De nos jours, plusieurs systèmes mettent en jeu des énergies alternatives dont la finalité est de libérer peu à peu de la dépendance vis-à-vis de combustibles fossiles qui s’épuisent et vont devenir de plus en plus chers. Parmi ces systèmes, les piles à combustible sont les plus intéressants de par leurs rendements énergétiques élevés et leur capacité à utiliser des énergies dites « propres ».
Après la pile de Volta en 1800, où la production d’électricité s’appuie sur des réactions chimiques irréversibles qui consomment des réactifs présents, et la découverte de l’électrolyse de l’eau par William Nicholson et Anthony Carlisle la même année, la première pile à combustible qui génère de l’électricité à partir de gaz, a été conçue en 1839 par Sir William Robert Grove. Il faut néanmoins attendre la deuxième moitié du XXe siècle pour voir apparaître les premières utilisations de ces systèmes. En effet, lors de la préparation des premières missions spatiales habitées américaines, la recherche d’un approvisionnement électrique fiable et d’un rapport « masse / énergie » plus favorable a conduit Grubb et Niedrach à développer une pile d’une puissance de 1 kW à partir d’hydrogène et d’oxygène.
Principe de fonctionnement de la pile à combustible à oxyde solide à haute température
La pile à combustible à oxyde solide est un dispositif électrochimique fonctionnant à haute température (T > 600°C) permettant de convertir de façon directe et continue de l’énergie chimique en énergie électrique à travers la réaction entre un combustible (H2, CO, CH4) et un comburant (O2, air). À la cathode, l’oxygène est réduit en O2- par les électrons qui proviennent du circuit extérieur. Les ions oxyde formés migrent à travers l’électrolyte solide et se combinent à l’anode, où le combustible est oxydé pour former de la vapeur d’eau. Des électrons sont alors libérés vers le circuit électrique extérieur. Les SOFC ont la particularité d’avoir comme électrolyte des matériaux céramiques denses, d’où leur appellation de « piles tout solide ».
Les réactions électrochimiques de réduction et d’oxydation se produisent respectivement aux interfaces cathode/électrolyte et anode/électrolyte, essentiellement dans la couche dite « fonctionnelle » à une distance inférieure à 10-20 μm de la surface de l’électrolyte. Le reste de l’électrode sert essentiellement de structure collectrice de courant, suffisamment poreuse pour faciliter l’accès des gaz vers la couche fonctionnelle .
Les piles à combustible à oxyde solide offrent de nombreux avantages. Il est par exemple possible d’utiliser une large variété de géométries et d’architectures. Dans les configurations de cellules individuelles SOFC, la classification suivante est possible :
• les cellules autosupportées ;
• les cellules à support externe.
Dans le cas des cellules autosupportées, un composant particulier supporte la structure de la cellule : électrolyte support, ou anode support ou cathode support. Dans la deuxième catégorie, la cellule constituée d’une superposition de couches minces repose soit sur un substrat poreux soit sur des plaques d’interconnection. La tension délivrée par une cellule SOFC en circuit ouvert est dépendante de la température de fonctionnement, de la pression et du rapport des pressions partielles d’oxygène aux électrodes. La tension théorique d’une cellule, sous hydrogène et oxygène purs, est de l’ordre de 0,95 V à 900 °C et délivre 1 W.cm-2 de puissance. Pour ajuster la puissance délivrée requise, il est nécessaire de constituer un empilement de cellules élementaires (anode/électrolyte/cathode) reliées par des interconnecteurs formant ainsi un « stack » ou module.
Pour la géometrie du stack de SOFC, quatre modèles ont été développés :
• tubulaires (développé par le groupe Siemens Westinghouse) ;
• monolithique (développé par le groupe américain Honeywell) ;
• planaire (utilisé par exemple par l’entreprise Sulzer Hexis) ;
• cellule segmentée en serie (deux categories : « banded configuration » et « bell and spigot configuration ») .
Malgré les avantages mentionnés, des inconvénients freinent l’introduction massive des piles SOFC sur le marché de l’énergie comme la durée de vie limitée des matériaux pour un fonctionnement à haute température, des procédés de fabrication onéreux et l’absence d’un équilibre « coûts-performances » acceptable.
