dans les deux contextes : quelle hiŽrarchie des t‰ches ? Quelles t‰ches correspondent ˆ des Žpreuves pour les acteurs ? Quelles sont les variations dans les rŽpertoires dÕaction policiers ? LÕŽtude des pratiques renvoie ˆ la mŽthode ethnographique privilŽgiŽe dans cette th•se et sÕinscrit dans le prolongement des travaux de Micheal Lipsky sur la street-level bureaucracy (Lipsky, 1980). Les ethnographies comparŽes restent cependant rares et se heurtent ˆ plusieurs difficultŽs : les probl•mes relatifs ˆ la traduction, lÕinterprŽtation de lÕorigine des diffŽrences et des ressemblances observŽes ou encore la reprŽsentativitŽ et la gŽnŽralisation des rŽsultats (Vassy, 2003, 226). Nous proposons dans cette th•se de comparer les pratiques polici•res en rŽgion parisienne et ˆ Berlin en ce quÕelles donnent ˆ voir des nuances dans les rŽpertoires dÕaction policiers28 inscrites dans des contextes nationaux mais se dŽployant dans une Žchelle locale, en interaction avec les acteurs civils dans des territoires ŽtiquetŽs comme Ç sensibles È et faisant lÕobjet de la formulation dÕun probl•me public.

Ç Les Turcs sont ˆ lÕAllemagne ce que les AlgŽriens sont ˆ la France È : quand les acteurs comparent

