DÉFINITION DES CONCEPTS
i. One Health : One Health ou « Une Seule santé » est une approche interdisciplinaire et intersectorielle dans la gestion publique de problèmes sanitaires complexes à l’interface entre l’homme, l’animal et leur environnement. Dans ce document le One Health ne se limite qu’aux secteurs de santé humaine et animale.
ii. Prophylaxie post exposition : Par ce terme on entend le traitement immédiat d’une personne ayant été mordue et donc potentiellement exposée à la rage. Elle consiste à :
✓ Nettoyer soigneusement la plaie et à appliquer un traitement local le plus rapidement possible après l’exposition ;
✓ Administrer une série de doses d’un vaccin antirabique puissant et efficace répondant aux normes de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) et administrer des immunoglobulines antirabiques, selon l’indication.
iii. Protocoles thérapeutiques : C’est le type de traitement après exposition par voie intramusculaire ou intradermique selon OMS : le protocole dit Essen se réfère à cinq injections (deltoïde) selon l’OMS suivant le calendrier suivant : une injection à J0, J3, J7, et entre J14 et J28 [13]. Le protocole par voie intradermique (ID), conformément aux schémas préconisés par l’OMS, la vaccination par voie intradermique en prophylaxie post-exposition est réalisée par injection intradermique en 2 sites (deltoïdes) aux jours J0, J3 et J7. Une dose intradermique correspondait à 0,1 ml de vaccin antirabique [13].
iv. Catégorie des contacts ou prophylaxie post exposition (PPE) [14] : Catégorie ou Nature du contact avec un animal sauvage ou domestique présumé enrager, ou dont la rage a été confirmé.
Analyses des données des prestataires de services de santé
L’analyse des connaissances sur la rage chez les prestataires de services santé était faite sur la base des réponses des enquêtés aux questions du test d’évaluations des connaissances. Une échelle de score a été adoptée pour l’analyse de résultats. L’échelle allait de 0 (non réponse ou réponse fausse), 1(Réponse incertaine), à 2 (réponse juste ou correcte), le score est qualifié mauvais pour les réponses 0, de moyen pour des réponses égales 1 et de bon pour les réponses égales 2 [27]. Pour les questions vrai ou faux, un score de 1 est attribué à la bonne réponse et 0 à une réponse fausse ou à une question sans réponse. Dans le questionnaire prestation de service, il y avait aussi deux questions pour évaluer le niveau de connaissances des prestataires et les connaissances acquises sur au cours de leur carrières professionnelles. Pour les attitudes et pratiques des prestataires de soins est mesurées par le calcul des fréquences à partir des données de la prise en charge des cas de morsures, observance du protocole, les traitements de la plaie pour la santé humaine, les prélèvements, diagnostique et mise en observation pour la santé animale et le niveau de collaboration entre les 2 secteurs de santé.
