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Thermodynamique du CO2
Le CO2 est la molécule présentant la stabilité thermodynamique la plus importante des espèces neutres contenant des atomes de carbone (ΔGf°= – 394.4 kJ/mol). En effet, cette stabilité produit une molécule avec une très faible réactivité (Tolman, 2006).
La plupart des réactions qui utilisent le CO2 comme réactif, sont endothermiques et nécessitent une quantité d’énergie qui dépend de l’état d’oxydation du produit, et/ou de leur barrières cinétiques (Metcalfe et al., 2013), (Aresta et al., 2013b). Quelques réactions exothermiques commercialisées et développées aujourd’hui à l’échelle industrielle peuvent être citées telles que la production d’urée et d’acide salicylique.
La Figure 1-2, montre les variations des énergies libres de Gibbs dans des conditions standards avec l’état d’oxydation des espèces C/O ou C/H. Nous observons que la réduction du CO2 en d’autres espèces nécessite l’apport d’énergie contrairement à une réaction où la conservation de l’état d’oxydation (+4) est garantie, nous parlons alors de fonctionnalisation. Dans la plupart des cas, les réactions dérivées de ce dernier sont thermodynamiquement favorables.
La transformation du CO2 repose sur les alternatives suivantes (Sakakura et al., 2007):
Utilisation de matières premières à haute énergie libre, telles que l’hydrogène ou des composants insaturés pour favoriser les réactions exothermiques (cf. Figure 1-3).
Synthèse de composés avec un faible niveau d’énergie, c’est-à-dire des états d’oxydation élevés, comme les carbonates.
Utilisation d’énergie supplémentaire comme la lumière ou l’électricité pour la modification de l’état d’oxydation du CO2.
Ces options ont pour but d’obtenir des produits chimiques soit au travers de l’insertion du CO2 dans des molécules à haute énergie libre ou soit au travers de la réduction du CO2 en utilisant de l’énergie sous forme de chaleur ou d’électrons. Cette dernière option, doit être examinée avec attention du point de vue de la consommation et du coût énergétique. Il est important donc, que cette énergie ne soit pas issue des combustibles fossiles pour pouvoir être considérée comme une solution durable.
Valorisation du CO2
Aujourd’hui, trois voies de valorisation sont distinguées pour l’utilisation du CO2. Deux d’entre elles (valorisation biologique et chimique), concernent la transformation de la nature du CO2 pour l’obtention de produits à haute valeur ajoutée. L’autre option considère l’utilisation directe de cette molécule à travers la valorisation physique, notamment dans l’industrie du pétrole (Ademe, 2010). La Figure 1-14 présente un résumé de ces voies.
A l’heure actuelle, seulement 207 Mt/an de CO2 sont utilisées par l’industrie chimique et environ 40 Mt/an par l’industrie pétrolière, ce qui représente environ 0,6% des émissions produites en CO2 (Aresta et al., 2016). La plupart du CO2 est destinée à la production d’urée, carbonates inorganiques et pigments (cf. Figure 1-5). Néanmoins, au regard du potentiel économique des voies de valorisation, ce chiffre devrait augmenter favorablement dans les prochaines années.
Les différentes options de valorisation de CO2, ont été étudiées depuis quelques années et certaines d’entre elles, font déjà l’objet de développements industriels. C’est le cas de la récupération assistée des hydrocarbures (RAH) qui utilise la plupart du temps le CO2 stocké de façon naturelle (Ademe, 2010).
Le potentiel de valorisation du CO2 est porté surtout sur la voie chimique. Diverses applications peuvent conduire à l’obtention de produits comme les polycarbonates ou carbonates cycliques largement utilisés dans l’industrie de polymères (Adhikari et al., 2014). Cependant, la conversion de CO2 en composés chimiques organiques implique généralement des réactions endothermiques ou de basse réactivité qui ont besoin de molécules hautement réactives ou de catalyseurs.
Dans les prochaines sections quelques généralités et exemples sur les différents types de valorisation sont abordés.
Valorisation physique
Lorsque l’on considère la valorisation physique du CO2, la molécule ne subit aucune transformation. Etant donné les propriétés physiques du CO2, il peut être utilisé dans deux contextes différents : la récupération assistée des hydrocarbures (RAH) ou des applications industrielles (solvants ou boissons gazeuses par exemple).
