Tรฉlรฉcharger le fichier pdf d’un mรฉmoire de fin d’รฉtudes
PSYCHOPATHOLOGIE
Les CPNE ont รฉtรฉ dโabord considรฉrรฉes comme des crises รฉpileptiques. Le Diagnostic and Statical Manual of Mental Disorders (DSM) IV [7] a remplacรฉ ce terme par celui de troubles somatoformes. Suivant ses critรจres diagnostiques, les CPNE sont classรฉes dans le sous-groupe de troubles de conversion.
Dans la Classification Internationale des Maladies (CIM-10) [31] les CPNE sont classรฉes dans les troubles dissociatifs, ce qui dโun point de vue psychopathologique parait plus pertinent pour de nombreux auteurs [25, 99].
La dรฉfinition des troubles dissociatifs est la suivante : ยซ Les divers troubles dissociatifs (ou de conversion) ont en commun une perte partielle ou complรจte des fonctions normales dโintรฉgration des souvenirs, de la conscience de lโidentitรฉ ou des sensations immรฉdiates et du contrรดle des mouvements corporels. Dans le passรฉ, ces troubles ont รฉtรฉ classรฉs psychogรจnes, dans la mesure oรน ils surviennent en relation temporelle รฉtroite avec des รฉvรจnements traumatiques, des problรจmes insolubles et insupportables ou des relations interpersonnelles difficiles. Les symptรดmes traduisent souvent lโidรฉe que se fait le sujet dโun tableau dโune maladie physique. Lโexamen mรฉdical et les examens complรฉmentaires ne permettent pas de mettre en รฉvidence un trouble physique (en particulier neurologique) connu. Par ailleurs, on dispose dโarguments pour penser que la perte dโune fonction est dans ce trouble lโexpression dโun conflit ou dโun besoin psychique. Les symptรดmes peuvent se dรฉvelopper en relation รฉtroite avec un facteur de stress psychologique et ils surviennent souvent brusquement. La possibilitรฉ de survenue ร une date ultรฉrieure dโun trouble physique ou psychiatrique grave doit รชtre gardรฉe ร lโesprit. ยป
Cette dรฉfinition englobe les antรฉcรฉdents, les hypothรจses psychopathologiques, les facteurs dรฉclenchants et certaines caractรฉristiques cliniques. La description clinique des CPNE est ainsi beaucoup bien comprise ร la lumiรจre de la phrase : ยซ Les symptรดmes traduisent souvent lโidรฉe que se fait le patient du tableau clinque dโune maladie physique ยป.
Si par souci dโharmonisation, le terme de CPNE devrait รชtre rรฉservรฉ ร des troubles dissociatifs, trois autres entitรฉs peuvent รชtre responsables de manifestations paroxystiques pouvant donner le change avec les crises รฉpileptiques : Les troubles factices dont le syndrome de Mรผnchhausen, la simulation et les troubles de panique.
La psychopathogรฉnie des CPNE ยซ pures ยป dโorigine dissociative nโest pas clairement รฉlucidรฉe [96]. Le mรฉcanisme proposรฉ est le suivant :
A la suite dโun รฉvรจnement traumatisant, violences physiques et sexuelles dans la petite enfance le plus souvent, un premier processus de dissociation est gรฉnรฉrรฉ. Il sโagit dโun processus de dรฉfense qui entraine un clivage de la mรฉmoire et de la conscience permettant de supprimer du champ de la conscience le souvenir de ces รฉvรจnements et les sentiments qui sโy rapportent.
Une fois initiรฉ, ce mรฉcanisme de dissociation est ensuite pรฉrennisรฉ comme mรฉcanisme de dรฉfense contre les situations stressantes ou conflictuelles. Dans ce contexte, les CPNE peuvent รชtre considรฉrรฉes comme le tรฉmoignage non verbal dโun contenu mental dissociรฉ pouvant exprimer des affects (peur , colรจre , tristesse), des conflits psychologiques ou de rappel comportemental dโexpรฉriences traumatiques (par exemple, mouvements dโantรฉpulsion pelviens chez des victimes dโabus sexuels) [25, 54, 49] .
