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Epidémiologie des MICI en population générale
Les MICI se manifestent le plus souvent à un âge jeune, généralement entre 20 et 30 ans pour la MC et entre 25 et 40 ans pour la RCH, avec néanmoins des formes de découverte très précoce dans la jeune enfance ou au contraire des formes tardives (5 à 11% des découvertes)(6). Du fait de leur pic d’incidence à un âge jeune, les MICI apparaissant chez les femmes se déclarent très fréquemment en période de fertilité, ce qui posera des problèmes spécifiques. La Figure 1 représente graphiquement la superposition des incidences des MICI et des grossesses par rapport à l’âge des patientes. La prévalence des MICI est variable dans le monde. En Europe et en Amérique il existe un gradient Nord-Sud, avec une incidence des MICI supérieure dans les pays du Nord par rapport à ceux du Sud. En Europe ces incidences sont évaluées à 11.4/105 habitants dans les centres du Nord contre 8 au Sud pour la RCH et 6.3 contre 3.6 pour la MC. De manière similaire il existe un gradient Ouest-Est, avec des incidences de RCH de 10.8/105 habitants à l’Ouest contre 4.1 à l’Est, et de 6.5 contre 3.1 pour la MC en Europe(7). De manière globale la RCH est plus fréquente que la MC à l’exception de certains centres en France, au Royaume-Uni, en Belgique et en Allemagne. En France l’incidence de la MC est plus élevée que celle de la RCH, évaluée à 7.6/105 habitants et 4.4/105 habitants respectivement.
En France, la prévalence de ces maladies est estimée à 160/105 et 100/105 habitants pour la MC et la RCH, soit environ 106000 patients atteints de MC et 66000 atteints de RCH. Les femmes ont un risque supérieur de 20 à 30% aux hommes de développer une MC, tandis que la RCH prédomine au contraire chez les hommes.
Il est important de préciser que l’incidence des MICI varie en fonction de l’âge et du sexe, en particulier pour la MC. Ainsi, les femmes sont à risque plus faible de débuter une MC dans l’enfance jusqu’à l’adolescence, avec un Incidence ratio évalué à 0.70 (IC 95% 0.53-0.93) dans une étude récente. Cette même étude précisait que l’incidence augmente chez les femmes après cette période avec un risque supérieur aux hommes de manière significative dans la période 25-29 ans et après 35 ans. Concernant la RCH, l’incidence diffère peu entre les femmes et les hommes hormis dans la tranche d’âge des 5-9 ans qui retrouve un risque supérieur chez les femmes, et après 45 ans, moment à partir duquel les hommes sont davantage à risque de débuter une RCH(8).
Occasionnellement, la maladie peut être découverte pendant la grossesse, le plus fréquemment au cours du premier trimestre. Une étude récente retrouve un taux nettement plus important de RCH que de MC parmi les MICI apparaissant pendant la grossesse, en effet, 71% des découvertes de MICI étaient des RCH contre 24% de RCH parmi les patientes déjà malades au moment de la grossesse(9). Dans cette étude, les MICI apparaissant pendant la grossesse constituaient 13% de l’ensemble des patientes enceintes atteintes de MICI, représentant une minorité non négligeable de patientes. La Figure 1 représente de manière très schématique le chevauchement entre période de fertilité des femmes et incidence des MICI en fonction de l’âge.
