Epidemiologie de la DA

EPIDEMIOLOGIE DE LA DA

Prévalence de la DA 

La DA est la dermatose inflammatoire chronique la plus fréquente avec une prévalence allant jusqu’à 15 à 30% chez les enfants avec toutefois d’importantes variations géographiques [19,101,119]. Le plus souvent, la DA débute précocement dans l’enfance, particulièrement pendant la première année de vie. D’après une étude anglaise, la DA débutait au cours des six premiers mois de la vie dans 45% des cas, la première année dans 60% des cas et avant l’âge de 5 ans dans 85% des cas [72]. À l’échelle internationale, une étude intitulée ISAAC a été menée à partir d’une population de 2 millions d’enfants issus de 106 pays. Cette étude est reconnue de façon consensuelle comme la référence dans l’épidémiologie des maladies atopiques. Elle utilisait les critères diagnostiques de la United Kingdom Working Party, permettant ainsi une comparaison de prévalence de la DA dans les différents pays participants à l’étude. Elle a révélé que dans certains pays, plus de 20% des enfants étaient affectés par la DA, et que la prévalence était très variable d’une région à l’autre. Une prévalence supérieure à 15% chez l’enfant était observée dans 4 des 9 régions étudiées incluant l’Afrique, l’Amérique latine, l’Europe et l’Océanie [101]. Les dernières données disponibles (phase trois de l’étude ISAAC) montrent que, si la DA semble avoir atteint un plateau dans les pays à forte prévalence (Royaume-Uni et Nouvelle-Zélande), sa prévalence continue à grimper, en particulier chez les jeunes enfants dans les pays en développement, tels que l’Afrique, l’Amérique latine ou l’Asie du Sud-Est [88,163]. C’est ainsi que dans la littérature, il n’est pas rare de voir certains auteurs qualifient la DA « d’épidémie », tellement cette maladie envahit de façon pernicieuse toutes nos sociétés.

Facteurs de risque de la DA

La DA est une maladie multifactorielle mettant en jeu des interactions multiples et complexes entre des facteurs génétiques et des facteurs environnementaux [69].

Facteurs génétiques

La prédisposition génétique occupe une place centrale dans le développement de la DA. Le rôle de la génétique comme facteur de risque important de la DA a été clairement démontré dans des études portant sur des jumeaux : la concordance de la maladie chez les jumeaux monozygotes est de 77% vs 15% chez les jumeaux dizygotes [19]. De plus, 70 % des patients atteints de DA ont un antécédent familial d’atopie [59]. Des études génomiques ont permis d’identifier deux groupes majeurs de gènes impliqués dans la DA : des gènes codant pour des protéines structurales de l’épiderme (FLG en particulier) et des gènes impliqués dans l’immunité innée et adaptative [73].

Gènes codant pour les protéines structurales de l’épiderme

La région ayant la plus forte association avec la DA a été identifiée sur le chromosome 1q21 qui comporte un grand locus de gènes codant pour le complexe de différenciation épidermique (CDE) [35].

La FLG constitue la protéine clé de ce CDE. Elle joue un rôle crucial dans le maintien de l’épiderme, barrière indispensable à la thermorégulation et à la protection vis-à-vis des microorganismes pathogènes et des allergènes. Depuis 2006, des données solides ont établi que des mutations inactivatrices hétérozygotes du gène codant pour la FLG étaient responsables d’une anomalie fonctionnelle de la barrière épidermique et multipliaient par trois le risque de développer une DA [105]. Ces anomalies de la barrière cutanée favorisent la pénétration des allergènes à travers la peau, ce qui déclenche une réponse Th2 et parfois une sensibilisation médiée par les IgE à certains aliments et allergènes environnementaux. La fréquence de la mutation de la FLG varie largement selon les ethnies : présentes dans 40 % des DA au nord de l’Europe, elles sont rares chez les atopiques originaires d’Afrique [90]. La grande majorité des personnes ayant une mutation de la FLG ne porte qu’un allèle nul, et 40 % d’entre eux ne développent jamais de DA. En revanche, les individus ayant deux allèles nuls vont développer une DA qui sera plus persistante [60].

Gènes codant pour les éléments majeurs du système immunitaire 

De nombreuses études génétiques ont montré une association entre la DA et la mutation de gènes impliqués dans la régulation de la réponse immunitaire. Ces gènes incluent notamment ceux codant pour l’interleukine 4, la chaîne alpha du récepteur de l’interleukine 4, l’interleukine 13, la chimiokine RANTES, de même que toute une série d’autres cytokines ou récepteurs impliqués dans la réponse immunitaire dont le lien avec la DA reste moins évident .

Facteurs environnementaux

De nombreux facteurs environnementaux, qui augmenteraient le risque d’apparition de la DA ont été proposés dans la littérature au cours de ces vingt dernières années. Néanmoins, rares sont ceux dont l’association avec la DA a été clairement établie.

Le climat
Le climat a fait l’objet de peu d’attention en ce qui concerne son association avec la DA. Les données sur l’association entre la DA et la température restent contradictoires [71]. La phase I de l’étude ISAAC prenant en compte les variables latitude, altitude, température extérieure moyenne et humidité relative moyenne a révélé que les symptômes de la DA étaient positivement corrélés avec la latitude et négativement avec la température extérieure moyenne [158]. Ces résultats sont confirmés par d’autres études similaires réalisées en Taïwan et aux Etats-Unis [78,141]. La lumière UV est également connue comme positivement associée à la DA grâce notamment à son effet immunosuppresseur [26].