Quatre types principaux dโรฉvรจnements sont incriminรฉs dans la survenue des CPNE :
violences physiques et sexuelles dans lโenfance : Cโest lโรฉvรจnement le plus frรฉquemment rencontrรฉ (jusquโร 50%) [24]. On peut y rajouter lโabandon ou le rejet parental ;
Traumatismes ร lโรขge adulte : Il peut sโagir de violences physiques ou sexuelles ou de traumatismes mรชme minimes ;
Deuil ou anniversaire de dรฉcรจs : Les divorces ou le dรฉpart dโenfants de la maison ont รฉtรฉ รฉgalement incriminรฉs;
Stress aigus ou situationnels : Cela concerne les conflits familiaux, domestiques, professionnels ou scolaires, les affections mรฉdicales ou chirurgicales, les problรจmes judiciaires, etc.
Ces diffรฉrentes situations peuvent dรฉclencher des CPNE, soit isolรฉment, soit en rรฉactivant des รฉmotions liรฉes ร un traumatisme ancien. Il peut sโagir dโun รฉvรจnement nโayant aucun contenu รฉmotionnel particulier (anniversaire dโun enfant correspondant ร lโรขge auquel sa mรจre a vรฉcu un รฉvรจnement traumatique, etc.) [27].
Enfin, les patients prรฉsentant des CPNE ont frรฉquemment une comorbiditรฉ psychiatrique. Il peut sโagir de troubles affectifs, anxieux, dรฉpressifs ou dโun stress post-traumatique [109]. Les troubles de la personnalitรฉ seraient plus frรฉquents en cas dโassociation CPNE-รฉpilepsie [59].
Il est probable que ces mรฉcanismes psychopathologiques soient facilitรฉs par la coexistence dโanomalies cรฉrรฉbrales organiques, ce dont attestent chez ces patients non seulement la prรฉvalence supรฉrieure ร la moyenne de la population de lโรฉpilepsie, mais aussi des anomalies de lโimagerie par rรฉsonnance magnรฉtique (IRM) encรฉphalique [98]. Dans un quart ou un tiers des cas [133], les CPNE font suite ร un traumatisme crรขnien. Contrairement ร lโรฉpilepsie post- traumatique, ces traumatismes sont le plus souvent minimes ou modรฉrรฉs. Cette notion doit รชtre connue pour รฉviter de dรฉbuter des traitements antiรฉpileptiques inutiles en cas dโapparition de manifestations paroxystiques aprรจs un traumatisme crรขnien sans gravitรฉ.
๏ถ Approche psychosomatique de la somatisation
๏ผ La psychosomatique dโinspiration selon Pierre MARTY
Selon Pierre Marty, reprenant lโessentiel des concepts de Freud [45, 46] relatifs au rรดle principal jouรฉ par lโappareil psychique : Les individualitรฉs que nous sommes se trouvent soumises tous les jours ร un certain nombre dโexcitations dโorigine externe et interne. Les รฉvรจnements et les situations qui se prรฉsentent ร nous touchent notre affectivitรฉ et dรฉclenchent des excitations quโil convient de dรฉcharger et dโรฉcouler. Nos principales possibilitรฉs dโรฉcoulement et de dรฉcharge rรฉsident, dโune part, dans un travail mental des excitations ressenties, ce qui est le rรดle principal jouรฉ par lโappareil psychique [44], dโautre part, dans des comportements moteurs et sensoriels diffรฉremment liรฉs ou non au travail mental. ยซ Le principe de somatisation est le suivant : lorsque les excitations qui se produisent en nous ne sโรฉcoulent pas ou ne se dรฉchargent pas, elles sโaccumulent et atteignent tรดt ou tard de maniรจre pathologique les appareils somatiques ยป [71]. Pour se dรฉcharger, les excitations peuvent emprunter, soit la voie de lโรฉlaboration mentale, soit la voie des comportements, soit la voie somatique. La voie de lโรฉlaboration mentale se trouve freinรฉe ou entravรฉe dans le cas dโinsuffisance des reprรฉsentations mentales (reprรฉsentation des choses et reprรฉsentation des mots). Pierre Marty insiste sur lโorganisation et la structuration du prรฉconscient, ยซ plaque tournante de lโรฉconomie psychosomatique ยป [70]. Lโappareil psychique ne se constitue pas, รฉcrit-il, ร lโidentique chez tous les individus ; ce sont donc ยซ ces insuffisances de dรฉveloppement psychique ยป qui sont ร lโorigine de fragilitรฉs de fonctionnement rรฉvรฉlรฉes lors des investigations de patients somatiques.
