EPIDEMIOLOGIE DES URGENCES VITALES POTENTIELLES AUX URGENCES ADULTES DU CHU D’ANGERS
Choix des critères d’inclusion
Des travaux similaires réalisés aux urgences du CHU de Caen (19) ou de Besançon (20) retrouvent une proportion de malades en urgence vitale similaire (respectivement 9,2% et 11% de leurs passages aux urgences). Les caractéristiques épidémiologiques de leur population (Age moyen, sexe ratio) rejoignent également nos résultats. En revanche une étude de 2011 au CH de Toulon n’identifie que 1,5% d’urgences vitales parmi leur patientèle (20). Mais leurs critères d’inclusion ne se basaient que sur l’urgence vitale confirmée. Or la problématique d’un service d’urgence réside dans un premier temps en l’identification au sein de l’afflux de patients des urgences vitales potentielles (Tri CIMU) ; puis en leur sein, la confirmation des urgences vitales avérées.
L’évaluation objective de la filière de soins à l’intérieur du service, des urgences vitales, nécessite l’inclusion de l’ensemble des candidats potentiels, mobilisant les moyens humains et matériels au même titre que les élus finaux. Il en est de même pour l’utilisation de la Classification Clinique des Malades aux Urgences (CCMU) comme critère d’inclusion. Celle-ci est réalisée a posteriori lors de la sortie du service. Ainsi son utilisation occulte la proportion importante de patients présentant une urgence vitale potentielle, nécessitant initialement la même mobilisation du service. Ce n’est qu’une fois l’évaluation médicale complète et les résultats paracliniques obtenus que la classification CCMU pourra s’avérer rassurante. De la même façon, le choix d’inclure les patients orientés secondairement en soins intensifs/réanimation est basé sur la même réflexion.
L’identification secondaire de ces urgences vitales avérées fait supposer une intensification des moyens de prise en charge au sein même des urgences avant transfert. Selon l’article D6123-33 du code de la santé publique : « les soins de réanimation sont destinés à des patients qui présentent ou sont susceptibles de présenter plusieurs défaillances viscérales aigües mettant directement en jeu le pronostic vital et impliquant le recours à des méthodes de suppléances»(21). D’autre part, selon l’article D6124-104 du code de la santé publique, « les soins intensifs sont pratiqués dans les établissements de santé comprenant une ou plusieurs unités organisées pour prendre en charge des patients qui présentent ou sont susceptibles de présenter une défaillance aiguë de l’organe concerné par la spécialité au titre de laquelle ils sont traités mettant directement en jeu à court terme leur pronostic vital et impliquant le recours à une méthode de suppléance »(22).
L’initiation aux urgences de cette prise en charge spécialisée est évidente et nécessite une organisation de service similaire transitoirement. Enfin les patients amenés aux urgences par les différentes UMH sont par définition même en urgence vitale potentielle au minimum. En effet, après régulation par le SAMU, la présentation clinique du patient a motivé l’envoi de moyen médicalisé. Le patient présentait donc une défaillance potentielle nécessitant une expertise médicale sur place et/ou un geste lourd adapté. L’orientation du malade vers le service d’urgence par une UMH est justifiée par la nécessité d’une surveillance rapprochée et la poursuite de la démarche diagnostique et/ou thérapeutique. En revanche, en présence d’une urgence vitale avérée, le SAMU orientera préférentiellement les patients directement dans la filière de soins concernée. Il persiste néanmoins parmi eux une proportion orientée par défaut aux urgences faute de place dans les services d’aval.
Nous n’avons pas quantifié celle-ci car ce n’était pas le but de notre étude mais cela pourrait être intéressant. Dans un souci d’exhaustivité, nous avons pris parti de relire l’ensemble des dossiers informatisés non triés à l’accueil des urgences. En appliquant scrupuleusement les critères CIMU, 3% d’entre eux ont pu être inclus. A l’inverse, aucun dossier n’a été inclus pas l’intermédiaire de la recherche informatique de l’UF bloc urgence. Cela provient d’une habitude informatique de l’ensemble des médecins urgentistes, clôturant systématiquement le dossier par l’UF de la spécialité chirurgicale impliquée (orthopédie, chirurgie viscérale, vasculaire…). A l’inverse il n’était pas réalisable de sélectionner l’ensemble des patients orientés informatiquement vers chacune des spécialités chirurgicales car seule une infime proportion d’entre eux relevait d’urgence vitale. A travers ces limites informatiques, nous avons probablement en partie minoré le nombre d’inclus.
Orientation
Concernant le devenir des malades, on constate qu’environ 1/3 des patients sont transférés en réanimation ou dans un service de soins intensifs ce qui correspond aux patients présentant un état d’urgence vitale avérée. Un tiers des patients est hospitalisé dans un service de médecine conventionnelle. Enfin un tiers des patients quitte l’hôpital pour un retour à domicile ou dans leur structure antérieure, voire une sortie avant la fin des soins. Ce dernier pourcentage peut sembler surprenant et discréditant la pertinence des critères d’inclusions. Or cela peut s’expliquer par la prise en charge d’urgence vitale potentielle dont l’évaluation médicale et les explorations paracliniques permettent d’écarter définitivement celle-ci. Les accidents de la voie publique, les douleurs thoraciques à ECG non modifié (23) ou encore les alertes thrombolyses peuvent rentrer dans cette catégorie par exemple.
