ENCEPHALITE À ANTICORPS ANTI-RECEPTEURS N-METHYL-D-ASPARTATE (NMDA)

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Classification immunologique

Il existe une distinction entre deux groupes d’EL. Elle est importante car les éléments déclencheurs et les syndromes peuvent être similaires mais les mécanismes pathogènes et leurs résultats sont différents (16).
La classification, aujourd’hui communément employée, s’est ainsi établie à partir de la physiopathologie de la maladie (17)(18)(19)(20).
Ø Les EL liées à des AC dirigés contre un AG intracellulaire.
Elles sont associées aux mécanismes de médiation cellulaire T cytotoxiques avec des infiltrations des cellules au niveau cérébral entraînant une perte neuronale.
Les AG cibles sont similaires entre les neurones et les cellules cancéreuses. La découverte de l’AC est un marqueur fiable d’une étiologie paranéoplasique et donc de la présence d’un cancer associé.
Les AC sont dans le système nerveux central (SNC) mais ne sont pas directement pathogènes. Elles comprennent, entre autres :
-les AC anti Hu ; anti Ma2 (les plus fréquentes) ; AC anti CV2/CRMP5 dont les AG cibles sont des protéines nucléaires ou cytoplasmiques.
-les AC anti GAD65, anti amphiphysine dont les AG cibles sont des protéines synaptiques intracellulaires.
Leur réponse aux traitements d’immunothérapie est limitée.
Le traitement de choix consiste en l’ablation du cancer associé (pulmonaire, testiculaire et autres). Cependant dans 60% à 70% des cas d’EL paranéoplasiques, le désordre neurologique précède la détection de la tumeur.
Ø Les EL liées à des AC dirigées contre un AG de surface membranaire.
Elles sont le plus souvent d’origine idiopathique mais peuvent être également paranéoplasiques (thymome, tératome etc.).
Le rôle pathogène des AC est direct.
Les AC ciblent des protéines de surface cellulaires ou synaptiques dont le dysfonctionnement neuronal qui en résulte peut être réversible.
Elles comprennent :
-les AC anti-canaux potassiques voltage dépendants (anti-VGKC) qui réunissent les AC anti-LGI1 et les AC anti-Caspr2.
-les AC anti-récepteur de l’acide α-amino-3-hydroxy-5-méthyl-4-isoxazol-propionique (AMPAR), anti-récepteur de l’acide γ-amino-butyrique B (GABAbR), anti-récepteur de la glycine (GlyR), anti-récepteur métabotropique du glutamate (mGluR5).
-et les AC anti-récepteur N-méthyl-D-aspartate (NMDAR) qui seront spécifiquement détaillés dans cette thèse.
Ces encéphalites répondent mieux à l’immunothérapie. Cependant, si un cancer est associé, le traitement par ablation reste le traitement de choix.
Le pronostic fonctionnel est meilleur.

Pourquoi en parler ?

