Éléments constitutifs de la chaussée

Le coefficient de Poisson

D’un point de vue théorique, selon Tschoegl et coll. (2002), le coefficient de Poisson des matériaux viscoélastiques dépend de la température et de la fréquence de sollicitation. Des mesures directes de  sur éprouvettes cylindriques, sollicitées en traction-compression sinusoïdale, tendent à montrer que sa partie imaginaire est très petite (Charif, 1991).

Les travaux de Di Benedetto et coll. (2007) effectués sur un mélange bitumineux précisent que, contrairement aux hypothèses couramment considérées, le coefficient de Poisson n’est ni une constante ni un nombre réel. La figure 2.8 présente un exemple de mesures du coefficient de Poisson effectuées sur un enrobé bitumineux pour 6 températures, sous 6 fréquences de sollicitations. Les résultats montrent que la norme |*| varie entre 0,25 pour les hautes fréquences ou les basses températures et 0,5 pour les basses fréquences ou les hautes températures.

Le coefficient de Poisson diminue lorsque la température diminue ou lorsque la fréquence augmente. Au cours de cette étude, l’angle de phase du coefficient de Poisson a montré un faible retard compris entre 1° et 6°. Chailleux et coll. (2011) proposent un modèle pour le coefficient de Poisson complexe en fonction du module complexe E* et des extensions élastiques à l’infini de E* et de *. Ce modèle est présenté à l’équation 2-13. Cette formule rend compte à la fois de la variabilité de  par rapport à la fréquence et à la température à travers les variations de E*.

Comportement à long terme des structures de chaussées

Au passage du trafic lourd, la chaussée est soumise à des sollicitations de courtes durées qui sont répétées en réponse aux passages successifs des essieux des véhicules. En fonction du nombre de répétitions de charge et de l’amplitude des sollicitations, de la fissuration et de l’orniérage peuvent apparaitre dans la structure de chaussée.

Deux types de fissuration, caractérisés par leur mécanisme d’initiation et de propagation, peuvent être définis. Le premier type de fissuration est engendré par la flexion des couches bitumineuses, imposée lors de chaque passage des charges. Comme illustré à la figure 2.2, cette flexion impose une contrainte en traction et par conséquent une déformation en extension à la base du revêtement. En réponse à la répétition des sollicitations, des microfissures apparaissent et peuvent à long terme aboutir à l’amorce d’une fissure. La succession des charges a pour effet de la propager vers le haut, jusqu’à ce qu’elle atteigne la surface de la chaussée.

Cette fissuration est appelée « fissuration de fatigue » ou « fissuration par le bas ». Le second type de fissuration s’amorce dans les premiers centimètres sous la surface de la chaussée et se propage vers la base du revêtement. Ces fissurations sont appelées : « fissuration par le haut » ou « top-down cracking (TDC) ». Les mécanismes à l’origine de ces fissurations sont détaillés par la suite. Outre la fissuration, les passages successifs des charges peuvent entrainer une déformation permanente du profil transversal de la chaussée.

Ce phénomène, appelé orniérage des chaussées, se divise en deux catégories. Dans un premier temps, les déplacements de la surface peuvent provenir du tassement des couches structurales non liées (matériau granulaire) et du sol d’infrastructure. La répétition des contraintes verticales appliquées au sommet de ces couches engendre des déformations permanentes au matériau ce qui forme des ornières dites structurales (ou ornières à grands rayons).

La deuxième catégorie d’ornière est issue de l’accumulation des déformations permanentes dans les couches bitumineuses. Sous l’effet des charges lourdes, principalement lorsque le trafic est lent et canalisé et que les températures extérieures sont élevées, l’enrobé bitumineux est amené à fluer. Le fluage des couches de surfaces engendre des ornières à petits rayons, de la largeur des bandes de roulement, qui s’accompagnent d’une formation de bourrelets latéraux. La chaussée est aussi soumise à d’autres dégradations causées principalement par le climat (fissuration thermique, soulèvement au gel), par une mauvaise mise en oeuvre (fissuration, nid de poule) ou aussi par une mauvaise formulation des enrobés (ressuage, désenrobage). Ces dernières ne sont pas détaillées par la suite puisqu’elles ne sont pas les conséquences directes des charges du trafic.