Chaque élement d’une cellule SOFC doit remplir un certain nombre de critères. De manière commune, les coefficients de dilatation thermique doivent être proches pour obtenir une bonne tenue mécanique des interfaces ainsi que pour éviter des fissures lors de cyclages thermiques. De même une bonne compatibilité chimique des matériaux à la température de fonctionnement est exigée afin qu’aucune réaction chimique ne se produise entre eux, évitant ainsi la formation de phases isolantes aux interfaces.
Les enjeux pour les SOFC
Le développement industriel des SOFC est freiné notamment par leur température de fonctionnement élevée (800 à 1 000 °C), ce qui nécessite des matériaux coûteux tels que les chromites de lanthane pour les interconnecteurs, et dont la durée de vie est restreinte à cause de contraintes thermiques et des problèmes de réactivité chimique provoquant leur vieillissement prématuré.
Les enjeux actuels pour les SOFC consistent à en limiter leur coût et à en augmenter leur durée de vie. Ceci passe par une diminution des températures de fonctionnement entre 600 et 750 °C. En effet, une température de fonctionnement plus faible permettrait d’intégrer des interconnecteurs autres que des chromites de lanthane moins onéreux. Ceci limiterait également la réactivité chimique, ainsi que les contraintes thermiques. Ces gammes de températures intermédiaires doivent aussi favoriser la conception d’un reformage direct en l’absence de catalyseurs coûteux à base de métaux nobles.
Différents axes sont étudiés afin d’améliorer les performances de la pile à combustible à des températures intermédiaires :
• l’élaboration d’un nouvel électrolyte composite intermédiaire entre les MCFC et les SOFC, meilleur conducteur ionique que YSZ. Ce composite est à base de carbonates fondus (MCFC) et d’oxydes solides (SOFC) ;
• la fabrication de couches minces à base de cérine sur l’électrode anodique via deux techniques, soit par dépôt par couches atomiques (Atomic Layer Deposition, ALD) de très haute qualité, soit par dépôt par voie chimique en phase vapeur (Chemical Bath Deposition, CBD), une technique peu onéreuse ;
• la fabrication de couches minces à base de cérine seule ou substituée sur l’électrolyte composite.
Eléments constitutifs
La cathode (électrode à comburant)
À la cathode a lieu la réaction de réduction de l’oxygène, impliquant les molécules d’oxygène gazeux, les électrons et les ions oxyde. Cette électrode doit posséder une porosité suffisante pour permettre le transport de l’oxygène gazeux vers les sites réactifs et doit être chimiquement compatible avec les autres composants de la pile. Il faut également que les interactions chimiques ou les inter-diffusions élémentaires entre la cathode et les composants adjacents soient limitées afin de minimiser l’apparition de phases secondaires non conductrices, des changements de coefficient de dilatation et l’introduction d’une conduction électronique dans l’électrolyte. La cathode doit aussi avoir une bonne stabilité chimique, morphologique et dimensionnelle dans l’environnement oxydant. Elle doit donc posséder une activité électrocatalytique élevée pour réduire l’oxygène et une conductivité électrique élevée (σ > 100 S.cm-1).
Typiquement, la cathode est composée d’oxydes mixtes. Les oxydes de structure pérovskite à base de LaMO3 (M = Co, Mn, Fe) présentent les meilleures caractéristiques. Mais afin d’améliorer leurs propriétés, un dopage est généralement effectué au strontium sur les sites du lanthane. Sa conductivité électronique est de l’ordre de 130 S.cm-1 à 1 000 °C10. L’abaissement de la température de fonctionnement augmente non seulement la résistance de l’électrolyte, mais aussi les surtensions aux électrodes, notamment au niveau de la cathode. L’utilisation d’un conducteur mixte ionique et électronique comme matériau cathodique réduit la surtension cathodique de réduction de l’oxygène .
Le matériau le plus utilisé et étudié dans la littérature est LSM (Lanthane StrontiumManganése) que l’on trouve sous la forme La1-xSrxMnO3, où x est généralement compris entre 0,2 et 0,4. Les performances de ces cathodes ont été augmentées grâce à l’amélioration de leur microstructure ainsi qu’en réalisant un mélange d’une certaine quantité de matériau d’électrolyte avec le matériau de la cathode afin de multiplier les zones de contact triple qui sont le siège des réactions.
