Emissions de N2O par nitrification et dénitrification

Effet de serre et forçage radiatif

   Une part importante du rayonnement infrarouge émis par le sol est absorbée par certains constituants atmosphériques mineurs (les gaz dits à effet de serre). Le rayonnement ainsi piégé réchauffe la basse atmosphère qui émet elle-même un rayonnement infrarouge. Une fraction de ce dernier rayonnement réchauffe la surface de la terre : c’est l’effet de serre. On parle d’effet de serre « naturel » pour caractériser le réchauffement de la planète dû à la présence de gaz absorbant dans l’infrarouge aux teneurs qu’ils avaient avant le début de l’ère industrielle, i.e. avant que l’homme ne commence à modifier significativement la composition de l’atmosphère. Cet effet de serre naturel a été estimé à 33°C : en absence de nuages et des gaz traces, la température moyenne de la terre serait ainsi d’environ -18°C, au lieu des 15°C environ vers 1800-1850. L’essentiel de l’effet de serre naturel est lié à la présence d’eau dans l’atmosphère (vapeur, nuages …) et à la présence de dioxyde de carbone (Figure 1a). Un changement dans l’intensité du rayonnement du soleil ou des capacités de l’atmosphère à absorber le rayonnement infrarouge constituent un forçage radiatif. Le forçage radiatif actuel serait à l’origine d’un accroissement de température d’environ 0.5-0.8°C depuis l’ère préindustrielle. Selon le rapport de l’IPCC (1996), entre 50 et 60 % du forçage radiatif résulte de l’accroissement de la concentration atmosphérique en dioxyde de carbone (Figure 1b). Le reste du forçage radiatif résulte de l’accroissement de concentrations d’autres gaz : méthane, CFC, ozone, protoxyde d’azote et vapeur d’eau stratosphérique. D’après l’évolution de la composition atmosphérique, l’accumulation atmosphérique du protoxyde d’azote (N2O) s’élève à environ 4 Tg N an-1 (IPCC, 1995). Sa durée de vie est estimée entre 110 et 166 ans, avec un temps de résidence de 25 ans dans la troposphère (Jambert, 1995). Le N2O possède un effet radiatif 200 à 300 fois supérieur à celui du CO2. Les estimations actuelles indiquent que près de 65 % des émissions (soit 9.5 Tg N an-1) sont issus du sol, dont 1/3 (3.5 Tg N an-1) proviendrait des sols cultivés. Environ 20 % (3 Tg N an-1) des émissions totales de N2O proviennent des océans, 3 % (0.4 Tg N an-1) serait produits par les animaux et l’élevage, 3 % (0.5 Tg N an-1) seraient émis au cours du brûlage de la biomasse et environ 9 % (1.3 Tg N an1) proviendraient des rejets industriels lors de la fabrication de produits chimiques tels que l’acide nitrique ou les engrais.

Effets sur l’ozone de la haute troposphère et de la basse stratosphère

   L’ozone (O3) est le composant le plus paradoxal de l’atmosphère terrestre. Ce gaz est à la fois indispensable et néfaste pour le maintien de la vie sur terre. Situé dans la haute troposphère et la basse stratosphère, il filtre les rayonnements ultraviolets de longueur d’onde inférieure à 290 nm mortels pour la plupart des formes de vie, alors que l’ozone situé dans la troposphère est néfaste pour les espèces vivantes. Différents composés interviennent dans le devenir de l’ozone avec l’implication de réactions chimiques et photochimiques. Dans la basse troposphère, le N2O est un composé très stable. Par contre, quand il atteint la haute troposphère et la basse stratosphère, il peut donner naissance à des radicaux libres NO• grâce à la présence d’atomes d’oxygène excités. Le monoxyde d’azote (NO) a alors un double rôle vis-à-vis de l’ozone :
– il est l’un des catalyseurs de la destruction de l’ozone ;
– il peut se combiner (sous la forme NO2•) à d’autres radicaux libres qui sont plus nocifs pour l’ozone (notamment les radicaux libres chlore Cl•) et aboutit à inactiver temporairement ces différents catalyseurs. Ainsi en terme de bilan, le N2O a probablement eu ces dernières années un effet plus protecteur que destructeur; ainsi au-dessus de l’Antarctique, le trou d’ozone se reforme chaque année au début du printemps austral lorsque les radicaux libres NO• sont piégés sous forme d’acide nitrique dans des nuages de glace et que les radicaux libres Cl• se reforment par photodissociation de la molécule Cl2. Toutefois, dans certaines  situations, les radicaux libres NO• sont plus nocifs pour l’ozone : c’est notamment le cas lorsqu’ils se forment en très grande quantité suite à des bombardements solaires de protons mais, ils ne proviennent alors plus de l’oxyde nitreux. (Graedel et Crutzen, 1992). Les autres sources de NO dans la haute troposphère et la basse stratosphère sont les rejets directs à partir d’avions, d’explosions nucléaires, …