L’historique démontre qu’il s’agit d’un diagnostic récent.
La clinique des EL dysimmunitaires, paranéoplasiques ou idiopathiques, est hétérogène. Les patients présentent le plus communément mais de façon variable des troubles psychiatriques d’une part, et une épilepsie avec des troubles mnésiques antérogrades d’autre part (19). Ces symptômes apparaissent de façon aiguë ou subaiguë.
Il est observé un chevauchement important des symptômes entre les différentes formes d’EL auto-immunes, notamment au début de la maladie.
C’est la prédominance de certains symptômes au sein du tableau clinique, les données démographiques, ou encore les résultats des explorations complémentaires qui permettent d’orienter vers une étiologie plus précise (21).
Certaines EL peuvent débuter sur un mode psychiatrique mais l’apparition ultérieure de crises d’épilepsie permet d’évoquer rapidement le diagnostic.
Toutefois, l’encéphalite anti-NMDAR est l’étiologie qui se manifeste avec une prédominance des symptômes psychiatriques. Des présentations psychiatriques isolées sont plus rares mais existent (22)(23)(24).
Des affections psychiatriques sont donc des diagnostics fréquemment évoqués et ce d’autant que la normalité des explorations de première intention peut ne pas orienter vers une pathologie organique.
Dans la plupart des cas d’encéphalite anti-NMDAR, les patients sont d’abord vus par des psychiatres, souvent dans l’hypothèse d’une psychose induite par la prise de toxiques (25).
Des hospitalisations initiales en service de psychiatrie ne sont pas rares (26) comme présentées dans la partie cas clinique ci-après.
Un traitement précoce et adapté est un facteur de bon pronostic dans la maladie, cependant une hospitalisation initiale en service de psychiatrie peut être un facteur de retard au diagnostic.
Il semble qu’établir le diagnostic d’encéphalite anti-NMDAR soit un défi et que les enjeux thérapeutiques sont divers. Des patients atteints de ce trouble peuvent être rencontrés en pratique courante ce qui indique qu’une sensibilisation est nécessaire.
Les différentes formes d’EL ont ainsi été résumées en première partie de ce propos afin de permettre d’effectuer une démarche diagnostique pour les praticiens concernés. Nous verrons ensuite, dans la partie cas clinique, que le psychiatre peut être sollicité dans la prise en charge des EL.
La seconde partie de cette thèse consiste en l’analyse de la littérature entre 2007 et 2018 de l’encéphalite anti-NMDAR.
La synthèse des données recueillies a pour principal objectif d’apporter des précisions sur les données épidémiologiques, le terrain, les données cliniques et paracliniques pour les psychiatres amenés à prendre en charge ces patients. Deux cas cliniques de patients atteints d’encéphalite anti-NMDAR seront développés afin de mettre en évidence les implications de cette étiologie dans notre pratique courante.

Données épidémiologiques

L’évaluation de la fréquence des encéphalites dysimmunitaires est encore difficile à ce jour. Les premiers résultats d’études épidémiologiques concernant les causes d’encéphalite en population générale suggéraient que les encéphalites anti-NMDAR représenteraient 4% de l’ensemble des encéphalites.
Elles seraient la 2ème cause la plus fréquente d’encéphalite auto-immune après l’encéphalomyélite démyélinisante aiguë ; et la 5ème cause après Herpès Simplex Virus (HSV), Varicelle Zona Virus, Mycobacterium Tuberculosis et l’encéphalomyélite démyélinisante aiguë (32).
Les données concernant les encéphalites auto-immunes ont récemment été élargies puisqu’il a été découvert que certains patients peuvent développer des syndromes qui se chevauchent. En effet, des AC anti-NMDAR peuvent coexister chez des sujets atteints d’encéphalite infectieuse à HSV-1. Dans certains cas, des AC se sont développés dans les semaines suivant une encéphalite herpétique par un phénomène auto-immunitaire para-infectieux (21)(33).
L’encéphalite anti-NMDAR semble donc relativement fréquente, en particulier par rapport à des troubles auto-immuns ou paranéoplasiques similaires (18). Une étude rétrospective de patients âgés de 18 à 35 ans, admis en unité de soins intensifs pour encéphalite d’étiologie inconnue, a d’ailleurs démontré que 1 % d’entre eux présentaient des AC anti-NMDAR (34).
Chez les jeunes patients, l’incidence de la maladie dépasserait actuellement celle de l’encéphalite à étiologie virale (35).
Dans la littérature, il est largement retrouvé que l’encéphalite anti-NMDAR est celle qui cause le plus couramment des symptômes psychiques.