Des matériaux à conductivité mixte comme La1-xSrxCoO3-δ ou La1-xSrxCo1-yFeyO3-δ ont été développés pour des applications à plus basse température. Enfin, les nickelates de formule générale Ln2MO4+δ présentent des performances électrochimiques vis-à-vis de la réduction de l’oxygène bien meilleures que celles des perovskites classiquement utilisées . Ces phases de type Ruddlesden-Popper cristallisent dans une structure plus complexe qui crée des canaux de conduction et une anistropie élevée de la conductivité ionique.
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Table des matières
Introduction énérale
Chapitre I : Enjeux des matériaux anodiques et leurs interactions dans les piles à combustible à oxyde solide
I.1. Introduction
I.2. Principe de fonctionnement de la pile à combustible à oxyde solide à haute température
I.3. Eléments constitutifs
I.3.1. La cathode (électrode à comburant)
I.3.2. L’électrolyte
I.3.3. L’anode
I.4. Les couches minces aux interfaces életrolytes/électrodes
I.5. Orientations de la thèse
Références
Chapitre II : Comportement de couches minces à base de CeO2 sous atmosphère réductrice
II.1. Introduction
II. 2. Techniques de dépôts en couches minces
II.3. Caractérisations cristallographiques et microstructurales des films minces
II.3.1. Caractérisation de films par diffraction des rayons X
II.3.2. Caractérisation par microscopie électronique à balayage (MEB) et spectrométrie en énergie dispersive (EDS)
II.4. Fabrication de couches minces à base de cérine par CBD (ou electroless deposition)
II.4.1. Principe
II.4.2. Synthèse d’oxydes par CBD/ED
II.4.3. Montage expérimental utilisé
II.4.4. Synthèse du dépôt d’oxyde de cérium
II.4.5. Dépôt d’oxyde de gadolinium
II.4.6. Dépôt de cérine dopée au gadolinium, GDC
II.4.7. Dépôt de cérine dopée à l’yttrium, YDC
II.5. Fabrication de couches minces à base de cérine par ALD
II.5.1. Principe de fonctionnement
II.5.2. Synthèse d’oxydes par ALD
II.5.3. Synthèse de dépôt de la cérine pure et substituée à l’yttrium
II.5.4. Caractérisations physicochimiques des films
II.6. Caractérisations électriques de couches minces sous atmosphère réductrice
II.7. Conclusion
Références
Chapitre III : De nouveaux électrolytes : les composites carbonates/oxyde
III.1. Introduction
III.1.1. Intérêt des électrolytes à base de composites oxyde/sels fondus
III.1.2. Historique et État de l’art des composites
III.1.3. Travaux antérieurs dans le laboratoire d’accueil
III.2. Choix du mélange de carbonates fondus
III.3. Objectifs de l’étude
III.4.- Synthèse et caractérisation physico-chimique
III.4.1. Procédure de synthèse du composite GDC-carbonates
III.4.2. Élaboration des pastilles
III.4.3. Caractérisation microstructurale du composite GDC-carbonate (Li/K) par Microscopie Electronique de Balayage (MEB)
III.5. Caractérisations électriques sous atmosphères réductrices
III.5.1. Conditions expérimentales
III.5.2. Rôle de la température
III.5.3. Rôle de la teneur en H2
III.5.4. Influence des cycles thermiques
III.6. Composite LiK-A sous air
III.6.1. Procédures expérimentales
III.6.2. Résultats
III.7. Conclusion
Références
Chapitre IV : Apport de couches minces à base de cérine associées aux électrolytes composites oxyde/carbonates
IV.1. Introduction
IV.2. Contribution des couches interfaciales aux composites
IV.3. Élaboration des échantillons
IV.3.1. Synthèse du composite GDC-carbonates
IV.3.2. Élaboration de couches minces sur le composite GDC-(Li/K) carbonates par ALD
IV.4. Caractérisations structurales et microstructurales
IV.5. Caractérisations électrochimiques sous atmosphère anodique par spectroscopie d’impédance
IV.6. Conclusion
Références
Conclusion générale
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