La nitrification

Le processus La nitrification est due à des bactéries oxydant NH4+ en NO2- (nitritation) puis en NO3- (nitratation) en conditions aérobies. La nitrification peut être autotrophe ou hétérotrophe.
a. La nitrification hétérotrophe est réalisée par une microflore qui se développe sur des substrats carbonés organiques. Elle se limite principalement aux sols forestiers et aux milieux à faible pH et à température élevée. Elle est moins active que la nitrification autotrophe.
b. La nitrification autotrophe est le processus dominant en sol cultivé. En présence d’une source minérale de carbone, CO2 ou bicarbonate, l’ammonium est oxydé successivement en hydroxylamine (NH2OH), nitrite et nitrate. Ce processus fait intervenir des transporteurs d’électrons tels que NAD et FAD. Chaque étape est catalysée par un système enzymatique différent.
Les micro-organismes nitrifiants Les nitrifiants hétérotrophes, largement représentés chez les champignons (ex: Aspergillus flavus, les bactéries et les actinomycètes, sont capables de réaliser la nitrification en culture pure à partir de sources d’azote organique ou ammoniacal (Killham, 1986). Toutefois, d’autres travaux sont nécessaires pour estimer l’importance de la nitrification hétérotrophe dans les sols. Les nitrifiants autotrophes sont des bactéries nitrifiantes classées dans la famille des Nitrobacteraceae (Watson, 1971 ; Bock et al., 1986). Les bactéries oxydant l’ammonium en nitrite s’organisent en 5 genres : Nitrosomonas, Nitrosospira, Nitrosococcus, Nitrosolobus et Nitrosovibrio. Les bactéries oxydant les nitrites en nitrates s’organisent en 4 genres : Nitrobacter, Nitrococcus, Nitrospira et Nitrospina. L’ammoniac mono-oxygénase (AMO) est une enzyme membranaire dont la structure n’est pas encore clairement identifiée. Des études ont montré une analogie de structure entre l’AMO de N. europaea et de Paracoccus dénitrificans (nitrifiant hétérotrophe). L’AMO présente la capacité d’hydroxyler une large gamme de substrats hydrocarbonés; elle est irréversiblement inhibée par l’acétylène (Hommes et al., 1998).
Les hypothèses de formation de N2O liées à la nitrification Plusieurs travaux ont mis en évidence la production de N2O par nitrification (Blackmer et al., 1980 ; Stevens et Laughlin, 1998). Plusieurs hypothèses ont été émises pour expliquer l’origine de ces émissions : H1) Une fraction du NH4+ oxydé est déviée vers la production de N2O durant la nitrification, avec plusieurs réactions intermédiaires. Selon Conrad (1990) cette formation serait la conséquence de la transformation d’un composé intermédiaire formé au cours de l’oxydation de l’hydroxylamine en nitrite, identifié comme étant le nitroxyl (HNO). Selon Parton et al. (1996), l’oxydation du nitroxyl pourrait également conduire à la formation d’un autre composé inconnu qui serait ensuite oxydé en nitrite. Cette hypothèse est prise en compte dans le modèle NGAS de Parton et al. (1996) et des autres modèles (Linn et Doran, 1984; Davidson, 1993). H2) La présence d’un système enzymatique sur Nitrosomonas europaea réduit NO2- en N2O durant l’oxydation de carbone en anaérobiose (Ritchie et Nicholas, 1972). L’effet de la pression partielle de O2 a été mis en évidence soit directement en faisant varier la pression partielle en O2 (Bollmann et Conrad, 1998), soit indirectement en faisant varier l’humidité du sol (Zanner et Bloom, 1995); il est pris en compte dans le modèle de Grant (1995). H3) L’oxydation partielle de NH4+ en NO2- en aérobiose est suivie d’une diffusion du NO2- vers les sites anoxiques, puis d’une réduction en N2O par dénitrification. Poth et Focht (1985) ont conclu que le processus de réduction de NO2- en N2O par N. europaea correspond à la définition de la dénitrification. La production de N2O par nitrification est non corrélée avec l’addition de nitrate mais corrélée avec l’addition d’ammonium, cela peut s’expliquer par l’utilisation de l’ammonium comme source d’électrons et par l’absence de l’activité du nitrate réductase dans N. europaea. Cette hypothèse est prise en compte dans quelques modèles (Poth et Focht, 1985).

