Émotions et besoins des individus au décours du confinement sanitaire du printemps 2020

Si l’homme ne peut se concevoir qu’en interaction avec son environnement, il ne peut vivre en bonne santé qu’en réduisant au maximum le coût biologique de l’adaptation dans cet environnement changeant. Ces changements constituent des stresseurs. Le coût minimal de réponse à ces stresseurs s’observe lorsque le fonctionnement physiologique demeure dans la zone d’homéostasie, ou zone d’équilibre de fonctionnement de l’organisme, permettant un état interne stable malgré des perturbations extérieures. Toute exposition à un environnement agressif entraine un surcoût de fonctionnement, appelé charge allostasique (1). C’est tout le sens de l’adaptation que de réduire ce coût. A côté de ce regard physiologique, se pose un regard psychologique qui n’en est que l’expression dans le champ affectif, cognitif, social et conatif. L’adaptation psychologique est une dynamique complexe qui s’articule autour de phénomènes perceptifs aboutissant à des prises de décision visant à un meilleur ajustement aux demandes de l’environnement. Ce regard se conçoit  dans un cadre individuel et collectif (e.g., la meilleure protection contre la Covid-19 début 2020 repose sur les gestes barrières que la population n’appliquera qu’après une prise de conscience collective portée par les pouvoirs publics).

Le stress est donc cette réaction multidimensionnelle normale au service de la survie de l’individu en ce qu’elle permet de répondre de façon ajustée aux changements de l’environnement. Ceci conduit à considérer que c’est le mal-ajustement qui participe à la fois comme facteur permissif et/ou causal au risque de pathologies de stress. Mieux appréhender ce mal-ajustement et ces facteurs de risque est un enjeu de santé publique. En effet, la crise sanitaire de la Covid-19 a induit des changements majeurs de l’environnement de vie des citoyens qui a sollicité leurs réponses de stress, particulièrement pendant le confinement du printemps 2020. La première partie de l’état de l’art présente les mécanismes de la réponse de stress adaptative et maladaptive au regard des caractéristiques des stresseurs de l’environnement et des modèles de stress. Cette situation et ses conséquences pour la santé psychique ont déjà étudiés dans des cadres professionnels singuliers d’isolement, de confinement, d’extrême et d’inhabituel. Ces professions concernent principalement les astronautes, les sous-mariniers et les hivernants polaires. Nous présenterons, dans la deuxième partie de l’état de l’art, les caractéristiques de ces environnements professionnels choisis pour les comparer à l’environnement imposé par la crise sanitaire. Ce détour nous permettra de présenter succinctement les études réalisées chez ces professionnels portant sur l’impact de ces environnements sur la santé de l’individu en ciblant le fonctionnement thymique et cognitif. L’état de l’art se terminera par un état des lieux des conséquences sur la santé du confinement, en insistant sur le rôle du vécu émotionnel.

Le stress : définitions et mécanismes 

Définitions 

Le stress est sous-tendu par une réaction biologique de l’organisme permettant la production d’énergie pour répondre à un changement de l’environnement ou stresseur. La réaction de stress s’exprime en termes cognitif (« suis-je à la hauteur»), comportemental (mouvements automatiques), et émotionnel (« j’ai peur »). Cette réponse biologique est aspécifique car identique quel que soit l’agresseur. Son évolution dans le temps a été conceptualisée par Hans Selye en 1956 (2) dans le syndrome général d’adaptation (SGA) qui comprend trois phases successives. (i) La première phase, dite d’alarme correspond à l’activation de tous les mécanismes biologiques selon une régulation en tendance, autorisant une réponse rapide au stresseur. (ii) La seconde phase de résistance ajuste la réponse de stress à l’intensité de l’agression perçue selon une régulation en constance (eustress ; figure 1). (iii) Lorsque l’agression disparaît, une phase de récupération permet le retour à l’homéostasie.

Le primum movens de toutes les pathologies est donc l’incapacité de l’individu à adapter sa réponse de stress en durée et/ou intensité au décours des phases du SGA. En phase d’alarme, un défaut de stress se traduit par une augmentation du risque de maladies. En phase de résistance, un excès de stress est délétère pour le corps en raison de la sollicitation excessive de l’organisme. Elle est susceptible d’évoluer vers une phase d’épuisement à plus ou moins long terme lorsque l’agression est trop intense ou trop longue et qu’elle ne permet pas la récupération nécessaire . En effet, la qualité de la récupération après chaque stresseur conditionne la qualité de la réponse de stress lors de la sollicitation suivante, une récupération insuffisante ne permettant pas un retour à un fonctionnement homéostatique. Il résulte de ces écarts à la réaction adaptée un coût allostasique qui maintient l’organisme dans un état de stress chronique et qui induit une usure fonctionnelle à court et moyen termes et une cassure structurelle à plus long terme. Enfin, dans certaines situations de sollicitation intense, certains sujets vont déclencher une réponse de stress anormale : ils réagissent au stresseur en le mémorisant anormalement. Ce stress dépassé fait le lit du trouble de stress post-traumatique.