Inflammation, génétique et accouchement prématuré
La grossesse est une période de modifications du système immunitaire, permettant à l’organisme de la mère de tolérer le développement du fœtus, que l’on peut comparer à une allogreffe sur le plan immunologique. La réponse immunitaire et donc la réponse inflammatoire de type Th1 et Th2 sont modulées sur le plan systémique et surtout localement, en particulier au niveau de l’interface materno-fœtale, sans que l’on puisse parler d’immunosuppression pour autant. Sans trop entrer dans les détails des mécanismes physiopathologiques, on peut évoquer le rôle important du syncytiotrophoblaste qui représente la principale interface entre le fœtus et la mère, et qui n’exprime ni le complexe majeur d’histocompatibilité (CMH) de type I ni le CMH de type II, limitant l’activation des lymphocytes T maternels. Globalement, la grossesse est considérée comme un phénomène Th2-like, les cytokines Th1 sont donc considérées comme délétères, leur action pouvant conduire à des complications de la grossesse comme la prématurité (voir ci-dessous). Par ailleurs, le trophoblaste extra-villeux exprime lui le Human leukocyte antigen (HLA) de type G, procurant une protection contre les lymphocytes T cytotoxiques et les cellules natural killer (NK)(10). D’autre part, il existe des actions d’origine hormonale, concernant particulièrement la human chorionic gonadotrophin (hCG), produite par le trophoblaste, qui va stimuler la production d’interleukine (IL)-6 et de TNF- α ainsi que moduler les capacités de réceptivité des cellules endométriales et des cellules endothéliales aux différentes cytokines, en particulier à l’IL-1β(11).
Il existe des données allant dans le sens d’une influence non négligeable de la génétique dans la survenue des complications de la grossesse chez les femmes en population générale et a fortiori chez les femmes atteintes de MICI, en particulier dans la survenue d’accouchements prématurés. On parle d’accouchement prématuré pour une naissance survenant avant 37 semaines d’aménorrhée. Le travail prématuré, précédant l’accouchement, est un syndrome causé par des processus pathologiques multiples dont l’inflammation du liquide amniotique fait partie. Cette inflammation peut être d’origine infectieuse secondaire à l’invasion de la cavité amniotique par un micro-organisme, ou d’origine inflammatoire secondaire à un stress cellulaire ou une apoptose massive (inflammation intra-amniotique stérile)(12). Dans les deux cas les cytokines inflammatoires jouent un rôle majeur, avec en premier lieu l’IL-1 dont IL-1β, IL-6, IL-8 et le TNF-α. De toutes ces cytokines, l’IL-1β joue le rôle central dans le déclenchement du travail prématuré puisqu’il peut stimuler la libération des autres médiateurs pro-inflammatoires. L’administration de cette molécule à l’animal entraine en effet un accouchement prématuré, qui peut être évité par l’administration secondaire d’un antagoniste du récepteur de l’IL-1β(13). L’IL-1β est produite secondairement à l’activation d’un complexe multiprotéique situé dans le cytoplasme des cellules appelé inflammasome qui transforme la pro-IL-1β en IL-1β mature par l’action de la caspase-1 (CASP-1)(14). Les concentrations intra-amniotiques en CASP-1 et IL-1β sont plus importantes chez les femmes présentant un travail prématuré par rapport aux femmes accouchant à terme, ce qui est en faveur d’un rôle majeur de ces molécules dans la physiopathologie de l’accouchement prématuré. La Figure 2 représente le complexe inflammasome-Caspase 1-IL-1β.
Beaucoup d’autres cytokines pro-inflammatoires ont été mises en évidence ces dernières années, parmi lesquelles IL-23 et IL-17 (voie des lymphocytes Th17) sont les plus souvent citées dans les mécanismes physiopathologiques des MICI. Une étude récente retrouvait des taux plus élevés de ces cytokines chez les patientes atteintes d’une MICI, étayant la piste des antagonistes d’IL-23 et IL-17 dans le traitement de ces maladies(15).
