Emission laser autour de 900 nm dans les fibres optiques dopées Nd3+
L’objectif principal de cette thèse est d’obtenir un laser de puissance (>1 W de puissance moyenne) émettant autour de 450 nm par génération de second harmonique dans un cristal non-linéaire. Il est nécessaire, dans un premier temps, de développer une source laser de forte puissance dans le proche IR, de bonne qualité spatiale (M² proche de 1) et étroite spectralement (Δλ < 1-2nm), afin d’obtenir une conversion de fréquence efficace. Dans ce chapitre, nous allons répertorier des sources de forte puissance disponibles autour de 900 nm pour plusieurs technologies, à savoir les diodes à semiconducteur, les lasers Saphir Titane et les lasers à solide basés sur des cristaux dopés Néodyme. Pour chaque système, les résultats obtenus (si disponibles) dans la région spectrale bleue après doublage de fréquence seront présentés. C’est dans ce contexte que nous introduirons l’étude menée dans le cadre de ce travail de thèse, l’utilisation de fibres dopées Nd3+ pour une émission autour de 900 nm. Nous commencerons par présenter les caractéristiques spectroscopiques des fibres dopées Nd3+ puis nous détaillerons les avantages et les limitations des lasers à fibre face aux autres systèmes. L’émission autour de 900 nm dans une fibre dopée Nd3+ est difficile à obtenir à cause de la nature de la transition qui repose sur un schéma à trois niveaux d’énergie et surtout de la compétition avec la transition laser à 1060 nm. Nous verrons donc les différents obstacles à contourner pour obtenir une émission efficace à 900 nm pour ensuite évoquer le design de fibre retenu ; une structure double-gaine à grande aire modale et à gaine interne réduite, solution appuyée par un calcul analytique simple. Nous présenterons ensuite les résultats préliminaires obtenus en configuration laser avec une fibre « test ». A partir de ces premiers résultats, un modèle numérique, réalisé dans l’objectif d’optimiser les paramètres géométriques de la fibre pour favoriser la transition 4F3/2-4I9/2, permettra de définir des designs de fibre et de cavité.
Sources laser de puissance autour de 900 nm
Diodes laser à semi-conducteurs
Les diodes laser basées sur la technologie semi-conducteur détiennent les records de puissance moyenne autour de 900 nm. Plusieurs systèmes disponibles commercialement peuvent en effet délivrer jusqu’à plusieurs centaines de Watts en régime continu ou quasi-continu. Ces diodes reposent toutes sur le même principe physique : l’inversion de population est assurée par un pompage électrique ou optique qui entraîne la création de paires électron-trou dans une jonction P-N faisant office de milieu amplificateur. En se recombinant, ces paires émettent des photons dont l’énergie correspond approximativement à la largeur de la bande interdite.
De par leur fonctionnement, les diodes laser possèdent une limitation intrinsèque : il faut augmenter la taille de la zone active pour augmenter les performances en termes de puissance, ce qui vient inexorablement dégrader la qualité spatiale de faisceau.
Il existe donc des diodes laser délivrant de fortes puissances autour de 900 nm mais comportant une faible brillance et exhibant de surcroît, des largeurs spectrales de plusieurs nm, ce qui les rend inutilisables pour une application de doublage de fréquence efficace. La société Lumics GmbH propose par exemple un module fournissant jusqu’à 170 W en régime continu entre 880 et 900 nm avec une sortie sur fibre de diamètre 200 µm et d’ouverture numérique (ON) égale à 0,22. Des systèmes peuvent même atteindre plusieurs kW par empilement d’éléments émetteurs à semi-conducteur dégradant d’autant plus la qualité spatiale de faisceau et donc la brillance de la source . Bien qu’elles ne soient pas adaptées pour notre application, de telles sources trouvent néanmoins leur utilité pour le pompage de cristaux massifs dopés Ytterbium ainsi que pour le pompage dans la gaine de fibres dopées Ytterbium.
D’autre part, il existe des diodes laser monomodes ayant une puissance de sortie beaucoup plus modeste (plusieurs centaines de mW) mais avec un faisceau proche de la limite de diffraction. La société Axcel Photonics propose, par exemple, des diodes laser monomodes fournissant jusqu’à 300 mW en régime continu à 905, 915 et 940 nm avec une largeur spectrale de 0,5 nm.
Les diodes laser ont l’avantage de pouvoir être facilement utilisées en régime impulsionnel grâce au principe du déclenchement par le gain. Les diodes laser sont des lasers de classe B et présentent des oscillations de relaxation avant l’établissement du régime permanent. La fréquence typique des oscillations de relaxation est voisine de plusieurs centaines de MHz voire de quelques GHz. Pendant le régime transitoire a lieu un phénomène dit de « spiking » (ou oscillations transitoires) qui correspond à l’émission d’un ou plusieurs pics (spikes) possédant une amplitude plus ou moins importante liée à l’énergie stockée dans la cavité.
En modulant au cours du temps l’intensité du courant de manière adéquate, c’est à dire en appliquant une impulsion électrique avec une durée appropriée, il est alors possible de ne faire osciller le laser que sur le premier « spike ».
Dans ce régime, les impulsions ont une durée de l’ordre de la nanoseconde et peuvent même atteindre une durée subnanoseconde. Ce régime a été démontré pour la première fois par P.-T Ho et collaborateurs qui étaient parvenus à obtenir des impulsions de 20 picosecondes dans une diode à base d’arséniure de gallium-aluminium GaAlAs [Ho 78]. Dans le cas des diodes laser monomodes, les puissances crêtes sont néanmoins limitées à quelques Watts et les puissances moyennes à quelques mW, ce qui ne permettra pas d’obtenir un doublage de fréquence efficace.
