Environnement législatif

Environnement législatif

L’élément détonnant

Comme énoncé dans l’introduction, l’affaire Birkenfeld, datant de la fin de la première décade de notre siècle, fut le début d’une importante série de mesures prises contre la Suisse depuis presque déjà une décennie. Mais qu’est-ce qu’au juste que l’affaire dite Birkenfeld ? En quelques mots, Bradley Birkenfeld était un banquier privé d’origine américaine travaillant à l’époque pour le compte de la banque suisse UBS, à Genève. En 2005, il s’aperçut à la lecture de documents juridiques internes que la banque ne respectait pas, en pleine conscience, un accord établi entre l’Internal Revenue Service (IRS) et elle-même relativement aux opérations. Le document émit l’idée que les gestionnaires de fortune outrepassaient leur rôle vis-à-vis des clients et des prospects américains. C’est ainsi que l’on découvrit une série d’agissements illicites opérés par quelques milliers de gestionnaires – émanant de la maison mère, UBS (Suisse) – qui consistaient au démarchage « offensif » de clients et prospects dans le but de les inviter à placer leur patrimoine en Suisse pour qu’ils puissent échapper à l’impôt de leur pays.

La particularité de ces agissements était qu’UBS envoyait physiquement ses émissaires en territoire américain (d’où l’usage du terme « offensif »…), ce qui est, et était déjà à l’époque, formellement illicite de par l’accord préexistant entre la banque et les services de prélèvement de l’impôt américains – une sorte de « pacte de non-agression ». C’est ainsi que M. Birkenfeld, dans une démarche de désapprobation, démissionna la même année et alerta le gouvernement américain deux ans plus tard de l’illicéité des pratiques faites sur son sol par la plus importante banque helvétique. En février 2009, alors que de nombreuses investigations furent lancées suite aux accusations du gestionnaire de fortune repenti, à la fois contre UBS mais aussi contre d’autres établissements bancaires suisses, le Département de la Justice des Etats-Unis condamna UBS à une lourde amande dont la somme se monta à 780 millions de dollars. Malgré tout arrêté pour avoir lui aussi aidé un milliardaire californien, en la personne de M. Igor Olenicoff, à évader ses actifs des Etats-Unis, M. Birkenfeld purgea à cet effet une peine privative de liberté dans son pays d’origine avant d’être reconnu « lanceur d’alertes » par l’IRS et doté d’une jolie récompense, à savoir d’un montant de 104 millions de dollars. M. Olenicoff, quant à lui, plaida coupable d’évasion fiscale et paya le tribut de 52 millions de dollars à l’autorité fiscale de son pays. En 2015, une affaire similaire éclata en France avec, toujours, l’UBS sur le banc des accusés. M. Birkenfeld fut autorisé à se rendre à Paris afin d’être entendu par la justice française. Selon un article du journal suisse Le Temps, paru le 20 mars 2017,

« (…) La maison mère UBS avait été mise en examen le 23 juillet 2014 par les juges d’instruction Serge Tournaire et Guillaume Daieff pour “blanchiment aggravé de fraude fiscale”, après une première inculpation, en juin 2013, pour “démarchage illicite” de clients sur le territoire français. Sa filiale UBS France a, de son côté, été plusieurs fois mise en examen pour les mêmes chefs d’inculpation, ainsi que pour “subornation de témoins” en mars 2016, soupçonnée d’avoir tenté de faire taire un lanceur d’alerte. « La banque avait acquitté le 30 septembre 2014 une caution de 1,1 milliard d’euros demandée par les magistrats instructeurs, qu’elle avait en vain par la suite contesté devant la justice. Toutes ses requêtes ont depuis été déboutées, y compris devant la Cour européenne des droits de l’homme. Selon la justice française, la banque helvétique et sa filiale auraient, entre 2004 et 2012, mis sur place un vaste système d’évasion fiscale portant sur une somme évaluée entre 10 et 12 milliards d’euros.