Il existe un substrat génétique commun entre les gènes identifiés comme favorisant la prématurité et ceux prédisposant aux MICI, notamment le gène NOD2, ainsi que les gènes CARD8, TLR10, DEFB1 et MBL2(16). Pareillement, il existe des prédispositions génétiques pouvant favoriser l’expression et l’action des cytokines pro-inflammatoires ou de leurs récepteurs, en particulier du TNF-α, chez certaines patientes, sensibilisant au risque de prématurité. Une telle réalité a été démontrée dans plusieurs études, avec le constat que ces susceptibilités génétiques sont variables en fonction des ethnies. Ainsi, les variants du gène du TNF-α et de son récepteur sont significativement différents entre les femmes d’ethnie Caucasienne et celles d’ethnie Afro-américaine(17). De cette manière, on retrouve des taux de prématurité significativement différents entre ces deux groupes, avec des chiffres actuellement admis de 10.3% de prématurité chez les femmes blanches contre 16.5% chez les afro-américaines. Plusieurs autres études, dont une importante parue l’année dernière, retrouvent une influence des variations génétiques touchant les gènes EBF1, EEFSEC et AGTR2 sur la prématurité. Les variants de ces trois gènes ainsi que ceux des gènes WNT4, ADCY5 et RAP2C sont eux associés à la durée gestationnelle. Pour détailler succinctement, le gène EBF1, qui encode pour le facteur précoce des cellules B, est impliqué dans le développement des lymphocytes B mais également dans le contrôle de la pression artérielle et du risque métabolique entre autres. Son rôle précis dans la prématurité reste à déterminer mais pourrait s’expliquer soit par une action directe sur la grossesse ou indirectement via des effets cardiovasculaires ou métaboliques. Le gène EEFSEC, qui encode pour le facteur spécifique d’élongation de la sélénocystéine eucaryote, joue un rôle important dans l’homéostasie cellulaire et la modulation de la réponse inflammatoire. Certains polymorphismes de ce gène ont également identifiés comme facteurs de risque de cancer de la prostate, d’hypospadias et prédicteurs d’âge des premières règles. Enfin, le gène AGTR2, qui encode pour le récepteur à l’angiotensine II, participe à la vascularisation placentaire et contribue à la survenue de la prééclampsie par différentes voies. L’effet sur la prématurité se ferait secondairement à la prééclampsie ou via d’autres mécanismes d’action(18).
Maladies inflammatoires intestinales et fertilité
En raison de leur apparition à un âge jeune, il est fréquent que les MICI surviennent en période de procréation, pouvant poser des problèmes spécifiques. Une prise en charge optimale de la MICI pendant la grossesse est primordiale en raison du risque de complication de la grossesse, en particulier en cas de maladie active, les principales complications rapportées étant la prématurité et le retard de croissance intra-utérin. Les patientes porteuses d’une MICI stable, en rémission, sans antécédent chirurgical digestif, ne sont pas davantage à risque d’hypofertilité que la population générale(19). Cependant on peut noter une baisse de la fertilité en cas de maladie de Crohn active, par exemple en raison des douleurs abdominales, et dans le cas d’adhérences abdominales en particulier post-opératoires, ou d’aménorrhée. Les femmes atteintes de rectocolite hémorragique opérées par colectomie totale avec anastomose iléo-anale (AIA) présentent également une baisse de la fécondité, jusqu’à 80% de stérilité, tandis que l’anastomose iléo-rectale n’entraine pas de baisse de la fertilité(20). Cet impact de la chirurgie sur la fertilité est représenté par la Figure 3.
Les causes avancées pour cette infertilité accrue après chirurgie sont la survenue d’hydrosalpinx, la destruction de la fimbria tubaire et l’obstruction tubaire dans les suites de la chirurgie pelvienne(21). Il a en revanche été démontré que le risque d’infertilité après AIA est diminué si la chirurgie est réalisée par voie coelioscopique plutôt que par chirurgie ouverte, probablement du fait de la réduction du nombre d’adhérences(22,23). La fécondité des patientes atteintes de RCH non opérées est identique aux femmes de la population générale.
La présence de lésions ano-périnéales compliquant la MC est de son côté un facteur prédictif de diminution de la fertilité. Les raisons sont plus d’ordre psychologique qu’organique, les patientes étant plus réfractaires à entreprendre une grossesse par peur de connaître une exacerbation de la maladie, une grossesse ou un accouchement plus compliqués, ou en raison des conseils des médecins(24).
