Evolution et Pronostic
L’évolution spontanée de la MDH ne peut se concevoir que sous traitement. L’objectif de ce traitement est l’obtention d’une rémission complète (RC). Celle ci se définit comme la normalisation de toutes les anomalies cliniques, biologiques et morphologiques présentes au moment du diagnostic, pendant une durée au moins égale à 6 mois après la fin du traitement. La régression totale des adénopathies n’est pas toujours obtenue notamment dansles cas des volumineuses masses ganglionnaires médiastinales.
Après RC, l’évolution peut schématiquement se faire selon deux modalités :
La première est une RC continue dans letemps et absence de rechute. Si classiquement, la majorité des rechutes surviennent au cours des 5 premières années, l’observation des rechutes après 5 ans autorise à considérer comme guéris les seuls patients en RC continue à 10 ans.
La deuxième est la survenue d’une rechute: c’est la survenue d’une récidive après 6 mois de RC. La majoritédes rechutes survient au cours des 3 premières années maiscertaines peuvent être très tardives, d’où l’intérêt d’une surveillance prolongée.
Le pronostic d’un patient en rechute est fonction du délai de survenue de la rechute et du site de la rechute.
A ces paramètres il faut ajouter les principaux facteurs de mauvais pronostic (tableau II).
Traitement
But
Le but du traitement est d’obtenir une guérison en maintenant la continuité de la rémission complète.
Moyens
La radiothérapie est la première thérapeutique curatrice dans la MDH. Elle utilise actuellement des accélérateurs linéaires capables de pénétrer en profondeur, en épargnant la peau sans diffusion en dehors des champs. Un territoire ganglionnaire qui reçoit 35 à 40 grays à raison de 10 grays par semaine a 95% de chance d’être débarrassé de tout atteinte hodgkinien.
Des doses plus faibles peuvent faire régresser les lésions mais les rechutes locales sontalors fréquentes.
L’extension par contiguïté de la MDH rend nécessaire l’irradiation des sites ganglionnaires contigus à l’atteinte initiale. On aboutit aussi au schéma de l’irradiation par champs étendus.
Trois champs sont retenus:
– Le champ d’irradiation en mantelet, qui comprend le médiastin, les régions cervicales, sus claviculaires, etaxillaires, en utilisant des cadres de protection pour la moelle cervicale.
– Le champ d’irradiation en Y inversé, qui comprend le pédicule splénique, les aires ganglionnaires lomboaortiques, iliaques, inguinales.
– Le champ d’irradiation en Y inversé +rate, comprend en outre le parenchyme splénique
la chimiothérapie
De nombreux agents chimiothérapiques sont utilisés avec possibilité d’établir des poly chimiothérapies. La première association utilisée est MOPP (Caryolysine, Vincristine, Procarbazine et Prednisone) avec des rémissions complètes de 80 %. La deuxième association la plus couramment employée est l’ABVD (Adriamycine, Bléomycine, Vinblastine et Dacarbazine). L’ABVD permet une RC chez des patients résistants au MOPP.
Une alternance mensuelle des deuxrégimes, MOPP et ABVD, est habituellement proposée, le variant leplus utilisé de nos jours étant le MOPP/ABV hybride. Dans tous les cas les cures sont reprises tous les 28 jours (tableau III)
Association chimio-radiothérapiques
Elles ont été proposées pour augmenter les taux derémission complète et les durées de survie. Avec cette association des champs d’irradiation plus restreints sont actuellement appliqués dans le souci de réduire les complications à long terme de la radiothérapie. Si les doses curatives sont de 40 à 50 grays, la radiothérapie peut s’envisager de façon préventive en complément à la chimiothérapie, les doses alors délivrées ne dépassent pas 25 à 30 grays.
Autogreffe de moelle
Il a pour but de permettre l’utilisation de fortes doses de chimiothérapie ou radiothérapie en vue d’augmenter les taux de RC et de contourner la résistance tumorale.