Ornière structurale

Lorsque les matériaux granulaires et les sols sont soumis à des contraintes externes, ils ont un comportement élastoplastique. L’application d’une charge sur ces matériaux génère une déformation totale qui se divise en deux composantes : la déformation réversible (réponse élastique) et la déformation permanente (déformation plastique).

L’orniérage structural apparait en surface de la structure de chaussée lorsque la déformation permanente s’accumule au niveau des matériaux granulaires et des sols. Ce type d’ornière est aussi appelé ornière à grand rayon. Les facteurs influençant la déformation permanente d’un matériau granulaire sont les suivants (Poupart, 2013) : la rotation des contraintes au passage de la charge, le niveau de contraintes appliqué ainsi que l’historique des contraintes, les caractéristiques physiques et mécaniques des matériaux granulaires telles que la masse volumique sèche, la granulométrie, la morphologie et la texture des particules granulaires et enfin les conditions environnementales et la teneur en eau.

La durée de vie d’une chaussée en orniérage est directement liée à la déformation verticale appliquée au sommet de la couche du matériau considéré. Les différentes lois d’endommagement liées à la déformation permanente se présentent sous la forme donnée à l’équation 2-24. Plusieurs modèles existent comme celui de l’Asphalt Institute (Asphalt Institute, 1982), le modèle du logiciel de dimensionnement MnPave (Minnesota Department of Transportation, 2012) ou encore le modèle de Roadent (Timm et coll., 1999). Pour chacun de ces modèles, le nombre d’applications de charge admissible avant la rupture est associé à une profondeur d’ornière maximale. Cette valeur est souvent prise égale à 12,7 mm.

Forme des empreintes de pneu

Un pneu se définit par sa bande de roulement qui correspond à la surface entre les deux arêtes extérieures du pneu. Dans la bande de roulement, les rainures du pneu imposent une sculpture propre à chaque type de pneu. Ces rainures définissent les limites des nervures du pneu. La figure 2.14 montre un exemple d’empreinte de pneu où trois rainures parallèles définissent les quatre nervures du pneu. D’autres rainures moins profondes divisent les nervures du pneu en bloc. L’approche classique utilisée pour les calculs de distribution de la contrainte dans les couches de la chaussée pose les hypothèses suivantes : l’aire de contact entre le pneu et la chaussée est de forme circulaire, la distribution des contraintes est uniforme et uniquement orientée perpendiculairement à la surface de contact (direction verticale suivant l’axe Z) et la charge est supposée statique. La pression de contact est également supposée égale à la pression de gonflage. Expliquer les phénomènes d’endommagement s’exerçant en surface des couches bitumineuses requiert de reconsidérer ces hypothèses.

La répartition des contraintes appliquées au contact pneu-chaussée est influencée par : le type de pneu (large, jumelé, radial, biais), la pression dans le pneu (pression recommandée par le fabricant, un sous-gonflage, un surgonflage), la charge distribuée par le pneu, sa sculpture (nervure et rainure) et ses propriétés mécaniques (type de caoutchouc).

La figure 2.14 présente la distribution des pressions de contact pour un même pneu, sous une même charge, mais pour deux pressions de gonflage différentes. La baisse de pression a imposé une augmentation de l’empreinte de pneu dans la direction longitudinale (de roulement), mais également une redistribution des pressions de contact. Lorsque le pneu est gonflé à une pression de 690 kPa, les pressions maximales se situent au centre du pneu. Lorsque la pression de gonflage diminue, la charge se répartit à travers la structure latérale du pneu et entraine une augmentation des pressions de contact au bord des pneus.

Les hypothèses simplificatrices considérant une charge circulaire ne peuvent donc pas s’appliquer lorsque les analyses portent sur la répartition des déformations et des contraintes dans les premiers centimètres de la structure de chaussée. Afin de caractériser l’endommagement s’amorçant en surface, il est nécessaire de considérer à la fois la forme générale du pneu (forme rectangulaire), mais aussi la distribution des nervures et la répartition des contraintes au contact.

