Les Tat du Caucase
Le tat de l’Apshéron est une langue indo-européenne appartenant à la branche sud-ouest de la famille iranienne. Il est parlé en Azerbaïdjan, par les habitants de Balakhani et de Sourakhani dont est originaire l’auteur de ce travail. A ce jour, le tat de l’Apshéron est peu décrit et peu documenté. Aussi, la grammaire présentée dans cette recherche est la première description dans une langue occidentale d’un dialecte tat musulman. Elle cherche à aborder le plus de thèmes possibles dans la limite de nos données.
Les Tat musulmans
Les dialectes tat Musulmans sont parlés dans la péninsule de l’Apshéron, aux villages de Sourakhani et de Balakhani, au nord-est de Bakou ; dans les villages de Lahij et Melhem, au nord de Shamakhi et Ismaïlli et dans les localités de moyenne montagne de Qonaqkend, Afruja, Chichi, Siyazen, Gendab, Daqkushchu, Gilezi en Azerbaïdjan (Aliev 2006). Tous les dialectes musulmans d’Azerbaïdjan sont de tradition orale et tous les locuteurs adultes de ces dialectes sont bilingues. Au début du XXème siècle, l’emploi massif de l’azéri a pris une telle ampleur qu’il s’est mis à influencer les langues ethniques vernaculaires. Ainsi, de nos jours, l’azéri, langue de l’administration et des médias d’Azerbaïdjan, tend à devenir la première langue des jeunes d’origine tat, en particulier à Bakou. La plupart des dialectes tat des Musulmans n’ont fait l’objet que d’études très limitées. Une étude générale sur ces dialectes a été menée par Miller (1929). Les parlers du dialecte du nord-est de l’Azerbaïdjan, eux, ont été étudiés par Grjunberg (1963). Un recueil de contes en dialecte de Qonaqkend a été publié par Maqsud Hajiev (1993). Le tat de Lahij a été partiellement décrit par Gulsum Husseynova (2002).
Le village de Sourakhani
Dans son compte-rendu Şirvanın təsviri « Description de Shirvan », Дренякин (1796) fait mention de 34 villages dans la ville de Bakou, dont Sourakhani. En 1813, on y dénombrait 9 habitants ; en 1832, ils étaient au nombre de 253 personnes, et en 1842, 319 hommes et 309 femmes (Aliev & Hamzaev 2005). Situé à l’est de Bakou, ce village se définit par une partie dite ancienne et une plus récente qui a vu le jour entre 1930 et 1936. En effet, suite à l’abondance de pétrole, les autorités se sont vu dans l’obligation de déménager une partie des habitants de l’ancien vers le nouveau. Jusqu’en 1992, ce village était connu sous l’appellation de Kirov. Dans Таты их расселение и говоры de Miller (1929), les tatophones de Sourakhani et de Balakhani appellent leur langue « parsi » et ignorent le terme « tat », allant jusqu’à le considérer comme une offense. Qeybullaev (1994) confirme ce fait historique. En 2008, le dernier recensement après l’Indépendance de 1991 donnait 15 300 « Azéris tat » à Sourakhani.
Conception et corpus
Textes spontanés
Les textes spontanés ont été recueillis et sélectionnés par l’auteur lui-même, lors de plusieurs séjours à Bakou, entre 2012 et 2015. Ils contiennent des chants folkloriques, des contes, des poésies, des légendes, ainsi que des recettes de cuisine. L’informatrice principale, Rosa Khanlarova, est aujourd’hui une des doyennes de la communauté de Sourakhani, une femme née en 1932. Elle est l’auteur de plusieurs contes, de poésies et d’un récit sur des coutumes : Qarəçi La gitane (G) ; Düto hamrah Deux amis (DA) ; Padşah boş ayol Le roi et l’enfant (R&E) ; Durnə boş tülkü La grue et le renard (G&R) ; Qudil L’araignée (A) ; Tapmacə Devinette (DT) ; Arsi Le mariage (M). Les recettes de cuisine ont été aimablement fournies par deux informatrices, Naïla Muzaffarova et Sona Arif : Aş Plat de riz (PR) ; Baranqu dolmasi Aubergine farcie à la viande (AFV) ; Buzbuş Bozbach (B).
Les trois contes et les légendes ont été collectés lors d’un séjour en 2015, auprès de deux informatrices, Naïla Muzaffarova et Sévil Guliéva : Qızilinə ləlu Le berceau d’or (BO) ; İskəndər Iskandar (I) ; Əfsani qu La légende du coucou (LC) ; Əfsani lalə La légende du coquelicot (LC) ; Əfsani mar La légende du serpent (LS) ; Əfsani qulyabanu La légende de la gorgone (LG).
Le corpus comprend aussi deux chants tat improvisés par Yaver Shuvalanli et Elchan & Nassib : Nazar beg « Nazar bey » (Ch1) ; Kələ gedə bşey dəndu vodurvardəni « Que tes dents poussent, et tu grandiras bien, garçon ! » (Ch2).