La comparaison est Žgalement une opŽration indig•ne car elle est mobilisŽe par les acteurs ŽtudiŽs pour dŽfinir leur identitŽ et leur action professionnelles. Dans notre cas, les perceptions rŽciproques sont asymŽtriques : si la France est souvent ŽvoquŽe par les policiers berlinois, la rŽciproque ne sÕest pas vŽrifiŽe29. Dans le contexte berlinois, la police fran•aise tend ˆ •tre per•ue nŽgativement, en raison notamment de la mŽdiatisation en Allemagne des Žmeutes de lÕautomne 2005. Pour la police berlinoise, les Žmeutes fran•aises constituent en effet un des pivots de rŽflexion de son action dÕordre public en gŽnŽral et vis-ˆ-vis des minoritŽs en particulier. Pour la plupart des policiers de la Ç base È, la France fait office de repoussoir en raison de la frŽquence selon eux ŽlevŽe des gr•ves et des manifestations dÕune part, et de la problŽmatique des banlieues dÕautre part, ces Ç foyers de conflits sociaux o• les voitures bržlent toutes les nuits È. Il nÕest alors pas Žtonnant que lÕimage communŽment exprimŽe de la police fran•aise soit celle du conflit et de la rŽpression : comme le dit un gardien de la paix berlinois Ç en France, les policiers ont lÕair agressifs comme dans les films È (extrait du carnet de terrain, Antonkiez, 04/10/07).
Plus encore, beaucoup de policiers livrent des rŽflexions comparatives ˆ partir du cas fran•ais. Ainsi pour Bernd, gardien de la paix ˆ Berlin, Ç en France, les jeunes ont essayŽ de sÕintŽgrer, on leur a promis des choses mais ils nÕont pas eu dÕopportunitŽs donc je peux comprendre quÕils soient frustrŽs. Alors quÕen Allemagne, on ne leur a rien promis, du coup ils se dŽbrouillent dans leur communautŽ È (extrait du carnet de terrain, Spreeheim, 09/02/08). On remarquera que cet argument est proche de ceux dŽveloppŽs par des sociologues des migrations et des confits sociaux ŽvoquŽs dans la partie prŽcŽdente. Otto, un policier travaillant ˆ Spreeheim depuis 33 ans et qui a vŽcu en France dans son enfance, livre quant ˆ lui une analyse plus dŽtaillŽe des questions migratoires dans les deux pays. Il constate tout dÕabord que les jeunes Turcs sont de plus en plus provocants vis-ˆ-vis de la police et, sur la base de ses rencontres lors de interventions, il regrette leur mauvaise ma”trise de lÕallemand qui provoque chez lui un ras-le-bol È de cette population (cf. chapitre 6). Ce reproche est selon lui dÕautant plus fondŽ quÕil a lui-m•me appris le fran•ais ˆ lÕ‰ge de neuf ans malgrŽ une expŽrience personnelle de la Ç marginalisation ˆ lÕŽcole È. Ainsi, selon Otto, les Turcs sont ˆ lÕAllemagne ce que les AlgŽriens sont ˆ la France È. Il note toutefois des difficultŽs particuli•res aux jeunes issus de lÕimmigration en Allemagne car Ç quand on est Allemand dans les classes infŽrieures, on peut progresser socialement, mais pas quand on est issu de lÕimmigration È. NŽanmoins lÕabsence dÕŽmeutes en Allemagne sÕexplique selon lui par le fait que lÕ Ç Allemagne a rŽussi ˆ intŽgrer un peu les familles Žtrang•res È. Selon lui, la situation des jeunes issus de lÕimmigration en France est une bombe sociale È et la France Ç nous a montrŽ ce qui se passe quand on ne fait rien È. Il critique notamment lÕaide sociale : Ç Quand quelquÕun passe son temps ˆ la maison ˆ ne rien faire, il se dŽtruit È. Otto est particuli•rement impliquŽ dans des t‰ches de prŽvention È (cf. chapitre 4), notamment aupr•s des Žcoles du quartier o• il essaie de comprendre Ç pourquoi les gamins dŽconnent È. Il se rappelle avoir conduit un jeune dans une cellule pendant une demi-heure afin quÕil comprenne ce que signifie la prison. Pour lui, peu importe la mani•re, mais le plus important est dÕ Ç entrer en contact avec les jeunes È et de susciter du respect mutuel.
Dans les niveaux plus ŽlevŽs de la hiŽrarchie polici•re berlinoise, les Žmeutes de 2005 font lÕobjet dÕune prŽoccupation constante. Il sÕagit pour les officiers et commissaires rencontrŽs sur le terrain berlinois dÕŽviter des ŽvŽnements similaires dans la capitale allemande. Une des solutions mise en avant par la hiŽrarchie berlinoise rŽside dans la mise en Ïuvre de la Ç prŽvention È selon laquelle la police doit •tre un Ç partenaire de proximitŽ È avec le Ç citoyen È (cf. chapitre 4). Les entretiens ultŽrieurs avec des commissaires ou officiers, mais Žgalement avec des gardiens de la paix, confirment cette idŽe que la prŽsentation de soi de la police de Berlin se fait en partie par le biais de la Ç configuration problŽmatique È fran•aise des banlieues et son lien avec les questions migratoire ou minoritaire.
Les rŽfŽrences aux Žmeutes fran•aises et leur interprŽtation par les policiers berlinois dans des termes Ç multiculturalistes È sont particuli•rement prŽsentes dans les discours des policiers enr™lŽs dans les unitŽs ou les t‰ches polici•res explicitement impliquŽes dans lÕÇ ouverture interculturelle È. Ainsi, le chef de lÕUnitŽ IntŽgration et Migration, spŽcialisŽe dans la rŽpression de lÕimmigration illŽgale et la prŽvention aupr•s des communautŽs de migrants (cf. chapitre 8) consid•re quÕun des objectifs de son unitŽ depuis 2005 est de Ç faire attention ˆ tout ce qui pourrait devenir comme ˆ Paris et provoquer des Žmeutes È. Une des solutions quÕil dŽfend est de rŽduire la fonction de Ç contr™le È de la police au profit de son r™le de Ç partenaire È et du travail de mise en rŽseau avec dÕautres institutions comme lÕŽcole. Selon lui, Ç la police ne peut pas rŽsoudre des conflits de longue durŽe È. Ë la diffŽrence de la France, quÕil identifie comme une sociŽtŽ o• prŽdomine le conflit, la sociŽtŽ allemande serait basŽe sur le Ç consensus È (Konsensusgesellschaft). Comme nous le verrons dans le dernier chapitre de cette th•se, les policiers engagŽs dans le Ç transfert de compŽtences interculturelles È dŽfendent lÕidŽe selon laquelle lÕ Ç ouverture sur lÕinterculturalitŽ È (cÕest-ˆ-dire la Ç religion È, la Ç culture È et la Ç mentalitŽ È) permet ˆ la police de produire des formes de consensus. Cette transformation du r™le de la police contribue par ailleurs ˆ diffŽrencier lÕordre symbolique de la police dans les deux pays : la rencontre des logiques de Ç prŽvention È et dÕ Ç interculturalitŽ È dans une partie du travail policier ˆ Berlin est un des ŽlŽments qui permet de comprendre les diffŽrences dÕordonnancement symbolique, de hiŽrarchie des t‰ches polici•res dans les deux contextes.