L’affaire avait démarré en 2010 par une dénonciation anonymes d’anciens salariés de la banque française. Ces derniers avaient découvert un système de comptabilité opaque nommé “carnets du lait”, destiné à camoufler la répartition des bonus entre chargés d’affaires français et suisses, lorsqu’ils envoyaient de part et d’autre de la frontière des clients dont les avoirs n’étaient pas déclarés. » (Werly, article Le Temps, 2017.) En somme, une affaire de la même envergure mettant à mal la même banque : UBS, à savoir l’une des deux d’importance systémique. La similitude de ces affaires accable encore davantage la déontologie – car UBS n’est de loin pas la seule institution à avoir aidé des ressortissants de tel ou tel pays, et les banques, en général, non plus puisque l’on peut également évoquer l’ensemble des acteurs périphériques aux clients : les cabinets d’avocats, les fiduciaires, etc. – d’un pays tout entier. Car en plus d’avoir dû sauvegarder une banque submergée par des peines pécuniaires dont les montants ont été rarement d’une telle importance et, par conséquent, chose gravissime, jusqu’à se trouver en grand danger, la Confédération helvétique n’eut d’autres choix que de procéder à un grand, passez-moi l’expression, « redorage de blason » qui, maculé comme il l’était, mettait en péril un secteur tout entier de l’industrie suisse – et par ailleurs l’épargne d’un grand nombre de nos compatriotes…

L’échange automatique de l’OCDE

Cette course à la transparence débuta au lendemain des révélations de M. Birkenfeld par « l’accord de poursuite différée conclu le 18 février 2009 entre l’UBS et le Département of Justice quiprévoit un échange d’informations concernant 4’450 clients américains. » (Boitelle, Bilan, 2013.) S’en suivra la modification de la Loi fédérale sur les opérations bancaires, apportée par la Confédération suisse. Cet ajournement permit la ratification en 2013 de la convention sur l’Entraide administrative mutuelle en matières fiscale et judiciaire, en réponse à un postulat déposé par le groupe socialiste le 26 mai 2008. La nouvelle convention se base sur les articles 26 et 27 du Modèle de convention de l’OCDE – émise pour la première fois en 1963, puis révisée à de multiples reprises jusqu’à 2012. Ce modèle avait initialement pour but la suppression des doubles impositions internationales en matière d’impôts sur le revenu et sur la fortune3. Pour l’anecdote, le Traité du 25 mai 1973 entre la Confédération suisse et les Etats-Unis d’Amérique sur l’entraide judiciaire en matière pénale excluait tout crime fiscal (art. 2), considérant que, de façon somme toutes ingénue, seul le crime organisé était susceptible de se soustraire à l’impôt fédéral américain (art. 7) !

Le 13 mars 2009 restera une date importante, la première véritablement significative dans la révolution financière suisse, puisque cette date marque l’abandon de la distinction entre fraude fiscale et évasion fiscale, et à les considérer comme étant toutes les deux répréhensibles puisqu’elles poursuivraient l’une et l’autre le même objectif : la soustraction à l’impôt du pays de résidence du client. Auparavant, la Suisse distinguait ces deux termes, la fraude fiscale étant considérée comme étant la seule pénalement problématique puisqu’elle signification le contournement volontaire des règles fiscales du pays domestique afin d’échapper à la taxation. Il y avait là un comportement actif, avec documentation fournie inexacte ou falsifiée. L’évasion fiscale, quant à elle, se différenciait de la fraude en étant apparentée à de l’optimisation fiscale, c’est-à-dire en usant de moyens légaux et multiples destinés à réduire (fortement) sa facture fiscale domestique, ou, plus généralement, à un simple oubli de la part du contribuable. Elle était déterminée dans tous les cas par un comportement passif et sans dessein d’ « échapper » à la taxation.

C’est à cet effet que, après la ratification en 2009, par la main du président de la Confédération de l’époque M. Hanz-Rudolf Merz, et en l’espace de six mois, douze conventions renégociées contre les doubles impositions (CDI) portant sur l’entraide administrative en matière fiscale, l’OCDE raya la Suisse de sa liste « grise ». Notons à titre purement informatif que l’OCDE est une organisation vouée au débat interétatique et qu’elle n’est censée, en aucun cas, posséder quelque pouvoir législatif, judiciaire ou exécutif… Suite à cette première « mise à niveau », la Suisse préservera officiellement son secret bancaire, certes dénaturé car ne pouvant plus travailler à l’ « optimisation », et condamné à moyen terme presqu’en intégralité puisque le Conseil fédéral, désireux de poursuivre la lutte contre la fraude fiscale et de faire valoir sa bonne foi, se dit prêt à collaborer en tout temps avec les instances internationales et les pays potentiellement lésés. En termes politiquement incorrects, il s’agit dans les faits bel et bien de la mort du secret bancaire comme ustensile de l’évasion fiscale. 2.2.3 Le FATCA L’élément le plus difficilement avalable de tous reste cette incompréhensible validation faite par le Parlement suisse, le 27 septembre 2013, du Foreign Account Tax Compliance Act (FATCA), accord unilatéral qui oblige les établissements bancaires des différents Etats signataires (dont la Suisse) à transmettre aux services fiscaux américains l’ensemble des informations relatives aux clients américains.