La pollution de l’air
La pollution de l’air est due à la présence de polluants dans les plus basses couches de l’atmosphère. Ces polluants sont des gaz ou des particules. Les industries sidérurgiques et métallurgiques rejetant des fumées nauséabondes, les incinérateurs de déchets, les raffineries de pétrole et les différents moyens de transports routiers constituent les principaux polluants de l’atmosphère. Connus principalement pour leurs effets néfastes sur l’appareil respiratoire, les polluants atmosphériques sont également capables de pénétrer la peau à travers la couche cornée et être à l’origine de phénomènes immunoallergiques [3]. Un certain nombre d’études transversales ont montré que la pollution de l’air influait beaucoup sur la prévalence de la DA. Dans une étude portant sur 4907 enfants français âgés de 9 à 11 ans résidant à leur adresse actuelle depuis au moins 3 ans, l’apparition de DA était significativement associée à des concentrations moyennes sur 3 ans de PM10, NO2, NOx et CO ; les odds-ratios (ORs) ajustés étaient respectivement de 1,13, 1,23, 1,06 et 1,08 [107]. Dans une étude castémoins comprenant 198 cas et 202 témoins âgés de 3 à 8 ans, les symptômes d’eczéma étaient associés à la concentration en benzyle butyle phtalate contenu dans la poussière collectée dans la chambre à coucher des enfants [23]. Cependant, bon nombre de ces études présentaient des biais de sélection liés en grande partie au diagnostic de la DA qui était parfois simplement basé sur les déclarations des patients ou de leurs parents.

Le mode de vie urbain vs mode de vie rural 

On sait que pour les populations de même origine ethnique et génétique, la prévalence de la DA est plus élevée dans les villes que dans les campagnes. Une revue systématique de 26 études a permis de démontrer le poids de la DA dans les zones urbaines comparées aux zones rurales .

L’alimentation 

La fréquence élevée de la DA dans les pays développés pourrait faire penser au rôle d’un régime alimentaire « occidentalisé » (c’est-à-dire riche en céréales raffinés, viandes rouges, conserves et acides gras insaturés) l’incidence de la maladie. Une phase III de l’étude ISAAC a montré un effet protecteur significatif de la consommation fréquente de fruits frais (1-2X par semaine) et un effet aggravant de la consommation de fast-food (≥ 3X par semaine) [44]. Une autre étude ISAAC retrouvait des résultats presque similaires en notant une association inverse entre la prévalence de la DA et l’apport par habitant de légumes, de céréales et de poissons frais et congelés [45]. D’autres études ont montré qu’une consommation élevée de poissons durant la grossesse réduit le risque de DA dans les 5 premières années de la vie de 25 à 43% [113]. L’effet protecteur du poisson peut être attribué à sa teneur élevée en n-3 acides gras poly insaturés (n3 AGPI) qui agirait de par son activité anti inflammatoire.

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Table des matières

INTRODUCTION
I.DEFINITION DE L’ATOPIE ET DE LA DERMATITE ATOPIQUE
I.1- Atopie
I.2- Dermatite atopique
II. HISTORIQUE
III.EPIDEMIOLOGIE DE LA DA
III.1- Prévalence de la DA
III.2- Facteurs de risque de la DA
III.2.1- Facteurs génétiques
III.2.1.1- Gènes codant pour les protéines structurales de l’épiderme
III.2.1.2- Gènes codant pour les éléments majeurs du système immunitaire
III.2.2- Facteurs environnementaux
III.2.2.1- Le climat
III.2.2.2- La pollution de l’air
III.2.2.3- Le mode de vie urbain vs mode de vie rural
III.2.2.4- L’alimentation
II.2.2.5- L’allaitement et le sevrage
III.2.2.6- Exposition microbienne : la « théorie hygiéniste »
IV. CONCEPT DE LA « MARCHE ATOPIQUE »
IV.1- Définition de la marche atopique
IV.2- Facteurs de risque de la marche atopique
IV.2.1- Précocité de la DA
IV.2.2- Sévérité de la DA
IV.2.3- Antécédents familiaux d’atopie
IV.2.4- Sensibilisation allergénique précoce et multiple
V. DA DE L’ENFANT : PRESENTATION CLINIQUE, COMPLICATIONS ET COMORBIDITES
V.1- Présentation clinique
V.1.1- DA du nourrisson
V.1.2- DA de l’enfant (après 2 ans)
V.2- Complications de la DA
V.2.1- Surinfections bactériennes et virales
V.2.1.1- Surinfection à staphylocoque doré
V.2.1.2- Surinfection au virus herpès (HSV-1 essentiellement)
V.2.2- Retard de croissance
V.2.3- Complications ophtalmologiques
V.2.4- Eczéma de contact
V.3- Comorbidités
V.3.1- DA et comorbidités cardiovasculaires
V.3.2- DA et risque infectieux
V.3.3- DA et troubles neuropsychiatriques
VI. DIAGNOSTIC DE LA DA DE L’ENFANT
VI.1- Diagnostic positif
VI.1.1- Critères diagnostiques de Hanifin et Rajka
VI.1.2- Critères diagnostiques de la United Kingdom Working Party
VI.2- Diagnostic de gravité
VI.2.1- SCORAD
VI.2.2- Facteurs de risque de sévérité
VI.3- Diagnostic différentiel
VI.3.1- Chez le nourrisson
VI.3.1.1- Dermite séborrhéique
VI.3.1.2- Psoriasis
VI.3.1.3-Gale
VI.3.1.4- Acropustulose infantile
VI.3.1.5- Miliaire sudorale ou bourbouille
VI.3.1.6- Syndromes génétiques impliquant un déficit immunitaire
VI.3.2- Chez l’enfant
VI.3.2.1- Eczéma de contact
VI.3.2.2-Psoriasis
VI.3.2.3-Varicelle
CONCLUSION

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