LÕACTION POLICIéRE AU PRISME DE LÕHISTOIRE MIGRATOIRE

Chaque sociŽtŽ construit son altŽritŽ en fonction de son projet national, dŽfinit ses codes de la diffŽrence ˆ travers les concepts ŽlaborŽs pour dŽsigner lÕAutre, par sa classification et sa catŽgorisation, avec les politiques appliquŽes et dans les interactions entre groupes et entre individus qui ont intŽriorisŽ lÕaltŽritŽ reproduite par des stŽrŽotypes et/ou renforcŽe par des partis politiques qui en ont fait leur fond de commerce (Kastoryano, 2006, 17).
La comprŽhension des configurations problŽmatiques ŽvoquŽes plus haut ainsi que la mise en Ïuvre de lÕapproche comparŽe nŽcessite un dŽtour par lÕhistoire migratoire allemande et fran•aise. Ce champ de recherche est Žvidemment bien trop vaste pour entrer dans le dŽtail. Nous proposons ici de nous focaliser sur lÕaction polici•re envers les migrants et leurs descendants dans les deux contextes nationaux.

Du Ç Gastarbeiter ˆ la fran•aise È ˆ la question minoritaire

LÕhistoire des migrations en France, de la question nationale et de ses ambigu•tŽs nŽes de la colonisation puis de la dŽcolonisation est dŽsormais bien connue (Blanc-ChalŽard, 2007 ; Noiriel, 1992 ; Weil, 1991). Entre la fin du 19•me si•cle et le dŽbut du 20•me si•cle, la France est devenue Ç une des premi•res terre dÕimmigration au monde È, alors que les autres pays europŽens restent avant tout caractŽrisŽs par lÕŽmigration (Noiriel, 2007, 139). Comme on le verra pour lÕAllemagne, mais sur des cycles dŽcalŽs, cÕest le Ç travail qui fait na”tre lÕimmigrŽ È dans la France industrialisŽe, lÕŽtranger Žtant de ce fait Ç soumis aux cycles de lÕactivitŽ Žconomique du pays recruteur È. On comprend ainsi le caract•re rŽcurrent du Ç probl•me de lÕimmigration È. La structure de la population immigrŽe sur le long terme (du milieu du 19•me si•cle ˆ la fin du 20•me si•cle) prŽsente Žgalement un parall•le avec, nous le verrons, la population considŽrŽe comme Ç problŽmatique È du point de vue de lÕaction polici•re. Au cours de cette pŽriode, les hommes entre 20 et 29 ans (la classe dÕ‰ge la plus productive) sont surreprŽsentŽs parmi les Žtrangers par rapport aux Fran•ais. Par ailleurs, les Žtrangers se dŽmarquent des Fran•ais par leur appartenance de classe : en 1901, un peu plus de la moitiŽ des immigrŽs appartiennent ˆ la classe ouvri•re (contre 34% pour les Fran•ais) ; plus des deux tiers en 1931 (contre 40% pour les Fran•ais) et plus des trois quarts en 1975 (contre 36% pour les Fran•ais). Ces Ç Gastarbeiter ˆ la fran•aise30 È sont principalement employŽs dans les mŽtiers basŽs sur la force physique (agriculture, industrie, Ç marchŽ du travail secondaire È), les branches ˆ la pointe du progr•s technologique, et les travaux domestiques. Principalement alimentŽ par lÕimmigration ouvri•re, le Ç creuset fran•ais È est constituŽ par lÕentrŽe sur le territoire puis lÕ Ç intŽgration È dÕun Žventail de nationalitŽs : Anglais, Allemands, Autrichiens, Belges, Italiens et Espagnols ˆ la fin du 19•me et au dŽbut du 20•me si•cle ; Italiens, Polonais et Russes dans les annŽes 1930 ; Portugais, AlgŽriens, Turcs et Marocains dans les annŽes 1970 (Noiriel, 1992, 137Ð147).