Il apparait que les femmes atteintes de MICI ont recours à un traitement de l’infertilité de manière plus fréquente que les femmes de la population générale, avec un OR de 2.2 (IC 95% 1.1-4.4). Il existe une corrélation entre l’âge maternel et l’infertilité, retrouvée également en population générale. De ce fait, il s’avère que la MICI n’a pas été prouvée comme étant un facteur indépendant d’infertilité. Les femmes atteintes de MICI ayant tendance à entreprendre une grossesse plus tard compte tenu de leur maladie, c’est davantage l’infertilité liée à l’âge de la patiente qui conditionne la prise d’un traitement. De cette manière, le taux plus faible de naissances chez les femmes atteintes de MICI est davantage un effet de l’âge maternel plutôt qu’une infertilité induite par la MICI(25).
En cas de fertilité insuffisante, les couples peuvent se tourner vers la procréation médicalement assistée (PMA) pour augmenter leurs chances de mener à bien une grossesse. Les grandes études s’intéressant au succès de la PMA chez les femmes atteintes de MICI retrouvent des résultats globalement similaires. Une étude récente retrouve un effet global défavorable de l’existence d’une MICI sur la réussite de la PMA par rapport aux femmes non atteintes, sans significativité toutefois mais avec une forte tendance, notamment pour la MC : OR 0.82 (IC 95% 0.57-1.17) pour la RCH, OR 0.58 (IC 95% 0.32-1.03) pour la MC. Cette même étude retrouve également un effet négatif surajouté de la chirurgie sur la fertilité, de manière significative chez les patientes atteintes d’une MC. En effet, la survenue d’une naissance vivante ne survenait que dans environ un cas sur trois dans ce groupe de patientes (OR 0.29, IC 95% 0.13-0.65) par rapport aux femmes non opérées. Les résultats n’étaient pas significatifs chez les femmes opérées d’une RCH, avec cependant une légère tendance d’un impact négatif de la chirurgie sur l’efficacité de la PMA (OR 0.81, IC 95% 0.47-1.40). Toutefois, dans cette étude, la très grande majorité des chirurgies réalisées étaient faites par laparotomie, voie d’abord connue pour diminuer la fertilité par rapport à l’abord laparoscopique(26). Ces résultats sont en accord avec la plupart des autres études, notamment une grande étude de cohorte étendue sur 20 ans retrouvant un effet négatif de la MC et de la RCH sur le succès de la PMA, avec des OR de 0.62 (IC 95% 0.48-0.80) et 0.79 (IC 95% 0.67-0.92) respectivement par rapport à la population appariée de femmes souffrant d’infertilité. Les résultats du succès de la PMA après chirurgie de MC ou de RCH étaient également comparables à ceux cités ci-dessus, ne retrouvant donc pas d’effet négatif majeur de la chirurgie de RCH tandis que la chirurgie de MC était à fort risque d’échec de la PMA (OR 0.52, IC 95% 0.29-0.91)(27). D’autres études ne retrouvent pas d’effet négatif de la MICI sur le succès de la PMA par rapport aux femmes infertiles de la population générale, mais ces études regroupent souvent un nombre plus faible de patientes et leurs résultats ne sont probablement pas aussi fiables que ceux des autres essais. Par exemple, une étude retrouve un succès global de la PMA dans 69% des cas pour les patientes atteintes de RCH, 57% pour celles atteintes de MICI contre 53% dans la population contrôle(28). Avec l’ensemble de ces données, il semble plus logique de penser que la présence d’une MICI impacte de manière négative le succès de la PMA.