Physiopathologie

Les NMDAR sont des récepteurs ionotropes du glutamate. Ils sont impliqués dans la transmission synaptique et la plasticité neuronale (36).
Ce sont des hétéromères associant deux sous-unités NR1 qui lient la glycine, et deux sous-unités NR2 qui lient le glutamate. Ils nécessitent, pour être activés, une liaison simultanée du glutamate et de la glycine en combinaison avec une dépolarisation membranaire (37)(38).
Le glutamate est le principal neurotransmetteur excitateur du SNC et joue plusieurs rôles importants au niveau cérébral (transmission et modification synaptique, germination dendritique, contrôle de l’expression des gènes). Son action est contrebalancée par les effets inhibiteurs du GABA dont il est d’ailleurs le précurseur principal.
Cependant, des taux de concentrations synaptiques de glutamate supérieurs à ceux nécessaires au fonctionnement normal des neurones entraînent des modifications du système de régulation et un dysfonctionnement cellulaire. Un signal de mort cellulaire, par un processus d’excitotoxicité, peut alors être responsable de dommages cérébraux (39)(40).
Il existe huit variantes de la sous unité NR1 et quatre formes différentes de NR2 (A, B, C, D) se combinant pour former des sous types de NMDAR. En fonction des combinaisons obtenues, les propriétés pharmacologiques et la localisation au niveau cérébral varient (37).
L’expression de NR1 et de NR2A est ubiquitaire au niveau cérébral. La sous-unité NR2B est majoritairement présente dans la partie antérieure du lobe frontal et les hippocampes, et NR2C au niveau du cervelet.
La localisation du sous-type de NMDAR au niveau de la cellule se modifie également en fonction du stade de développement. A l’âge adulte, les hétéromères NR1/NR2B sont les récepteurs extra-synaptiques majoritairement retrouvés dans les neurones hippocampiques, alors que les hétéromères NR1/NR2A/NR2B sont les principaux récepteurs synaptiques de l’hippocampe et du lobe frontal (38).
Les premières études in vitro montraient, qu’au cours de la maladie, les AC anti-NMDAR se liaient à des hétéromères fonctionnels NR1/NR2B ou NR1/NR2A (29). Cependant, la perturbation des récepteurs contenant la sous unité NR2B, exprimés dans le cerveau antérieur et l’hippocampe, ne permettait pas d’expliquer l’ensemble des déficits présentés par les patients.
La poursuite des recherches a secondairement révélé que la maladie était associée à des AC dirigés spécifiquement contre la sous-unité NR1 du NMDAR, plus largement exprimée au niveau cérébral (41)(42).
Au niveau synaptique, lorsque les AC anti-NMDAR se lient sur les épitopes de surface, ils induisent l’internalisation rapide des NMDAR provoquant ainsi une diminution sélective de la densité superficielle de NMDAR et de sa localisation synaptique.
Il en résulte une diminution spécifique des courants synaptiques médiés par NMDAR sans toutefois modifier les courants glutamate-dépendants des récepteurs AMPA. Il existe alors un déséquilibre NMDA/AMPA au niveau post synaptique (42)(43).
La fixation de l’AC sur le NMDAR entraine un blocage post synaptique de la synapse glutamatergique, mais également au niveau des interneurones inhibiteurs gabaergiques. La dysfonction des interneurones gabaergiques entraîne alors la désinhibition des neurones glutamatergiques. (43). L’état d’hyperglutamatergie subséquent peut expliquer l’apparition de la symptomatologie psychotique, de la catatonie, du mutisme et des mouvements anormaux stéréotypés.
D’autre part, la plasticité synaptique est à la base des mécanismes de mémoire, d’apprentissage et de la cognition. La perte de la fonction synaptique médiée par le NMDAR explique donc les déficits d’apprentissage, de mémoire et les troubles cognitifs observés chez les patients atteints.
Les signes de dysautonomie observés au cours de la maladie pourraient s’expliquer par la présence des NMDAR sur les voies dopaminergiques, noradrénergiques et cholinergiques.
Pour finir, l’hypoventilation centrale semble liée à la présence des NMDAR dans les centres respiratoires pontiques (31).
Le phénomène d’internalisation dépend du titre d’AC du patient et les effets sont donc réversibles si le titre d’AC est réduit (31). Cependant l’excitotoxicité causée par des niveaux élevés de glutamate peut expliquer l’irréversibilité des symptômes chez certains des patients (43).