Les excitations peuvent emprunter la voie des comportements qui repose sur des activitรฉs sensorielles et motrices. Elle est diminuรฉe ou impossible ร mettre en ลuvre lors des rรฉductions totales ou partielles, occasionnelles ou dรฉfinitives des sensorialitรฉs ou de la motricitรฉ. ยซ Lorsque les excitations qui se produisent en nous ne se dรฉchargent pas dans lโactivitรฉ des comportements, et ne sโรฉcoulent pas dans lโรฉlaboration mentale, elles sโaccumulent et atteignent tรดt ou tard les appareils somatiques et neuronaux de maniรจre pathologique ยป [71]. Lโรฉlaboration mentale se trouve freinรฉe ou barrรฉe dans les cas des insuffisances des reprรฉsentations ou de dรฉsorganisation mentale. Lโinsuffisance des reprรฉsentations rรฉsulte des avatars du dรฉveloppement de lโappareil psychique et les dรฉsorganisations mentales surviennent, soit ร la suite de perte ยซ dโobjets ยป soutenant le fonctionnement mental du sujet (par exemple, perte de parents ou de proches etc.), soit ร la suite de conflits non รฉlaborables par le sujet seul. Nous faisons allusion ici aux situations traumatiques permanentes ou aux conflits intrapsychiques. Les dรฉsorganisations mentales surviennent aussi ร la suite de la perte du cadre de vie assurant lโhomรฉostasie mentale, psychique et somatique du sujet, et enfin ร la suite de conflits non รฉlaborables par lui-mรชme. Il existe aussi des conflits dans la rรฉalitรฉ (pesรฉe traumatique permanente : รฉvรจnements graves de la vie, licenciement, divorce, engagements financiers, sources de stress multiples) : il sโagit de situations de stress permanent [118, 120]. Quant ร lโactivitรฉ des comportements, elle se trouve freinรฉe ou barrรฉe dans le cas de maladies physiques, dโinvaliditรฉ post-accidentelle, dโinvaliditรฉ due au vieillissement, de rรฉpression des comportements parce quโils possรจdent une charge sexuelle ou agressive. Nous tenons ร signaler que lโaccumulation dโexcitations telles que les excitations de lโรขge adulte ร lโoccasion dโรฉvรจnements ou de situations ayant une valeur traumatique rรฉactive souvent des traumatismes passรฉs.
๏ผ Processus de somatisation selon lโapproche de la psychosomatique intรฉgrative (thรฉorie psychodynamique)
La psychosomatique intรฉgrative nโest pas lโintรฉgration de la psychanalyse, de la mรฉdecine et des neurosciences ; elle a pour objectif, en se rรฉfรฉrant ร la thรฉorie des systรจmes, de rechercher les interrelations entre ces trois disciplines et dโรฉtablir les liens existants entre les nombreux niveaux du vivant. Elle se rapproche aux sciences du vivant [39], distinguant des niveaux dans le continuum de lโunitรฉ psychosomatique humaine. La comprรฉhension du fonctionnement de lโunitรฉ somatique exige de se rรฉfรฉrer ร de nombreuses disciplines des sciences du vivant dans les neurosciences. Nous avons รฉmis lโhypothรจse que lโunitรฉ psychosomatique humaine est un ยซ systรจme de systรจmes ยป [130], complรจtement intรฉgrรฉ au terme dโun long processus de maturation psychosexuelle, biologique et neuronale. Ces processus aboutissent ร lโรฉdification dโorganisations somatopsychiques [119] ; intรฉgration signifiant coordination, communication et gestion des systรจmes au niveau global. Les organisations psychiques ne sont pas รฉtablies une fois pour toutes ; elles sont en รฉvolution constante avec des remaniements des reprรฉsentations mentales. Il en est de mรชme pour le systรจme nerveux central dont la plasticitรฉ et les connexions synaptiques รฉvoluent jusquโร la fin de la vie de lโindividu. La part de la contribution de lโappareil psychique aux maladies somatiques dans cet ensemble ยซ varie considรฉrablement ยป selon lโhistoire personnelle individuelle, la composante gรฉnรฉtique, lโhistoire des diffรฉrentes maladies et les diffรฉrentes situations familiales et professionnelles auxquelles lโindividu est confrontรฉ. Quel que soit le degrรฉ de mentalisation, nul nโest ร lโabri des somatisations. Dans le modรจle global dynamique proposรฉ dans ce chapitre le quantum dโexcitations est pris en charge ยซ simultanรฉment ยป par : le systรจme ou appareil psychique
(modรจles de Sigmund Freud et Pierre Marty), le systรจme nerveux central, le systรจme nerveux autonome, le systรจme immunitaire et le systรจme gรฉnรฉtique ou gรฉnome. Ces cinq systรจmes sont en interrelation les uns avec les autres [32] et traitent chacun, selon son fonctionnement, les donnรฉes en provenance de lโenvironnement interne ou externe. Il sโagit de ยซ systรจmes complexes ouverts dissipatifs dโรฉnergie ยป [95, 94], et non de systรจmes fermรฉs. Les lois de Carnot รฉvoquรฉes par Sigmund Freud pour le principe dโรฉconomie ont รฉtรฉ รฉtablies pour des systรจmes fermรฉs, ce que ne sont pas les รชtres vivants.
