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LES DETERMINANTS DES POLITIQUES AGRICOLES
Au regard du poids de l’agriculture dans l’รฉconomie nationale, lโEtat, sous lโimpulsion du gouvernement burkinabรจ, a dรฉveloppรฉ diverses politiques en vue de promouvoir le secteur agricole, en complรฉment aux diverses initiatives prises par ses partenaires techniques et financiers bilatรฉraux, multilatรฉraux et par dโautres acteurs non รฉtatiques ou non gouvernementaux. Les rรฉformes du systรจme agricole ont รฉtรฉ caractรฉrisรฉes par une forte emprise de la politique intรฉrieure et de lโinfluence des bailleurs de fonds sur leurs orientations. Dโaprรจs Jean-Franรงois Bayart, ยซ les รฉlites africaines ont รฉtรฉ clientes des Etats coloniaux ou mรฉtropolitains ยป396 . Cโest donc dans la thรฉorie de la dรฉpendance quโil faut lire lโhistoire actuelle du Burkina Faso en ce sens que la thรฉorie de la dรฉpendance souligne la primautรฉ de lโaction รฉtrangรจre dans la dรฉtermination des รฉvolutions historiques. Au regard de la dรฉpendance politique et รฉconomique un peu disproportionnรฉe de la plupart des pays africains envers lโรฉtranger de l’รฉtranger, le poids de ce dernier semble constituer un facteur important dans l’explication de la situation politique par rapport aux processus de libรฉralisation dans bon nombre de ces pays africains397 ร lโimage du Burkina Faso.
Ce qui nรฉcessite un rappel du dรฉbat sur les origines ou ยซ facteurs catalyseurs ยป des changements politiques qui ont rythmรฉ la vie politique du Burkina Faso au dรฉbut des annรฉes 1990. Car les avis sont partagรฉs sur la primautรฉ des facteurs dits ยซ endogรจnes ยป et ceux censรฉs รชtre ยซ exogรจnes ยป. Il s’agit donc ici de s’interroger sur l’impact que ce facteur peut avoir sur la formulation des politiques publiques agricoles. Il est vrai que la position qu’adoptent de plus en plus, lโUnion europรฉenne (UE) et les institutions financiรจres internationales envers le Burkina Faso semblent avoir une signification non nรฉgligeable sur la psychologie et, donc, les actions des gouvernements398. Ainsi, dans son analyse des conditionnalitรฉs politiques de la coopรฉration allemande en Afrique entre 1990 et 1994, Gerhard Boke semble accorder une grande importance au rรดle de ces conditionnalitรฉs dans l’avรจnement de la dรฉmocratie en Afrique, des conditionnalitรฉs qui s’รฉtaient longtemps heurtรฉes ยซ aux intรฉrรชts divergents qui prรฉvalaient dans les rapports entre l’Ouest et l’Est tout au long de la guerre froide ยป 399. Pour sa part, Goldsmith voit une corrรฉlation entre le niveau de libรฉralisation du systรจme politique dans les pays africains400 et le volume d’aides รฉtrangรจres dont ces derniers ont bรฉnรฉficiรฉ au dรฉbut des annรฉes 1990.
Selon Moss, le rรดle de l’รฉtranger401 se manifeste de deux maniรจres principales : par la ยซ politique du bรขton ยป, d’une part et, par celle ยซ de la carotte ยป, d’autre part. Dans le premier cas, il s’agit de conditionner l’offre d’assistance aux rรฉgimes africains par la dรฉmocratisation au stade de libรฉralisation tel le cas du Burkina Faso. Aux stades de la transition et de la consolidation, il s’agit d’exiger que les pays africains jouent par les rรจgles dรฉmocratiques dรฉjร รฉtablies402. Dans le second cas, il sโagit de promettre une aide accrue aux pays qui s’engagent dans la voie de la dรฉmocratie pour soutenir et encourager leurs efforts. Goldsmith ajoute deux autres stratรฉgies par lesquelles les pays donateurs ou institutions financiรจres internationales peuvent influencer l’attitude des rรฉgimes africains par rapport ร la dรฉmocratisation. Une de ces deux stratรฉgies est le soutien que certains donateurs accordent aux organisations de la sociรฉtรฉ civile. L’autre stratรฉgie qu’identifie Goldsmith est celle qu’il considรจre comme ยซ accidentelle ยป, ร savoir les rรฉformes politico- รฉconomiques qu’entreprennent des rรฉgimes africains afin de satisfaire aux exigences ยซ รฉconomiques ยป et ยซ techniques ยป que leur imposent les bailleurs de fonds dans la formulation des politiques publiques.