L’injection de cellules souches hématopoïétiques (prélevées à partir de la moelle osseuse ou du sang périphérique), après le traitement permet d’éviter en partie la toxicité hématologique. Les divers médicaments utilisés en général comprennent de fortes doses de Cyclophosphamide, BCNU, VP16 et dans certains cas, une irradiation corporelle totale.
Les cellules souches du malade, préalablement congelées, lui sont réinjectées. Avant la prise du greffon, on observe une période d’aplasie, durant en moyenne 14 jours. Cette thérapeutique est limitée aux sujets en bon état général, de moins de 55 ans.
Indications
Pour les formes localisées: stade I et II, on recommande de réaliser 3 à 6 cures d’ABVD associées à une radiothérapie sur le sites atteints.
Pour les formes avancées, le traitement repose sur 6 à 8 cures d’ABVD, qui donne de meilleurs résultats que le MOPP, en terme d’efficacité et de moindre toxicité. L’intérêt de la radiothérapie dans ces formes disséminées est moindre si une chimiothérapie de type ABVD a été réalisée.
LES LYMPHOMES MALINS NON-HODGKINIENS
Les lymphomes non hodgkiniens (LNH) sont des proliférations malignes decellules lymphoïdes. Toutes les proliférations malignes lymphoïdes ne sont pas intégrées au cadre des LNH. Ainsi il est habituel d’en exclure les leucémies lymphoïdes qu’elles soientaiguës ou chroniques mêmes si leslimites nosologiques sont quelques peu arbitraires. Par ailleurs la malignité des LNH est définie par leur monoclonalité et s’exprime de manière très hétérogène sur le plan clinique, avecune évolutivité clinique tantôt modérée (lymphomes dit « indolents ») parfois plus élevée (lymphomes « agressifs »).
L’intérêt de l’étude des LNH s’explique par :
– L’augmentation de leur incidence, avec une faible part due à la pandémie de l’infection par le virus de l’immunodéfience humaine (VIH).
– L’amélioration de nos connaissances sur leurs mécanismes de développement regroupés sous le terme de lymphomagénèse.
– Les réels progrès thérapeutiques observés notamment dans les formes pédiatriques et d’histologie agressive.
Epidémiologie
Le LNH est actuellement l’hémopathie maligne la plus fréquente. Son incidence est en constante augmentation,ainsi en 15 ans elle a augmenté de 4 % dans les pays développés (8). Dans le monde l’incidence est élevée aux Etats unis, en Australie et en Europe de l’Ouest. En revanche, cette incidence est moindre en Espagne, en Amérique du sud et surtout au Japon. Aux Etats Unis, l’incidence est plus élevée dans les populations blanches que dans les populations noires à la différence du myélome (8).
Etiologie
Les LMNH se développent à partir de cellules constituant le tissu lymphoïde normal. Ils représentent la prolifération monoclonale de cellules lymphoïdes B ou T bloquées à un stade de différenciation donné. Lors de la transformation maligne, le lymphocyte T ou B conserve la majeure partie des Ag de différenciation et les critères morphologiques de la cellule dont il dérive (figure 1). L’étiologie des LMNHreste encore mal connue malgré les suspicions qui pèsent sur de multiples facteurs notamment :
Les facteurs immunitaires dans le cadre de l’immunodéficience congénitale, des traitements immunosuppresseurs, ou du SIDA.
Les facteurs physiques et chimiques.
Les facteurs infectieux notamment viraux.
Les facteurs environnementaux
Classification
Formulation de travail à usage clinique
En 1982, une tentative de synthèse des diverses classifications a aboutit à la proposition de la Formulation à usage clinique, cependant cette classification n’intègre pas les résultats des études immunohistochimiques. (Tableau IV)
Classification OMS
Une nouvelle classification sous l’égide de l’OMS (organisation mondiale de la santé), a été publiée en 2001. Cette classification est le résultat d’un consensus entre experts hématopathologistes, hématologues et oncologues européens et Américains (10). Son principe a consisté, comme pour la classification de REAL à définir des entités distinctes qui peuvent être reconnues par des pathologistes. Cette classification ne prévoit pas de différencier les lymphomes en faible ou haut grade malignité ou en lymphomes indolents ou agressifs. Chaqueentité est définie sur la base de données morphologique, immunophénotypique, génétique et clinique. Ainsi cette classification distingue deux entités : la classedes lymphomes B et celle lymphomes T/NK.