๏ถ Le modรจle a double commande
Lorsque le systรจme psychique dysfonctionne, le systรจme nerveux central prend la relรจve [32] immรฉdiatement. Le dรฉbordement de lโappareil psychique est souvent causรฉ par une ou des sรฉries de traumatismes, qui le court-circuitent temporairement, si bien que les excitations font lโobjet dโun traitement ร un autre niveau du vivant. Le traumatisme actuel peut rรฉactiver un traumatisme passรฉ, mรฉmorisรฉ sous forme de reprรฉsentations mentales ou non dans lโhippocampe, les ganglions de la base et le tronc cรฉrรฉbral ainsi que dans le systรจme limbique. Lโappareil psychique peut รชtre dรฉbordรฉ temporairement, ou de faรงon permanente, entravant son fonctionnement car il peut รชtre sidรฉrรฉ, puis reprendre une activitรฉ de faรงon irrรฉguliรจre. Lโappareil psychique a un temps de latence de 24 ร 48 heures en moyenne pour commencer un travail dโรฉlaboration satisfaisant.
Pendant ce temps de latence, les diffรฉrents systรจmes neuronaux et somatiques rรฉagissent selon un rythme pulsatile ; les excitations sont transmises au niveau du systรจme nerveux central, plus spรฉcifiquement ร lโaxe hypothalamo-hypophyso-surrรฉnalien qui interprรจte en fonction de sa programmation gรฉnรฉtique les excitations en terme de comportements de ยซ lutte ou de fuite ยป afin dโassurer la survie de lโorganisme. ยซ Le systรจme psychique participe plus ou moins
grandement ยป aux processus de somatisation et les rรฉgressions psychiques induites par lโexcรจs dโexcitation sont trรจs souvent accompagnรฉes de troubles somatiques qui peuvent sโaggraver avec la permanence des excitations. Lโhypothรจse est la suivante : Lorsquโun รฉvรจnement de nature traumatique dont lโintensitรฉ รฉmotionnelle est trรจs รฉlevรฉe de faรงon ponctuelle survient, il sโeffectue alors au niveau de lโappareil psychique des dรฉliaisons avec les reprรฉsentations mentales et les affects. Si le travail psychique ne peut sโeffectuer dans un dรฉlai raisonnable, le quantum dโexcitations ne peut รชtre traitรฉ dans lโappareil psychique ; il est alors transmis au niveau des sous-systรจmes neuronaux qui vont activer les diffรฉrents systรจmes biologiques de dรฉfense de lโorganisme en interprรฉtant ces excitations comme une menace dรฉclenchant alors des processus neurohormonaux dโadaptation.
๏ผ Les quatre systรจmes fondamentaux de rรฉponse neuronale (thรฉorie neurobiologique)
Selon J. Panksepp [90], on peut distinguer quatre sous-systรจmes fondamentaux de commande neuronale des รฉmotions :
Le systรจme exploratoire ;
le systรจme de rรฉaction de rage et de colรจre suite ร une agression ;
Le systรจme de rรฉaction de peur ;
Le systรจme de sรฉparation-dรฉtresse ou systรจme panique plus spรฉcialement liรฉ au sentiment de perte ou de tristesse.
Nous pensons que le quantum dโexcitations, selon la nature de lโagressivitรฉ ou de la perte dโobjet, se transmet ร lโun des trois sous-systรจmes qui lโinterprรจte selon son fonctionnement propre [119]. Le systรจme de rรฉaction de colรจre ou de rage est activรฉ par des rรฉactions de frustration qui le mettent en ลuvre. Ce systรจme possรจde des programmes de rรฉaction motrice ร la perception de lโagression : la rรฉponse de combat. Toutes les fonctions du corps sont mobilisรฉes au niveau du systรจme nerveux autonome pour prรฉparer lโรชtre humain ร se battre : accroissement du rythme cardiaque, redirection du flux sanguin vers la musculature, blocage du systรจme digestif, du sphincter anal et des dรฉsirs sexuels. Tous ces changements sont orchestrรฉs par des projections neuronales de lโamygdale (situรฉ dans le lobe temporal) reliรฉ au systรจme hypothalamique. Lorsque ce systรจme est faiblement activรฉ, il est dรฉclenchรฉ par ce que lโon pourrait appeler de lโirritabilitรฉ due ร la frustration dโactivitรฉs qui nโont pu รชtre rรฉalisรฉes.