Lโaccรจs ร des ressources, de part et dโautre, peut รชtre vu sous trois conditions qui, selon Philipe de Leener, permettent de caractรฉriser un partenariat. Tout dโabord, chaque partenaire sโattend ร recevoir quelque chose de la part de lโautre, par exemple en termes de connaissances, de savoir-faire et de capital relationnel auxquels il nโaurait pas pu prรฉtendre sans partenariat403. Une deuxiรจme condition est que chaque partenaire ait quelque chose de matรฉriel ou dโimmatรฉriel ร donner. Cโest tout lโenjeu de la rรฉciprocitรฉ des รฉchanges entre Nord et Sud induits ou non par les bailleurs de fonds. Enfin, les parties prenantes doivent รชtre mues par des objectifs ร atteindre en commun, diffรฉrents dโobjectifs individuels รฉventuels, et qui ne peuvent pas รชtre atteints par chaque partenaire sรฉparรฉment. Nous retrouvons ici lโidรฉe de jeu ร somme positive censรฉ รชtre induit par la coopรฉration. Nรฉanmoins, dans le cas dโun partenariat Nord-Sud, la symรฉtrie dโรฉchanges รฉvoquรฉe par cet auteur peut facilement รชtre mise en doute. On peut en effet se placer dโun point de vue critique en suggรฉrant que le partenariat permet avant tout aux bailleurs de fonds du Nord de sโassurer dโune meilleure efficience de leur aide, essentiellement sur le plan financier404.
Ainsi, en fournissant comme base un cadre nรฉgociรฉ dans lequel les droits, responsabilitรฉs et devoirs sont dรฉfinis, le partenariat permettrait en fait aux [pays pourvoyeurs] dโaide de rรฉimposer leurs conditionnalitรฉs ร travers des rรจgles contractuelles dรฉfinies par le Nord405. Comme รงa รฉtรฉ le cas au Burkina Faso, dans la mise en place des politiques agricoles, les bailleurs de fonds ont accordรฉ un traitement privilรฉgiรฉ ร la culture de rente qui constitue un secteur รฉconomique stratรฉgique pour son importance sur la culture vivriรจre. Les investissements publics sont dรฉsormais rรฉduits pour le dรฉveloppement de la culture vivriรจre sous lโinfluence de ces bailleurs de fonds alors que les besoins sโaccentuent non pas seulement au niveau de la culture vivriรจre mais aussi et surtout pour deux raisons. Dโune part, on assiste ร cette mรชme pรฉriode ร une croissance dรฉmographique constante406 et non encadrรฉe au moment oรน les populations actives sont touchรฉes par de la chertรฉ de la vie tandis que le Burkina qui se trouve parmi les premiers producteurs du coton, reste toujours dรฉpendant de lโimportation des produits alimentaire de base407 et de lโautre cรดtรฉ, les politiques tarifaires prรฉfรฉrentielles qui protรฉgeaient les producteurs et les marchรฉs du sud sโeffondrent408.
