La place de la phonétique et de la phonologie dans l’apprentissage d’une langue étrangère à l’école primaire en France
Tout ce qui précède a permis de prouver que s’intéresser à la phonétique comme à la phonologie revient à se mettre en capacité de connaître, reconnaître et produire les sons d’une langue. Cela apparaît donc comme un processus nécessaire à l’acquisition d’une langue étrangère (LE).
Les textes officiels – notamment les documents d’accompagnement en anglais publié au B.O. hors série n°8 du 30 août 2007 de même que les tableaux de progressivité des apprentissages parus dans le B.O. n°1 du 5 janvier 2012 – accordent à ce processus une place importante. Par exemple, l’élève doit être capable, en fin de cycle 3, de se faire comprendre à l’oral en prononçant correctement. Pour cela, dans les tableaux de progressivité proposés, tous les aspects – intonation, rythme, accentuation, phonétique articulatoire – sont travaillés tout au long de l’apprentissage.
Toutefois, en pratique, le travail effectué en phonétique et phonologie anglaises reste très minoritaire. Peu sûrs d’eux, et souvent à raison malgré les dispositifs de formation initiale et continue mis en place, les enseignants se risquent rarement à proposer de la correction phonétique à leurs élèves. Pour le coup, leurs propres défaillances peuvent être relevées. Très peu ont conscience des enjeux bien qu’ils sachent que parler nécessite de produire des sons correctement au regard de la langue cible. Encore moins nombreux sont ceux qui disposent des connaissances relatives à la langue anglaise nécessaires à son enseignement et ce malgré souvent plus d’une dizaine d’années de pratique. Or le professeur des écoles français ne peut pas s’appuyer sur sa propre langue pour enseigner l’anglais langue étrangère.
Eléments de comparaison des systèmes anglais et français
Pour pouvoir procéder à cette comparaison, il faut préalablement définir précisément les langues objet de l’étude. En effet, parlées par des millions de locuteurs à travers le monde, l’anglais comme le français connaissent de nombreuses variantes. Pour le français, nous retiendrons le français standard de France. Concernant l’anglais, le choix se révèle également assez simple au final. La variante la plus enseignée est la prononciation standard britannique appelée Received Pronunciation (RP). Or il est essentiel que les élèves soient confrontés à un système de prononciation unique pour être cohérent. A titre de comparaison, on ne parle pas avec l’accent québécois et l’accent marseillais dans la même phrase au quotidien. C’est donc la RP qui sera retenue. Ce choix sera néanmoins porteur de difficulté, ce que nous verrons au cours de l’analyse du travail mené. Après avoir brièvement présenté les phonèmes des deux langues et donné un bref aperçu des difficultés articulatoires, nous verrons que l’anglais et le français diffèrent également en matière d’intonation et surtout d’accentuation ou de rythme.
Les phonèmes des deux langues
Cette section a pour unique but de présenter brièvement mais dans leur intégralité l’ensemble des phonèmes consonnes et voyelles du français et de l’anglais. Cette présentation – sous forme de tableau pour plus de clarté – permettra de faire émerger la plus évidente des différences entre les deux langues : les phonèmes propres à l’une ou à l’autre. Le seul nombre respectif de phonèmes de chacune des langues suffit à nous en convaincre : trente-six en français contre quarante-neuf en anglais. Je ne développerai pas les rapports phonématiques, c’est-à-dire les combinaisons de phonèmes admises propres à chaque langue, trop complexes à ce niveau.
La plupart des ouvrages traitant de prononciation commencent leur présentation par les phonèmes voyelles. Je fais ici le choix opposé car, au seul plan phonétique, il existe moins de différences entre le français et l’anglais du point de vue de ces phonèmes consonantiques alors qu’ils sont globalement plus nombreux. Sur le plan de l’articulation, nous verrons toute fois que les choses sont plus nuancées.