Récupération assistée des hydrocarbures (RAH)
La RAH consiste à injecter du CO2 dans des conditions supercritiques dans les réservoirs de pétrole ou de gaz naturel pour améliorer l’extraction de ces derniers. Les propriétés physico-chimiques du CO2 supercritique (T >31°C, P > 74 bar) permettent en effet de diminuer la viscosité du pétrole brut favorisant son extraction (cf. Figure 1-6).
L’utilisation de CO2 pour la RAH existe depuis plusieurs années et permet d’augmenter le rendement d’extraction de 10 à 30%. La plupart du CO2 utilisé dans ce procédé provient essentiellement de réservoirs naturels. Toutefois, la valorisation du CO2 permettrait de réutiliser le CO2 capté des fumées industrielles pour son implémentation dans la RAH sans complications majeures.
Entre 0,24 et 0,42 tonnes de CO2 sont nécessaires pour la récupération d’un baril, ce qui représente environ 1,7 à 3,0 tonnes de CO2 par tonne de pétrole. Aujourd’hui, il est estimé une consommation mondiale de CO2 de l’ordre de 72 millions de tonnes par an pour la RAH (76% de ressources naturelles) (RECORD, 2014).
Cette application est majoritairement employée aux Etats Unis où en 2008, 56 millions de tonnes de CO2 ont été utilisées, dont 83% proviennent de ressources naturelles (Ademe, 2010).
Applications industrielles
Le CO2 requis pour les applications industrielles doit avoir une pureté assez élevée (99,99%), puisqu’il est utilisé notamment dans l’industrie agro-alimentaire ou comme réfrigérant. Il est utilisé étant donné ses propriétés physico-chimiques comme solvant et acide.
Dans cette alternative, l’utilisation du CO2 issu de fumées industrielles présente certaines contraintes liées principalement aux niveaux de pureté requise dans l’industrie alimentaire et la possible modification des propriétés physico-chimiques par la présence des impuretés, lorsqu’il est utilisé comme réfrigérant (Ademe, 2010).
Valorisation biologique
Dans ce domaine, le captage et la valorisation du CO2 peut être obtenu à partir des organismes photosynthétiques tels que les algues et microalgues. L’intérêt repose sur la production de biomasse avec un contenu important de protéines, de lipides et de cellulose. Les proportions de ces composés varient en fonction de l’espèce de microalgue utilisée. La biomasse est alors utilisée dans différentes applications :
Produit à haute valeur ajoutée : polyols, polymères, iso-cyanates, fibres, plastiques, nourriture animale, pesticides.
Biocarburants : biodiésel ou éthanol.
Traitement de l’eau.
La production d’algues au niveau mondial bénéficie d’un fort potentiel d’exploitation et est en croissance depuis les années 1950-1980 (Tapie and Bernard, 1988), (Spolaore et al., 2006). Généralement la culture de microalgues est réalisée soit en bassins ouverts soit en photobioréacteurs, chacun avec des spécificités technologiques bien particulières.
Dans le premier système, la principale problématique repose sur la nécessité d’utiliser de grandes étendues pour la culture de ces espèces. Par contre pour les photobioréacteurs, la difficulté réside dans les coûts d’investissement (CAPEX) et les coûts opératoires (OPEX) élevés (Borowitzka, 1999), (Chen et al., 2011).
L’utilisation de fumées est envisageable dans cette alternative, étant donné la capacité d’adaptation de microalgues et d’algues. Toutefois, il a été démontré que la présence de polluants tels que les NOx et les SOx induisent l’inhibition de la croissance des microorganismes à cause de l’acidification du milieu (Cheah et al., 2015).
Valorisation chimique
L’utilisation du CO2 comme réactif chimique est un champ d’étude assez important. Le grand nombre des possibilités de transformation de CO2 constitue aujourd’hui un enjeu majeur pour la recherche. Le principe consiste à synthétiser des molécules à haute valeur ajoutée en partant d’une molécule très stable thermodynamiquement.
La conversion du CO2 peut avoir lieu à partir de deux principes :
Le premier, porte sur la fonctionnalisation de la molécule avec des nouvelles liaisons covalentes (C-O, C-N, C-C).
La seconde consiste en la réduction chimique vers des états plus riches en énergie.
La Figure 1-7 présente de manière générale les différentes alternatives de valorisation chimique de CO2 à partir des deux principes décrit précédemment.