Le systรจme de rรฉaction de peur, gรฉnรฉrant des sentiments dโanxiรฉtรฉ, est ร lโorigine des rรฉactions de fuite. Ce sont les parties centrale et nuclรฉique du complexe de lโamygdale qui sont le cลur dโun tel systรจme. A partir de lโamygdale, il existe des projections neuronales vers lโhypothalamus antรฉrieur et mรฉdian. Les rรฉactions motrices de ce systรจme sont proches de celles du systรจme de rage-colรจre avec comme diffรฉrence une transmission des excitations au niveau viscรฉral : diarrhรฉes par exemple.
Le systรจme de sรฉparation-dรฉtresse ou systรจme panique est non seulement associรฉ avec de lโangoisse gรฉnรฉrรฉe par la panique mais aussi avec les sentiments de tristesse et de perte accompagnant souvent les affects dรฉpressifs. Le cลur neuronal dโun tel systรจme est le gyrus cingulaire qui a des connexions avec des nombreux nuclei thalamiques et hypothalamiques. La neurochimie de ce systรจme est dominรฉe par les opioรฏdes endogรจnes ; il semble aussi que lโocytocine et la prolactine soient impliquรฉes dans la mise en ลuvre de ce systรจme qui relie des mรฉcanismes รฉmotionnels causรฉs par la crainte de la sรฉparation et le comportement maternel. On peut comprendre alors que les opioรฏdes endogรจnes aient pour rรดle de rรฉduire considรฉrablement les sentiments de douleur liรฉs ร la sรฉparation dโun objet aimรฉ ou bien ร sa perte. De nombreux systรจmes somatiques sont sollicitรฉs au cotรฉ du systรจme psychique et du systรจme nerveux central pour rรฉtablir lโensemble des รฉquilibres puisque nous sommes dans un univers multisystรจmes.
DIAGNOSTIC POSITIF
Les manifestations cliniques des CPNE sont de deux types principaux:
Mouvements anormaux des quatre membres avec chute pris ร tort pour des crises tonicocloniques gรฉnรฉralisรฉes dโemblรฉe ou secondairement.
Des รฉtats de non-rรฉponse isolรฉs ou avec ยซ automatismes ยป pris ร tort pour des absences ou des crises partielles complexes.
Des CPNE avec symptรดmes moteurs focaux sont plus rares [56].
Le diagnostic dโune CPNE est dโabord un diagnostic dโexclusion dโune crise รฉpileptique [43]. Or, le diagnostic de crises รฉpileptiques est en rรจgle gรฉnรฉrale basรฉe sur la description de tรฉmoins plus ou moins directs et confortรฉ (mais dans 60 ร 80% des cas seulement) par la prรฉsence de graphoรฉlรฉments paroxystiques ร lโEEG [82]. Il est rare que le mรฉdecin assiste ร la crise, le diagnostic repose donc sur la pertinence et la prรฉcision de sa description par les tรฉmoins. Or, cette description est souvent imprรฉcise et incorrecte, quโelle soit faite par lโentourage du patient [111] ou mรชme par des รฉtudiants en mรฉdecine ou des internes [69]. Dans cette derniรจre publication, vingt volontaires dont dix รฉtudiants en mรฉdecine et quatre internes en neurologie ont dรป dรฉcrire une crise partielle secondairement gรฉnรฉralisรฉe quโils avaient vue en vidรฉo. Cette crise avait huit caractรฉristiques principales. Chaque item comptait pour un point. Un point รฉtait retirรฉ en cas de description erronรฉe. Le score maximal pouvant รชtre obtenu est de 8. Les rรฉsultats allaient de -2 ร 6. Le score le plus faible รฉtait obtenu par un interne en neurologie.
A la lecture de ces rรฉsultats chez des professionnels de santรฉ, on imagine facilement les erreurs, les imprรฉcisions et les approximations que peut rapporter le tรฉmoin dโune crise qui est survenue de faรงon impromptue, qui avait de plus des caractรฉristiques motrices bruyantes.