Les voyelles
Je présenterai dans cette partie d’abord tous les phonèmes voyelles français illustrés de quelques exemples avant de m’intéresser aux phonèmes voyelles simples, diphtongues et triphtongues anglais. Les diphtongues (et triphtongues) s’analysent comme des glissements d’un son voyelle à un autre et peuvent se révéler particulièrement difficiles à produire pour un francophone qui, se rattachant à ce qu’il connait aura tendance à produire par exemple /ej/ (comme dans « payer ») au lieu de /eN /.
Les phonèmes voyelles français sont au nombre de seize mais la distinction opérée entre /X/(lundi) et /R/(brin) tend à disparaitre et ne sera probablement bientôt plus discriminante.
Les quatre voyelles nasales seront alors réduites à trois.
La phonétique articulatoire
L’une des difficultés rencontrées lors de l’apprentissage de l’anglais vient de la production même des phonèmes que nous venons de passer en revue. D’une part, il va falloir apprendre à prononcer les phonèmes inconnus dans notre langue et pour ça il faudra bien apprendre à placer les organes phonatoires de façon à les produire. C’est le cas par exemple du fameux /I/ qui cristallise tant de craintes et d’attentes depuis des générations. Mais, avec du travail, cela n’est pas impossible. Ce qui en revanche est plus subtil mais aussi plus difficile à travailler il me semble, ce sont les phonèmes qui semblent identiques mais qui, du point de vue articulatoire, diffèrent.
Généralités sur l’appareil phonatoire
Avant de présenter quelques cas d’articulation différente de mêmes phonèmes, la figure n°3 permet de se rendre compte de la complexité de la production de la parole.
Articulation comparée de quelques phonèmes consonnes anglais et français
Il ne s’agit pas ici de présenter de façon exhaustive tous les points d’articulation de chacun des phonèmes décrits précédemment. En revanche, en comparant quelques phonèmes qui se traduisent phonétiquement de la même façon, nous nous rendrons compte qu’ils sont en réalité articulés différemment.
Il faut commencer par souligner une spécificité articulatoire attachée aux phonèmes /p, t, k/. Principalement en début de mot, ces phonèmes sont suivis en anglais d’une expiration. Or cette expiration est très peu produite par les francophones qui ne la connaissent pas dans leur langue. Cette erreur pourrait n’être qu’anecdotique mais elle pose en réalité des problèmes de compréhension. En effet, c’est d’abord cette expiration qui oppose respectivement /p, t, k/ à /b, d, g/. Sans ce souffle caractéristique, un Britannique aura plus de chances de comprendre /beB/ que /peB/ par exemple. Or « I’m eating a pear. » n’est pas la même chose que « I’m eating a bear. ».
Le rythme et l’accentuation
Pour l’apprentissage de l’anglais, il est important d’acquérir le système des sons nous l’avons longuement démontré. Mais ce serait en vain si on n’envisage pas en parallèle le rythme propre à cette langue. Nous retiendrons, comme Adamczewski et Keen (1973 : 179), que le rythme se caractérise par le retour régulier d’un accent. Pour l’apprenant d’origine française, ainsi que le souligne Wilhelm (2012), « la maîtrise du rythme de l’anglais est d’autant plus nécessaire que la langue qu’il apprend à manier appartient à une catégorie rythmique différente de celle de sa langue maternelle ». En effet, le français a tendance à pondérer de la même façon toutes les syllabes avec un supplément de durée sur la dernière ; le français est ainsi classé parmi les langues syllabiques. L’anglais est pour sa part une langue dite accentuelle ce qui se traduit par une intensité variable mise sur certaines syllabes. Par conséquent, en anglais, il faut impérativement connaître la place de cet accent tonique pour prononcer correctement un mot. Il existe des règles précises pour savoir où placer cet accent au sein d’un mot et, en cas de doute, il est toujours conseillé de se rapporter à un dictionnaire.