La Ç dŽcouverte È de lÕimmigration en Allemagne

LÕAllemagne est en fait un pays dÕimmigration et de fait une sociŽtŽ multiculturelle. De Gastarbeiter, ils deviennent AuslŠnder et, dans les annŽes 1970, des auslŠndische Arbeiter ou parfois des Einwanderer, et non plus simplement des GŠste, mais immigrŽs, ou minoritŽs, ou les deux, EinwanderungsminoritŠt ou encore auslŠndische MitbŸrger, des citoyens sans lÕ•tre (Kastoryano, 2001, 8).
LÕantienne Ç lÕAllemagne nÕest pas un pays dÕimmigration È, qui a longtemps nourri les discours des Žlites politiques, est dŽsormais caduque. RŽtrospectivement, lÕEmpire, la RŽpublique de Weimar et le III•me Reich peuvent •tre pensŽs comme des sociŽtŽs dÕŽmigration et dÕimmigration, et des continuitŽs dans les discours politiques et les rŽgulations administratives des travailleurs Žtrangers peuvent •tre mises au jour. Il faut nŽanmoins attendre le dŽbut du 21•me si•cle, le gouvernement de coalition de Gerhard Schršder et la rŽforme du droit de la nationalitŽ en 2000 pour que lÕAllemagne se reconnaisse comme une sociŽtŽ dÕimmigration (Einwanderungsgesellschaft) et non plus exclusivement comme un ƒtat-nation constituŽ sur une base ethnique (MŸnz et Ulrich, 1998, 173 ; Pieper, 2008, 25). Comment comprendre cette Žvolution ?
Entre 1939 et 1945, les politiques dÕexpansion et dÕextermination du III•me Reich, notamment vers lÕEst, ont provoquŽ des mouvements massifs de migration forcŽe (Pieper, 2008, 32) : Ç en 1950, environ 8 des 50 millions dÕhabitants de la RŽpublique FŽdŽrale Allemande Žtaient des rŽfugiŽs dÕapr•s-guerre et des Ç expulsŽs È (V ertriebene) È (MŸnz et Ulrich, 1998, 173). Entre 1945 et 1995, Ç plus de 20 millions de personnes ont immigrŽ en Allemagne de lÕOuest : Ç expulsŽs È, A ussiedler32 venant dÕEurope Centrale et Orientale, Allemands de la RDA (†bersiedler), travailleurs immigrŽs (Gastarbeiter), demandeurs dÕasile et rŽfugiŽs [É] Depuis 1950, lÕensemble de la population allemande (Est et Ouest) a augmentŽ de 13,4 millions, atteignant ainsi au total 81,8 millions dÕhabitants en 1995. Les deux tiers de cet accroissement sont dus un solde migratoire positif de 8 millions entre 1950 et 1995. On peut distinguer six phases dÕimmigration dÕapr•s-guerre vers lÕAllemagne : une premi•re phase caractŽrisŽe par une immigration dÕAllemands (expulsŽs, citoyens de RDA et autres descendants dÕAllemands) ; une deuxi•me phase ˆ partir des annŽes 1950 avec le recrutement de travailleurs Žtrangers ; une troisi•me phase dans les annŽes 1960 avec un recrutement ˆ large Žchelle de travailleurs Žtrangers stoppŽ en 1973 (A nwerbestopp) ce qui provoqua, du fait du regroupement familial et de lÕinstallation de nombreux travailleurs Žtrangers en Allemagne, un accroissement rapide du nombre dÕenfants Žtrangers nŽs en Allemagne (quatri•me phase) ; une cinqui•me phase ˆ partir de la fin des annŽes 1980 avec une augmentation importante du nombre dÕŽtrangers et de Aussiedler ; une sixi•me phase caractŽrisŽe par des mesures restrictives visant ˆ limiter lÕimmigration des Aussiedler et des demandeurs dÕasile (MŸnz et Ulrich, 1998, 173Ð 175). Au dŽbut des annŽes 1950, les Žtrangers dans les LŠnder de lÕOuest reprŽsentaient environ 1% de la population pour atteindre plus de 10% en 1995 (Schmidt et Weick, 1999). De son c™tŽ, ˆ lÕexception de ressortissants de quelques.

ESPACE LƒGAL ET MORAL DE LÕACTION POLICIéRE DANS LÕƒTAT DE DROIT

La comparaison franco-allemande prend Žgalement sens dans un ensemble de normes et de valeurs dŽfinissant le contexte dans lequel sÕinscrit lÕaction polici•re. La distinction en droit entre nationaux et non-nationaux appara”t dŽcisive concernant lÕaction polici•re. Par ailleurs, un ensemble de normes et de valeurs contribue ˆ cadrer la question minoritaire dans les deux pays.