A l’inverse, il peut exister des motifs de refuser volontairement d’entreprendre une grossesse pour les femmes atteintes de MICI. En dehors des poussées peuvent exister des douleurs chroniques, des problèmes d’image de soi, la peur de la grossesse soit par conviction personnelle soit due à des conseils médicaux inadéquats. Les dyspareunies sont fréquentes, retrouvées dans jusqu’à 26% des cas après une chirurgie pelvienne, pouvant expliquer une crainte des rapports sexuels et à fortiori de mettre en route une grossesse(29). La crainte de vivre une grossesse compliquée ou de mettre au monde un enfant à la santé précaire peut également pousser les femmes jusqu’à demander un avortement volontaire. Cependant, il s’agit d’une démarche qui ne serait pas réalisée plus souvent chez les patientes atteintes de MICI par rapport à celles de la population générale, comme l’a prouvé une étude récente(30). Cette étude retrouvait en effet un taux d’avortement de 12.4% et 14.9% respectivement pour les patientes atteintes de RCH et de MC, contre 16.9% dans la population générale appariée. Ainsi, les patientes atteintes de MICI seraient même moins enclines à avoir recours à cette démarche. Malgré tout, il s’agit d’une étude danoise, l’accès à l’interruption volontaire de grossesse entrant dans un cadre législatif spécifique à ce pays.
Un mot sur le sujet des contraceptions orales utilisées par les femmes en âge de procréer. La tendance actuelle porte à croire que leur utilisation est un facteur de risque indépendant de développer une MC, sans augmenter le risque de RCH, avec un Hazard ratio à 2.88 (95% IC 1.69-4.89) en cas de traitement actif et 1.5 (95% IC 1.13-1.00) en cas de traitement antérieur(31). Ces données ne constituent pas un motif de contre-indication à une contraception, quel que soit son mode d’administration.
Hérédité et MICI
Il est prouvé depuis de nombreuses années que le principal facteur de risque de développer une MICI est l’histoire familiale, cela étant encore plus vrai pour la MC. En prenant pour exemple une étude ancienne, le risque de développer une MC ou une RCH pour un apparenté au premier degré d’un sujet atteint de MC est accru d’un facteur 10.3 et 4.4 respectivement par rapport à la population générale. De manière similaire, le risque de développer une RCH ou une MC chez un apparenté au premier degré d’un patient atteint de RCH est accru d’un facteur 9.5 et 1.8 respectivement par rapport à la population générale(32). Les études plus récentes retrouvent globalement les mêmes résultats. Par ailleurs, il faut souligner que ce risque de transmission est plus élevé pour la MC si le parent atteint est la mère et si l’enfant est une fille. Une telle démonstration n’a pas pu être mise en évidence pour la RCH(33). Une étude prospective maintenant ancienne retrouvait même un risque global de 36% de développer une MICI chez les enfants nés de parents tous deux atteints de MICI, risque majoré à 67% si les deux parents avaient déjà développé leur maladie au moment de la conception(34).
Complications des grossesses chez les femmes atteintes de MICI
Etant donné le risque plus important de complications de la grossesse chez les femmes atteintes d’infections ou d’inflammation systémique, on peut s’attendre à retrouver un effet néfaste des MICI sur l’évolution de la grossesse. Effectivement, la MC active rend compte de risques de fausses couches et d’accouchement prématuré plus importants ainsi que d’un risque de mort fœtale in utero supérieur à la population générale, avec des études retrouvant un taux d’effets indésirables de la grossesse pouvant atteindre un OR de 1.54 (IC 95% 1-2.38) et de complications jusqu’à un OR de 1.78 (IC 95% 1.13-2.81)(35). Le taux de complications s’avère plus important en cas de MC active au moment de la conception ou pendant la grossesse. Il n’y a en revanche pas de preuve actuellement en faveur d’un effet néfaste des MICI sur la santé des nouveau-nés.
Le risque de complications au cours de la RCH s’approche de celui de la population générale. Les études à propos des atteintes coliques sévères et étendues nécessitant une prise en charge chirurgicale sont contradictoires mais surtout peu nombreuses et reposant principalement sur des case reports de faibles effectifs. Les études anciennes retrouvent un risque d’évènements défavorables plus important en cas de colite aiguë pendant la grossesse, allant jusqu’au décès de la patiente (jusqu’à un tiers de décès) ou à un enfant mort-né (près de la moitié des cas)(36). Cela pouvait conduire à proposer une interruption volontaire de grossesse en cas de poussée étant donné les risques majeurs d’évolution défavorable. Heureusement les études plus récentes sont plus rassurantes, probablement en raison d’une prise en charge thérapeutique largement plus adaptée. Désormais la mortalité et la morbidité de tels évènements pendant la grossesse sont nulles ou proches de zéro, y compris en cas de prise en charge chirurgicale(37).