Les mรชmes rรฉserves peuvent รชtre faites pour lโEEG qui nโest pas spรฉcifique. Il a รฉtรฉ retrouvรฉ des graphoรฉlรฉments paroxystiques ร lโEEG, focaux ou gรฉnรฉralisรฉs, chez 2,6% des candidats ร lโentrรฉe ร lโUS Air Force. Le pourcentage de sujets sains ayant ร lโEEG des activitรฉs paroxystiques spรฉcifiques varie suivant les รฉtudes entre 0,2 et 6,4% [83].
Les รฉlรฉments anamnestiques et cliniques faisant รฉvoquer des CPNE sont les suivants :
Elรฉments anamnestiquesย
Frรฉquence รฉlevรฉe des crises souvent pluriquotidiennes ;
Pharmacorรฉsistance malgrรฉ une bonne observance attestรฉe par les taux sรฉriques dโantiรฉpileptiques ;
Rรฉponse paradoxale aux antiรฉpileptiques (la frรฉquence des crises augmente avec lโaugmentation du nombre et de la posologie des antiรฉpileptiques) ;
Survenue systรฉmatique des crises en sociรฉtรฉ ou ร lโinverse ร lโabsence de tรฉmoins ;
Relative indiffรฉrence vis-ร -vis de la sรฉvรฉritรฉ de son affection et du handicap quโelle occasionne ;
Antรฉcรฉdents de violences physiques ou sexuelles ;
Notion dโรฉpilepsie dans lโentourage familial ou professionnel (patient souvent tรฉmoin de crises รฉpileptiques). Il sโagit dโune notion quโil est important de rechercher de faรงon systรฉmatique ;
Multiples hospitalisations aux urgences pour crises ou รฉtats de mal รฉpileptiques [87] ;
Raretรฉ des lรฉsions occasionnรฉes par les crises. La sรฉvรฉritรฉ des lรฉsions est un bon indicateur de celle de la pathologie.
Critรจres cliniques et รฉlectroencephalographiques
Aucun de ces signes nโest spรฉcifique mais leur association peut constituer un bon รฉlรฉment dโorientation. Lโinterrogatoire des tรฉmoins permet de prรฉciser les circonstances dโapparition et les sรฉquences cliniques pendant et aprรจs la crise. Lโinterrogatoire du patient permet de dรฉtailler les facteurs dรฉclenchants, la prรฉsence de signaux-symptรดmes et les symptรดmes postcritiques.
Lโรฉtape suivante est celle de lโobservation directe chez un patient enregistrรฉ en vidรฉo-EEG. LโEEG critique a une spรฉcificitรฉ absolue, il permet de mettre en รฉvidence une crise รฉlectrique ou mรชme une souffrance postcritique. En revanche, il peut รชtre non informatif, soit du fait de la prรฉsence dโartรฉfacts mรฉcanographiques qui gรชnent lโinterprรฉtation [23], soit en cas de foyers profonds, en particulier dans la rรฉgion frontale.
Si le gold standard du diagnostic de CPNE est lโobservation directe dโun รฉpisode en vidรฉo-EEG, il arrive quโaucun รฉpisode ne soit enregistrรฉ spontanรฉment, y compris au cours dโhospitalisation prolongรฉe. Il est dans ce cas tentant de provoquer une crise par lโinjection dโun placebo. Lโutilisation de cette technique reste dรฉbattue. Certains sont contre pour des raisons รฉthiques [47] ou pratiques (peu de rentabilitรฉ, risque de provoquer une crise gรฉnรฉralisรฉe tonicoclonique). La plupart des auteurs sont pour, le plus souvent par
pragmatisme ou souci dโefficacitรฉ [14, 132], voire mรชme ร but thรฉrapeutique en permettant de mieux prรฉciser les modalitรฉs de la prise en charge psychothรฉrapique ultรฉrieure [132].
Bien sรปr ce procรฉdรฉ nโa dโintรฉrรชt quโen cas de dรฉclenchement du type de crises habituellement prรฉsentรฉes par le patient. Si pour diverses raisons, ce type de procรฉdure nโest pas retenu, il est possible dโemployer de simples techniques de suggestion associรฉes ร lโhyperpnรฉe et la stimulation lumineuse intermittente (SLI), qui donneraient des rรฉsultats aussi probants [74].
On peut en rapprocher lโhypnose qui peut dรฉclencher des CPNE ou permet un rappel de leur contenu.