Droit de la nationalitŽ : sol, sang et catŽgories de lÕaction polici•re

Le droit de la nationalitŽ distingue les nationaux des migrants et de leurs descendants. Cette distinction juridique constitue un des fondements de lÕarticulation entre action polici•re et question minoritaire. En France, lÕhistoire coloniale, postcoloniale et le droit du sol ont pour consŽquence que la majoritŽ des migrants et de leurs descendants sont de nationalitŽ fran•aise. Ceux-ci entrent alors de fait dans la catŽgorie abstraite des citoyens, interdisant en principe toute discrimination dans lÕacc•s aux droits et dans le recours aux services publics. CÕest dÕailleurs lˆ une des difficultŽs de notre recherche concernant la France : comment mettre ˆ jour des dynamiques discriminatoires censŽes ne pas exister car contraires aux principes rŽpublicains ?
La nationalitŽ est en revanche un crit•re discriminant lŽgitime pour les policiers : la prŽsence sur le territoire de migrants ne disposant pas de la nationalitŽ fran•aise et ne remplissant pas les conditions requises pour prolonger leur sŽjour constitue une infraction. Dans le cadre de notre recherche, il importe de distinguer lÕaction polici•re destination des Žtrangers de celle sÕexer•ant sur les populations issues de lÕimmigration. La police est en effet le principal acteur de la mise en Ïuvre de la rŽpression des Ç infractions ˆ la lŽgislation sur les Žtrangers (ILE) È notamment par le biais du contr™le de la rŽgularitŽ des sŽjours sur le territoire fran•ais. Les Ç Žtrangers en situation irrŽguli•re È font lÕobjet dÕune politique proactive de ciblage et dÕinterpellation, impliquant de fait une discrimination polici•re fondŽe sur le crit•re de la nationalitŽ.
LÕanalyse des discriminations polici•res renvoie avant tout aux divisions ˆ lÕÏuvre au sein m•me du national (Spire, 2003b ; Fassin, 2010). La police se trouve en effet au cÏur dÕune ambigu•tŽ relative ˆ la nationalitŽ et ˆ la citoyennetŽ : parmi les citoyens fran•ais, il est souvent avancŽ que certains groupes sont surexposŽs ˆ des pratiques polici•res marquŽes par la fermetŽ, la violence et le contr™le accru. Il appara”t que les populations sur lesquelles sÕexercent ces pratiques sont caractŽrisŽes par un triple stigmate : social, gŽographique et racial (Jobard, 2006). Les deux premiers concernent la pauvretŽ et la relŽgation urbaine ; le troisi•me stigmate renvoie ˆ une double dimension : la visibilitŽ et lÕantŽcŽdent migratoire. Cette double dimension construit deux des principales catŽgories dŽsignant ces populations : la premi•re, synchronique, insiste sur une apparence physique distinctive de la population majoritaire (les Ç minoritŽs visibles È) ; la seconde, qui insiste sur lÕhistoire migratoire, est diachronique (les Ç personnes issues de lÕimmigration È).
Selon la conception allemande de la citoyennetŽ, la nationalitŽ se transmet par lÕascendance allemande, accordant de fait une place centrale ˆ la dimension ethno-culturelle de lÕappartenance ˆ la communautŽ nationale (Tucci et Groh-Samberg, 2008). Ë ce titre, le cas allemand est associŽ au droit du sang sÕopposant au droit du sol dans le contexte fran•ais. De ce fait, et malgrŽ la rŽforme du code allemand de la nationalitŽ en 1999 qui a introduit des ŽlŽments de droit du sol, une part importante des enfants de migrants turcs vivant sur le territoire allemand conserve la nationalitŽ turque35. CÕest par exemple le cas de nombreux Turcs, quÕil sÕagisse des primo-arrivants ou des descendants des Ç travailleurs invitŽs È (Gastarbeiter), dont lÕimmigration remonte aux annŽes 1950 et qui constituent le groupe de migrants le plus important numŽriquement sur le territoire allemand ainsi quÕˆ Berlin. Les descendants des Gastarbeiter sont confrontŽs ˆ des formes dÕexclusion sociale et culturelle qui se traduisent par des phŽnom•nes de sŽgrŽgation urbaine, de discrimination scolaire, un taux de ch™mage important, le dŽveloppement de rŽseaux Žconomiques communautaires et un faible acc•s ˆ la participation politique du fait notamment de lÕinterdiction du droit de vote pour les Žtrangers36 (Schmidt et Weick, 1999, 267Ð276). MalgrŽ une augmentation des naturalisations, une grande partie des individus issus directement ou indirectement de lÕimmigration nÕa pas la nationalitŽ allemande, mais dispose dÕun statut lŽgal spŽcial de rŽsident non-allemand (Nichtdeutsche) (Wilpert et Gitmez, 1987, 178). Les trois autres catŽgories de migrants sont les ressortissants de lÕUnion europŽenne, les demandeurs dÕasile et les Ç rapatriŽs È (A ussiedler).
Ces deux aspects, immigrations rŽcentes et non coloniales sur le sol allemand dÕune part, et droit du sang dÕautre part, ont notamment conduit ˆ une plus grande perpŽtuation quÕen France des nationalitŽs du pays dÕorigine. Ë cet Žgard, le statut des anciens Gastarbeiter et de leurs descendants Žtablis en Allemagne et des A ussielder peut appara”tre contradictoire : une part importante des individus du premier groupe restent des Ç non-allemands È alors que ceux du second groupe ont ŽtŽ naturalisŽs de droit. Le mod•le allemand appara”t ainsi plus permŽable aux politiques diffŽrencialistes. Ce maintien du statut dÕŽtranger pour de nombreux immigrŽs et descendants dÕimmigrŽs a longtemps focalisŽ les dŽbats sur les Ç Žtrangers È et non, comme en France, sur les Ç Fran•ais issus de lÕimmigration È. Ceci explique Žgalement que les sciences sociales allemandes ont longtemps privilŽgiŽ la variable nationale. JusquÕaux annŽes 2000, lÕattention Žtait en effet focalisŽe sur la Ç criminalitŽ des Žtrangers È dont la principale controverse Ð les Žtrangers sont-ils plus ou moins criminels que les Allemands ? Ð fut une prŽoccupation centrale des criminologues.