Bien que les études divergent quelque peu, il apparait que le facteur de risque majeur de complications de la grossesse chez les femmes atteintes de MICI est l’activité de la maladie au moment de la conception et pendant l’évolution de la grossesse, les autres étant l’histoire familiale de MICI, la localisation de la maladie et les antécédents chirurgicaux(19).
Parmi les complications de la grossesse, le plus fréquemment souligné est le risque de prématurité. Ce risque accru d’accouchement prématuré chez les femmes atteintes d’une MICI a été démontré dans de nombreuses études. Plusieurs chiffres sont retrouvés dans la littérature, on pourra retenir la moyenne d’un OR à 1.87 (IC 95% 1.52-2.31, p < 0.001)(38), représentant un risque moyen de prématurité de 20% contre 10% pour les femmes non atteintes de MICI, soit deux fois plus de risque que la population générale. Prises indépendamment la MC et la RCH sont toutes deux à risque supérieur de prématurité, avec un OR à 1.97 (IC 95% 1.36-2.87, p < 0.001) et 1.34 (IC 95% 1.09-1.64, p < 0.005) respectivement, sans différence significative entre elles. Il est à noter que ce risque de prématurité a été prouvé comme étant supérieur à la normale avant même l’apparition des premiers symptômes de MICI, pouvant faire suspecter que l’inflammation systémique infraclinique joue déjà un rôle néfaste avant même les premiers symptômes de la maladie. En effet, jusqu’à 30% des femmes qui développeront une MC mais qui ont un enfant avant le début de leurs symptômes présenteront une prématurité significative(39). La Figure 4 représente l’incidence de cette prématurité pré-diagnostic sous forme d’histogramme. Ce résultat est retrouvé avec autant de significativité pour les femmes atteintes de RCH. Cet aspect sera étudié dans la partie discussion. Cette prématurité est un problème clinique important en raison du fait qu’elle est associée à une morbidité et une mortalité péri-natale importantes, jusqu’à 75% dans les formes très sévères.
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Table des matières
I – Introduction
I.1 Généralités
I.2 Epidémiologie des MICI en population générale
I.3 Inflammation, génétique et accouchement prématuré
I.4 Maladies inflammatoires intestinales et fertilité
I.5 Hérédité et MICI
I.6 Complications des grossesses chez les femmes atteintes de MICI
I.7 Evolution des MICI au cours de la grossesse
I.8 Traitements des MICI pendant la grossesse
I.9 MICI et allaitement
I.10 Prise en charge nutritionnelle pendant la grossesse
I.11 Vaccination des enfants nés d’une mère atteinte de MICI
II – Objectifs
III – Matériel et méthodes
III.1 Population étudiée : Groupe des patientes ayant connu leurs grossesses après le diagnostic de MICI
III.2 Groupe des patientes ayant connu leurs grossesses avant le diagnostic de MICI
III.3 Recueil de données
III.4 Analyse statistique
IV – Résultats
IV.1 Groupe grossesses avant le diagnostic de la MICI
IV.1.a Caractéristiques de la population
IV.1.b Caractéristiques des grossesses et des accouchements
IV.1.c Evolution dans le post-partum
IV.2 Groupe grossesses après la découverte de la MICI
IV.2.a Caractéristiques de la population
IV.2.b Caractéristiques des grossesses
IV.2.c Caractéristiques des accouchements
IV.2.d Evolution dans le post-partum
IV.3 Patientes ayant connu une grossesse avant et après le diagnostic
IV.4 Comparaison des grossesses avant et après diagnostic de la MICI
IV.4.a Population étudiée
IV.4.b Evolution des grossesses
IV.4.c Déroulement des accouchements
IV.4.c Evolution dans le post-partum
V – Discussion
VI- Conclusion
Annexe
Références
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