Problèmes de santé et de mortalité infantile (5)
Au cœur des taudis qui prolifèrent et des villages enclavés où les programmes de soins de santé primaires restent un vœu pieux, il faut s’attendre à une mortalité infantile plus élevée dans la mesure où, en dépit des programmes de vaccination, l’avenir de l’enfant africain est mis en cause par les politiques qui obligent l’Etat à élever le coût de l’alimentation et à réduire ou à supprimer les services voués à l’entretien de la vie. Rappeler ces faits, c’est souligner l’apport des recherches qui mettent en évidence l’articulation des rapports entre la mortalité infantile et les inégalités sociales qui se développent au sein des déséquilibres des sociétés en mutation. En d’autres termes, au-delà des variations régionales, écologiques ou climatiques, les incidences des inégalités socio-économiques en matière de mortalité rappellent que les problèmes de population ne se posent pas exclusivement en termes de taux de natalité mais aussi en termes de santé et de mortalité infantile et d’éducation. Or, ce n’est que si l’on tente de résoudre ces problèmes, si l’on assure un certain nombre d’infrastructures que l’on peut demander aux gens d’avoir moins d’enfants.
Changement dans le développement (6)(7)
La question importante à la base de notre réflexion est celle du changement. Dans un sens, on pourrait s’interroger sur sa signification : que signifie le changement, d’où provient-il ? Comment peut-on l’anticiper, l’orienter, l’encourager ou l’éviter ? Quelle serait la science du changement ? Le développement est un changement qualitatif, un processus organique de transformation qualitative qui débouche sur l’émergence de plusieurs structures et formes organisationnelles. A titre d’exemple, on citerait l’émergence d’activités économiques modernes utilisant des techniques de pointe qui modifient les valeurs, les comportements sociaux tels que la taille de la famille, les comportements démographiques de fécondité, mortalité ou migrations, mais qui induisent également la substitution de nouvelles valeurs aux valeurs traditionnelles : une nouvelle culture se met à la place de l’ancienne. Le développement modèle également les échanges entre populations et entre régions. Loin de porter uniquement sur la variation du nombre de chaque type de population ou activités initialement présentes, le changement peut engendrer de nouvelles populations et activités, avec leurs propres comportements et valeurs et leurs influences caractéristiques sur le système qui leur a donné naissance. Une science du changement doit tenir compte de ces aspects. En outre, un système tel qu’une région géographique, une ville, une nation, un fleuve, une firme ou un secteur économique présente divers aspects : physiques, biologiques, psychologiques, économiques et socioculturels. Chacun de ces aspects influence et est influencé par les autres. Pour comprendre le changement, il faut considérer simultanément tous ces aspects et leurs interactions mutuelles.
Equilibre et changement (8)
La science classique caractérise des états d’équilibre. A titre d’exemple en économie, l’approche prédominante du développement économique est fondée sur la théorie néoclassique. La théorie de croissance économique, clé de voûte de la démarche, tire ses principales prémisses de la théorie de l’équilibre général. Elle détermine un comportement rationnel des agents économiques, une concurrence parfaite et une information complète sur les marchés. Les ménages établissent leurs plans en maximisant leurs fonctions d’utilité sous des contraintes budgétaires, les producteurs quant à eux maximisent le profit sous les contraintes technologiques. Il existe un système de prix tel que les décisions des agents soient mutuellement compatibles sur tous les marchés. Cet état caractérise un équilibre économique de concurrence parfaite. L’état d’équilibre n’est pas marqué par l’ordre des évènements, et l’évolution du système économique apporte un changement tel que toute particularité initiale s’estompe. Mais ceci est l’inverse de ce que l’on observe dans les systèmes vivants qui peuvent se complexifier, s’organiser et se développer. Le présent s’explique par le passé et le futur n’est qu’une projection du présent. En réalité, tout est changement. Les gens changent d’endroits, de goûts, d’idées, de revenus, de spécialisations, de besoins. Les villes grandissent et déclinent, et les terres sont cultivées, surexploitées, abandonnées, réutilisées. Les connaissances changent, les technologies progressent, les innovations apparaissent.
COMMENTAIRES
La planification familiale entre dans les activités prioritaires pour la santé de la mère et de l’enfant et fait ainsi partie des objectifs de développement pour le millénaire. L’enquête CAP (Connaissance, Attitude et Pratique) que nous avons menée dans le fokontany d’Ambolokandrina vise entre autres objectifs, d’identifier les principaux obstacles au programme de planification familiale.
1. Lieu de l’enquête : Le fokontany d’Ambolokandrina se trouve dans le deuxième arrondissement de la ville d’Antananarivo. Il compte 13.143 habitants avec 2.978 femmes en âge de procréer réparties au niveau de 10 quartiers. Le fokontany d’Ambolokandrina a la particularité d’être habité par beaucoup d’étudiants et de professeurs d’université parce qu’il se trouve à proximité de l’Université d’Antananarivo.