Textes traduits
Les quatorze contes traduits de l’azéri vers le tat sont issus du livre les Contes azéris de Nuraddin Séïdov et de Bahlul Abdulla, paru en 2005, et qui contient des contes de types variés : Ağıllı qız La fille intelligente (FI) ; Loğman Logman (L) ; İki qardaş Les deux frères (DF) ; Bənidaş şəhərinin sirri Le secret de la ville de Banidache (SVB) ; Əzazil padşah Le roi tyran (RT) ; Hillilim Güllülüm Hillilim et Gullulum (H&G) ; İlan və qız Le serpent et la femme (S&F) ; Naxırçı Le bouvier (B) ; Kəsik baş La tête coupée (TC) ; Uşax pəhlivan Le brave enfant (BE) ; Yuxu Le rêve (R) ; Yetim qız L’orpheline (O) ; Zəngi Zengui (Z) ; Cin Le djinn (D). Keçəl Le teigneux (T) fait partie du livre les Contes azéris, paru en 2002. Enfin, le conte Şəngülüm, Şüngülüm, Məngülüm Shangulum, Shungulum et Mangulum (Sh,Sh&M), lui, provient des Contestraditionnels d’Azerbaïdjan, parus en 2013 à Bakou.
Les Histoires drôles de Molla Nasreddine publiées par Rafiq Ismaïlov, parues en 2005, sont centrées sur un personnage principal, Molla Nasreddine. Le personnage est drôle et sympathique, et on s’y attache facilement. Ces histoires sont un témoignage de la force de la parole. Avec le mot juste, l’humour ou l’allusion, elles arrivent à dire ce qu’il est souvent difficile d’exprimer. Le corpus comprend plusieurs histoires : İnanma N’y crois même pas ! (MN1) ; Hamınızın dərdini çəkirəm Je me soucie de vous tous (MN2) ; Daş daş üstə qalmazdı Une pierre ne tiendrait pas sur une autre (MN3) ; Görəsən kimin ürəyi yanır ? Qui est-ce qui se fait des soucis ? (MN4) ; Göz ağrısı Le mal aux yeux (MN5) ; Diş ağrısı La rage de dents (MN6) ; Böyüyüb keçi olub Il a grandi et est devenu une chèvre (MN7) ; Ağlamayım, neyləyim? Que faire sinon pleurer ? (MN8) ; Dediyinin üstündə durandı Il tient sa promesse (MN9) ; Qırxınıda birdən bilmirən Je ne connais pas la réponse à quarante questions (MN10) ; Mollanın dərdi Le chagrin de Molla (MN11) ; Yaxşı tanımaq olur On reconnaît bien (MN12) ; Birə dərmanı Le traitement contre la puce de lit (MN13) ; İnşallah In cha Allah (MN14) ; Demədim ki, sarsağam Je n’ai pas dit que j’étais stupide (MN15) ; Yun əkəcəyəm Je vais planter de la laine (MN16) ; Üç əlim yoxdu ki… Je n’ai pas trois mains… (MN17) ; İt duası La prière du chien (MN18) ; Atılmalı şeyi də satarlar ? Vend-on une chose à jeter ? (MN19) ; Molla tayfası Les Mollas (MN20) ; Hamısı yatır Tout le monde dort (MN21) ; Doyunca yatmışam J’ai assez dormi (MN22) ; Apara bilməyəcək Il ne pourra pas emporter (MN23) ; Uşaqlarım yetim qalmışdı Mes enfants étaient restés orphelins (MN24) ; Gərək bir adam ala Il faudrait que la même personne les achète (MN25) ; Rəngi qaradı Il est noir (MN26) ; Qaç gölə tərəf Cours vers la rivière (MN27) ; Tapmağın ləzzətini az bilirsiniz ? Vous connaissez peu le plaisir de trouver (MN28) ; Ölənin eşşəyini yeyərlər On mangera l’âne d’un défunt (MN29) ; Hamısı eşşəyə düşməsin Pour ne pas charger l’âne (MN30) ; Eşşəkdən tez gəlmişəm Je suis arrivé avant l’âne (MN31) ; Səni söyəcək, məni döyəcək Toi, il t’insultera et moi, il me battra (MN32) ; Eşşəyi də var imiş Il avait aussi eu un âne (MN33) ; Halva alıb yeyərsən Tu achèteras du halva et en mangeras (MN34) ; Sən gündə gəlirsən Tu viens chaque jour (MN35) ; Ya eşşək ölər, ya Teymur Soit l’âne mourra soit ce sera Teymour (MN36) ; Ağlına gəlməz Cela ne viendra pas à son esprit (MN37) ; Eşşəyə inanırsan Tu crois en l’âne (MN38) ; Nə çəkirəm Combien je souffre (MN39) ; Bircə dəfə ölüm Que je meure une fois (MN40) ; Aparmıram ki, verəm Je ne l’emporte pas pour le donner (MN41) ; Dava yorğan davası imiş Dispute au sujet de l’édredon (MN42) ; Borc istəmə Ne me demande pas de prêt (MN43) ; Bəlkə versinlər S’il en donne (MN44) ; Allahın qapısı La porte de Dieu (MN45) ; Yaxşı müştəri olsun Qu’il y ait un bon acheteur (MN46) ; Sonra gözüm üstə Après, sur mes yeux (MN47) ; Buz ilə çörək Le glaçon et le pain (MN48) ; Bilənlər bilməyənlərə öyrətsin Que ceux qui le savent l’apprennent à ceux qui l’ignorent (MN49) ; Eşitdin get Si tu l’as entendu, vas-t-en ! (MN50).
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Table des matières
1 Introduction
2 Noms
3 Syntaxe interne et externe des groupes nominaux
4 Adjectifs
5 Numération et quantité
6 Syntagmes possessifs
7 Adverbes
8 Adpositions
9 Pronoms
10 Thèmes, noms verbaux et classes de verbes
11 Dérivation verbale
12 Locutions verbales
13 Copules et prédicats non verbaux
14 Formes verbales conjuguées
15 Relatives
16 Conclusion
17 Subordonnées adverbiales
18 Coordination de prédicats
Index
Textes
Appendice
Lexique
Bibliographie