Ces opérations engendrent de très lourds frais administratifs à la charge seule des établissements donateurs. La mise en application fut effective le 2 juin 2014. Le FATCA est l’un des différents fronts fiscaux pour mener à bien son débusquage du client américain irrévérencieux. Il incite les banques à se dénoncer elles-mêmes en cas de possession d’un compte d’un client américain. Quatre catégories existent, en vertu de classification des diverses banques : Pour la première, il s’agit de banques étant déjà poursuivies (Crédit Suisse, Pictet, UBS) ; la seconde regroupe les banques qui se pensent fiscalement justiciables pour des faits antérieurs (Lombard-Odier, BCV, feu BSI) ; la troisième recense les banques qui s’estiment être parfaitement en règle de ce côté-là (Vontobel, Bâloise) ; et enfin, la quatrième catégorie est celle des banques n’étant qu’actives localement, donc loin de tout soupçon.

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Table des matières

Déclaration
Remerciements
Résumé
Liste des tableaux
Liste des figures
1. Introduction
1.1 Brève introduction de l’aventage comparatif suisse
1.2 Le offshore
1.3 La banque privée
2. Environnement législatif
2.1 L’élément détonnant
2.2Liste des normes entrées en vigueur depuis 2009
2.2.1Transparence, criminalisation et entraide
2.2.2L’échange automatique de l’OCDE
2.2.3Le FATCA
2.2.4L’échange automatique de renseignements (EAR)
2.2.5Les accords Rubik
2.2.6Le GAFI
2.2.7Aux Etats-Unis
2.3Normes attachées directement aux gestionnaires
2.3.1Les UCITS
2.3.1.1Les UCITS I à IV
2.3.1.2Les UCITS V
2.3.2AIFMD
2.3.3Le nouvel « investisseur qualifié », selon les LPCC / OPCC
3. Environnement politique
3.1Etats-Unis
3.1.1Origine de l’hégémonie américaine
3.1.2« L’Amérique, la nouvelle Suisse »
3.1.3EAR, FATCA ; des solutions commerciales ?
3.1.3.1À qui profite le « crime » ?
3.1.3.2Des boîtes aux lettres vieilles de vingt ans
3.1.4La politique de Donald Trump et la déréglementation de la finance
3.1.4.1Dodd-Frank et les banques
3.1.4.2« Trump Tax Plan » ou le nouvel élan de l’optimisme
3.1.4.3« Border Tax »
3.2L’Union européenne
3.2.1Le Traité de Rome de 1957
3.2.2L’Europe ultra-libérale
4. Environnement économique
4.1Tendance globale actuelle
4.2La croissance
4.2.1L’indicateur pétrole et sa corrélation avec les monnaies
4.2.2Les chiffres mondiaux
4.3Les monnaies
4.3.1Et si le dollar devenait une monnaie comme les autres ?
4.3.1.1L’impérialisme par la dette libellée en dollars
4.3.1.2Le dollar comme monnaie de référence
4.3.1.2.1Les dangers d’une monnaie dominatrice
4.3.1.2.2Le dollar comme monnaie des matières premières
4.3.1.3 La création de la Nouvelle banque de développement (NBD)
5. Environnement technologique
5.1Les perspectives du « P2P »
5.2Les fintechs
5.2.1Le phénomène de la fintech
5.2.2Les chiffres de la fintech
5.2.3La banque et les fintechs : quelle stratégie ?
5.3La blockchain
5.4Le conseil robotisé
6. Les cinq (+ une) forces de Porter
6.1Menace de produits de substitution
6.2Menace de nouveaux entrants
6.3Pouvoir de négociation des clients
6.4Pouvoir de négociation des fournisseurs
6.5Contraintes réglementaires des pouvoirs publics (+1)
6.6Intensité concurrentielle
7. Les perspectives
7.1L’Europe antisociale voulant garder le contrôle
7.2La dérèglementation financière et la compliance qui desservent les banques suisses
7.3Repositionnement géopolitique
7.4Mesures envisageables de la Confédération
8. Conclusion
Bibliographie

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