2. Méthodologie : Notre enquête a utilisé la méthode des quota pour déterminer la taille de l’échantillon et sa composition. Le questionnaire porte sur l’état civil de l’enquêtée sans le nom ni les prénoms, la connaissance, l’attitude et la pratique des méthodes contraceptives modernes. Il s’agit d’une enquête interview qui permet à la personne enquêtée d’écouter et de répondre, l’enquêteur notant au fur et à mesure les réponses données.
3. Résultats
3.1. Sujets de l’enquête : L’enquête porte sur 400 femmes en âge de procréer.
i) Tranche d’âge : Les femmes de l’enquête sont âgées de 15 à 45 ans ou plus. Dans 41% des cas, elles ont 25 à 34 ans et dans 34,5% des cas, elles ont 35 à 44 ans.
ii) La situation matrimoniale : Dans 67,5% des cas, les femmes de l’étude sont des femmes en union. Les célibataires représentent 21,5% des cas.
iii) Le nombre d’enfants et le niveau d’instruction : Dans 24% des cas, les femmes de l’enquête ont 4 enfants ou plus, mais pour le reste, elles ont :
– 3 enfants (20,7%)
– 2 enfants (19%)
– 1 enfant (17%)
– et pas d’enfants (19,3%)
Les femmes de l’enquête ont au moins le niveau secondaire dans 65,7% des cas. Il s’agit donc d’un fokontany où les femmes ont un haut niveau d’instruction dans la majorité des cas.
iv) Profession et domicile : Le niveau d’instruction explique la répartition des femmes de l’enquête selon la profession :
– celles qui travaillent dans le secteur public représentent 18,5% de l’ensemble ;
– celles qui travaillent dans le secteur privé représentent 26,2% ;
– le secteur informel ne comporte que 24,5% ;
– et dans 28,5% des cas, elles sont encore des étudiantes à l’université d’Antananarivo.
Le système de sondage utilisé a fixé 40 femmes par quartier avec au moins 10 étudiantes par quartier.
3.2. Connaissance : Selon les résultats de notre étude, 46,5% des femmes de l’enquête connaissent 2 méthodes contraceptives modernes et 15,8% connaissent 4 méthodes ou plus. Celles qui ne connaissent aucune méthode ne représentent que 1,5% de l’ensemble des femmes enquêtées.
La connaissance d’une méthode contraceptive moderne ou non, est légèrement plus élevée chez les femmes et les hommes en union selon les résultats de l’enquête nationale démographique et sanitaire de 2008. Cependant, chez les femmes, ce sont les femmes célibataires sexuellement actives qui ont déclaré le plus fréquemment connaître une méthode. C’est parmi les femmes et les hommes célibataires qui n’ont jamais eu de rapports sexuels que le niveau de connaissance d’une méthode est le plus faible (respectivement 74% et 68%) (23).
3.3. Attitude : D’après nos résultats, 33% des femmes de l’enquête ont déclaré vouloir en savoir plus sur les méthodes contraceptives modernes, tandis que 46,5% se disent assez favorables à leur utilisation. Les femmes défavorables à l’utilisation ne représentent que 11,5%. Ceci semble sous entendre que les femmes sont généralement plus favorable à l’utilisation des méthodes contraceptives modernes que les hommes.
3.4. Pratique : Nos résultats montrent que dans 26,5% des cas, les femmes de l’enquête sont des utilisatrices régulières des méthodes contraceptives modernes. Les méthodes utilisées sont les contraceptifs injectables dans 51% des cas. L’utilisation des préservatifs (condoms) reflète une participation directe des hommes (3%). Les motifs de non utilisation des méthodes contraceptives modernes sont d’après les réponses aux questionnaires :
• La peur causée par les rumeurs : En effet, souvent les rumeurs disent que les méthodes contraceptives modernes seraient les causes de maladies graves telles que les cancers du sein ou du col de l’utérus, qu’elles seraient également les causes des malformations congénitales. Ceci a été rapporté par 41,2% des non utilisatrices régulières.
• La peur des effets secondaires : Apparemment les effets secondaires des contraceptifs modernes semblent constituer un frein à leur utilisation. Une meilleure information pourrait lever ces obstacles, car dans la plupart des cas, il s’agit d’effets secondaires mineurs (nausées, céphalées…). En revanche, il peut s’agir d’effets secondaires graves comme par exemple, l’hypertension artérielle ou une métrorragie abondante (24). Des précautions et une prise en charge spécifique doivent s’imposer.
• La désapprobation ou même l’interdiction par le conjoint ou par un membre de : la famille Il s’agit ici d’un obstacle assez difficile à résoudre en l’absence d’une bonne information des acteurs.