LES DETERMINANTS ENDOGENES A LA FILIERE COTON
La mise en ลuvre de la politique dโajustement structurel caractรฉrisรฉe par le dรฉsengagement de lโEtat du secteur agricole a entraรฎnรฉ un regain de vivacitรฉ du mouvement coopรฉratif visant une position dโinterlocuteur crรฉdible dans le paysage institutionnel en raison des enjeux et dรฉfis nouveaux. La culture cotonniรจre, hรฉritรฉe de la pรฉriode coloniale fut un des rares succรจs de dรฉveloppement agricole menรฉ ร cette pรฉriode au Burkina Faso. En effet, les cultures commerciales dโexportation รฉtant plus demandeuses en compรฉtences de gestion et en techniques agronomiques que les cultures vivriรจres, une coordination efficace entre services dโassistance technique, distribution des intrants et organisations de producteurs. Au cลur de la rรฉforme du secteur cotonnier, le processus de privatisation de lโancien monopole parapublic, la SOFITEX, a permis le transfert de nombreuses responsabilitรฉs de lโEtat aux producteurs, grรขce ร leurs structures dโorganisations รฉmergentes. La production du coton au Burkina Faso semble les plus significatives parce elle a bรฉnรฉficiรฉ un certain nombre de conditions politiques et รฉconomiques favorables qui ont permis aux paysans dโavoir du succรจs. Parmi celles-ci, des mesures incitatives ou dissuasives ร certains comportements par le biais des politiques de prix et commerciale, des politiques de commercialisation des intrants et des produits, les politiques sociales (transferts de revenus, des filets sociaux, systรจmes de sรฉcuritรฉ sociale) et les politiques fiscales et financiรจres.
Les paysans ont adhรฉrรฉ en majoritรฉ ร cette culture parce quโelle leur permettait dโaccรฉder ร des revenus dans un environnement faiblement monรฉtarisรฉ et dans un contexte de prix favorables sur le marchรฉ international. La disponibilitรฉ des rรฉserves fonciรจres permettant une extension des superficies cultivรฉes en coton, ont constituรฉ des facteurs incitatifs. La conjugaison des facteurs liรฉs ร lโencadrement et aux conditions environnementales a provoquรฉ une hausse importante des rendements cotonniers. La diffusion dโinnovations agricoles dans les zones cotonniรจres a conduit ร une vรฉritable ยซ rรฉvolution technique ยป, rendue possible grรขce aux revenus monรฉtaires tirรฉs de la culture du coton et ร la mise en place de systรจmes des mรฉcanismes dโincitation ร la production du coton (paragraphe 1), le partenariat entre les paysans et la SOFITEX (paragraphe 2).
Des mรฉcanismes dโincitation ร la production du coton
Les rรฉformes qui ont conduit ร la privatisation de la filiรจre burkinabรฉ ont ouvert un espace plus large aux dynamiques portรฉes par les paysans et leurs organisations. LโEtat410 burkinabรจ a initiรฉ ร la fin des annรฉes 90 une politique d’incitation d’investissement dans la production agriculture par des investisseurs privรฉs afin de surmonter les insuffisances. Dรจs lors, un vรฉritable partenariat a รฉmergรฉ au sein de la filiรจre entre lโEtat, lโUNPCB, la SOFITEX et la Banque agricole et commerciale du Burkina Faso (BACB), ainsi que lโInstitut de lโenvironnement et de recherches agricoles (INERA). Il sโagit de faire participer tous les acteurs aux dรฉcisions de la filiรจre. LโUNPC-B en intervenant dans tous les processus de dรฉcision de la filiรจre de la dรฉfinition, de la Recherche- Dรฉveloppement, ร la prise en charge du conseil en gestion รฉconomique auprรจs des exploitations agricoles. Ainsi, le domaine de Recherche-Dรฉveloppement auparavant dรฉvolu ร lโEtat, par le biais notamment des organismes de dรฉveloppement rural, est dรฉsormais sous la responsabilitรฉ conjointe de lโEtat (par le biais de lโInstitut de lโEnvironnement et de Recherches Agricoles (INERA) pour la recherche.
Il faut cette fois, non plus seulement exploiter le coton local mais faire produire localement du coton aux qualitรฉs requises pour satisfaire les besoins de son industrie. Le changement รฉtait important puisquโil impliquait de facto en amont des efforts dโintroduction variรฉtale et dโencadrement des paysans. Dรจs le dรฉbut du XX รจme siรจcle, les fins (dโexportation) ร laquelle le colonisateur destinait la culture du cotonnier lui a permis de bรฉnรฉficier dโune attention prรฉcoce et intรฉressรฉe de la part de la recherche. Celle-ci a permis, au fil du temps, la mise au point dโinnovations techniques, culturales et institutionnelles, notamment sous lโรฉgide des organismes cotonniers (IRTC et CFDT). Son rรดle a รฉtรฉ essentiel en termes dโaugmentation des rendements et dโamรฉlioration de la qualitรฉ de la fibre. La recherche a en effet permis, entre autres, la mise au point et la diffusion de variรฉtรฉs de coton adaptรฉes aux conditions climatiques du pays et conformes aux critรจres du marchรฉ mondial, qui ont fait la renommรฉe de la fibre burkinabรฉ en termes de qualitรฉ. Quatorze variรฉtรฉs de coton ont ainsi รฉtรฉ mises au point dans le pays et neuf dโentre elles ont รฉtรฉ vulgarisรฉes puis adoptรฉes ร large รฉchelle entre 1955 et 1995411.