Les stresseurs 

Taxoxomies des stresseurs

Un stresseur (ou contrainte) caractérise toute situation qui active les voies du stress, indépendamment de sa nature, de son intensité et de sa durée. Un stresseur peut être extérieur au sujet, ou généré par son propre organisme. Les stresseurs externes sont imposés au sujet par un changement de l’environnement. Ce sont les plus étudiés. Les stresseurs internes (affects, pensées, etc.) font l’objet de moins d’attention. Ils posent la question de la représentation que l’homme a de son environnement interne et externe (4). Indépendamment de leur nature cognitive, physique, émotionnelle, cinq catégories de stresseurs peuvent être décrits d’un point de vue dynamique (4) : (i) les stresseurs aigus limités dans le temps (5 à 100 min ; e.g., les stresseurs de laboratoire) ; (ii) les stresseurs naturels brefs (e.g., devoir passer un examen, un entretien d’embauche) ; (iii) les séquences d’évènements stressants (e.g., deuil, catastrophe naturelle) ; (iv) les stresseurs chroniques : évènements caractérisés par leur stabilité et le fait que n’a aucune information sur leur durée (e.g., chômage, maladie chronique) ; et (v) les stresseurs distants se caractérisant par des traumatismes (re)surgissant tardivement (e.g., viol, prisonnier de guerre) et entrainant des stress post-traumatiques.

Les caractéristiques d’un stresseur 

Quatre caractéristiques ont été proposées pour rendre compte des changements de l’environnement à risque de générer un distress. Elles permettent de considérer chacun des évènements de ce changement sous l’acronyme C.I.N.É qui reprend respectivement : (i) la perception d’une diminution ou d’une absence du Contrôle de l’évènement, (ii) le fait que l’évènement soit inattendu ou encore Imprévisible, (iii) la Nouveauté de l’évènement, et/ou (iv) qu’elle menace l’Égo de la personne ; cette composante est souvent le résultat d’interactions sociales (5). Ces caractéristiques peuvent s’additionner. En d’autres mots, une situation qui contient les quatre éléments engendre une plus grande réponse de stress qu’une situation qui n’en comporte qu’un seul. Enfin, ce qui est perçu comme sans contrôle, imprévisible, nouveau ou menaçant pour l’égo est différent d’un individu à l’autre, rendant compte de la variabilité interindividuelle du vécu des changements de l’environnement.

La théorie du stress comme insécurité généralisée (Generalized Unsafety Theory of Stress ; GUTS) 

La GUTS propose qu’il est plus pertinent de comprendre comment un organisme perçoit l’environnement comme sécurisant plutôt que de comprendre comment il perçoit les menaces et les dangers (6,7). Dans cette approche, le stress serait une réaction par défaut qui serait toujours présente dans l’organisme traduisant l’évaluation continuelle des risques présents dans l’environnement, et ce de manière majoritairement inconsciente. Les compétences physiologiques, comportementales, cognitives permettraient une inhibition de la réaction de stress en l’absence de perception de danger, et une levée de cette inhibition en situation de danger. Ce modèle s’appuie sur deux postulats : (i) l’inhibition est un fonctionnement biologique peu coûteux, et (ii) une réponse de stress est plus rapide lorsqu’on lève un frein que lorsqu’on active un ensemble de réponse.

Ainsi dans ce modèle, la réaction de stress ne serait pas générée mais désinhibée dès que l’environnement est perçu comme non sécure. Il est également important de noter que la GUTS spécifie que l’absence de menace n’implique pas que l’organisme perçoit l’environnement comme sécurisant, d’où le fait que l’organisme peut maintenir des niveaux de stress sans présence apparente de danger. Ainsi, ce modèle propose une compréhension des stresseurs internes du sujet qui conduisent à un vécu de stress chronique. Il propose une approche de la variabilité des réponses de stress, indépendamment des changements de l’environnement par défaut d’inhibition de la réponse de stress.

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Table des matières

1 Introduction
2 Le stress : définitions et mécanismes
Définitions
Les stresseurs
2.2.1 Taxoxomies des stresseurs
2.2.2 Les caractéristiques d’un stresseur
2.2.3 La théorie du stress comme insécurité généralisée (GUTS)
2.2.4 Les stresseurs de la crise sanitaire COVID
La neurophysiologie du stress
2.3.1 Les mécanismes cérébraux
2.3.2 Les liens corps-cerveau
Phénoménologie du stress
2.4.1 Le couplage entre individu et environnement au repos
2.4.2 La psychologie du stress au quotidien
2.4.3 Le confinement sanitaire : entre rupture et effraction
La psychologie du stress
2.5.1 Cadre général
2.5.2 Le modèle transactionnel du stress
2.5.3 Le modèle biopsychosocial du stress
2.5.4 Le modèle de conservation des ressources (COR)
3 Les environnements isolés et confinés professionnels sont délétères
La description des environnements professionnels d’intérêt
L’impact des environnements professionnels d’intérêt
3.2.1 En termes de stress
3.2.2 En termes cognitifs
3.2.3 En termes d’humeur et de souffrances psychiques
Le rôle des émotions positives dans l’adaptation ?
4 Les conséquences psychologiques de la crise
Les principales pathologies psychiatriques chroniques de stress
4.1.1 L’anxiété
4.1.2 La dépression
4.1.3 Troubles des conduites
Les pathologies d’exposition à un stress aigu
Particularités des individus atteints de troubles mentaux
Les mesures adaptatives
4.4.1 Des individus
4.4.2 Des autorités
5 Problématique
6 Étude
Méthodologie
6.1.1 Objectifs de la recherche
6.1.2 Protocole et matériel
6.1.3 Taille d’effectif et analyses
6.1.4 Lieu d’expérimentation
Résultats
6.2.1 Pour l’ensemble de la population
6.2.2 Impact du suivi psychiatrique sur le vécu du confinement
6.2.3 Quels sont les besoins et leur évolution au décours du confinement ?
7 Discussion
Résumé des résultats
Interprétation des résultats
Application des résultats en clinique
Limites et forces de l’étude
8 Conclusion
9 Bibliographie

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