En quoi la simulation nous renseigne-t-elle sur l’activité en situation réelle?

La formation des sapeurs-pompiers a connu des changements profonds au cours de ces dernières années. Les réformes successives sont venues transformer leurs pratiques et leurs approches pédagogiques de façon déterminante. Pendant une longue période marquée par la pédagogie par objectifs, la construction des dispositifs de formation s’est faite à partir des représentations du travail des responsables formation avec un découpage de l’apprentissage en objectifs à atteindre. La dernière réforme de la formation recommande désormais une analyse du travail comme préalable à la conception des formations et souhaite mettre l’accent sur les situations de travail.

L’analyse de l’activité occupe une place centrale dans la didactique professionnelle Elle constitue le fondement de la conception des dispositifs de formation. La connaissance précise du travail, de ses buts et de ses conditions d’exécution est une source d’innovation et de transformation pour les dispositifs de formation. En raison de son occurrence faible et aléatoire, l’observation de l’activité chez les sapeurspompiers n’est pas aisée. La simulation représente une alternative pour pallier à l’absence de cet accès direct à l’activité.

Genèse d’un questionnement et émergence d’une problématique

Changement de paradigme : de la pédagogie par objectifs à la pédagogie des situations

La formation des sapeurs-pompiers s’appuie sur un règlement de manœuvre depuis 1956 et sa déclinaison est laissée au libre arbitre des différents corps communaux et intercommunaux. Ce règlement compile dans le détail l’ensemble des caractéristiques et des techniques de mise en œuvre des matériels utilisés pour conduire des opérations de lutte contre l’incendie. Il est également la référence pour les savoirs théoriques sur les questions du développement des incendies.

Le retour d’expérience sur la campagne feux de forêt 1989, qui a montré de nombreux dysfonctionnements sur le plan organisationnel, conduit à une mission d’inspection générale par le préfet Dupuis. Cette mission doit proposer les mesures nécessaires à la mise en place d’une réforme de la formation des sapeurs-pompiers. Les conclusions du rapport mettent en évidence 105 emplois différents pour lesquels aucun dispositif de formation n’est associé. Suite à ce rapport se dégagent deux éléments nouveaux : la nécessité d’élaborer une architecture générale des programmes de formation pour les différents emplois et la mise en place d’un enseignement identique sur le territoire national. Une formation destinée aux formateurs est intégrée dans la réforme et les premiers référentiels introduisant la pédagogie par objectifs font leur apparition en 1997. Ce courant pédagogique est issu des théories béhavioristes. Il s’agit ici de la « traduction des comportements des apprenants en objectifs opérationnels, c’est-à dire en capacité à faire ». C’est une conception qui vient de l’Amérique du Nord, influencée par le comportementalisme développé par Skinner et Watson (1976.) Les caractéristiques de cette approche se situent dans la standardisation et la systématisation des étapes de la formation, se focalisant sur les comportements observables des apprenants et plus particulièrement sur leurs performances. Cela relève d’un découpage analytique entre ce qui est à faire et à apprendre. L’hypothèse de la pédagogie par objectifs repose sur l’idée que cet apprentissage séquentiel amènera au final à une compétence. La formulation des référentiels est bien souvent centrée sur le résultat. Ils sont rédigés sous la forme d’une liste de tâches à réaliser sans toutefois rendre compte du travail « réel ».

Le changement de paradigme est arrivé chez les sapeurs-pompiers avec la réforme de la formation de 2013. Le référentiel des emplois, activités et compétences cherche désormais à s’orienter vers l’approche constructiviste. Le formateur doit s’intéresser également au raisonnement et plus seulement au résultat. La vision de l’apprentissage n’est plus cumulative, elle cherche à comprendre à présent l’organisation de l’action. La conception des formations n’est plus centrée sur les contenus (savoir, savoir-faire…), sur une présentation du travail prescrit, mais tournée à présent vers le travail réel et les situations professionnelles. Du fait de ce changement de paradigme, de nouvelles questions se posent à présent aux sapeurs-pompiers: comment s’approprier cette démarche d’analyse de l’activité et comment la mettre en place dans les dispositifs de formation ?

La question de l’activité

Le concept d’activité est récent chez les sapeurs-pompiers. Il apparaît officiellement dans l’arrêté du 4 octobre 2017 relatif aux formations de spécialités dans le domaine d’activité de la formation et du développement des compétences.