Spécificités du tableau pédiatrique

Les symptômes psychiatriques sont donc fréquents chez l’adulte cependant la présentation dans la population pédiatrique est différente. En effet, chez l’enfant, le premier symptôme à reconnaître est souvent neurologique.
Les symptômes sont le plus généralement des convulsions, des mouvements anormaux ou la réduction de la production verbale.
Au niveau psychiatrique, plutôt qu’une symptomatologie psychotique franche, les symptômes les plus fréquemment retrouvés sont l’irritabilité, les troubles du comportement avec crise de colère, les troubles du sommeil (insomnie), l’hyperactivité et l’hypersexualité (49).
La présentation des symptômes varie donc entre les enfants et les adultes : les symptômes sont plus souvent neurologiques chez l’enfant et plus souvent psychiatriques chez l’adulte.
Cette distinction explique probablement pourquoi le délai entre l’apparition des symptômes et le début du traitement est plus court chez les enfants que chez les adultes.
Les symptômes évoluent vers un trouble similaire dans la plupart des cas (44). Les déficits de mémoire et l’hypoventilation centrale sont cependant moins fréquents chez les enfants (44).
Les signes évocateurs d’une encéphalite anti-NMDAR chez l’enfant sont donc la fréquence élevée de troubles psychiatriques et la présence de mouvements anormaux.

Explorations complémentaires

Ø Le bilan biologique :
Les bilans biologiques de première intention, y compris le bilan inflammatoire, sont le plus souvent normaux.
L’évaluation du complément sérique peut révéler une élévation de certains marqueurs du complément (C3, C4, CH50) (50) mais il s’agit d’examens biologiques spécifiques, rarement effectués en première intention.
Ø La Tomodensitométrie cérébrale (TDMc) :
Elle est le plus souvent normale.
Ø L’IRM cérébrale (IRMc) :
Elle est anormale dans 33% des cas. Lorsque des anomalies sont retrouvées il s’agit de signes discrets et aspécifiques (44).
Les anomalies fréquemment retrouvées sont une hyperintensité T2/FLAIR du lobe temporal médian, de la substance blanche sous-corticale du lobe frontal et de la région périventriculaire. Une amélioration du contraste leptoméningé et cortical peut également être observée (51).
Ø L’électroencéphalogramme (EEG) :
Il est presque toujours anormal (90%) cependant un EEG normal n’exclut pas le diagnostic (44)(52).
Dans 92% des cas il est retrouvé une activité ralentie, diffuse et désorganisée.
Le ralentissement de l’électrogénèse est cependant un phénomène aspécifique fréquemment retrouvé dans les encéphalites et les encéphalopathies de diverses étiologies.
Il a été décrit une exception chez les patients atteints d’encéphalite anti-NMDAR avec la mise en évidence d’une anomalie appelée « extreme deltra brush » (EDB) (53).
L’EDB a été décrite pour la première fois en 2012 par Schmitt et al. lors d’une étude regroupant 23 patients. Cette anomalie observée chez 30% des sujets, a été caractérisée comme une activité delta rythmique 1-3 Hertz (Hz) avec une superposition de salves rythmiques 20-30 Hz de fréquence bêta « chevauchant » sur chaque onde delta.
L’EDB ne semble pas être attribuable à l’activité bêta induite par un traitement par benzodiazépines (BZD) et n’a pas été modifiée par l’administration d’antiépileptiques non sédatifs dans les études (53).