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Table des matières

LISTE DES TABLEAUX
LISTE DES FIGURES
TABLE DES SIGLES ET ACRONYMES
INTRODUCTION GÉNÉRALE : POSER LA QUESTION MINORITAIRE EN FRANCE ET EN ALLEMAGNE
1.1 IMMIGRATION, POLICE ET PAUVRETÉ : ACTUALISATION D’UNE CONFIGURATION PROBLÉMATIQUE
1.1.1 France : police, banlieue, immigration
1.1.2 Les « quartiers chauds » en Allemagne
1.1.3 Question de recherche : police, territoires et populations « sensibles »
1.2 HEURISTIQUE DE L’APPROCHE COMPARÉE
1.2.1 Pourquoi comparer ?
1.2.2 Toutes choses n’étant pas égales par ailleurs…
1.2.3 « Les Turcs sont à l’Allemagne ce que les Algériens sont à la France » : quand les acteurs comparent
1.3 L’ACTION POLICIÈRE AU PRISME DE L’HISTOIRE MIGRATOIRE
1.3.1 Du « Gastarbeiter à la française » à la question minoritaire
1.3.2 La « découverte » de l’immigration en Allemagne
1.4 ESPACE LÉGAL ET MORAL DE L’ACTION POLICIÈRE DANS L’ÉTAT DE DROIT
1.4.1 Droit de la nationalité : sol, sang et catégories de l’action policière
1.4.2 Un espace moral fondé sur l’antiracisme et la lutte contre les discriminations ?
1.4.3 Le paradigme « interculturel » dans la police berlinoise
1.5 PRÉSENTATION DES ENQUÊTES
1.5.1 Un commissariat de proche banlieue parisienne : Victorcity
1.5.2 Les données quantitatives : mesurer le travail d’interpellation à Victorcity
14 TABLE DES MATIÈRES
1.5.3 Deux commissariats de quartiers « sensibles » berlinois : Antonkiez et Spreeheim
1.5.4 L’Unité Intégration et Migration de la police berlinoise
1.6 PLAN DE LA THÈSE
PREMIÈRE PARTIE : REVUE DE LA LITTÉRATURE ACADÉMIQUE ET MÉTHODOLOGIE
CHAPITRE 1 : LA RACE, DÉTERMINANT INTROUVABLE DE L’ACTION POLICIÈRE ? UN ÉTAT DES LIEUX COMPARÉ DES RECHERCHES
1.1 LES REPRÉSENTATIONS RÉCIPROQUES POLICE / POPULATION
1.1.1 La perception de l’action policière par les minorités
1.1.1.1 France : l’ « humeur anti-institutionnelle » dans les banlieues
1.1.1.2 Allemagne : les enquêtes de confiance dans la police
1.1.1.3 Royaume Uni : la confiance dans la police comme instrument des politiques publiques
1.1.1.4 États-Unis : la confiance dans la police selon les « races »
1.1.2 La question du racisme policier
1.1.2.1 France : le racisme policier comme catégorie d’action
1.1.2.2 Allemagne : le racisme comme produit des contraintes professionnelles
1.1.2.3 Royaume-Uni : le racisme comme produit de la culture policière
1.1.2.4 États-Unis : les préjugés raciaux envers les Noirs
1.2 L’ACTION POLICIÈRE EST-ELLE DISCRIMINATOIRE ?
1.2.1 France : un traitement différencié des Maghrébins et des Noirs
1.2.2 Allemagne : de la « criminalité des étrangers » à la société « multiculturelle »
1.2.3 Royaume-Uni : des contrôles d’identité discriminatoires
1.2.4 États-Unis : les discriminations policières constitutives de la condition minoritaire
1.3 ! APPORTS ET LIMITES DES TRAVAUX SUR LES RELATIONS ENTRE POLICE ET MINORITÉS VISIBLES
CHAPITRE 2 : MÉTHODOLOGIE. ENQUÊTER ENTRE VICE CACHÉ ET DISCOURS D’INSTITUTION