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Table des matières

Chapitre 1 Introduction et problématique
1.1 Mise en contexte et problématique
1.2 Objectifs de la recherche
1.3 Organisation du document
1.4 Terminologie et convention de signes
Chapitre 2 Revue de littérature
2.1 Méthodes de conception
2.1.1 Méthodes mécanistes-empiriques de conception
2.1.2 Méthode française de dimensionnement
2.1.3 Méthode de dimensionnement nord-américaine
2.1.4 Synthèse
2.2 Généralité sur les chaussées souples
2.2.1 Éléments constitutifs de la chaussée
2.2.2 Effet d’une charge sur la chaussée
2.2.3 Synthèse
2.3 Comportement en petites déformations des enrobés bitumineux
2.3.1 Généralité
2.3.2 Le module complexe
2.3.3 Modélisation du comportement des enrobés bitumineux dans le domaine viscoélastique linéaire
2.3.4 Le coefficient de Poisson
2.4 Comportement à long terme des structures de chaussées
2.4.1 Fissuration des enrobés bitumineux
2.4.2 Orniérage des chaussées
2.5 Essais caractérisant la réponse mécanique et à long terme de la structure de chaussée
2.5.1 Essais de laboratoire
2.5.2 Essais en vraie grandeur
2.5.3 Synthèse
2.6 Caractéristiques des charges
2.6.1 Configurations des différents types d’essieux
2.6.2 Configurations des pneus
2.6.3 Interaction entre le pneu et la chaussée
2.6.4 Synthèse
2.7 Outils de calcul et de modélisation de chaussées
2.7.1 Outils de calcul
2.7.2 Le logiciel ViscoRoute© 2.0
2.7.3 Validation du logiciel
2.7.4 Synthèse
2.8 Instrumentation des chaussées
2.8.1 Problématique liée à l’instrumentation des chaussées
2.8.2 Capteurs de déformations à la base des couches bitumineuses
2.8.3 Instrumentation des couches bitumineuses proche de la surface
2.8.4 Synthèse
2.9 Interfaces entre les couches de la chaussée
2.9.1 La couche d’accrochage
2.9.2 Effet des conditions d’interface
2.9.3 Analyse des déformations au niveau des interfaces
2.10 Conclusion
Chapitre 3 Essais en vraie grandeur : démarche expérimentale, procédure, modélisation et mesures à la base du revêtement
3.1 Présentation et objectifs
3.2 Campagnes de mesures
3.2.1 Campagne no 1 : développement et validation des protocoles expérimentaux
3.2.2 Campagne no 2 : caractérisation de la réponse mécanique des structures sous charges multiessieux
3.2.3 Campagne no 3 : étude paramétrique et développement des modélisations
3.3 Modélisation viscoélastique sous le logiciel ViscoRoute© 2.0
3.3.1 Paramètres de charge
3.3.2 Propriétés des matériaux
3.4 Déformations longitudinales et transversales à la base des couches bitumineuses
3.4.1 Signaux caractéristiques
3.4.2 Effet de la position des pneus
3.4.3 Développement d’un outil de traitement de données
3.4.4 Effet des paramètres de charge sur la mesure des amplitudes maximales de déformation
3.5 Conclusion
Chapitre 4 Instrumentation des structures de chaussée
4.1 Présentation et objectifs
4.2 Instrumentation des matériaux non liés
4.2.1 Capteurs de déformations pour les sols et matériaux granulaires
4.2.2 Capteurs de température
4.3 Instrumentation des enrobés bitumineux
4.3.1 Capteurs résistifs
4.3.2 Capteurs à fibre optique
4.3.3 Instrumentation d’une carotte d’enrobé bitumineux
4.3.4 Instrumentation d’une plaque de déformation multiniveau
4.4 Validation des capteurs de déformation
4.4.1 Analyse de la répétabilité de la mesure des jauges à fibre optique.
4.4.2 Analyse de la dispersion des jauges des plaques instrumentées.
4.4.3 Analyse comparative entre les différents types de capteurs
4.4.4 Discussion
4.5 Conclusion
Chapitre 5 Analyse des déformations à faible profondeur sous la surface