La présence de cette anomalie est décrite comme associée à une affection plus prolongée.
S’il a été initialement suggéré que cette anomalie puisse être un marqueur électroencéphalographique de la maladie, ce phénomène n’a cependant été signalé que chez un nombre restreint de patients. Une récente publication a d’ailleurs mis en évidence que la prévalence cumulative des EDB est inférieure aux premiers résultats énoncés par Schmitt et al. En effet, l’analyse de 12 études effectuées sur ce sujet et réunissant 221 cas, a révélé la présence d’EDB chez 35 patients, soit un rapport nombre de patients ayant présenté EDB/Total cohorte de 16% (54).
Il est à noter que le résultat du premier enregistrement EEG a une valeur prédictive pour les résultats cliniques. Un rythme postérieur normal au premier enregistrement prédit un résultat clinique favorable, tandis qu’un EEG sévèrement anormal est associé à un résultat clinique plus médiocre (52).
Ø Le TEP-18FDG :
Il est décrit comme étant l’examen pouvant révéler des anomalies lorsque l’IRM ne le permet pas. Dans la phase aiguë, il existe un changement caractéristique du métabolisme cérébral du glucose. Il s’agit d’un gradient frontotemporal-occipital accru : hypermétabolisme fronto-temporel/hypométabolisme occipito-pariétal (51)(55).
Ø La Ponction lombaire (PL) avec l’analyse du Liquide-Céphalo-Rachidien (LCR) :
L’analyse est anormale chez 79% des patients (44). Les anomalies les plus fréquentes sont une hyperprotéinorachie avec glycorachie normale, une pléiocytose lymphocytaire, des bandes oligoclonales spécifiques (24).
Le diagnostic repose sur la mise en évidence des AC anti-NMDAR dans le LCR. La technique de recherche par immunohistochimie se fait en deux temps (41)(56).
La première étape est une analyse par immunofluorescence indirecte effectuée sur différents substrats tissulaires (tissus de l’hippocampe et du cervelet de rat). Cette analyse peut ainsi mettre en évidence des AC présents dans le LCR (ou le sérum) du patient qui se fixent alors sur les coupes de cerveau de rat.
La seconde analyse s’effectue sur des cellules mises en culture et surexprimant les gênes du NMDAR (cellules HEK293).
L’analyse tissulaire permet le repérage de plusieurs AC dont les AC anti-NMDAR. L’analyse sur les cellules permet la détection spécifique des AC anti-NMDAR.
Ces tests se font uniquement dans des laboratoires spécialisés et la plupart des institutions doivent donc procéder à un envoi des échantillons.
Si la positivité dans le LCR et le sérum est fréquente, le LCR peut s’avérer être le seul positif (24), notamment si le diagnostic est retardé (31).
Certaines publications rapportent que les AC peuvent être détectables dans le LCR trois jours après le début des céphalées prodromales (48).
Ø Recherche sérique des AC :
Les AC anti-NMDAR peuvent être retrouvés lors de recherches sériques. Cependant le taux de faux négatifs est de 14 % (16). En effet, produit intrathécalement, les AC sont présents à des niveaux plus élevés dans le LCR que dans le sérum.
Ø La biopsie cérébrale :
Elle ne constitue pas un outil permettant de diagnostiquer une encéphalite anti-NMDAR. Lorsqu’elles des biopsies ont été effectuées, les résultats étaient normaux ou non spécifiques. Les données des autopsies révèlent des résultats similaires (31).