2.1 TRAJECTOIRE DE L’ENQUÊTE COMPARATIVE
2.1.1 La légitimité de l’objet déterminée par les contextes institutionnels
2.1.1.1 Accès au terrain français : négocier avec la hiérarchie et enquêter auprès de la « base »
2.1.1.2 ! Accès aux terrains berlinois : mettre à distance le discours de l’institution
2.1.2 Ethnographier l’expérience professionnelle policière
2.2 ETHNOGRAPHIER LA QUESTION MINORITAIRE : UNE DÉMARCHE INDUCTIVE
2.2.1 Le biais ethnocentriste
2.2.2 Que faire du « racisme » ?
2.2.3 Différents espaces d’émergence de la question minoritaire
2.2.4 La discrimination dans l’économie relationnelle policière
2.3 QUANTIFIER L’ACTIVITÉ D’INTERPELLATION À VICTORCITY
2.3.1 Présentation des données
2.3.2 Analyser l’ « effet de clientèle »
CONCLUSION DE LA PARTIE : UNE SOCIOLOGIE COMPRÉHENSIVE DE L’EXPÉRIENCE PROFESSIONNELLE POLICIÈRE
DEUXIÈME PARTIE : POLICE ET POLIZEI, DEUX « BELLES INFIDÈLES » ? VARIATIONS SUR LES RÉPERTOIRES D’ACTION POLICIERS À BERLIN ET EN RÉGION PARISIENNE
L’organisation policière française
L’organisation policière allemande
La police de sécurité publique berlinoise
CHAPITRE 3 : UNE ACTION POLICIÈRE ÉPIDERMIQUE EN RÉGION PARISIENNE
3.1 L’INDETERMINATION RELATIVE DE L’ACTION POLICIÈRE
3.1.1 Une dynamique professionnelle : gérer la contrainte des « servitudes »
3.1.2 Motifs de conduite, garde à vue et « effet de clientèle »
3.1.3 « Crapauds de banlieue » et policiers : les régimes d’interconnaissance
3.2 ! LA POLARISATION DE L’ACTION POLICIÈRE SUR L’ANTICRIMINALITÉ
3.2.1 L’attraction du style de la BAC
3.2.2 Dynamiques de l’action policière anticrime
3.3 CONTRÔLER ET VÉRIFIER LES IDENTITÉS
3.3.1 Le contrôle d’identité comme arme de « chasse »
3.3.2 Les vérifications approfondies d’identité
CHAPITRE 4 : GARDER LE CONTRÔLE PAR LA PRÉVENTION ? L’INVESTISSEMENT DE LA POLICE BERLINOISE DANS LA PRÉVENTION
4.1 FAIRE LA POLICE DANS UN QUARTIER SENSIBLE BERLINOIS
4.1.1 Enjeux du policing
4.1.2 Territorialisation et définition du rôle de la police
4.2 LA MISE À DISTANCE DE L’ANTICRIMINALITÉ
4.2.1 L’attractivité réduite des brigades anti-criminalité
4.2.2 La mise à distance des contrôles et des gardes à vue
4.2.3 Stratégies de désescalade
4.3 PRATIQUER LA « PRÉVENTION »
4.3.1 Faire carrière dans la prévention
4.3.2 Les « personnes issues de l’immigration » comme populations-cibles de la prévention
CONCLUSION DE LA DEUXIÈME PARTIE : ANTICRIMINALITÉ EN RÉGION PARISIENNE VS PRÉVENTION À BERLIN
TROISIÈME PARTIE : PROFESSION POLICIÈRE ET EXPÉRIENCE MINORITAIRE
CHAPITRE 5 : DES CORPS ÉTRANGE(R)S DANS LA POLICE ? LES POLICIERS MINORITAIRES À PARIS ET À BERLIN
5.1 QUAND L’INSTITUTION FAIT LA CONDITION MINORITAIRE
5.1.1 Apprendre la condition minoritaire
5.1.2 Des trajectoires altérées
5.1.3 Étayage institutionnel
5.2 AJUSTER AU QUOTIDIEN LES IDENTITÉS PROFESSIONNELLES
5.2.1 « Quelque chose qui ne va pas »
5.2.2 Réagir aux assignations identitaires