Mais au-delà des mots, ce sont des parties des énoncés eux-mêmes qui sont plus ou moins accentuées. Cette accentuation va dépendre pour partie de la volonté du locuteur d’insister sur tel ou tel mot mais également de la nature des mots de la phrase. Les anglophones accentuent généralement les mots lexicaux c’est-à-dire les mots qui apportent des informations de sens (ex : noms, adjectifs, …) ; tandis que les mots de structure (auxiliaires, pronoms, prépositions, …) ne le seront pas. Le francophone aura pour sa part tendance à s’appuyer sur ces mots grammaticaux. C’est un nouveau facteur de difficulté.
Les erreurs rythmiques sont les erreurs les plus communes et les plus gênantes commises par les locuteurs francophones. En effet, si un anglophone peut sans trop de peine comprendre un phonème mal articulé, il aura en revanche nettement plus de mal à comprendre un énoncé mal accentué. C’est ce que souligne Anne-Marie Voise (2001 : 30). Or, les francophones ont beaucoup de mal à se détacher du rythme du français : ils ont du mal à accentuer ou réduire la force d’une syllabe, en d’autres mots, ils ne savent pas où placer les accents toniques et comment les marquer à l’oral. Pire, même au niveau de l’agrégation, la majorité des candidats reproduisent le schéma rythmique du français ce qui donne une impression hachée de « staccato ».
Pour maîtriser l’anglais, les francophones doivent donc prendre garde à trois éléments.
D’abord au niveau des mots, il faut donner une force suffisante à la syllabe accentuée et lutter contre notre tendance naturelle à accentuer la dernière syllabe. Au niveau des phrases, il faut reproduire cette opposition fondamentale entre les syllabes accentuées et celles qui ne le sont pas. Ces dernières sont moins audibles, souvent prononcées plus rapidement. Enfin, une grande partie des mots grammaticaux inaccentués existent sous des formes réduites ou contractées. C’est par ce procédé que « I am » devient « I’m ». La réduction n’est pas nécessairement traduite graphiquement. Ainsi l’auxiliaire « can » se prononce /kBn/ dans sa forme réduite et /kZn/ dans sa forme pleine mais s’écrit toujours « can ». Ces formes réduites sont en réalité les formes communes, normales ; les formes pleines sont réservées à des cas spécifiques notamment pour marquer une insistance. Or les francophones, souvent attachés à la grammaire, sont déstabilisés par cet affaiblissement des mots grammaticaux. C’est pourquoi ils ont d’une part du mal à les percevoir quand ils sont en réception et, d’autre part,ils ont une forte tendance à prononcer tous ces mots dans leur forme pleine ce qui donne un caractère affecté à leur expression.
S’imprégner du rythme de la langue est donc un travail de longue haleine mais très utile. Il est un dernier élément caractéristique de la prosodie des langues dont on ne peut faire l’économie lors de l’apprentissage d’une LE : l’intonation.
L’intonation
Nous considérerons pour ce propos que l’intonation se caractérise par toutes les variations de hauteur de voix au niveau de la phrase. Par ces variations, plusieurs informations sont transmises. D’une part, l’intonation porte des informations linguistiques (c’est-à-dire sur le sens du texte) ; par exemple l’énoncé est-il une affirmation ou une question, le tour de parole est-il terminé ? D’autre part, l’intonation transmet des informations sur l’état émotionnel du locuteur (est-il surpris, inquiet, en colère, heureux, … ?) : c’est la fonction paralinguistique de l’intonation. Enfin, l’intonation peut traduire des traits de personnalité, une origine ethnique ou géographique, en d’autres termes des informations extralinguistiques.
Nous voyons dès lors se profiler une correspondance entre schémas mélodiques et langue et, comme Grabe ou Cruttenden cités par Wilhelm (2012), nous pouvons affirmer que l’intonation fait partie des éléments distinctifs d’une langue. Or, une fois encore, les systèmes français et anglais sont en opposition. La tendance générale pour l’intonation française est montante, a contrario l’intonation anglaise est dominée par le caractère descendant.
L’intonation française est cohérente avec le rythme de la langue française. En effet, c’est une fois encore la dernière syllabe qui portera la note la plus haute ou la plus basse de l’énoncé.
