Epidemiologie du paludisme dans la zone transfrontalière entre la Thaïlande et le Myanmar

Ecologie et géographie 

L’Asie du Sud-Est 

L’écologie de l’Asie du Sud-Est (ASE) et ses corollaires pour comprendre l’entomologie du paludisme ont été revus par Morgan et al. (Morgan et al., 2013). L’ASE est une région qui s’étend depuis la frontière orientale de l’Inde jusqu’à l’Ouest de la Papouasie-Nouvelle-Guinée et du Sud de la Chine à l’Indonésie (Figure I). L’ASE est divisée en deux sous-régions : la sousrégion continentale (Birmanie, Thaïlande, Laos, Cambodge, Vietnam et péninsule malaisienne) et la sous-région insulaire (Indonésie, Philippines, Malaisie orientale, Brunei, Singapour et Timor-Est). Sur le plan écologique, cette région est caractérisée par une très grande diversité des espèces et des écosystèmes (Round et al., 2003, Hughes et al., 2011, Woodruff and L.M., 2009). Il est possible de distinguer quatre zones biogéographiques différentes : l’IndoBurma, le Sundaland, le Wallacea et les Philippines (Myers et al., 2000) (Figure I). Ces zones biogéographiques ont été façonnées au cours du temps sous l’influence de facteurs géologiques et climatiques (Hall, 1998, Voris, 2000, Heaney, 1991, White et al., 2004, Janis, 1993). Localement, des facteurs écologiques ont joué un rôle très important en favorisant le processus de spéciation (Morgan, 2009, Morgan et al., 2010).

La zone transfrontalière entre la Thaïlande et le Myanmar 

La zone transfrontalière entre la Thaïlande et le Myanmar (ZTTM) est située au centre de la zone IndoBurma (98°E) et s’étend sur plus de 1000 km du Nord (20°N) au Sud (10°N). La zone IndoBurma est isolée du reste de l’Asie par la chaîne de l’Himalaya (Hall, 1998). Au Sud, la ligne de Kangar-Pattani est une zone de transition écologique qui sépare la péninsule indochinoise du Sundaland (elle se situe proche de la frontière entre la Thaïlande et la Malaisie) (Round et al., 2003, Hughes et al., 2011, Woodruff and L.M., 2009). La Thaïlande est séparée du Myanmar par le Tenesserim, une chaîne de petites montagnes très anciennes qui s’étend du Sud du Laos jusqu’à la Malaisie. C’est une zone de « suture » qui fait office de barrière écologique entre le Myanmar et la péninsule indochinoise (Morgan et al., 2011).La ZTTM est aussi une zone de transition écologique, entre la forêt tropicale humide de la péninsule malaisienne (2°N) et la forêt tempérée caduque du nord de la Thaïlande (12°N). Les plaines alternent avec des montagnes forestières dont l’altitude varie entre 600-1500m. Le climat de la zone IndoBurma est particulier : pendant les mois d’hiver (Décembre-Février) un vent du Nord-Est froid et sec souffle depuis les systèmes de haute-pression atmosphérique installés au-dessus de l’Asie continentale, c’est la saison sèche. Au printemps (Mars-Mai), cet anticyclone faiblit et les vents changent de direction. Des masses d’air chaud chargées d’humidité sont portées par les vents du Sud-Ouest venant de l’océan Indien. Ces masses d’air provoquent des pluies abondantes et saisonnières, c’est le phénomène de la mousson (JuinNovembre).