Ces efforts de recherche ont permis une augmentation spectaculaire des rendements en culture et ร lโรฉgrenage et une amรฉlioration des qualitรฉs technologiques de la fibre. Ces rรฉsultats nโauraient รฉvidemment pas รฉtรฉ obtenus sans les efforts de diffusion et de vulgarisation en milieu paysan des innovations (techniques, culturales, etc.) qui ont รฉtรฉ entrepris par la CFDT et par les services dรฉconcentrรฉs de lโEtat. Les rendements et la qualitรฉ du coton se dรฉterminent en effet non seulement en amont de la filiรจre (sรฉlection de semences amรฉliorรฉes, choix protection phytosanitaire, techniques culturales,…) mais รฉgalement ยซ au champ ยป et dรฉpendent alors aussi des pratiques agricoles des paysans et de leur capacitรฉ ร soutenir le processus dโintensification de la culture et ses exigences de qualitรฉ. Par ailleurs et simultanรฉment la nรฉcessitรฉ de lier les intรฉrรชts de lโexportation avec ceux des producteurs fut admise. La valorisation du prix dโachat aux producteurs participait de cette idรฉe. Celui-ci devait รชtre suffisamment rรฉmunรฉrateur pour dรฉtourner le paysan du marchรฉ local ou dโautres spรฉculations plus attractives pour lui. La conviction de la SOFITEX รฉtait quโune meilleure rรฉmunรฉration entraรฎnerait de meilleurs rendements, une meilleure qualitรฉ du coton et donc une augmentation de son prix dโachat.
Le partenariat entre les paysans et la SOFITEX
La SOFITEX ou la sociรฉtรฉ burkinabรฉ des fibres textiles, aujourdโhui principale opรฉratrice de la filiรจre coton, existe depuis 1979. A ses dรฉbuts, le capital รฉtait rรฉparti comme suit : 65 % pour lโEtat, 34 % pour la CFDT et 1 % pour les banques. Une restructuration engagรฉe en 1996 a abouti ร la privatisation de cette sociรฉtรฉ industrielle et commerciale dโEtat, sous la pression de la Banque Mondiale et des institutions financiรจres internationales428. La privatisation a profitรฉ aux groupements de producteurs de coton, les GPC, qui sont actuellement dรฉtenteurs de 33 % du capital, cโest-ร -dire autant que lโEtat ou que la CFDT. La sociรฉtรฉ sโachemine maintenant vers la libรฉralisation prรฉconisรฉe par les accords de Bretton Woods429. Le processus a dรฉbutรฉ en dรฉcembre 2001 avec deux dรฉcrets ministรฉriels dont un mettait fin au monopole de la SOFITEX. Depuis 1999, lโUNPCB a signรฉ un accord interprofessionnel430 avec la SOFITEX et travaille en partenariat avec lโagence franรงaise pour le dรฉveloppement, ou AFD, pour le recrutement des conseillers en gestion, des conseillers agricoles et des inspecteurs provinciaux.