Une dichotomie profonde existe entre les schémas intonatifs qui annoncent la continuation de l’énoncé (ascendants) et ceux qui marquent la finalité (descendants). Les schémas ascendants peuvent traduire une question formulée à la forme affirmative (sans inversion sujet-verbe ou locution « est-ce que ») de même que l’étonnement ou la surprise, l’impatience voire l’enthousiasme. Les schémas descendants terminent l’énoncé (et suivent souvent une montée de l’intonation) ; ils sont également caractéristiques des questions introduites par un mot interrogatif (quand, combien, où, …) comme des phrases impératives. Les phrases complexes, avant de descendre, se caractérisent par des montées qui atteignent des notes de plus en plus basses.
Dans la conversation courante, le registre anglais couvre des hauteurs à la fois plus hautes et plus basses qu’en français. Par exemple, l’intonation monte fortement lors de l’utilisation de mots à sens forts (extraordinary, fantastically, …). Utiliser ces mots sans les accompagner de cette montée intonative traduit un sarcasme, une hypocrisie. De même, en fin d’énoncé, la descente est plus brutale qu’en français. Pour le reste, les anglophones ont une intonation descendante pour les phrases énonciatives courtes, les questions commençant par un mot interrogatif (who, when, where, what …) et les phrases impératives ; ils ont une intonation ascendante pour les questions fermées (« yes/no questions »), les énoncés introductifs, non achevés, les « question tags » (You’re late, aren’t you ?), les demandes polies. Un ton ascendant montre un intérêt, la bienveillance, la politesse.
Au terme de cette première partie, deux constats primordiaux peuvent être faits en termes d’apprentissage de l’anglais langue étrangère. D’une part, un travail phonétique approfondi, continu et de qualité est nécessaire pour éviter des erreurs de communication gênantes.
D’autre part, les profondes différences des systèmes français et anglais rendent l’apprentissage d’autant plus complexe.
Dès lors, comment, en tant que professeur non spécialisé dans l’enseignement de l’anglais LE, mettre en place un tel apprentissage ? Comment amener de jeunes élèves à bien prononcer en anglais ? Enfin, faut-il et peut-on mener un travail de correction phonétique avec de très jeunes élèves ? Si oui, en espérant quels résultats ?
Le « seuil fatidique »
C’est aux alentours de 10 ans que l’enfant va perdre une grande partie de sa capacité perceptive et c’est pourquoi on parle de « seuil fatidique ». Le crible phonologique est presque totalement figé et provoque de facto une surdité aux oppositions non discriminantes dans la LM mais qui le sont dans la LE. Cette fossilisation rend plus difficile l’accès à d’autres structures phonologiques.
A partir de cet âge, bien que l’apprentissage soit toujours possible, il sera bien plus compliqué et l’acquisition phonétique et phonologique de la LE demandera un long travail.
Ce que disent les textes officiels
Il s’agit ici de donner le cadre institutionnel de l’enseignement des langues à l’école. Je reviendrai brièvement sur l’histoire récente de l’enseignement des langues à l’école primaire pour ensuite envisager les textes actuellement applicables. Les nouveaux programmes entrant en application en septembre 2016, à la rentrée prochaine, je présenterai enfin les modifications qu’ils entraînent.
Retour sur l’histoire de l’enseignement des langues étrangères
L’enseignement des langues étrangères est présent dans les écoles sous forme d’expérimentation dès les années 1960. A la fin des années 80, dans un objectif de démocratisation, le dispositif d’Enseignement d’Initiation aux Langues Étrangères (EILE) est créé par Lionel Jospin. L’objectif déclaré est de permettre aux élèves d’« acquérir quelques réflexes sociolinguistiques qui leur permettront de s’initier à la langue étrangère et à la connaissance des sociétés qui la parlent dans le pays d’origine et dans d’autres pays du monde » (Circulaire n° 89-141 du 14 juin 1989). Ce dispositif s’adresse aux élèves de 9 à 11 ans (cycle 3). Ce dispositif est rapidement suivi par le plan Initiation aux Langues Vivantes (ILV) lancé en 1995 sous le ministère de François Bayrou, qui ouvre la possibilité de débuter l’ « initiation » dès le CE1. A l’origine, ce sont des enseignants en poste volontaires qui participent à cette initiation. Dès lors leur formation va devenir une priorité déclarée.