Modalités de prise en charge

Du fait de sa présentation psychiatrique, les patients peuvent être pris en charge initialement par des services spécialisés (41).
Cependant il ne s’agit pas de la prise en charge adéquate et la mise en place précoce du traitement approprié est associée à des résultats plus favorables.
La prise en charge consiste tout d’abord à rechercher une tumeur sous-jacente, principalement un tératome ovarien ou une tumeur testiculaire des cellules germinales (31).
– Si la tumeur est présente, le traitement consiste en l’ablation de la tumeur et la mise en place d’une immunothérapie de première intention (stéroïdes, immunoglobuline (Ig) intraveineuse (IV), plasmaphérèse).
– En l’absence de tumeur, la prise en charge médicamenteuse reste identique.
L’échange de plasma (ou plasmaphérèse) est plus difficile à mettre en oeuvre chez les enfants, les patients non coopérants et en cas d’instabilité autonome. En pratique il semble que les stéroïdes et les Ig soient privilégiés en première intention.
En cas de réponse insuffisante dix jours après l’initiation du traitement médicamenteux, un traitement de deuxième intention doit être envisagé.
L’immunothérapie de deuxième intention comprend l’instauration d’un traitement par rituximab et/ou cyclophosphamide.
Chez l’adulte, l’utilisation du rituximab est majoritairement associée à la phase aigüe à la prise simultanée de cyclophosphamide. La prise en charge ultérieure consiste en un traitement de maintien par plusieurs cycles mensuels de cyclophosphamide.
Chez les enfants, il semble que les pédiatres privilégient la mise en place d’un seul médicament, majoritairement le rituximab (31).
Une analyse a démontré qu’environ la moitié des patients ne répondent pas aux traitements de première intention alors que les traitements de deuxième intention sont majoritairement efficaces (57).
Le traitement peut être interrompu lorsque les patients ont un rétablissement clinique important. L’amélioration clinique s’accompagne alors d’une diminution des concentrations des AC dans le LCR et dans le sérum.
Cependant des rechutes peuvent survenir chez 20 à 25 % des patients, souvent sans tératome associé. Ces rechutes discutent de la mise en place d’une immunosuppression continue pendant au moins un an après l’arrêt des immunothérapies initiales.
Chez certains patients, dont le diagnostic a été établi a posteriori, le trouble a pu être résolutif sans ablation de tumeur. Il a donc été interrogé de la nécessité absolue de l’ablation tumorale et du recours à l’immunothérapie pour traiter ce trouble. Cependant la durée des soins intensifs et du soutien ventilatoire était significativement moins longue chez les patients ayant bénéficiés de la résection tumorale et de l’immunothérapie (27).
La majorité des patients atteints d’encéphalites anti-NMDAR présentent des symptômes catatoniques (84%). Cependant la littérature concernant l’utilisation de la thérapie électroconvulsive (ECT) dans ce contexte est rare (58).
Il s’agit d’un traitement connu pour la prise en charge de la catatonie et certains rapports de cas décrivent une efficacité de l’ECT dans l’encéphalite anti-NMDAR (59).
Cependant l’interprétation de ces données est difficile notamment du fait d’un manque de connaissance de son mécanisme d’action.
Des études complémentaires devraient permettre d’établir la place de l’ECT dans la gestion de la maladie, lorsque la présentation de la maladie inclut un syndrome catatonique (58).

Evolution et Pronostic

La durée d’hospitalisation moyenne est de 2,5 mois (41).
Il est fréquemment décrit une amnésie totale et persistante de l’épisode (47).
Il est le plus souvent observé une régression des symptômes dans l’ordre inverse de leur apparition (réveil lent et progressif) (31). Cette caractéristique est compatible avec la perturbation des NMDAR ayant un rôle important dans les mécanismes de plasticité synaptique (cf. supra physiopathologie)(36).
Dans la majorité des cas, le retour à l’état basal nécessite plusieurs semaines. Des publications rapportent des cas de patients s’étant rétablis après plusieurs mois de coma (27).
La plupart des patients présentent des troubles cognitifs et comportementaux résiduels (déficits dans les fonctions exécutives, impulsivité, désinhibition comportementale, troubles du sommeil) qui s’amendent secondairement (41)(47). Les patients nécessitent alors des séjours plus longs en centre de réadaptation au décours de la prise en charge aigüe (60).
Dans 75% des cas, l’évolution reste favorable sans séquelles bien que le processus de rétablissement puisse être long (57). Les bons résultats cognitifs à long terme dépendent d’un traitement précoce et agressif (61).
On note une mortalité de 4% (31)(47) avec un délai médian de 3,5 mois. Les causes de décès retrouvées sont la septicémie, la détresse respiratoire aigüe, l’arrêt cardiaque, l’EME réfractaire. Le taux de rechute dans l’encéphalite anti-NMDAR est d’environ 20-25% (47), parfois en lien avec l’arrêt du traitement. Comparativement à l’épisode initial, la majorité des rechutes sont moins graves et plus souvent monosymptomatiques (44).
Chez certaines patientes, le diagnostic de tératome ne peut être effectué que plusieurs mois après l’apparition des premiers symptômes neurologiques.
Un suivi tumoral est donc indiqué en l’absence de découverte initiale d’un tératome, pendant au moins deux ans (31).