Cet accord prรฉvoit un comitรฉ paritaire de gestion du secteur qui traite de questions liรฉes au prix des intrants proposรฉs par la SOFITEX, dรฉtermine le prix plancher aux producteurs pour le coton graine, le prix dโachat complรฉmentaire ou ยซ ristourne coton ยป versรฉ lors de la nouvelle campagne lorsque le rรฉsultat de la campagne prรฉcรฉdente est positif, administre un fonds de soutien des prix financรฉ par les producteurs au moyen dโun prรฉlรจvement sur le plancher, et รฉlabore des programmes de recherche et des programmes dโentrettien des pistes rurales 431 . Les GPC, structure coopรฉrative, facilitent lโapprovisionnement en intrants et matรฉriels agricoles, la bonne gestion des crรฉdits et lโaugmentation de la production. Ils sont reprรฉsentรฉs par lโUnion nationale des producteurs de coton du Burkina (UNPCB). Les dirigeants432 de lโUNPCB tirent parti de cette situation pour obtenir, dans un contexte de dรฉgradation des cours, une stabilisation du prix du coton pour 3 ans et la possibilitรฉ dโutiliser les revenus du coton en fonction des choix dรฉfinis par les organisations.
Au prรฉalable, les paysans avaient dรฉjร obtenu une hausse substantielle du prix du coton, une baisse des prix des intrants, ainsi quโune annulation dโune partie des dettes vis-ร -vis de la SOFITEX et de la Caisse Nationale de Crรฉdit Agricole (CNCA). Celles-ci doivent contribuer ร la structuration du milieu rural et รชtre surtout des partenaires techniques efficaces pour la cogestion des filiรจres. Lโattitude des acteurs institutionnels sโinscrit dans le prolongement de pratiques anciennes, qui consistent ร organiser le monde rural pour amรฉliorer le fonctionnement des filiรจres les plus rentables. Dans un contexte de retrait contraint de lโEtat, la capacitรฉ des organisations de producteurs ร assumer des fonctions de plus en plus larges est primordiale pour la sรฉcuritรฉ des filiรจres. Cela explique lโinsistance mise sur les projets de professionnalisation des organisations paysannes et lโimportance des moyens qui leur sont attribuรฉs. Ces projets portent sur lโamรฉlioration des compรฉtences des responsables paysans pour que les fonctions transfรฉrรฉes aux organisations soient correctement assurรฉes : suivi des approvisionnements en intrants, contrรดle de leur utilisation sur les parcelles de coton pour limiter des dรฉtournements vers le vivrier, remboursement des crรฉdits.
Lโintervention de lโunion nationale auprรจs des exploitants est facilitรฉe par lโintermรฉdiaire de groupements ou dโinstitutions prรฉ-coopรฉratives ร plus grande รฉchelle et auxquels ils appartiennent. Il y a ainsi, au Burkina Faso, 7 005 groupements de producteurs de coton, 4162 groupements villageois, 240 unions dรฉpartementales et 36 unions provinciales dont les reprรฉsentants รฉlus ont dรฉsignรฉ un bureau exรฉcutif433. Ces organismes coopรฉratifs ont une action fonciรจre, juridique, politique et รฉconomique434. Les groupements villageois et les groupements de producteurs cotonniers sont tous deux des structures dรฉcentralisรฉes de lโUNPCB, les GPC รฉtant superposรฉs aux GV ce qui accentue les conflits et engendre lโรฉclatement progressif des seconds, dans un contexte de spรฉcialisation cotonniรจre435. Entre ces organismes dโencadrement et les producteurs, il y a des agents de terrain. Les correspondants coton ont une fonction technico-commerciale et servent dโinterface entre la SOFITEX et les groupements villageois pour estimer les besoins en intrants, pour organiser la commercialisation, pour diffuser les informations techniques et pour former les producteurs.
Ils peuvent animer des groupes de travail et intervenir en sโappuyant sur des parcelles de dรฉmonstration, cultivรฉes par des producteurs-pilotes.