Les principales diffรฉrentiations entre CPNE et crises gรฉnรฉralisรฉes tonicocloniques sont rรฉsumรฉes dans le tableau 1, celles entre les CPNE et les absences ou crises partielles complexes dans le tableau 2. Il faut rappeler quโaucun des signes pris sรฉparรฉment nโa de valeur spรฉcifique.
Ainsi par exemple, des CPNE ont รฉtรฉ enregistrรฉs pendant le sommeil (sous contrรดle vidรฉo-EEG) [84] alors que cette caractรฉristique รฉtait jusquโalors considรฉrรฉe comme pathognomonique de lโรฉpilepsie.
Paramรจtres biologiques
Le dosage sรฉrique de la neuron specific enolase (NSE) [123] et de la prolactine [6] a peu dโintรฉrรชt pour distinguer des CPNE et des crises gรฉnรฉralisรฉes tonicocloniques. En revanche, lโรฉlรฉvation des crรฉatine-phosphokinases (CPK)
[67] et surtout des lactates veineux [51] a un bon pouvoir discriminant. Le dosage le plus pertinent semble รชtre celui des lactates veineux dont lโรฉlรฉvation serait ร la fois consรฉcutive ร une รฉlรฉvation percritique des catรฉcholamines et au mรฉtabolisme aรฉrobie et anaรฉrobie musculaire pendant la phase tonicoclonique.
DIAGNOSTIC DIFFERENTIEL
Dans les derniรจres annรฉes, le dรฉveloppement de lโรฉpileptologie, lโavรจnement de la vidรฉo-EEG et la crรฉation dโunitรฉs dโexploration et de traitements de lโรฉpilepsie ont permis la prise en compte plus systรฉmatique des CPNE, dans les hypothรจses diagnostiques devant les manifestations paroxystiques rรฉpรฉtรฉes.
Pour certains auteurs (92), ces crises sont mรชme parfois diagnostiquรฉes par excรจs.
Ce diagnostic par excรจs concerne essentiellement deux types de situation :
Les crises รฉpileptiques avec manifestations comportementales prรฉdominantes et/ou de sรฉmiologie motrice inhabituelle et/ou pour lesquelles lโEEG (y compris critique) nโest pas informatif ;
Les รฉvรจnements paroxystiques physiologiques ou organiques non รฉpileptiques.
Crises รฉpileptiques
Si les CPNE prises ร tort pour des crises รฉpileptiques ont une sรฉmiologie รฉvocatrice de crises gรฉnรฉralisรฉes tonicocloniques ou dโabsence, les crises รฉpileptiques considรฉrรฉes ร tort comme psychogรจnes le sont du fait de modifications comportementales ou de sรฉquences gestuelles inhabituelles ou bizarres.
Les sรฉquences gestuelles concernent plutรดt les crises frontales, et les modifications comportementales, les crises dโorigine temporale.
Les crises frontales
Les crises frontales sont souvent confondues ร des CPNE probablement parce que plusieurs de leurs caractรฉristiques ont servi ร dรฉfinir les CPNE :
Automatismes gestuels complexes ;
Attitude pseudomasturbatoire ;
mouvements rythmiques du bassin ;
hurlements rรฉpรฉtitifs ;
Manifestations motrices asynchrones ;
Crise motrice bilatรฉrale sans trouble de la conscience ;
Arrรชt quasiment instantanรฉ ;
Absence dโanomalie intercritique et souvent mรชme critique ร lโEEG.
Certaines topographies sont plus particuliรจrement en cause.
Crises de lโaire motrice supplรฉmentaire
Manifestations motrices bilatรฉrales ;
Arrรชt de la parole ou vocalisations sans trouble de la conscience.
Crises du gyrus cingulaire antรฉrieur
Frayeur, puis vocalisations complexes, hurlements, sรฉquences gestuelles complexes et manifestations รฉmotionnelles.
Crises orbitofrontales
On note en pรฉriode critique des sรฉquences gestuelles complexes, manifestations thymiques, manifestations posturales complexes. Dans ces crises, lโEEG est souvent peu informatif du fait des artรฉfacts รฉlectromyographiques et mรฉcanographiques. Les รฉlรฉments qui orientent vers une origine รฉpileptique sont les suivants : durรฉe brรจve, survenue pendant le sommeil, dรฉbut dans lโenfance ou lโadolescence, anomalies IRM [10 ,112 ,48 ,30]. Le caractรจre stรฉrรฉotypรฉ des crises nโest pas un รฉlรฉment discriminant [50].