Différentes types de lymphomes B
Selon l’OMS on distingue :
° Les lymphomes folliculaires (20 à 25% des lymphomes)
° Les lymphomes de la zone marginale (5 à 15%) qui peuvent être à localisation extra ganglionnaire (mucosa associated lymphoïd tissue, MALT) mais aussi de présentation splénique, leucémique, ganglionnaire ou parfois disséminé.
° Les lymphomes lymphocytiques et lymphoplasmocytoïdes (5 à 10%), qui représentent la contre partie tumorale de la leucémie lymphoïde chronique.
° Les lymphomes du manteau (environ 5%)
° Les lymphomes lymphoplasmocytaires plus rare (1%)
Différents types de lymphomes T/NK
Selon L’OMS on distingue :
lymphome T périphérique SAS (sans autres spécifications) NOS (not
otherwise specified).
Lymphomes de types angio-immunoblastique
Lymphomes T/NK à grandes cellules anaplasiques.
Lymphomes T extraganglionnaires (52)
Diagnostic
Le diagnostic est souvent relativement facile et soupçonné d’emblée en fonction de la présentation clinique et de l’examen anatomo-pathologique d’un prélèvement de tissu tumoral.
Circonstance de découverte
Les modes de révélation des lymphomes sont extrêmement polymorphes, reflétant leur grande variété histologique, leurs nombreuses modalités évolutives et leurs multiples possibilités de localisations extra ganglionnaires.
Les LNH peuvent être soupçonnés devant une polyadénopathie superficielle augmentant progressivement de volume ou une localisation extra ganglionnaire évocatrice (cutanée, oto-rhino laryngée, digestive etc.), un amaigrissement ou une fièvre prolongée. Souvent en fait c’est au médecin et au chirurgien d’envisager cette possibilité devant l’aspect clinique radiologique, endoscopique ou macroscopique d’une tumeur.
Examen clinique
L’état général est apprécié par la mesure du retentissement de la maladie sur l’activité du patient. Pour cela, on utilise une échelle semi-quantitative simple et reproductible, initialement décrite par le groupe coopérateur américain Eastern cooperative oncology group (ECOG) (tableau VI).
Pronostic
Une fois le diagnostic de LNH établi, ilse pose alors le choix du traitement.
Ce dernier est directement associé à desfacteurs pronostiques qu’il faut évaluer au début, et dont vont dépendre la réponse au traitement et le devenir de la maladie. Dans les lymphomes agressifs, on dispose d’un index pronostique international établi en 1993 à partir d’une base de données internationales.
Cet index comprend 5 facteurs de risque : l’âge inférieur ou égale à 60 ans contre > 60 ans la valeur des LDH <à la normale contre > à la normale.
L’indice d’activité ECOG (0-1 contre 2-4)
Le stade d’extension I-II contre III-IV.
Le nombre de sites ganglionnaires (0-1 contre 2-4)
L’estimation du pronostic tient comptedu nombre de facteurs de risque présent au diagnostic (tableau VII).
Lymphomes lymphocytique et lymphoplasmocytoïde
Ces lymphomes se rapprochent de laleucémie lymphoïde chronique par les caractéristiques des cellules qui sont à l’origine de cette maladie. La distinction se fait par l’observation d’une lymphocytose inférieure à 10 giga/l au diagnostic. Il s’agit d’une maladie plus fréquente chez l’homme que la femme (2 hommes pour une femme) et qui surviennent chez les patients âgés d’environ 65 ans.
