Les alliages d’aluminium dans l’industrie automobile
Les propriétés requises L’application des alliages d’aluminium de coulée dans les moteurs automobiles pose un certain nombre de défis principalement pour les moteurs diesels.
-Bonne conductivité thermique et de bonnes propriétés mécaniques à haute température : Les moteurs automobiles modernes subissent des températures jusqu’à 150 ˚C dans l’arbre à came et plus de 200˚C dans les régions proches des cylindres où la température des gaz de combustion peut atteindre 400˚C. La grande conductivité thermique de l’aluminium assure une bonne dissipation thermique.
-Bonne dureté : En effet, lors du fonctionnement du moteur, plusieurs pièces peuvent venir en contact les unes avec les autres. On peut par exemple citer le cas des soupapes qui sollicitent le pontet de la culasse en fretting fatigue. Une bonne dureté peut contribuer à retarder considérablement l’apparition de défauts de surface.
-Bonne résistance à la fatigue : Pendant le fonctionnement, le bloc moteur est soumis à des contraintes de traction compression cycliques, des gradients de températures très élevées (<0˚(hiver au repos ) >150˚C (en fonctionnement). Le plus important critère pour le choix du matériau fonctionnant à haute température est donc la résistance à la fatigue thermique.
-Critères de sélection d’un alliage : Choisir un alliage demande la prise en compte de plusieurs critères. Les aluminiums de fonderie utilisés pour la production de pièces coulées complexes pour les moteurs doivent être à la fois très peu chers, très facilement coulables et usinables et, avoir une bonne résistance mécanique à haute température.
-Résistance mécanique : Les alliages à plus haute limite d’élasticité seraient naturellement l’option à préconiser quoiqu’ils aient des points faibles comme le prix , la coulabilité et une faible résistance à la fatigue.
-Prix : Pour des questions économiques et techniques, on utilise beaucoup des alliages d’aluminium de seconde fusion ou recyclés (AlSi8Cu3,AlSi6Cu4).
-Coulabilité : En général on augmente les propriétés de coulabilité d’un alliage en augmentant le taux de silicium. En outre l’addition de cuivre dont on a besoin pour augmenter les propriétés mécaniques à haute température a un effet négatif sur le remplissage des moules. Les alliages avec une certaine teneur en fer et manganèse sont nécessaires pour éviter le collage de la pièce avec le moule. Mais l’ajout de fer diminue la durée de vie en fatigue de l’alliage.
-D’autres critères de choix : Dans d’autres cas, d’autres caractéristiques peuvent être plus importantes que le prix et la coulabilté. Pour éviter l’utilisation de l’acier très lourd ou encore l’usinage des blocs de cylindre, certaines pièces de voitures de sport sont entièrement faites d’alliages d’aluminium hypereutectiques (AlSi17Cu4) qui donnent directement de très bonnes propriétés de surface.
Le Cuivre et le Nickel pour les alliages à haute limite d’élasticité
Le Cuivre à lui seul a le plus grand impact sur les propriétés mécaniques des alliages d’aluminium, notamment en augmentant considérablement la limite d’élasticité et la contrainte à la rupture. Les alliages d’aluminium contenant du cuivre gardent de très bonnes propriétés mécaniques (grande limite d’élasticité) même à haute température. Par ailleurs, il a été remarqué que l’ajout de cuivre augmente la dureté de la matrice d’aluminium rendant ainsi la possibilité d’usiner des pièces très complexes avec de petites épaisseurs. Le nickel apporte aussi tous les avantages cités précédemment pour le cuivre, mais ses effets sur la limite d’élasticité restent moins importants comparés au cuivre. Le nickel se combine assez facilement aux autres éléments, notamment au cuivre pour former de nouveaux types d’intermétalliques. Le cuivre et le nickel sont d’ailleurs deux éléments qui se retrouvent systématiquement dans les alliages d’aluminium pour les têtes de piston (AlSi10Cu5Ni2 [48]).
Le traitement thermique de vieillissement artificiel ou revenu
Beaucoup de recherches ont été menées pour comprendre les effets du revenu [2, 98, 129] sur les propriétés mécaniques des alliages de coulée notamment l’influence sur la contrainte limite à rupture et la propagation de fissures [24]. Le revenu est reconnu comme étant le moyen le plus important pour le durcissement des alliages d’aluminium, qui implique l’augmentation des propriétés mécaniques de l’alliage par des précipités susceptibles d’être cisaillés par les dislocations. En contrôlant le temps et la température de revenu, des propriétés mécaniques variés peuvent être obtenues ; la limite d’élasticité peut être augmentée ; les contraintes résiduelles dues à la solidification peuvent être réduites voire annihilées, la microstructure de l’alliage peut être stabilisée. En effet, le traitement thermique de vieillissement artificiel consiste à accélérer la précipitation dans la matrice d’aluminium (voir figure I.6). Dans un matériau métallique, tout ce qui s’oppose au déplacement des dislocations entraîne un durcissement, c’est-à-dire une augmentation de la limite d’écoulement plastique et de la dureté. Ces obstacles sont, pour la plus grande partie, des précipités dans les alliages à durcissement structural. Il est indiqué de faire le vieillissement sous l’écart de miscibilité métatstable appelé la zone de Guiner-Preston (GP) [8].