5.2.3 Des affinités paradoxales
5.3 QU’EST-CE QU’UN FLIC RACISTE ? (1)
5.3.1 Les « anciens » et les « jeunes »
5.3.2 L’institution policière à l’épreuve du genre et de l’origine
5.3.3 Le statut de minoritaire à Paris et à Berlin
CHAPITRE 6 : DES MINORITÉS TROP VISIBLES ? LECTURES POLICIÈRES DE LA QUESTION MINORITAIRE
6.1 RÉFLEXIVITÉ POLICIÈRE ET RÉFLEXION SOCIOLOGIQUE
6.1.1 Des acteurs incriminés
6.1.2 La vérité est dans la rue
6.1.3 Ce qui n’est pas permis existe-t-il ? Les catégories clandestines
6.2 SOCIOGRAPHIE DES CATÉGORISATIONS POLICIÈRES DE L’ALTÉRITÉ
6.2.1 Dimension écologique : les contextes urbains
6.2.2 Dimension temporelle : la dégradation du quartier concomitante à l’arrivée des migrants
6.2.3 Dimension pratique : décrire, qualifier et utiliser l’altérité
6.3 QU’EST-CE QU’UN FLIC RACISTE ? (2)
6.3.1 Une expérience négative de la profession : la frustration
6.3.2 Le dilemme racial : la tentation raciste et le renversement de la question minoritaire
6.3.3 Le racisme comme espace de débat dans la profession policière
CONCLUSION DE LA TROISIÈME PARTIE : LA QUESTION MINORITAIRE STRUCTURANTE DE LA PROFESSION POLICIÈRE
QUATRIÈME PARTIE : ACTION POLICIÈRE ET QUESTION MINORITAIRE311!
CHAPITRE 7 : UN EXERCICE DIFFÉRENCIÉ DE L’ACTION POLICIÈRE ? POLICIÈRE ? TRAVAILLER SUR LES APPARENCES ET LES ORIGINES
7.1 L’ALTÉRITÉ COMME PRINCIPE DE CADRAGE DES INTERACTIONS POLICIÈRES
7.1.1 Un savoir-faire racialisé
7.1.2 Exigence accrue de déférence : variations autour de l’hexis professionnel
7.1.3 « C’est toujours compliqué avec les Arabes ! »
7.2 LE RELÂCHEMENT DES EXIGENCES DÉONTOLOGIQUES
7.2.1 De la frustration à la discrimination
7.2.2 Une police de « proximité conflictuelle »
7.2.3 L’ancrage des traitements différenciés dans les pratiques collectives
7.3 VICTORCITY : PEUT-ON QUANTIFIER LA DISCRIMINATION POLICIÈRE ?
7.3.1 Les contours de la police property
7.3.2 Modes d’action policiers et classes de clientèles : une proximité conflictuelle avec les « jeunes voyous »
7.3.3 Les déterminants du passage en garde à vue
CHAPITRE 8 : LES POLICIERS COMME « PROFESSIONNELS DE L’INTÉGRATION » ? L’INSTITUTIONNALISATION DE LA QUESTION MINORITAIRE DANS LA POLICE BERLINOISE
8.1 LE « TRANSFERT DE COMPÉTENCES INTERCULTURELLES » DANS LA POLICE BERLINOISE
8.1.1 Évolution doctrinale dans la police berlinoise
8.1.2 Traduction policière d’une impulsion fédérale
8.2 L’UNITÉ INTÉGRATION ET MIGRATION : FAIRE CARRIÈRE DANS L’INTERCULTUREL
8.2.1 Histoire de l’Unité Intégration et Migration
8.2.2 Se spécialiser dans l’immigration
8.2.3 Les « spécialistes de l’intégration » comme « acteurs de la politique locale » !
CONCLUSION DE LA QUATRIÈME PARTIE : LA QUESTION MINORITAIRE DANS L’ÉCONOMIE DES PRATIQUES POLICIÈRES
CONCLUSION GÉNÉRALE : LE CONTRÔLE DES ORIGINES COMME
RÉPONSE À LA QUESTION MINORITAIRE
RÉSUMÉ DE LA THÈSE
APPORTS DE LA RECHERCHE
BIBLIOGRAPHIE

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