Depuis l’étude angevine pointant la pertinence des critères de Vittel (24)(25) pour le recours au scanner corps entier systématique, une proportion importante de patients pris en charge aux urgences est considérée comme traumatisé grave jusqu’à preuve du contraire (Tri CIMU 2 minimum). Après réalisation de l’imagerie sans lésion objectivée, il est fréquent que les patients puissent retourner à domicile le jour même. (26) Il en est de même pour les alertes thrombolyses dont les explorations s’avèrent rassurantes (migraine avec aura, troubles psychosomatiques,…) ou les douleurs thoraciques sans signe de gravité après explorations initiales pouvant être prises en charge en externe. Nous avons pris le parti de considérer que les patients hospitalisés à l’UHCD étaient toujours pris en charge aux urgences, c ‘est pourquoi nous n’avons pas coté l’UHCD comme une orientation de sortie.
En effet, celle-ci fait partie intégrante du service dont le fonctionnement repose sur le personnel des urgences. L’UHCD est donc un gros pourvoyeur de lit d’aval pour les urgences vitales potentielles. Et parfois ces hospitalisations semblent servir d’unité de surveillance continue, car 13% de ces patients seront transférés secondairement en réanimation ou en soins intensifs. Ces résultats concordent avec l’étude menée en 2013 au CHU d’Angers montrant que 43% des patients admis à l’UHCD relèveraient d’unité de soins continus en se basant notamment sur le score IGS2 (indice de gravité simplifié).
Familles de pathologies
Les défaillances neurologiques sont majoritaires, essentiellement représentées par les alertes thrombolyses. Avec l’existence en parallèle d’une filière thrombolyse assurée par les neurologues directement dans un autre bâtiment du CHU, on constate la persistance d’une proportion importante de passages par les urgences. Cela s’explique par l’absence fréquente de régulation préalable des patients et l’existence uniquement en journée de la filière thrombolyse déportée. On ne dénombre que 62 thrombolyses réalisées aux urgences sur l’année 2015. Ainsi beaucoup de patients doivent bénéficier d’une prise en charge « thrombolyse like » pour peu d’élus au final. L’organisation du service doit permettre à tout moment de mettre en oeuvre pour ces patients la même disponibilité, réactivité et intensité de soins qu’en UNV. Malgré l’existence de filières dédiées à la prise en charge des urgences cardiologiques (USIC, centre de la douleur thoracique), il persiste une part importante de cette typologie de patient au sein des urgences. Ces données sont comparables avec la littérature.(30)
Les raisons semblent être multifactorielles. D’une part, à l’image des suspicions d’AVC, une part des douleurs thoraciques se présente directement aux urgences sans régulation du SAMU préalable.(31) D’autre part, face à cette symptomatologie aux étiologies multiples, il est fréquent que la démarche diagnostique soit initiée aux urgences en priorité, pour orienter secondairement les patients dans la bonne filière de soins. Enfin cela est en lien avec la fermeture du centre de la douleur thoracique durant la nuit et l’indisponibilité de lits en USIC parfois. Un travail de thèse sur cette problématique est d’ailleurs en cours afin d’identifier les raisons et quantifier précisément les réorientations secondaires de douleur thoracique vers la cardiologie. Les traumatisés graves potentiels sont également fortement représentés dans notre population d’intérêt. On peut expliquer cette prévalence par la pertinence même des critères d’identification des traumatisés graves (annexe 3).(24)(25) En effet, on distingue deux types de critères : -Ceux objectivant une défaillance avérée : en temps normal, la plupart bénéficient d’une prise en charge médicale préhospitalière et sont orientés majoritairement dans la filière « déchocage ».
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Table des matières
RESUME
INTRODUCTION
MATERIEL ET MÉTHODE
RÉSULTATS
1.Description épidémiologique
1.1.Flowchart
1.2.Population générale
1.3.Population étudiée
1.4.Orientation, devenir
1.5.Passage à l’UHCD
1.6.Familles de Pathologies suspectées
2.Objectifs secondaires : évaluation de la prise en charge
2.1.Tri à l’accueil
2.2.Délai de prise en charge en fonction du tri initial
2.3.Délai de prise en charge en fonction du moment de la journée
2.3.1.Comparatif jour / nuit
2.3.2.Comparatif semaine / weekend
2.3.3.Comparatif semaine de jour / weekend de jour
2.3.4.Comparatif semaine de nuit / weekend de nuit
2.4.Seniorisation des dossiers
2.5.Gestes lourds
2.6.Thérapeutiques d’urgences administrées
2.7.Limitations thérapeutiques
2.8.Soins lourds
2.9.Durée de prise en charge moyenne
DISCUSSION
1.Résultats principaux
2.Les limites de l’étude
3.Population étudiée
3.1.Choix des critères d’inclusion
3.2.Orientation
3.3.Familles de pathologies
3.4.Respect des objectifs de tri
3.5.Seniorisation
3.6.Soins lourds
3.7.Durée de prise en charge
3.8.Perspectives
BIBLIOGRAPHIE
LISTE DES FIGURES
LISTE DES TABLEAUX
TABLE DES MATIERES
ANNEXES
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