Selon les diffรฉrents acteurs interrogรฉs, la SOFITEX, sociรฉtรฉ mixte, conjugue les intรฉrรชts des actionnaires et le bien-รชtre des producteurs, et ce, depuis bien avant la privatisation partielle. Les objectifs poursuivis par la sociรฉtรฉ sont principalement le volume de production de coton fibre et la viabilitรฉ financiรจre. Selon ces mรชmes personnes ressources, DAGRIS (un tiers du capital), qui est une sociรฉtรฉ de dรฉveloppement, prend en compte le niveau de vie des producteurs dans les objectifs de la SOFITEX. Avant sa privatisation, les bรฉnรฉfices de la SOFITEX รฉtaient rรฉpartis entre les dividendes servis aux actionnaires et la ristourne. Cette derniรจre รฉtait le prix dโachat complรฉmentaire du coton graine versรฉe aux producteurs afin dโassurer la mise en place et le fonctionnement de leurs organisations. Il semblerait pourtant quโune partie des bรฉnรฉfices รฉtaient affectรฉs par lโEtat ร dโautres politiques publiques ou ร des intรฉrรชts privรฉs. Avec la privatisation, les producteurs, lโUnion Nationale des Producteurs de Coton (UNPC-B) est entrรฉ dans le capital de la SOFITEX, ร hauteur de 30 %, aux cรดtรฉs de lโEtat (35 %), de la CFDT (34 %) et des Banques locales (1 %). Ils ont dรฉsormais un droit de regard, un pouvoir dโinformation et de nรฉgociation436 supplรฉmentaire dans la filiรจre et une capacitรฉ importante ร coopรฉrer et ร cogรฉrer.
DES DETERMINANTS EXOGENES DES POLITIQUES AGRICOLES
Lโhistoire de la filiรจre cotonniรจre montre ร quel point la prรฉsence des bailleurs de fonds a รฉtรฉ dรฉterminante dans lโessor de la production cotonniรจre et dans le maintien de cette culture qui fait vivre indirectement prรจs dโun quart de la population du Burkina Faso. Initialement promu par la France le coton est devenu, dans les annรฉes 1970, le support technique et รฉconomique de nombreux projets rรฉgionaux de dรฉveloppement439. La conjoncture du marchรฉ international รฉtait alors favorable et les bailleurs de fonds se sont diversifiรฉs pour encourager le dรฉveloppement de cette culture perรงue comme un moteur du dรฉveloppement rural. Les baisses successives des cours mondiaux intervenues ร partir du milieu des annรฉes 1980 vont ensuite avoir pour consรฉquence de mobiliser les sources de financement pour assainir les finances de la sociรฉtรฉ cotonniรจre et rรฉtablir les recettes budgรฉtaires de lโEtat. Puis, la privatisation de la filiรจre, en marquant le dรฉsengagement de lโEtat dans le secteur, va conduire ร la rรฉaffectation des financements au profit notamment de lโUnion Nationale des Producteurs de Coton du Burkina Faso (UNPCB).
Parmi ces initiatives, les regroupements รฉconomiques440, pourtant dรฉcriรฉs ร cause de leur inefficience 441 et incapables de provoquer le renouveau du continent 442 รฉmergent et reviennent en force ร la mode443. Il faut se souvenir que la rรฉgionalisation รฉconomique a constituรฉ dans les annรฉes soixante et soixante-dix, plus quโune mode, un instrument de revendication et surtout un moyen dโรฉmancipation tant politique quโรฉconomique 444 des peuples colonisรฉs. Elle a reรงu au niveau du continent africain un sens singulier puisquโelle a รฉtรฉ transformรฉe en slogan politique et vidรฉe de sa substance originelle445 pour devenir, au fil des annรฉes, une coquille quasi-vide446. Curieusement, malgrรฉ ces รฉchecs consommรฉs, dans un contexte international marquรฉ par une interconnexion des marchรฉs et la radicalisation rรฉcurrente de la concurrence รฉconomique et commerciale, tous les acteurs du dรฉveloppement du continent noir, Etats et divers bailleurs de fonds bilatรฉraux et multilatรฉraux en premiรจre ligne, continuent encore aujourdโhui dโinsister sur la place trรจs privilรฉgiรฉe de la coopรฉration et de lโintรฉgration rรฉgionale447 de lโagriculture. Cette nouvelle approche sโest traduite depuis la fin de la dรฉcennie quatre-vingt-dix par lโรฉmergence des bailleurs de fonds (paragraphe1), des actions des รฉlites dirigeantes et leurs motivations (paragraphe 2).