La maladie est généralement disséminée (80% des cas) , notamment au niveau médullaire, et les patients ont au moment du diagnostic un état général souvent conservé. Les signes révélateurs sont :
La prolifération tumorale est constituée de petites cellules lymphocytaires CD5 et CD23+. Les anomalies cytogénétiques rencontrées sont semblables à celle de la LLC, avec notamment une trisomie 12 (20%), une délétion du bras court du chromosome 13 (50%), ou du chromosome 11 (20%). L’évolution de cette maladie paraît cependant plus grave que celle de la LLC. Il existe un risque de transformation histologique vers un lymphome à grandes cellules classiquement appelé syndrome de Richter.
La médiane de survie des patients est proche de 5ans.
Lymphomes à cellules du manteau
Il s’agit d’une prolifération de cellules lymphoïdes de taille petite ou moyenne à noyaux irréguliers. La présentation clinique est habituellement ganglionnaire, parfois splénique, leucémique et souvent gastro-intestinale, responsable de la majorité des cas depolyposes lymphomateuses. Il est le plus agressif de tous ceux envisagés dans ce chapitre.
La prolifération est faite de cellules lymphomateuses, centrocytes exprimant le marqueur CD5 mais aussi CD10, CD23 et CD43 -. Cescellules lymphomateuses sont caractérisées par la translocation t(11;14) réarrangeant le gène de la cycline D1. Ces lymphomes présentent des variantes morphologiques, posant des problèmes diagnostiques.
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Table des matières
INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : REVUE DE LA LITTERATURE
I- LES LYMPHOMES HODGKINIENS
I-A) Epidémiologie
I-B) Pathogénie
I-C) Diagnostic
I-C-1/ Manifestations cliniques
I-C-2/ Diagnostic biologique
I-C-3/ Diagnostic différentiel
I-C-4/ Bilan de la maladie
I-D) Evolution et Pronostic
I-E) Traitement
I-E-1/But
I-E-2/Moyens
I-E-3/Indications
II- LYMPHOMES MALIN NON HODGKINIEN (LMNH)
II-A) Epidémiologie
II-B) Etiologie
II-C) Classification
II-C-1 : Formulation de travail à usage clinique
II-C-2 : Classification de REAL
II-C-3 : Classification de l’OMS
II-D) Diagnostic
II-D-1/ Circonstances de découverte
II-D-2/ Examen clinique
II-D-3/ Examens biologiques
II-E/ Bilan d’extension des LMNH
II-F/ Pronostic
II-G/ Etude analytique
II-G-1/ LNH de Phénotype B
II-G-2/ LNH de Phénotype T/NK
II-H/ Traitement des LNH
III- RELATIONS LYMPHOMES ET VIRUS
III-A) Généralités
III-B) Epstein Barr virus et lymphomes
III-B-1/ Rappel sur l’EBV
III-B-2/ Lymphomes associés à l’EBV
III-C) HHV-8 et lymphomes
III-D) HTLV-1 et lymphomes
III-E) Les virus des hépatites et les lymphomes
III-F) Lymphomes et VIH
DEUXIEME PARTIE : TRAVAIL PERSONNEL
I- MATERIEL ET METHODES
I-A) Population étudiée
I-B) Méthodes
I-C) Analyse statistique
II- RESULTATS
II-A) Description de la population étudiée
II-B) Aspects diagnostiques
II-C) Association lymphomes et virus
II-C-1/ Lymphomes et virus de l’Hépatite B
II-C-2/ Lymphomes et virus de l’Hépatite C
II-C-3/ Lymphomes et VIH
II-C-4/ Lymphomes et HTLV
III- Discussion
III-A) Aspects épidémiologiques des lymphomes
III-B) Lymphomes et Virus de l’Hépatite B
III-C) Lymphomes et Virus de l’Hépatite C
III-D) Lymphomes et VIH
III-E) Lymphomes et HTLV
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE
ANNEXES