Les corollaires en matière d’entomologie du paludisme

La biodiversité de l’entomo-faune anophélienne reflète l’histoire évolutive de la région: une trentaine d’espèces d’anophèles sont des vecteurs du paludisme (Sinka et al., 2011, Saeung, 2012, Rattanarithikul et al., 2006) et les espèces appartiennent souvent à des complexes d’espèces jumelles (i.e. espèces identiques sur le plan morphologique mais bien distinctes sur le plan génétique) (World Health Organization, 2007). Les variations de l’habitat et du comportement trophique des différentes espèces vectrices sont très importantes et déterminent localement une partie des modalités et de la dynamique de transmission du paludisme (donc l’efficacité des stratégies de lutte anti-vectorielles) (Manguin and Boëte, 2011). L’étude des systèmes vectoriels est par ailleurs compliquée par l’hétérogénéité du comportement et de la capacité vectorielle d’une espèce donnée en fonction du site d’étude (Trung et al., 2005, Sinka et al., 2011). La distribution de An. maculatus (s.s.) et An. sawadwongporni est limitée à l’Ouest par la frontière occidentale de l’IndoBurma (Morgan et al., 2013). Les complexes An. minimus (s.l.) et An. fluviatilis (s.l.), très proches d’un point de vue phylogénétique, ont une distribution parapatrique le long de cette frontière : An. minimus (s.l.) est retrouvé du côté oriental alors que An. fluviatilis (s.l.) est un vecteur dominant sur le sous-continent indien et dans les pays voisins (Sinka et al., 2011). Certaines espèces jumelles ont une distribution parapatrique le long de la ZTTM avec (An. dirus (s.s.) et An. baimaii) ou sans superposition (An. rampae et An. sawadwongporni) (Morgan et al., 2013). Elle sépare également des lignées distinctes au sein d’une espèce donnée en isolant génétiquement les populations en présence d’un côté et de l’autre de la frontière (An. splendidus, An. minimus et An. annularis) (Morgan et al., 2011). A cette zone de transition écologique s’ajoute la mer qui sépare la péninsule indochinoise et l’ASE insulaire. Cette barrière physique limite la dispersion des espèces. Par exemple, au sein du groupe Leucosphyrus, An. dirus (s.s.) et An. baimaii sont distribués sur la péninsule alors que An. macarthuri, An. cracens, An. introlatus et An. latens sont distribués sur la partie insulaire (Morgan et al., 2013). Anopheles minimus (s.l.) et An. maculatus (s.l.) sont largement distribués sur toute la péninsule indochinoise alors qu’ils sont rares dans le Sundaland (Morgan et al., 2013, Sinka et al., 2011). Brièvement, dans les deux autres zones biogéographiques que sont le Wallacea et les Philippines, le sous-groupe Minimus est absent et An. flavirostris est le principal vecteur (Sinka et al., 2011, Morgan et al., 2013). Les espèces jumelles des groupes Leucosphyrus et Maculatus y sont spécifiques (Morgan et al., 2013).

Les populations en présence 

Les minorités ethniques 

Le Myanmar est peuplé par plus de 135 minorités ethniques ayant chacune une culture, une histoire et un langage propre (Oxford Burma Alliance, 2017). Le groupe majoritaire est celui des Bamars. Ce groupe représente deux-tiers de la population totale, il contrôle le gouvernement central et l’armée. Les minorités ethniques représentent le tiers restant, les groupes principaux sont les Shans (10%), les Karens (9%), les Arakans (5%), les Mons (2,5%), les Chins (2%), les Kachins (1,5%) et les Karennis (0,8%). Ils vivent principalement dans les zones montagneuses le long des frontières internationales, en marge des grands états souverains, pour des raisons géographiques, politiques et culturelles (Scott, 2009). Les territoires occupés par les minorités ethniques sont très riches en ressources naturelles et représentent 65% de la surface du Myanmar (Human Welfare Foundation, 2010). Ces minorités vivent selon un mode de vie traditionnel (principalement de l’agriculture) dans des villages isolés et difficiles d’accès, parfois en quasi autarcie. Le long de la ZTTM, les minorités ethniques les plus représentées sont les Shans, les Karennis, les Karens et les Mons.