Toutefois, dans les faits, les enseignants restent peu formés. De surcroît, la mise en œuvre se faisant sur la base du volontariat, d’importantes disparités ont pu apparaître selon les territoires. Enfin, ces dispositifs ne s’accompagnaient pas d’évaluation ce qui va à l’encontre de tous les principes d’enseignement.
Ce sont les programmes de 2002 qui, pour la première fois, éditent des instructions en matière de langues étrangères et régionales . Ces textes ont vocation à s’appliquer pour tous les élèves:l’enseignement des langues étrangères et régionales devient obligatoire.
Les programmes de 2008 vont réaffirmer la place de l’enseignement des langues étrangères à l’école. Ce sont ces programmes qui s’appliquent encore au moment de la rédaction de ce rapport.
Les textes applicables
A la rentrée 2015
Le Bulletin Officiel n° 3 du 19 juin 2008 définit précisément les compétences, les objectifs et les dispositifs en matière d’enseignement des langues en lien avec le CECR. Le début de l’apprentissage est fixé au CE1 (7 ans) mais une « première sensibilisation » est recommandée à l’oral dès le CP. Il est précisé que « l’apprentissage des langues vivantes s’acquiert dès le début par une pratique régulière et par un entraînement de la mémoire. Ce qui implique de développer des comportements indispensables : curiosité, écoute, attention, mémorisation, confiance en soi dans l’utilisation d’une autre langue. Les élèves distinguent des réalités mélodiques et accentuelles d’une langue nouvelle ; ils découvrent et acquièrent du vocabulaire relatif à la personne et à la vie quotidienne ; ils utilisent progressivement quelques énoncés mémorisés. » Enfin les enseignants sont renvoyés à des tableaux de progressivité établis pour différentes langues.
L’apprentissage précoce des langues en pratique
Au-delà de l’approche théorique, il m’a semblé essentiel de regarder les résultats obtenus en matière d’apprentissage des LE et plus particulièrement du point de vue de la prononciation dans le cadre d’un apprentissage précoce.
Les résultats observables
Ces résultats ne peuvent s’apprécier qu’en regard des résultats obtenus par un apprentissage plus tardif de la langue étrangère. Et ils sont en demi-teinte. Il apparaît qu’un apprentissage précoce est un apprentissage plus long mais ça ne signifie pas pour autant qu’il est plus efficace. Ainsi, en ce qui concerne la seule vitesse d’apprentissage, les apprenants plus tardifs montrent de meilleurs résultats que les apprenants précoces. Ce résultat n’est pas surprenant si on considère qu’il est le reflet du développement cognitif général.
On peut dès lors se demander si les apprenants précoces finissent par rattraper et dépasser les apprenants tardifs. Les résultats disponibles ne sont pas tranchés. D’une part, plusieurs études montrent un nivellement. C’est le cas par exemple en ce qui concerne la discrimination phonémique : Fullana cité par Lambelet et Berthele (2014 : 44) met en exergue en 2006 un avantage pour les apprenants tardifs après 200 heures d’enseignement, mais constate une inversion de la tendance en faveur des apprenants précoces à partir de 416 heures. Toutefois ces résultats n’apparaissent pas dans toutes les études.
En ce qui concerne le niveau atteint par les apprenants précoces et tardifs, les études dressent également une situation relativement peu avantageuse pour l’enseignement précoce. En effet, il apparaît qu’un âge plus précoce ne garantit pas l’atteinte d’une compétence linguistique plus élevée.