La fonctionnalisation présente l’avantage d’utiliser l’apport énergétique provenant des espèces chimiques qui réagissent avec le CO2 et non de sources externes contrairement à la valorisation par réduction chimique. Dans cette première catégorie, il est possible de trouver notamment la synthèse organique et la minéralisation.
Quelques exemples des transformations possibles du CO2 sont résumés dans la Figure 1-8. La synthèse d’alcools ou d’hydrocarbures est un exemple des produits obtenus par la réduction chimique de CO2. Les principaux procédé utilisés pour obtenir ces produits, sont l’électro-réduction, la photo réduction ou des technologies telles que l’énergie thermique, solaire ou les
plasmas (Olajire, 2013), (Aresta et al., 2013b). Le defi est de trouver les moyens appropriés pour la génération d’énergie et de réduire les coûts associés à la production.
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Table des matières
INTRODUCTION GENERALE
CONTEXTE DE CETTE ETUDE : CAPTAGE ET VALORISATION CHIMIQUE DU CO2 AVEC DES AMINES HETEROCYCLIQUES
CADRE ET OBJECTIFS SCIENTIFIQUES
CHAPITRE 1. ETAT DE L’ART SUR LA VALORISATION DU CO2
I. LE CO2 COMME MATIERE PREMIERE
I.1. Propriétés du CO2
I.2. Thermodynamique du CO2
II. VALORISATION DU CO2
II.1. Valorisation physique
II.2. Valorisation biologique
II.3. Valorisation chimique
III. LES PROJETS DE TRANSFORMATION DE CO2 DANS LE MONDE
III.1. Distribution de l’utilisation du CO2
III.2. Applications industrielles
IV. PRODUCTION DE CARBONATES CYCLIQUES
IV.1. Le marché des carbonates cycliques
IV.2. Production traditionnelle par phosgénation
V. SYNTHESE DE CARBONATES CYCLIQUES PAR CYCLOADDITION EPOXYDE/CO2
V.1. Les époxydes dans la production de carbonates cycliques
V.2. Influence de la nature de l’époxyde sur la réaction
VI. SYSTEMES CATALYTIQUES DE LA REACTION DE CYCLOADDITION EPOXYDE/CO2
VI.1. Complexes métalliques
VI.2. Oxydes métalliques
VI.3. Sels de métaux alcalins
VI.4. Liquides ioniques
VI.5. Les amines hétérocycliques
VII. LES MECANISMES REACTIONNELS DE CYCLOADDITION CO2/EPOXYDE
VII.1. La voie métallique
VII.2. La voie non métallique
VIII. CONCLUSIONS
CHAPITRE 2. EQUILIBRE THERMODYNAMIQUE GAZ/LIQUIDE DU SYSTEME CO2 – EPOXYDE
I. INTRODUCTION
II. NOTIONS DE BASE SUR L’EQUILIBRE THERMODYNAMIQUE
II.1. L’approche idéale : la dilution infinie
II.2. La démarche empirique
II.3. La démarche approfondie
II.4. Définition de la fugacité des phases gaz et liquide
III. MODELISATION DE L’EQUILIBRE GAZ/LIQUIDE
III.1. Représentation de la phase gaz
III.2. Représentation de la phase liquide
IV. DISPOSITIF EXPERIMENTAL
V. PROTOCOLE OPERATOIRE
VI. ESTIMATION DE LA SOLUBILITE DU CO2 DANS LES EPOXYDES
VII. RESULTATS
VII.1. Validation de la répétabilité des mesures
VII.2. Système CO2/H2O
VII.3. Système CO2/Epoxydes
VII.4. Détermination de la constante de la loi de Henry
VII.5. Détermination de l’enthalpie de solution
VIII. DISCUSSION ET CONCLUSION
CHAPITRE 3. MODELISATION DE LA CINETIQUE DE TRANSFERT DE MATIERE GAZ/LIQUIDE DE LA REACTION CO2/EPICHLOROHYDRINE
I. INTRODUCTION
II. APPROCHE THEORIQUE AU TRANSFERT DE MATIERE
III. MODELES DE TRANSFERT DE MATIERE
III.1. La théorie du double film
III.2. La théorie de la pénétration
III.3. La théorie du renouvellement aléatoire de l’interface
IV. MODELISATION DU TRANSFERT DE MATIERE SANS REACTION CHIMIQUE
IV.1. Dispositif expérimental