Traitement thermique de mise en solution ou sphéroidisation
La mise en solution a trois rôles principaux :
– L’homogénéisation de la microstructure de coulée.
– Dissolution de certaines phases (généralement au cuivre).
– Changement de la morphologie des particules de silicium.
En effet, lors de la solidification dendritique des alliages de coulée, la ségrégation non homogène des éléments de secondes phases (intermétalliques, silicium …) peut avoir un effet négatif sur l’élongation à rupture du matériau. Une mise en solution à une température légèrement en dessous de la température de l’eutectique (490-540˚C) sert à redistribuer les particules. Dans les alliages de coulée avec une forte teneur en silicium, la mise en solution sert principalement à changer la morphologie des particules de silicium. Les particules de silicium initialement allongées et plates évoluent vers une structure globulaire et ronde (voir figure I.7). Par ailleurs la mise en solution sert aussi à dissoudre certaines phases intermétalliques pour former des précipités. Cependant les éléments d’addition n’ont pas le même taux de solubilité dans l’aluminium. La solubilité du cuivre dans l’aluminium est seulement de 0.05 m% à température ambiante mais augmente considérablement à haute température [82, 108]. La solubilité maximale du silicium dans l’aluminium est de 1.6 m%, mais le silicium a très peu d’effet sur les propriétés de l’aluminium lorsqu’il est en solution solide[45]. La solubilité maximale du nickel et du fer est seulement de 0.04 m% [108] à la température de l’eutectique, c’est à dire entre 640˚C et 655˚C dans les alliages binaires respectifs. Ainsi les phases au cuivre telles que les Al2Cu et Al15Cu4Ni peuvent se dissoudre dans la matrice à très grande proportion tandis que les phases Al5FeSi et Al15Si2(FeMn)3 sont très peu affectées et restent quasi intactes.
Caractérisation en tomographie aux rayons X
Comme expliqué dans l’annexe 1, la tomographie aux rayons X permet la mesure d’absorption locale d’un matériau, ce qui permet de distinguer les différentes phases qui le composent. Cependant des difficultés peuvent survenir quand on veut faire des mesures sur un matériau dont les différentes phases ont des coefficients d’atténuation très proches. Dans notre cas, il s’agit du silicium et de l’aluminium. D’autres informations sont alors nécessaires. Il s’agit du contraste de phase qui peut être exploité en faisant varier la distance entre l’échantillon et le détecteur. Cette technique a été mise en place à l’ESRF sur la ligne ID19 par une équipe de chercheurs européens sous la direction de J. Baruchel. La caméra CCD utilisée a été réalisée spécialement à l’ESRF et comprend 2048 rangées de 2048 détecteurs. Dans le dispositif expérimental que nous avons utilisé pour nos observations, le détecteur est situé entre 3 cm et 8 cm de l’échantillon. La résolution de la caméra, qui correspond à la taille de chaque élément sensible du détecteur qui la compose, est de 0,3µm (configuration haute résolution). 1500 projections sont acquises pour reconstruire le volume, soit un pas de rotation de 0.12° entre chaque radiographie pour couvrir un angle de 180°. La totalité de ces projections est aussi appelée scan. La durée d’exposition pour une projection, compte tenu de l’énergie choisie, est de 1 s, ce qui correspond à un temps d’acquisition d’un scan d’environ 45 minutes. La figure I.18 montre le résultat de la reconstruction d’une section circulaire de notre alliage. Nous pouvons clairement voir apparaître trois phases que constituent la matrice d’aluminium (gris), les intermétalliques (blanc) et le silicium (gris sombre). On peut noter l’effet du traitement thermique sur la morphologie des particules de silicium qui évoluent d’une structure plate et allongée vers une structure globulaire et plus épaisse.
Répartition volumique et numérique des particules intermétalliques
Les particules intermétalliques ont une forme 3D très complexe. Elles peuvent se présenter comme des branches interconnectées les unes aux autres traversant tout le volume que l’on observe. La figure II.15 représente l’histogramme de la répartition numérique et de la fraction numérique cumulée en fonction du volume des particules intermétalliques. On peut remarquer que les petites particules (dont le volume est inférieur à 1000 voxels) représentent près de 90 % du nombre total de particule . Par ailleurs la figure II.16 représente la distribution de la fraction volumique (volume de la particule rapporté au volume totale de particules) des particules intermétalliques en fonction de leur volume. L’ensemble des petites particules représente moins de 10 % du volume totale des particules. Une seule particule représente près de 70% du volume total des particules intermétalliques. Il s’agit de la particule la plus grande qui se ramifie dans tout le volume observé.