5.1 Présentation et objectifs
5.2 Analyse des déformations longitudinales à faible profondeur (10 à 20 mm sous la surface)
5.2.1 Signaux caractéristiques et bassins des déformations pour un essieu simple
5.2.2 Effet des paramètres de charge sur les déformations longitudinales
5.2.3 Signaux caractéristiques pour un essieu tridem
5.2.4 Synthèse et enseignements
5.3 Analyse des déformations transversales à faible profondeur (10 à 20 mm sous la surface)
5.3.1 Signaux caractéristiques et bassin des déformations pour un essieu simple
5.3.2 Signaux caractéristiques et bassin des déformations pour un essieu tridem
5.3.3 Effet des paramètres de charge sur les déformations transversales
5.3.4 Synthèse et enseignements
5.4 Analyse des déformations verticales à faible profondeur (20 à 30 mm sous la surface)
5.4.1 Signaux caractéristiques et bassin des déformations pour un essieu simple
5.4.2 Signaux caractéristiques et bassin des déformations pour un essieu tridem
5.4.3 Effet des paramètres de charge sur les amplitudes maximales
5.4.4 Synthèse et enseignements
5.5 Analyse du cisaillement et de la contrainte de cisaillement à faible profondeur (20 mm sous la surface
5.5.1 Distribution du cisaillement sous la charge
5.5.2 Effet des paramètres de charge et des conditions environnementales
5.5.3 Synthèse
5.6 Conclusion
Chapitre 6 Modélisation, analyse et effet de la viscoélasticité de l’interface
6.1 Présentation et objectifs
6.2 Modélisation de l’interface entre deux couches bitumineuses
6.2.1 Interface collée et interface viscoélastique
6.2.2 Paramètres de modélisation de l’interface viscoélastique
6.2.3 Analyse qualitative du comportement d’une interface viscoélastique
6.3 Analyse des déformations de part et d’autre de l’interface
6.3.1 Analyse des déformations transversales
6.3.2 Analyse des déformations longitudinales
6.3.3 Effet des paramètres de charge sur les déformations
6.3.4 Synthèse et enseignements
6.4 Effet de la viscoélasticité de l’interface sur la distribution des contraintes et des déformations
6.4.1 Distribution des contraintes dans la structure en fonction de la température et des conditions d’interface
6.4.2 Distribution des déformations en fonction des conditions d’interface
6.4.3 Synthèse et enseignements
6.5 Détermination de l’épaisseur de modélisation de la couche d’interface
6.6 Conclusion
Chapitre 7 Mise en application du modèle de comportement viscoélastique de l’interface et discussion
7.1 Présentation et objectifs
7.2 Mise en application du modèle de comportement viscoélastique de l’interface
7.2.1 Présentation des cas simulés
7.2.2 Analyse des déformations à la base des couches bitumineuses
7.2.3 Approche énergétique
7.2.4 Analyse du chemin des contraintes au passage d’un essieu tridem
7.2.5 Synthèse et enseignements
7.3 Discussion
7.3.1 Principales avancées dans le domaine
7.3.2 Applicabilité
7.3.3 Critique objective et limite des travaux
7.3.4 Recherches futures
Chapitre 8 Conclusion
Bibliographie
Annexe 1 Matrice expérimentale des campagnes de mesures
Annexe 2 Résultats de caractérisation des matériaux de chaussées des structures du manège de fatigue de l’IFSTTAR
Annexe 3 Localisation des points de mesures sous le pneu
Annexe 4 Température dans les structures de chaussées des sections A et B
Annexe 5 Protocole d’installation des carottes instrumentées
Annexe 6 Résultats : Bassin des déformations
Annexe 7 Étude paramétrique de l’épaisseur de modélisation de la couche d’interface

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