Cas Cliniques

Dans cette partie, trois cas cliniques issus de la pratique de la psychiatrie au sein d’une même ville seront développés.
Le cas n° 1, illustre la question du diagnostic de l‘EL en général et de l’apport du psychiatre dans le cadre d’une prise en charge pluridisciplinaire.
Les cas n° 2 et 3 concernent spécifiquement des patients atteints d’encéphalite anti-NMDAR ayant été pris en charge par des services de psychiatrie.
Ces trois cas seront ensuite discutés ci-après.

Cas clinique n°1

L’observation psychiatrique retranscrite ici est le compte rendu de l’évaluation initiale d’une patiente ayant été évalué par un service de psychiatrie de liaison.
L’avis concerne Mme X, âgée de 74 ans, hospitalisée en somatique pour une hyponatrémie symptomatique dans un contexte d’introduction récente d’un traitement antidépresseur. Demande d’évaluation clinique et thérapeutique.
Son principal antécédent somatique est une hypertension artérielle traitée par Périndopril (Inhibiteur de l’enzyme de conversion) et Indapamide (Sulfamide diurétique).
Au niveau des antécédents psychiatriques personnels, on retrouve:
– Un seul épisode dépressif majeur (EDM) il y a 15 ans dans un contexte de divorce ayant nécessité une hospitalisation en psychiatrie.
– L’absence de nouvelle décompensation thymique et l’absence de suivi et de traitement psychotrope depuis l’épisode index.
– L’absence de consommation de toxiques.
Il est à noter l’introduction, depuis 8 jours, de psychotropes par le médecin généraliste. Il s’agit de paroxétine 20 mg/ jour (inhibiteur de la recapture de la sérotonine ISRS) et d’alprazolam (BZD) 0,25 mg 1 comprimé au coucher.
Il n’y a pas d’antécédents psychiatriques familiaux par ailleurs.
Elle vit avec son conjoint, elle a 3 enfants. Elle est retraitée.
Anamnèse :
La patiente est adressée dans un service d’urgence la veille de l’évaluation psychiatrique pour la prise en charge d’un mutisme.
Le dossier clinique fait état d’une humeur dépressive avec idées noires évoluant depuis une semaine chez une patiente ayant un antécédent d’EDM. Il est décrit la remise en place de psychotropes par le médecin généraliste et une aggravation du tableau clinique depuis l’introduction du traitement antidépresseur.
Les constantes à l’entrée sont : Fréquence cardiaque (FC) 94, Tension artérielle (TA) 172/82, saturation en oxygène (SAO2) de 96%, température (T°) 37,1°C.
Lors de l’examen clinique aux urgences, la patiente est mutique rendant l’interrogatoire impossible. Elle est décrite comme opposante, refusant d’ouvrir les yeux et ayant des mouvements spontanés. L’examen somatique est retrouvé sans anomalies par ailleurs.
Les explorations effectuées en urgence sont un TDMc et un angioscanner des troncs supra-aortiques qui sont retrouvés sans anomalies.
Le bilan standard retrouve une natrémie corrigée à 126 avec une hypokaliémie à 3,35. Le bilan inflammatoire est sans anomalie.
Devant l’absence d’anomalie à l’imagerie, une orientation vers un service de psychiatrie est initialement décidée. La découverte de l’hyponatrémie oriente la prise en charge vers un service de somatique au préalable.
Reprise anamnestique lors de l’évaluation psychiatrique:
Depuis environ 15 jours, la patiente présente une asthénie, un ralentissement psychomoteur et une apathie. Le médecin traitant, au vue de son antécédent d’EDM, met en place un traitement par paroxétine et alprazolam (traitement prescrit lors de son épisode thymique index) 8 jours avant l’hospitalisation afin de prévenir une rechute thymique.
Le médecin traitant est contacté et décrit que le tableau clinique était prédominé par un ralentissement psychomoteur et une asthénie sans franche tristesse morale au moment de l’introduction.
L’entourage rapporte une dégradation rapide de son état clinique après l’introduction des traitements. Ils décrivent une majoration du ralentissement et de l’asthénie et l’apparition de mouvements inhabituels de l’hémicorps droit. La famille décrit un tableau clinique fluctuant les jours précédents l’hospitalisation.
La veille, le mari appelle les pompiers car la patiente ne parvenait pas à répondre aux ordres simples. L’époux informe l’absence de velléité suicidaire et l’absence d’idées noires les jours précédents l’hospitalisation. Il rectifie que sa femme aurait exprimé son inquiétude autour de la mort au vue de la dégradation de son état somatique.
L’évaluation clinique est effectuée à deux reprises au cours de la même journée afin de rechercher une fluctuation des troubles dans le temps. L’état clinique reste identique.
À l’entretien la patiente est calme, elle répond volontiers aux questions, le contact est de bonne qualité. Il n’y a pas d’anxiété patente. On ne retrouve pas de trouble de la vigilance, mais elle présente une désorientation temporo-spatiale avec une amnésie totale des événements récents.
Il n’y a pas de tristesse morale ni de velléité suicidaire.
Il n’y a pas de symptomatologie psychotique.
On ne retrouve aucun élément clinique en faveur d’un syndrome catatonique.
Les conclusions de l’avis spécialisé sont :
– Il n’y a pas d’argument clinique pour un syndrome catatonique.
– L’état clinique est prédominé par un syndrome confusionnel dans un contexte d’hyponatrémie symptomatique.
– Il n’y a pas d’argument pour un épisode thymique notamment mélancolique a priori.
– Il est suspecté une iatrogénicité du traitement antidépresseur ISRS d’introduction récente chez la personne âgée avec un probable syndrome de sécrétion inappropriée d’hormone antidiurétique (SIADH).
– Il n’y a pas d’indication à la remise en place d’un traitement en urgence.
– Il n’y a pas d’indication à une hospitalisation en psychiatrie.
La conduite à tenir proposée est la poursuite de la fenêtre thérapeutique associée à une surveillance clinique rapprochée.
Une réévaluation clinique après normalisation de la natrémie est programmée avant la sortie du service de somatique.
Au vu des symptômes d’origines neurologiques associés (modification du comportement, trouble de la conscience fluctuant, amnésie des faits récents, mouvements anormaux hémicorporels), il est proposé de poursuivre les explorations complémentaires avec la réalisation d’un EEG et d’une IRMc. Ceux-ci pourraient permettre d’éliminer une organicité sous-jacente aux troubles.