IV.2. Protocole opératoire
IV.3. Validation du protocole opératoire
IV.4. Effet de la température
IV.5. Effet de la vitesse d’agitation
IV.6. Estimation et optimisation du kLa pour un réacteur agité
IV.7. Résultats de la modélisation
IV.8. Caractérisation hydrodynamique
IV.9. Transfert de matière dans le cas des mélanges gazeux réels
V. MODELISATION DU TRANSFERT DE MATIERE AVEC REACTION CHIMIQUE
V.1. Régimes de réactions
V.2. Dispositif expérimental et protocole opératoire
I.2. Comparaison entre l’absorption physique et chimique
V.3. Effet de la température et de la vitesse d’agitation
V.4. Résultats de la modélisation du facteur d’accélération
VI. CONCLUSIONS
CHAPITRE 4. MODELISATION DE LA CINETIQUE CHIMIQUE DE REACTION ENTRE LE CO2 ET L’EPICHLOROHYDRINE CATALYSEE PAR DES AMINES HETEROCYCLIQUES
I. INTRODUCTION
II. INSTALLATION
III. PROTOCOLE OPERATOIRE
IV. METHODES ANALYTIQUES
IV.1. Chromatographie gazeuse (GC-FID)
IV.2. Spectroscopie Infrarouge (FT-IR)
IV.3. Chromatographie gazeuse – spectrométrie de masse (GC-MS)
IV.4. Spectroscopie RMN
IV.5. Pyrolyse et thermo-désorption couplées à la GC-MS
IV.6. Suivi de la réaction
V. VALIDATION DU PROTOCOLE DE SUIVI DE LA REACTION
VI. INFLUENCE DES CONDITIONS OPERATOIRES SUR LA REACTION
VI.1. Suivi de la pression dans la réserve
VI.2. Analyses préliminaires
VI.3. Etude cinétique
VI.4. Répétabilité des expériences
VI.5. Influence de la pression partielle du CO2
VI.6. Influence de la température
VI.7. Influence de la concentration du catalyseur
VI.8. Influence des impuretés gazeuses sur la réaction
VII. APPROCHE STATISTIQUE DE L’INFLUENCE DES CONDITIONS OPERATOIRES DE LA REACTION
VII.1. Définition du modèle empirique
VII.2. Définition des réponses et des facteurs du système
VII.3. Définition du domaine d’étude
VII.4. Résultats du modèle statistique
VIII. MODELISATION MECANISTIQUE
VIII.1. Mécanisme A : époxyde-catalyseur
VIII.2. Mécanisme B : CO2-catalyseur
VIII.3. Mécanisme C : ter moléculaire
VIII.4. Définition des réactions chimiques
VIII.5. Construction du modèle détaillé
VIII.6. Réduction du modèle détaille : Etat quasi-stationnaire
VIII.7. Estimation et optimisation de paramètres cinétiques
VIII.8. Résultats de la modélisation
IX. CONCLUSIONS
CHAPITRE 5. SIMULATION DE LA REACTION DE CYCLOADDITION SUR ASPEN HYSYS
I. INTRODUCTION
II. DESCRIPTION DU PROCEDE
III. METHODES DE CALCUL ET SIMULATION
III.1. Unité de production de carbonate d’épichlorohydrine
III.2. Unité de récupération du catalyseur
III.3. Purification du produit
III.4. Simulation du procédé
IV. RESULTATS DE LA SIMULATION
IV.1. Bilans de matière et d’énergie
IV.2. Dimensionnement des équipements
V. ANALYSE DE SENSIBILITE
V.1. Influence de la température et du volume du réacteur
V.2. Influence du ratio molaire CO2/EPC
V.3. Influence du débit des effluents gazeux en entrée
VI. CONCLUSIONS
CONCLUSION GENERALE ET PERSPECTIVES
CONCLUSION
PERSPECTIVES
REFERENCES
ANNEXES
ANNEXE 1 : ESTIMATION DES PROPRIETES PHYSIQUES
ANNEXE 2 : ANALYSE DE LA STABILITE ET DECOMPOSITION THERMIQUE PAR DSC
ANNEXE 3 : METHODES ANALYTIQUES DE QUANTIFICATION
ANNEXE 4 : METHODES ANALYTIQUES DE CARACTERISATION
ANNEXE 5 : COEFFICIENTS OBTENUS DU MODELE STATISTIQUE
ANNEXE 6 : ENTHALPIE SPECIFIQUE DE LA REACTION
ANNEXE 7 : METHODOLOGIE DE RECUPERATION DU CATALYSEUR
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