Crises temporales
Les phรฉnomรจnes dysmnรฉsiques et sensoriels des crises temporales sont maintenant bien codifiรฉs et rarement confondus avec des CPNE. Le diagnostic peut รชtre difficile en cas de crises dont le contenu principal est รฉmotionnel : anxiรฉtรฉ, peur, tristesse, surtout en cas dโintrication ร des hallucinations ou ร des automatismes gestuels.
Episodes paroxystiques physiologiques ou organiques non รฉpileptiques
Dans la pratique courante, trois situations principales sont rencontrรฉes :
Les pertes de connaissance ;
Les mouvements anormaux et les phรฉnomรจnes moteurs paroxystiques ; Les troubles du sommeil.
On peut รฉgalement citer les migraines, les accidents ischรฉmiques transitoires, lโhรฉmiplรฉgie alternante du nourrisson et les troubles mรฉtaboliques.
|
Table des matiรจres
INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : REVUE DE LA LITTERATURE
I.DEFINITION
II.TERMINOLOGIE
III.HISTORIQUE
IV.EPIDEMIOLOGIE
V.PSYCHOPATHOLOGIE
VI.DIAGNOSTIC POSITIF
VI.1.รlรฉments Anamnestiques
VI.2.critรจres cliniques et รฉlectroencรฉphalographiques
VI.3.paramรจtres biologiques
VII.DIAGNOSTIC DIFFERENTIEL
VII.1.crises รฉpileptiques
VII.1.1.crises frontales
VII.1.2.crises de lโaire motrice supplรฉmentaire
VII.1.3.crises du gyrus cingulaire antรฉrieur
VII.1.4.crises orbitofrontales
VII.1.5.Crises temporales
VII.2. Episodes paroxystiques physiologiques ou organiques non physiologiques
VII.2.1.Syncopes
VII.2.2. Les mouvements anormaux et phรฉnomรจnes moteurs paroxystiques
VII.2.2.1.Hyperekplexia
VII.2.2.2.Syndrome de sandifer
VII.2.2.3.Torticolis paroxystique bรฉnin
VII.2.2.4. Vertiges paroxystiques bรฉnins
VII.2.2.5.Mouvements rituels
VII.2.2.6.Accรจs de masturbation
VII.2.2.7.Syndrome ataxo-opso-myoclonique
VII.2.2.8.Choreoathetose paroxystique kinesigenique
VII.2.2.9. Dystonies paroxystiques
VII.2.2.10. Tics
VII.2.3. Troubles du sommeil
VII.2.3.1. Myoclonies du sommeil calme
VII.2.3.2. Myoclonies dโendormissement ou de rรฉveil
VII.2.3.3. Rythmies du sommeil
VII.2.3.4. Terreurs nocturne
VII.2.3.5.Somnambulisme
VII.3.Autres รฉpisodes paroxystiques physiologiques ou organiques
VII.3.1. Migraine
VII.3.2.Hemiplegie alternante
VII.3.3. Accidents ischรฉmiques transitoires
VII.3.4. Hypoglycemies
VII.4. Autres manifestations paroxystiques ร mรฉdiation psychogรจne
VIII. ASSOCIATION CRISES PSYCHOGENES NON EPILEPTIQUES ET EPILEPSIE
IX. DIAGNOSTIC ETIOLOGIQUE
IX.1.Traumatisme
IX.2. Dissociation
IX.3.La somatisation
IX.4.Troubles de la personnalitรฉ
IX.5.Comorbiditรฉ psychiatrique
IX.6.Age
IX.7.Troubles du comportement
IX.8.Genre
IX.9.Organicitรฉ
IX.10. Corrรฉlats neurobiologiques en imagerie fonctionnelle
X.PRISE EN CHARGE ET PRONOSTIC
X.1.Prise en charge
X.2.Pronostic
DEUXIEME PARTIE : PRESENTATION DE LโETUDE
I.METHODOLOGIE
I.1. Objectifs
I.2. Types dโรฉtude
I.3.Cadre dโรฉtude
I.4.Pรฉriode dโรฉtude
I.5. Variables รฉudiรฉes
I.6.Population dโรฉtude
I.7. Echantillonnage
I.8.Matรฉriel et mรฉthodes
I.9.Entretien psychiatrique
II.RESULTATS
III. COMMENTAIRES
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE
Tรฉlรฉcharger le rapport complet