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Table des matiรจres
CONCEPTS FONDAMENTAUX
Lโanalyse des politiques publiques
Les politiques publiques
Les politiques agricoles
Lโagriculture familiale
METHODOLOGIE
La recherche documentaire
Les enquรชtes de terrain
Les entretiens individuels
Lโanalyse des discours
LES APPROCHES COGNITIVES DES POLITIQUES PUBLIQUES
Les bailleurs de fonds en tant que producteurs dโidรฉes sur les politiques agricoles
Les organisations paysannes : acteurs dโexรฉcution des programmes internationaux
REVUE DE LA LITTERATURE
Lโagriculture comme facteur de dรฉcollage vers lโindustrialisation
Politiques agricoles et la croissance รฉconomique
Les politiques agricoles avec le programme dโajustement structurel
Le retour de lโEtat dans le secteur agricole aprรจs lโajustement structurel
La rรฉvolution du secteur agricole pour plus de productivitรฉ
L’agrobusiness et des agro-industries comme moyen dโassurer la croissance รฉconomique et la sรฉcuritรฉ alimentaire
PARTIE I : ENVIRONNEMENT DES POLITIQUES AGRICOLES : RESSOURCES, ACTEURS ET INSTITUTIONS
CHAPITRE I : HISTORIQUES DES POLITIQUES PUBLIQUES AGRICOLES SECTION I : DES REFORMES DANS LE SECTEUR AGRICOLE AVEC LE PROGRAMME DโAJUSTEMENT STRUCTUREL
Paragraphe I : Lโimportance accordรฉe aux organisations paysannes
Paragraphe II : Le secteur privรฉ avec la libรฉralisation du secteur agricole
SECTION II : LES POLITIQUES AGRICOLES ENTRE DEUX MODELES DโEXPLOITATIONS : CULTURE DE RENTRE ET CULTURE VIVRIERE
Paragraphe I : Pourquoi une intervention publique en faveur de la production du coton ?
Paragraphe II : La culture vivriรจre au cลur du dรฉbat des politiques agricoles
CHAPITRE II : LES DETERMINANTS DES POLITIQUES AGRICOLES
SECTION I : LES DETERMINANTS ENDOGENES A LA FILIERE COTON
Paragraphe I : Des mรฉcanismes dโincitation ร la production du coton
Paragraphe II : Le partenariat entre les paysans et la SOFITEX
SECTION II : DES DETERMINANTS EXOGENES DES POLITIQUES AGRICOLES
Paragraphe I : Les bailleurs de fonds
Paragraphe II : Les actions des รฉlites dirigeantes et leurs motivations
PARTIE II : LES ENJEUX POLITIQUES DES POLITIQUES AGRICOLES
CHAPITRE III : LโIMPACT DES POLITIQUES AGRICOLES SUR LE VOTE PAYSAN
SECTION I : POLITIQUES AGRICOLES ET RESULTATS ELECTORAUX AU BURKINA FASO
Paragraphe I : Lโinfluence des politiques agricoles sur la participation รฉlectorale
Paragraphe II : Lโhรฉgรฉmonie du parti au pouvoir sur lโespace associatif paysan
SECTION II : LES CHOIX POLITIQUES : ENTRE RATIONALITE ET APPARTENANCE COMMUNAUTAIRE
Paragraphe I : Le transfert de lโautochtonie au champ politique
Paragraphe II : Le vote basรฉ sur lโappartenance communautaire : un choix rationnel dans le milieu paysan
CHAPITRE IV : LโEMPRISE DES POLITIQUES DANS LES ESPACES LOCAUX AVEC LโAVENEMENT DE LA DECENTRALISATION
SECTION I : LโEMERGENCE DE LA CHEFFERIE TRADITIONNELLE DANS LE VIE POLITIQUE AVEC LA DECENTRALISATION
Paragraphe I : Les rapports entre les chefferies traditionnelles/ coutumiers et le pouvoir politique colonial jusquโร lโaccession de la Haute Volta ร la souverainetรฉ nationale
Paragraphe II : Les chefs traditionnels/ coutumiers en tant que des grands รฉlecteurs dans les collectivitรฉs territoriales
SECTION II : L’INSTRUMENTALISATION DES POUVOIRS TRADITIONNELS / COUTUMIERS PAR LES POLITIQUES AVEC LA DECENTRALISATION
Paragraphe I : Les chefs traditionnels / coutumiers comme des courtiers politiques
Paragraphe II : La mobilisation par le truchement des rรฉseaux clientรจles
CONCLUSION GENERALE
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
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