En revanche, du point de vue de la prononciation, on pourrait s’attendre à de bien meilleurs résultats de la part des apprenants précoces. Le crible phonologique encore partiellement ouvert est la principale justification de cet apprentissage précoce. Or là encore les résultats sont finalement peu probants. Si les apprenants précoces montrent globalement une meilleure capacité de discrimination auditive, ils n’en ont pas pour autant acquis une meilleure prononciation que les apprenants plus tardifs ; sauf dans les cas où les élèves ont bénéficié d’une véritable correction phonétique.
En regard de ces résultats, il apparaît que la qualité de l’enseignement prime sur l’âge de début d’apprentissage. Du seul point de vue de la discrimination auditive cependant, un apprentissage dès le plus jeune âge de l’enfant (soit le cycle 1) se révèle pertinent. Quelques conseils peuvent être donnés aux enseignants pour éviter les principaux écueils de l’apprentissage précoce des langues étrangères et ainsi le rendre le plus efficace.
Conseils et écueils pour l’apprentissage précoce des langues
Les différences procédurales d’apprentissage entre les apprenants précoces et les tardifs expliquent les différences constatées entre ces deux groupes en termes de vitesse d’apprentissage et de niveau maximal atteint. Ces différences ont conduit les auteurs à préconiser un enseignement précoce différent. Ainsi, il semble avantageux de n’introduire que progressivement (et plus tardivement) un enseignement explicite de la langue-cible et de ses structures grammaticales. Il a aussi été conseillé de favoriser des approches communicatives permettant de donner aux élèves la possibilité d’expérimenter des situations similaires à l’acquisition en contexte naturel . Ces approches ont été largement critiquées notamment car elles risquent d’induire des erreurs fossilisées chez les apprenants. En outre, elles nécessitent un très grand nombre d’heures d’exposition qu’il n’est matériellement pas possible de mettre en place en classe.
Les auteurs s’accordent néanmoins à dire que l’enseignement des langues aux jeunes enfants doit se concentrer sur les champs d’expérience immédiats des élèves : les activités langagières doivent avoir du sens pour ces apprenants. Il faut également veiller à proposer des activités impliquant plusieurs sens (ouïe, vue, toucher, odorat, goût). Il ne faut pas oublier l’importance du corps et des gestes dans les processus d’apprentissage. Il est par conséquent recommandé de mettre en place des situations qui encouragent le mouvement, la créativité et l’expérimentation des élèves. Ainsi la musique, la danse, les chansons et comptines doivent être privilégiées. C’est également la motivation des élèves qui est visée par ces processus. En effet, sans cet élément, tout apprentissage est voué à l’échec.
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Table des matières
Introduction
1 Phonétique et phonologie comparées du français et de l’anglais : des erreurs expliquées
1.1 De l’importance de la prononciation dans l’apprentissage d’une langue
1.1.1 Quelques définitions
1.1.2 Les apports de Roman Jakobson
1.1.3 La place de la phonétique et de la phonologie dans l’apprentissage d’une langue étrangère à l’école primaire en France
1.2 Eléments de comparaison des systèmes anglais et français
1.2.1 Les phonèmes des deux langues
1.2.2 La phonétique articulatoire
1.2.3 Le rythme et l’accentuation
1.2.4 L’intonation
2 De l’apprentissage précoce des langues étrangères
2.1 La question du début de l’apprentissage
2.1.1 Ce que disent les auteurs
2.1.2 Ce que disent les textes officiels
2.2 L’apprentissage précoce des langues en pratique
2.2.1 Les résultats observables
2.2.2 Conseils et écueils pour l’apprentissage précoce des langues
3 Méthodologie
3.1 Participants
3.1.1 L’enseignante
3.1.2 Les élèves
3.2 Procédure et résultats obtenus
3.2.1 Le travail personnel engagé
3.2.2 Le travail proposé aux élèves
4 Conclusion : limites et perspectives
4.1 Limites au travail mené
4.2 Perspectives possibles et impact sur ma pratique enseignante
Bibliographie