La signification de ce terme est recherchée dans le champ disciplinaire de l’ergonomie qui fait la distinction entre le travail prescrit et le travail réel. L’activité est définie ici comme un couplage entre opérateur et une tâche prescrite (Leplat, 1997). La tâche est définie par un but donné dans des conditions déterminées (Leplat et Hoc, 1983, p.48). La tâche détermine le travail par des procédures, des fiches de postes, des règles. Cela correspond à ce que doit faire l’opérateur. La tâche prescrite est définie par celui « qui en commande l’exécution » (Rabardel et al.1983, p.48). Elle peut être définie avec plus au moins de précision. Elle peut correspondre aux états à parcourir avant l’atteinte de l’état final comme par exemple dans les procédures qualité qui définissent les façons pour atteindre ces étapes, mais elle peut aussi correspondre aux opérations admissibles pour parcourir ces états. Il existe toujours un écart entre le « prescrit » et le « réel ». Le prescripteur attend bien souvent autre chose: c’est la tâche attendue, la tâche dont la réalisation est réellement attendue. Elle s’écarte de la tâche prescrite.

La tâche est aussi définie du point de vue de l’opérateur, c’est la tâche telle que l’opérateur l’interprète en fonction des moyens dont il dispose et des contraintes qu’il prend en compte, de son système de valeurs, de ce qu’il pense être le travail bien fait. Le travail ne peut pas se réduire à la prescription.

Occurrence faible de l’activité réelle

Les missions des sapeurs-pompiers sont très variées. Leur activité se situe essentiellement dans les domaines du secours à personnes, du secours routier, des opérations diverses et de l’incendie. Des équipes spécialisées permettent d’intervenir sur un champ opérationnel très technique comme le risque technologique, le sauvetage déblaiement ou le sauvetage en milieu périlleux. L’activité des sapeurs-pompiers se caractérise par une occurrence très faible et très aléatoire. Cela rend la mise en place d’une observation de l’activité difficile sur le plan organisationnel.

Les travaux de recherche déjà menés chez les sapeurs-pompiers mentionnent de façon récurrente la problématique du recueil de données. Le positionnement du chercheur et la mise en place d’une observation armée se confrontent aux aléas de la sollicitation des sapeurspompiers.

La didactique professionnelle

La didactique professionnelle a pour but d’analyser le travail en vue de la formation des compétences professionnelles. Cette démarche cherche avant tout à aller interroger l’activité des praticiens. Le rapport entre la théorie et la pratique ne s’arrête pas à une simple application. La conception des dispositifs de formation n’est-elle pas plus efficace si elle est en accord avec les pratiques professionnelles réellement observées dans le travail ? La spécificité de la didactique professionnelle s’appuie alors sur un cadre théorique et méthodologique issus de la convergence entre un champ de pratique de la formation pour adulte et trois champs théoriques : la psychologie du développement, l’ergonomie cognitive et la didactique des disciplines. Son cadre théorique est fortement inspiré par la psychologie du développement. Son cadre méthodologique s’inspire de la psycho-ergonomie et s’appuie sur le concept essentiel de l’activité.

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Table des matières

Introduction
1 Genèse d’un questionnement et émergence d’une problématique
A. Changement de paradigme : de la pédagogie par objectifs à la pédagogie des situations
B. La question de l’activité
C. Développement des compétences
D. Occurrence faible de l’activité réelle
E. Problématique
2 Le cadre théorique
A. La didactique professionnelle
A1. De la notion de compétence au concept de schème
A2 Les modèles de conceptualisation
B. La gestion des environnements dynamiques
C. Comprendre et apprendre par la simulation
C1. Simuler pour comprendre
C2. Simuler pour apprendre
3 Définition de l’objet de recherche
A. Les opérateurs : tâche prescrite
B. La simulation
4 Le recueil des données
A. La démarche
B. La grille de décodage des vidéos
C. Les entretiens d’auto-confrontation
D. Les débriefings
E. Remarques sur la démarche
5 L’analyse des résultats
A. Le premier niveau d’analyse
B. Le second niveau d’analyse
C. Le troisième niveau d’analyse
6 Discussion et perspectives
Conclusion
Glossaire
Bibliographie
Liste des annexes

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