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Table des matières

I – INTRODUCTION
II – MALADIES SOMATIQUES À EXPRESSION PSYCHIATRIQUE
II.1 Généralités
II.2 Encéphalites limbiques dysimmunitaires
II.2.1 Historique
II.2.2 Classification immunologique
II.2.3 Pourquoi en parler ?
III – ENCEPHALITE À ANTICORPS ANTI-RECEPTEURS N-METHYL-D-ASPARTATE (NMDA)
III.1 Revue de la littérature
III.1.1 Historique
III.1.2 Données épidémiologiques
III.1.3 Physiopathologie
III.1.4 Présentation clinique et paraclinique
III.1.5 Modalités de prise en charge
III.1.6 Evolution et Pronostic
III.2 Cas Cliniques
III.2.1 Cas clinique n°1
III.2.2 Cas clinique n°2
III.2.3 Cas clinique n°3
IV – DISCUSSION
IV.1 Les différents facteurs de retard diagnostic de l’encéphalite anti-NMDAR 51
IV.2 Analyse de concordance entre données de la littérature et données cliniques des cas n°2 et 3
IV.2.1 Au niveau sémiologique
IV.2.2 Au niveau des explorations complémentaires
IV.2.3 Au niveau pharmacologique
IV.3 Quelle place de la prise en charge médicale dans le retard diagnostic des encéphalites limbiques ?
IV.3.1 Prise en charge somatique des troubles mentaux
IV.3.2 Les soins psychiatriques
IV.4 Réduction du retard diagnostic
IV.4.1 Stratégies mises en places
IV.4.2 Le rôle du psychiatre
V – CONCLUSION
VI – BIBLIOGRAPHIE

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