La distance à parcourir représente une contrainte à la demande antirabique
Selon le ministère de la santé publique, la distance à parcourir pour se rendre dans une formation sanitaire était un des multiples facteurs qui influence la décision du patient à recourir aux soins modernes. La distance moyenne pour accéder à un centre de santé était de 16 km et à un hôpital de 62 km (DSIS, MSP 2017). Beaucoup des personnes enquêtées rapportent les difficultés liées à la distance. La distance est présentée par les répondants comme un facteur qui décourage les patients dans la recherche du traitement. « Pour aller chercher ce traitement anti rabique, ça demande un moyen de transport et c’est peut-être ça, mais même si on n’a pas de transport il faut demander aux parents, eux aussi ils manquent d’argent » (victime, Bénoye). « Il faut aller dans les districts, mais c’est une grande distance, c’est pour ça que nous n’arrivons pas, s’il amenait le vaccin dans notre village, on allait vacciner tous nos chiens pour éviter cette maladie. » (Victime, DS Bénoye) Ces difficultés relatives à la distance sont aussi relayées par les prestataires de santé. Selon le dire des prestataires, certains patients prennent 2 ou 3 doses de vaccin et ne reviennent plus à cause de la distance. Il y aussi des patients qui ne peuvent pas accéder aux traitements en raison des grandes distances ou de l’enclavement de la région pendant les saisons de pluies. « Il y a des gens qui se sont fait mordre par des chiens et ces chiens sont morts. Les RCS nous ont appelés pour nous dire qu’il y a tel cas qui se pose, qu’est-ce qu’il faut faire ? Il faut mettre directement le mordu sous anti rabique. Mais maintenant pour que le mordu puisse quitter 180 km pour venir chercher le vaccin dans le district ça pose un problème, par ce que y a une barrière qui se pose par rapport au transport et les gens sont très retissant à voyager. Par ce que pour lui ce n’est pas grave il préfère aller voir le guérisseur traditionnel et c’est quand c’est mauvais d’abord ils viennent » (MCD, DS Adré). « Il y a certains patients qui abandonnent le traitement par ce qu’ils font des longues distances pour venir et quand ils prennent 2 fois ils pensent que la personne est déjà sauvée et ils ne reviennent plus » (RCS, DS Bénoye). « Bien sûr, je peux parler de ma zone, il y a des villages éloignés, il y a aussi des zones qui sont enclavées par des oasis surtout pendant la période de saison pluvieuse, y a presque une dizaine de villages qui sont totalement enclavés les gens ne pouvaient pas vraiment vite venir au centre de santé. Non seulement pour le cas de rage mais pour d’autres cas maladies, ils n’arrivent pas à traverser les oasis pour arriver. D’autres qui sont un peu loin sont presque à 30 quelques km, mais aussi le moyen de déplacement pose problème,» (RCS, DS Abéché).
Le coût élevé du vaccin n’est pas à la portée des populations pauvre
Parmi les éléments considérés comme les principaux obstacles à cette lutte figurent le prix du vaccin antirabique, les populations tout comme les prestataires sont unanimes, le vaccin antirabique coûte énormément cher. Le prix du vaccin estimé par les répondants était de 12000 FCFA la dose et le coût du traitement est estimé à 50000FCFA. Ce montant n’est pas à la portée des ménages des populations pauvres du pays, dans une étude réalisée au Tchad, le coût du traitement anti rabique était de 47 667 FCFA [8]. En clair le coût du vaccin anti rabique est l’un des facteurs entravant l’accès des populations aux soins anti rabique. Ce point est notamment relayé lors des discussions de groupe par les prestataires, ils estimaient que si rien n’ai fait en ce qui concerne le coût du vaccin les populations continueront par mourir. La problématique du coût reste fortement liée celle de la pauvreté, alors que celle-ci apparait comme une contrainte essentielle pour prévenir le risque de la rage chez les personnes mordues.