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Table des matières

I. Introduction
A. Epidemiologie du paludisme dans la zone transfrontalière entre la Thaïlande et le Myanmar
1. Présentation générale de la zone
a) Ecologie et géographie
b) Les populations en présence
c) La problématique du paludisme
2. Les cadres nosologiques du paludisme
a) Le paludisme dans la population générale
b) Le paludisme chimio-résistant
c) L’infection asymptomatique en zone de faible endémicité
d) Le paludisme à Plasmodium vivax
3. Le contexte entomologique de la transmission
a) Les vecteurs anophéliens
b) Indicateurs entomologiques de la transmission
c) Les outils actuels de lutte anti-vectorielle et leurs limites
B. Elimination des souches de Plasmodium falciparum résistantes à l’artémisinine
1. Etat des lieux sur la résistance à l’artémisinine
2. L’élimination médicamenteuse ciblée de Plasmodium falciparum
a) Les sept piliers de l’élimination
b) Le « poste palu » et l’accès universel au diagnostic et traitement précoce
c) Le traitement de masse et l’élimination du réservoir sous-microscopique
3. Les risques du programme d’élimination
a) Résurgence du paludisme et prémunition
b) Aggravation des résistances aux médicaments antipaludiques
C. Surveillance entomologique dans le contexte de l’élimination
1. Les indicateurs entomologiques
a) Le taux d’inoculation entomologique
b) La capacité vectorielle
2. Difficultés rencontrées pour la mesure des indicateurs
a) Les complexes d’espèces et la taxonomie
b) Le taux de piqûre et les techniques de collection
c) Les taux d’infection et les techniques de détection
3. Les modèles statistiques
a) Structure et caractéristiques des données entomologiques
b) Les modèles linéaires généralisés mixtes et multi-niveaux
c) Les systèmes d’équations d’estimation généralisée
D. Objectifs de la thèse
II. Matériels et méthodes
A. Conception générale de l’étude
1. Sélection des villages
2. Intervention
3. Suivi longitudinal
B. Procédures de laboratoire pour l’analyse des échantillons entomologiques
1. Description générale de la procédure
2. Identification morphologique
3. Extraction de l’ADN
4. Identification moléculaire des espèces jumelles
5. Détection du plasmodium
a) Echantillons de référence
b) Techniques de PCR en temps réel et choix des amorces
c) Dilution en série
d) Utilisation en routine
6. Suivi de la résistance à la deltaméthrine, à la perméthrine et au DDT
a) Test phénotypique de sensibilité
b) Détection des mutations kdr
C. Analyse et interprétation des données
1. Mise au point des techniques de PCR quantitative en temps réel pour la détection du parasite
dans les échantillons entomologiques
a) Comparaison des performances aux faibles concentrations de parasite
b) Quantification absolue de la charge en sporozoïtes
2. Résistance aux insecticides
3. Définition et calcul des indicateurs entomologiques
4. Modélisation des indicateurs entomologiques
a) Paramètres des modèles d’équations d’estimation généralisée
b) Les covariables
III. Chapitre1. Optimisation des techniques utilisées pour la détection de plasmodium dans les échantillons entomologiques
A. Optimisation des conditions réactionnelles
B. Comparaison des performances aux faibles concentrations
C. Vérification des performances analytiques
IV. Chapitre 2. Biologie et écologie des anophèles
A. Biodiversité et abondance de l’entomo-faune anophélienne
1. Identification morphologique
2. Diversité spécifique au sein des complexes Minimus et Dirus et du groupe Maculatus
3. Variations qualitatives et quantitatives
B. Taux d’infection et charges parasitaires des vecteurs
1. Taux d’infection
2. Charges parasitaires
C. Comportement trophique
1. Les vecteurs primaires des complexes Minimus et Dirus et du groupe Maculatus
2. Les vecteurs secondaires des groupes Aconitus, Annularis, Barbirostris et Subpictus
3. Les autres espèces peu abondantes et/ou très zoophagiques
D. Résistances aux insecticides utilisés pour la lutte anti-vectorielle
E. La transmission résiduelle
V. Chapitre 3. Dynamique et modalités des indicateurs entomologiques de la transmission du paludisme
A. Valeurs moyennes et dynamique des indicateurs entomologiques
1. Le taux de piqûre humain
2. L’index sporozoïtaire
3. Le taux d’inoculation entomologique
B. Hétérogénéité de la transmission
C. Facteurs déterminant l’intensité de la transmission
VI. Chapitre 4. Impact du traitement de masse sur la transmission du paludisme
A. Effet du traitement sur le taux d’inoculation entomologique
B. Taux de couverture et effet prophylactique post-traitement de la pipéraquine
C. Transmission de P. falciparum après le traitement de masse
VII. Discussion
A. Objectifs, principaux résultats et limites de cette étude
B. Apport de notre étude pour comprendre l’épidemiologie du paludisme dans la zone
1. Les systèmes vectoriels en présence du côté birman de la frontière
a) Les vecteurs impliqués dans la transmission
b) Importance de la transmission « résiduelle »
c) Intensité et dynamique de la transmission
2. Contribution du réservoir sous-microscopique à la transmission
3. Déterminants entomologiques des résistances médicamenteuses
C. Impact de l’intervention sur la transmission du paludisme
1. Le traitement de masse
a) Accélérateur de l’élimination
b) Considérations pharmacologiques
c) Résistances médicamenteuses
2. Le poste palu
3. Les moustiquaires
D. Perspectives et pistes de reflexion pour la suite du programme d’élimination
1. La mise en œuvre d’une surveillance à grande échelle pour documenter l’élimination
2. La lutte anti-vectorielle et le contrôle de la transmission résiduelle
a) La place de la LAV dans le contexte de l’élimination
b) Les difficultés d’évaluer la LAV dans la zone
c) Les stratégies
d) Les résistances aux insecticides
3. Apport de l’entomologie pour l’élimination de Plasmodium vivax
VIII. Travaux issus de cette étude
A. Articles
B. Posters
C. Communications orales
D. Manuscrits en cours de préparation
IX. Conclusion

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