Lasers Saphir-Titane
Après leur découverte en 1986 par P.F Moulton, les lasers Saphir-Titane ont rapidement supplanté les lasers à colorant qui étaient alors les seules sources à impulsions ultra-courtes accordables sur une grande plage en longueur d’onde [Moulton 86]. Les lasers Saphir-Titane font partie de la famille des lasers à solide et, de ce fait, peuvent offrir un très bon compromis en alliant puissance moyenne élevée et excellente qualité spatiale de faisceau. Leur fonctionnement repose sur le pompage optique de cristaux de Saphir dopé Titane (Ti3+:Al2O3). La très bonne conductivité thermique de la matrice de Saphir permet au cristal Ti3+:Al2O3 de supporter de fortes densités de puissance. D’autre part, le Titane trivalent dans la matrice Al2O3 possède une bande de gain très large s’étalant de 650 nm à 1100 nm avec un maximum de gain autour de 800 nm. Les systèmes disponibles commercialement peuvent fournir plusieurs watts de puissance moyenne et peuvent être accordés en longueur d’onde entre 700 et 1000 nm . Le pompage optique, qui peut s’effectuer à plusieurs longueurs d’onde dans le vert, était historiquement réalisé par des lasers à argon ionisé délivrant de fortes puissances à 514 nm. Cette source de pompage a été remplacée, ces dernières années, par des lasers à solides basés sur des cristaux dopés Néodyme et doublés en fréquence pour émettre à 532 nm.
|
Table des matières
Introduction
I. Emission laser autour de 900 nm dans les fibres optiques dopées Nd3+
I.1 Sources laser de puissance autour de 900 nm
I.1.1 Diodes laser à semi-conducteurs
I.1.2 Lasers Saphir-Titane
I.1.3 Lasers à solide dopé Nd3+
a. Propriétés de l’ion Nd3+
b. Performances actuelles
I.2 Sources laser à fibres dopées Nd3+
I.2.1 Propriétés générales des lasers à fibre de puissance
a. Intérêts des lasers à fibre
b.Limitations : effets non-linéaires et qualité spatiale de faisceau
I.2.2 Emission autour de 900 nm dans les fibres alumino-silicates dopées Nd3+
I.3 Fibres LMA dopées Nd3+ à gaine réduite
I.3.1 Intérêt des fibres LMA à gaine réduite : modèle analytique simple
I.3.2 Résultats préliminaires : fibre LMA 20/80
I.3.3 Modélisation numérique pour l’optimisation de la géométrie de la fibre
I.3.4 Optimisation des paramètres de la cavité
I.4 Nouvelles fibres optimisées : accordabilité par réseau de diffraction et par VBG
I.4.1 Fabrication des fibres LMA
I.4.2 Caractérisations des nouvelles fibres dopées Nd3+
a. Fibre LMA à gaine d’air
b. Fibre LMA à gaine polymère
I.4.3 Accord en longueur d’onde par réseau de diffraction
I.4.4 Accord en longueur d’onde étendu par VBG
I.5 Conclusion du chapitre
II. Etude d’un amplificateur à fibre LMA : caractère modal et saturation du gain
II.1 Etude d’un amplificateur à fibre LMA 20/80 dopée Nd3+
II.1.1 Système MOPA simple-passage
II.1.2 Modélisation numérique de l’amplificateur
II.1.3 Qualité spatiale de faisceau et filtrage modal
II.2 Caractérisation modale de fibres LMA passives et dopées Nd3+
II.2.1 Etude théorique à partir du profil d’indice et vérification expérimentale
II.2.2 Méthode de battement spectral
II.2.3 Etude des propriétés modales de la fibre LMA 20/80 dopée Nd3+
II.3 Sélection modale dans un amplificateur à fibre LMA double-passage
II.3.1 Principe de la sélection modale par réseau de Bragg fibré
II.3.2 Structure de l’amplificateur double-passage
II.3.3 Mise en évidence de la sélection modale dans une fibre 18/80 passive
II.3.4 Résultats en régime d’amplification double-passage
II.4 Conclusion du chapitre
III. Conversion non-linéaire de fréquence autour de 450 nm
III.1 Doublage de fréquence en régime continu
III.1.1 Conversion non-linéaire de fréquence dans un cristal de LBO
a. Généralités sur le doublage de fréquence
b. Choix du cristal de LBO et estimation du coefficient de conversion simple-passage
III.1.2 Doublage de fréquence en cavité résonante interne
a. Rappels sur les cavités Fabry-Perot
b. Principe du doublage de fréquence en cavité résonante insérée dans un laser à fibre
c. Modèle analytique de la cavité résonante
d. Optimisation de la cavité résonante interne
III.1.3 Résultats expérimentaux en régime continu
a. Montage expérimental : adaptation de mode et largeur spectrale du laser à fibre
b. Puissance doublée autour de 452 nm
III.2. Doublage de fréquence en régime impulsionnel
III.2.1 Contexte : génération d’impulsions nanosecondes autour de 450 nm
III.2.2 Système MOPA injecté par une diode laser déclenchée par le gain
III.2.2 Système MOPA injecté par un laser déclenché activement
III.3 Conclusion du chapitre
Conclusion générale
Références bibliographiques