L’insuffisance de l’offre pour la prise en charge des cas de morsures
Au Tchad, la rage faisait partie des maladies réputées légalement contagieuse et soumise à déclaration obligatoire sur l’ensemble du territoire de la République au terme d’une loi n° 09/PR du 19/05/2004. Depuis cette loi, de l’avis des prestataires il n’y a rien sur la rage au Tchad : il n’y a pas un programme de santé au Tchad sur la rage et la rage n’est pas inscrite en tant que maladie sous surveillance dans le rapport mensuel d’activité. Les professionnels de santé humaine estiment que l’origine de la maladie est de l’animal et qu’il revient aux vétérinaires de contrôler cette pathologie. Dans les centres de santé et les postes vétérinaires, l’offre de services de prise en charge rabique reste très insuffisante et la question qui se pose est de savoir quels sont les facteurs qui expliquent cette insuffisance de l’offre. Les responsables des services de santé expliquent qu’il y a quelques années les vaccins anti rabique faisaient partie de la liste des médicaments gratuits que le ministère de la santé met à la disposition des services des santé pour de personnes mordues, mais depuis plus de trois ans, cette gratuité est suspendue. Notre étude ne dispose pas des données pour expliquer les raisons de cette suspension. Cependant les déterminants recherchés sur le mécanisme d’accès aux soins face aux risques de la rage établissent un constat, que l’offre de prise en charge est très insuffisante ce qui justifie de toute évidence les réponses inappropriées apportées à la demande du traitement rabique. Les résultats des données qualitatives mettent en évidence plusieurs facteurs qui entravent le fonctionnement des services de santé humaine et vétérinaires et qui réduisent la qualité des services. Les responsables des services vétérinaires, eux le déplorent, il s’agit de l’insuffisance des ressources humaines qualifiées dans les structures vétérinaires. Dans les structures de santé humaine, la faible capacité des services de santé humaine à offre des soins vient du fait d’un manque de connaissance adéquat sur la prise charge à la prophylaxie post-morsure [27]. Autrement dit, le plus grand risque qui pourrait entraver la demande des soins rabiques serait l’incapacité des prestataires à offrir efficacement ces soins rabiques, le manque de connaissance à offrir les soins rabiques est également évoqué en Asie [42,43]. Or dans certains centres de santé la capacité technique à offrir un service adéquat dépend de la présence d’un seul infirmer chef de poste [10]. Certains agents vétérinaires rechignent à s’occupent des chiens, sous prétexte que l’activité n’est pas lucrative. Ils préfèrent s’occuper des bœufs et autres animaux qui rapportent que de s’occuper du chien. Sur ce point les services vétérinaires sont décriés par les propriétaires de chiens par ce qu’ils ne faisaient rien dans le sens de la protection ou du contrôle de la rage. De même dans le cadre de la surveillance au secteur d’élevage la rage n’est pas inscrite sur les listes des maladies à surveiller, elle serait simplement négligée par les agents vétérinaires les raisons invoquées c’est encore l’économie. Les infrastructures sont en nombres insuffisants, à l’échelle des régions le ratio est de 4 centres de santé pour un poste vétérinaire. L’absence d’une couverture suffisante des services vétérinaires limite les performances de ce secteur. La solution à envisager serait le renforcement des compétences du personnel et d’amélioration des défaillances en équipement, mais ces actions doivent être accompagner des mesures visant à inciter le personnel à rendre effective le contrôle de la rage.
CONCLUSION
Les populations tchadiennes en général et plus spécifiquement celles des régions étudiées sont confrontées à des défis socioculturels et organisationnels qui freinent l’accès à l’utilisation de soins de santé en générale et particulièrement les soins anti rabique. L’identification de ces déterminants est une donnée essentielle dans la stratégie de lutte contre la rage. Un programme d’information et de communication pourrait améliorer la connaissance à la prévention de la maladie et le recours aux traitements médicaux. Puisque les résultats de l’étude montrent une importante proportion de population rurale moins informée sur les méthodes de prévention de la maladie alors qu’elle la plus exposées aux risques. L’étude présente aussi des nombreuses lacunes chez les prestataires d’abord en termes de connaissance de la rage et aussi dans les méthodes de traitements, ces insuffisances devraient être intégrées à un programme de formation pour des interventions futures. Une bonne collaboration dans une intervention de lutte contre la rage serait un atout. Cependant le système de santé humaine comme animale au Tchad est géré en grande partie par le gouvernement et ses partenaires, l’approche One Health ne peut fonctionner efficacement que la facilitation d’une organisation nationale.
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Table des matières
INTRODUCTION
I. DÉFINITION DES CONCEPTS :
II. CONTEXTE ET JUSTIFICATION DE L’ETUDE
III. OBJECTIFS
IV. CADRE D’ETUDE
V. MÉTHODOLOGIE
VI. RÉSULTATS DE L’ÉTUDE
VII. LIMITE DE L’ETUDE
VIII. DISCUSSION
IX. RECOMMANDATIONS
CONCLUSION
REFERENCES
ANNEXES
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