• Problèmes d’accès aux produits ou d’ignorance : L’ignorance et les problèmes d’accès aux contraceptifs constituent encore des obstacles à la planification familiale pour 7,1% des femmes de l’enquête.
• Le besoin d’avoir des enfants : Il est logique que les personnes qui veulent avoir des enfants refusent d’utiliser les méthodes contraceptives modernes.
4. Autres méthodes : Les femmes de l’enquête pratiquent d’autres méthodes contraceptives dans 11% des cas. Il s’agit de l’allaitement maternel exclusif (54,5%), de l’abstinence (9,1%) ou de l’utilisation de la méthode d’Ogino (36,4%).
5. Sources d’information : Les femmes de l’enquête reçoivent des informations sur la planification familiale et les méthodes contraceptives du personnel de santé dans 58,5% des cas. Mais les informations peuvent également provenir des membres de la famille (9%), des amies (5,5%) ou des média (télévision, radio, journaux). D’après les enquêtes nationales démographiques et sanitaires de 2004 et 2008, chez les femmes, quelle que soit la catégorie, les méthodes contraceptives injectables sont les méthodes modernes les mieux connues. La pilule a également été fréquemment citée par les femmes, de même que le condom (24). Comme l’on pouvait s’y attendre, le niveau d’instruction a une influence importante sur le niveau de connaissance de la contraception ; ainsi, pratiquement toutes les femmes et tous les hommes ayant au moins un niveau secondaire ont cité une méthode moderne, contre 58% des femmes et 51% des hommes n’ayant jamais fréquenté l’école (24). Le niveau maximum d’utilisation se situe entre 25 à 34 ans pour toutes les femmes. Chez les femmes célibataires mais sexuellement actives, la prévalence la plus élevée se situe à la tranche d’âge 25 à 29 ans. En outre, quel que soit l’âge on note que les injectables sont la méthode contraceptive la plus utilisée par les femmes en union (24).
CONCLUSION
Au terme de notre étude sur la planification familiale à Ambolokandrina, par le biais d’une enquête CAP (Connaissance, Attitude et Pratique), les informations obtenues pourraient améliorer les données disponibles sur le niveau de couverture contraceptive et l’utilisation des méthodes contraceptives modernes. Sur un échantillon représentatif des femmes en âge de procréer du fokontany constitué de 400 femmes, les caractéristiques des sujets de l’échantillon montrent un profil ressemblant de la population qui se compose d’étudiants à l’université, des cultivateurs, des employés des secteurs public, privé et informel. Le taux de couverture contraceptive atteint 26,5% et la méthode préférée des utilisatrices est la méthode injectable. Les obstacles à l’utilisation sont essentiellement la peur des effets secondaires et des maladies graves telles que les cancers du sein et du col de l’utérus, la désapprobation du conjoint et/ou des membres de la famille, les problèmes d’accès au service. Afin d’améliorer la planification familiale à Ambolokandrina, nos suggestions portent d’abord sur le renforcement de l’information de la population par le biais des activités d’IEC en stratégie mobile au niveau des quartiers. Nos suggestions portent ensuite sur la mise en place de centres de planification familiale dans 2 quartiers qui sont AmbolokandrinaTanàna et Ankatso II CUR.
|
Table des matières
INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : GÉNÉRALITÉS SUR LA PLANIFICATION FAMILIALE
I. GENERALITES
1. Réalités africaines sur le contrôle de la fécondité
1.1. Problème de la femme sans maternité
1.2. Problèmes de santé et de mortalité infantile
2. La science du changement de comportement
2.1. Changement dans le développement
2.2. Equilibre et changement
2.3. Systèmes complexes
3. Les contraceptifs modernes
3.1. Méthodes contraceptives temporaires
3.2. Méthode contraceptive à long terme
3.3. Méthodes contraceptives permanentes
DEUXIEME PARTIE : METHODOLOGIE ET RESULTATS SUR L’ENQUÊTE
II. METHODOLOGIE
1. Cadre de l’étude
1.1. Lieu de l’étude
1.2. Démographie
2. Type de l’étude
3. Période de l’étude
4. Durée de l’étude
5. Population de l’étude
6. Echantillonnage et taille de l’échantillon
7. Recueil des données, saisie et traitement
8. Approche méthodologique
9. Limite de l’étude
10. Considérations éthiques
11. Paramètres de l’étude
III. RESULTATS
1. Caractéristiques des sujets de l’enquête
2. Connaissances
3. Attitudes
4. Pratiques
5. Sources d’information
TROISIEME PARTIE : COMMENTAIRES ET SUGGESTIONS
IV. COMMENTAIRES
1. Lieu de l’enquête
2. Méthodologie
3. Résultats
4. Autres méthodes
5. Sources d’information
V. SUGGESTIONS
1. Renforcement de l’information de la population
2. Mise en place de centres de planification familiale à Ambolokandrina
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE
ANNEXE
Télécharger le rapport complet