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Table des matières
Introduction générale
I MATÉRIAUX ET CONTEXTE INDUSTRIEL
1 Introduction
2 Les alliages d’aluminium dans l’industrie automobile
2.1 Les propriétés requises
3 Microstructure des alliages de coulée pour moteurs automobiles
3.1 Structure globale
3.2 Les éléments d’addition et les différentes phases durcissantes
3.3 Effet des traitements thermiques
3.4 Morphologie des particules de secondes phases
3.5 Mécanismes d’endommagement sous compression
4 Matériau de l’étude : l’alliage AlSi12Ni
4.1 Origine
4.2 Composition chimique et les différentes phases
4.3 Caractérisation microstructurale et mécanique
4.3.1 Caractérisation en tomographie aux rayons X
4.3.2 Segmentation des images et reconstruction de la microstructure
4.3.3 Propriétés élastiques des différentes phases
4.3.4 Comportement mécanique macroscopique du matériau
5 Résumé
II IDENTIFICATION DES MECANISMES D’ENDOMMAGEMENT ET DE RUPTURE
1 Introduction
2 Essai in situ au microscope électronique à balayage
2.1 Initiation de l’endommagement de surface
2.2 Propagation de fissure en surface
2.3 Résumé des mécanismes d’endommagement de surface
3 Essai in situ en tomographie aux rayons X à l’ESRF
3.1 Suivi de l’évolution de la microstructure pendant la traction
3.1.1 L’intercorrélation : notions de base et mise en œuvre
3.1.2 Recherche de ressemblance d’images dans les séquences temporelles : Application à un essai insitu
3.1.3 Identification d’un volume élémentaire représentatif (VER)
3.1.4 Répartition volumique et numérique des particules intermétalliques
3.2 Rupture des particules intermétalliques
3.2.1 Principe de la superposition des volumes homologues
3.2.2 Algorithme pour décrire la rupture des particules intermétalliques
3.2.3 Résultats
3.3 Mécanisme 3D de l’évolution de la porosité
3.3.1 Histoire de formation d’une cavité individuelle
3.3.2 Quantification de l’endommagement dans la région proche de l’entaille
3.3.3 Caracterisation morphologique 3D des cavités
3.3.4 Observation 3D de la formation d’une fissure
4 Conclusion
III MECANISMES DE DEFORMATION ET MODELISATION NUMERIQUE DE L’ENDOMMAGEMENT
1 Introduction
2 Mesure de champs 2D par corrélation d’images numériques
2.0.5 Instabilité d’imagerie au MEB
2.0.6 Formulation mathématique du problème de corrélation 2D
2.1 Champs de déplacements
2.1.1 Traitement d’images et incertitudes sur les champs de déplacements
2.1.2 Résultats
2.2 Calcul des champs de déformation
2.2.1 Méthodes
2.2.2 Analyses des champs de déformation
3 Mesures de champs 3D
3.1 Formulation mathématique du problème de corrélation 3D
3.1.1 Coefficient de corrélation
3.1.2 Procédure de minimisation et précision subvoxel
3.2 Champs de déplacement 3D
3.3 Calcul des déformations
4 Mesures de l’endommagement
4.1 Principe
4.2 Comparaison des mesures de l’endommagement 3D et 2D
5 Modélisation de l’endommagement
5.1 Introduction
5.2 Estimation de la triaxialité dans la région de l’entaille
5.3 Identification des paramètres du modèle GTN
5.4 Modèles pour décrire l’endommagement de matériaux ductiles à deux populations de cavités
6 Conclusion
IV CARACTERISATION ET MODELISTATION DE LA MICROSTRUCTURE
1 Introduction
2 Influence de la répartition spatiale des particules intermétalliques
2.1 Modélisation éléments finis à l’échelle de la microstructure
2.1.1 Méthodes de maillage
2.1.2 Maillages
2.1.3 Identification du comportement de la matrice
2.1.4 Analyses des champs locaux
2.1.5 Calcul des propriétés apparentes et effectives
2.2 VER et évolution de l’endommagement
2.2.1 Résultats de corrélation d’images
3 Morphologie et caractérisation spatiale de la microstructure
3.1 Endommagement ductile et répartition spatiale des inclusions
3.2 Squelettisation des particules intermétalliques
3.2.1 Paramètres microstructuraux obtenus à partir du squelette
3.3 Caractérisation topologique et spatiale des particules intermétalliques
3.3.1 La classification hiérarchique
3.3.2 Principes de l’algorithme classification
3.3.3 Quelques cas test
3.3.4 Principe de l’application aux particules intermétalliques
3.3.5 Mise en œuvre dans le cas d’une particule simple
3.3.6 Identification de paramètres microstructuraux
4 Génération de microstructures modèles
4.1 Paramètres retenus
4.2 Description de l’algotithme de génération de microstructures modèles
4.3 Validation du modèle morphologique
4.3.1 Effet de la variation d’épaisseur sur le comportement effectif
4.3.2 Comparaison du comportement mécanique de la particule modèle générée et particule réelle
5 Identification d’une loi de comportement pour les cellules
5.1 Stratégie de calcul
5.2 Identification des paramètres
6 Comparaison des mécanismes de déformation entre microstructure modèle et réelle
6.0.1 Maillage
6.0.2 Première comparaison entre microstructure modèle et réelle
7 Conclusion
Conclusion générale et perspectives
Références bibliographiques
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