L’aération du sol

   Le sol est un milieu hétérogène où peuvent exister des zones aérobies et anaérobies. La dénitrification apparaît à de faibles teneurs en O2 (Jambert, 1995; Granli et Bockman, 1994). Le rapport N2O/(N2O+N2) tend à augmenter lorsque la concentration en O2 diminue. La N2Oréductase semble plus sensible à la teneur en O2 que d’autres enzymes de la dénitrification (Betlach et Tiedje, 1981). Des sites anoxiques peuvent exister dans un sol présentant de bonnes conditions d’aération. Ils apparaissent au cœur des agrégats (Sextone et al, 1985, Sierra et al., 1995), au voisinage des matières organiques particulaires en décomposition (Parkin, 1987 ; Parry et al., 2000) et dans la rhizosphère (Bidel et al., 2000). La taille de ces sites joue sur l’importance de la dénitrification et sur le rapport N2O/(N2O+N2) : plus le site est petit, plus le N2O pourra atteindre rapidement les zones aérées sans être réduit (Lafolie et al., 2001). La dénitrification a longtemps été considérée comme exclusivement anaérobie, en supposant que les enzymes de la dénitrification sont inhibées par les environnements oxiques. Il semble maintenant qu’elle puisse apparaître aussi en aérobiose. Cette activité est attribuée à l’existence d’une NO3- réductase distincte (appelée Nap), localisée dans l’espace périplasmique des dénitrifiants gram -, alors que le site actif de la membrane liée à la NO3- réductase (Nar) est située dans le cytoplasme (Bell, 1990).

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Table des matières

INTRODUCTION GENERALE
CHAPITRE 1 : SYNTHESE BIBLIOGRAPHIQUE
I. Problématiques environnementales et agronomiques
I.1. Effet de serre et forçage radiatif
I.2. Effets sur l’ozone de la haute troposphère et de la basse stratosphère
I.3. Pertes de fertilisants azotés en agriculture
II. Processus impliqués dans la production et la consommation de N2O dans les sols
II.1. La dénitrification
II.2. La nitrification
III. La régulation des émissions de N2O dans les sols
III.1. La teneur en eau
III.2. L’aération du sol
III.3. La disponibilité en azote minéral
III.4. La disponibilité en carbone et matière organique
III.5. La texture et la structure du sol
III.6. La température
III.7. Le pH
IV. Modélisation des émissions de N2O dans les sols
IV.1. Les modèles stochastiques
IV.2. Les modèles empiriques
IV.3. Les modèles mécanistes
V- Conclusion
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
CHAPITRE 2 : SIMULATION DE LA DENITRIFICATION, DE LA DYNAMIQUE DES DENITRIFIANTS ET LEUR CAPACITE PROGRESSIVE A REDUIRE N2O : COMPARAISON MODELE – EXPERIENCE
Introduction
Materials & Methods
Results
Discussion
References
CHAPITRE 3 : INFLUENCE D’UNE PRE-INCUBATION ANAEROBIE SUR LA RESPIRATION ET LES EMISSIONS DE N2O PAR DES MOTTES DE SOL EN INCUBATION AEROBIE
Summary
Introduction
Materials & Methods
Results
Discussion
References
CHAPITRE 4 : MODELE SIMPLIFIE DES EMISSIONS DE N2O PAR DENITRIFICATION PRENANT EN COMPTE LA STRUCTURE DES MOTTES ET LA PREINCUBATION ANAEROBIE
Summary
Introduction
Materials & Methods
Results & discussion
Conclusion
References
CHAPITRE 5 : INFLUENCE DE LA PRESSION EN O2 SUR LA PRODUCTION DE N2O PAR NITRIFICATION ET DENITRIFICATION PAR DES AGREGATS DE SOL
Summary
Introduction
Materials & Methods
Results
Discussion
References
SYNTHESE DES RESULTATS
I. Synthèse des principaux acquis
I.1.Fonctionnement dénitrifiant en condition anaérobie
I.2. Anoxie, respiration et dénitrification
I.3. Emissions de N2O par nitrification
I.4. Données complémentaires
II. Comparaison avec le comportement du sol in situ
III. Perspectives de ce travail
III.1.Aspect méthodologique
III.2.Aspect d’analyse des mécanismes
III.3.Extrapolation à des échelles d’espace et de temps plus larges
BIBLIOGRAPHIE

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