Élaboration théorique d’une aide à la création d’une séquence d’enseignement en relativité restreinte

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Potentialités didactiques des graphiques

L’effet Doppler est mis en évidence lorsqu’un émetteur d’ondes électromagnétiques ou mécaniques périodiques est en mouvement relatif par rapport à un observateur. Dans ce cas-là, la fréquence de réception est perçue différemment de la fréquence d’émission. Cela explique par exemple que le son d’une sirène d’ambulance est perçu plus aigu lorsqu’elle se rapproche d’un observateur sur le bord de la route et plus grave lorsqu’elle s’en éloigne.
En observant, par exemple, une image représentant l’effet Doppler (voir figure 8), on s’aperçoit que la distance d, entre l’émetteur et l’observateur, placée sur le graphique donne de l’importance à un paramètre qui n’intervient pas dans la formule de transformation des fréquences. De même on voit « un train d’onde », avec la représentation des longueurs d’onde et ’, qui devient un objet qui se transforme sans que l’on sache pourquoi. Ce phénomène est accentué par la confusion des référentiels, car « le train d’onde » associé à la longueur d’onde est représenté dans le référentiel de l’émetteur et celui qui est associé à la longueur d’onde ’ l’est dans le référentiel de l’observateur sans que cela soit bien explicité sur l’image.
Une nouvelle représentation graphique du phénomène de l’effet Doppler dans laquelle la distance d n’a plus la même importance et pour laquelle on n’observe plus de confusion de référentiels a été proposée par Leroy-Bury et Viennot (2003).
On considère une source se déplaçant suivant une demi-droite orientée Ox. Le récepteur est placé à une distance d de la source sur cette demi-droite.
La source et le récepteur sont immobiles par rapport au référentiel terrestre (voir figure 9), c’est pour cela que les demi-droites représentant leurs positions au cours du temps sont parallèles à l’axe des abscisses. La source émet des bips réguliers séparés d’une durée TS qui correspond à la période de la source. Le signal se propage jusqu’au récepteur (il aurait pu se propager dans les deux sens, celui des x positifs et celui des x négatifs mais on ne représente que ce qui est pertinent pour le problème). Ceci est représenté par les segments appelés « signal ». La pente de ces segments correspond à la vitesse du signal dans le milieu de propagation considéré. Le récepteur reçoit un bip lorsqu’un segment « signal » rencontre la demi-droite associée aux positions au cours du temps du récepteur. Le graphique permet ensuite de repérer la période du signal perçu par le récepteur, notée TR. Ici TR = TS car la source et le récepteur sont immobiles par rapport au référentiel terrestre.
Ici le récepteur est immobile et la source s’éloigne de lui (voir figure 10). Il est possible de trouver la vitesse de la source par rapport au récepteur à partir de la pente de la demi-droite représentant les positions de la source au cours du temps. La source émet également des bips réguliers séparés d’une durée TS. Comme tout à l’heure, le signal se propage jusqu’au récepteur. Il est possible de connaitre également sa vitesse par rapport au référentiel terrestre grâce à la pente des segments nommés « signal ». Dans ce cas, la construction graphique montre que TR > TS ce qui veut dire que la fréquence du signal perçu par le récepteur est plus petite que la fréquence du signal émis par la source (la fréquence est inversement proportionnelle à la période).
La relativité de la simultanéité de deux événements dans le cadre de la théorie de la relativité restreinte peut également être mise en évidence par une méthode graphique (voir figure 11). Un événement est caractérisé par quatre coordonnées : trois coordonnées d’espace et une coordonnée de temps. Les situations étudiées sont bien souvent limitées au déplacement d’un référentiel par rapport à un autre suivant une seule coordonnée de l’espace, x par exemple, par souci de simplification. L’étude des coordonnées d’un événement E est ainsi limitée à l’étude des coordonnées x et t.
Dans un graphique d’espace-temps (x, c.t), un événement est un simple point et les lignes d’univers correspondent aux positions d’une particule au cours du temps. Une particule immobile a donc une ligne d’univers verticale. La ligne d’univers d’un photon est parallèle à la bissectrice de l’angle formé par Ox et Oc.t qui a pour équation x = c.t si les photons se déplacent dans le sens des x croissants. Elle peut aussi être parallèle à la bissectrice de l’angle formé par – Ox et Oc.t si les photons se déplacent suivant le sens des x décroissants.
Une particule en mouvement ne peut pas avoir une ligne d’univers qui a une pente plus faible que la ligne d’univers d’un photon lorsque le déplacement se fait suivant les valeurs de x croissantes (ou une pente plus grande dans le cas d’un déplacement suivant les valeurs de x décroissantes).
En effet, dans le cas d’un mouvement suivant les valeurs de x croissantes, la ligne d’univers d’une particule de vitesse v a pour équation : x = v.t
Cette équation peut s’écrire également : cv.x = c.t
Si la pente de cette droite est plus petite que celle de la droite d’équation x = c.t, cela entraîne obligatoirement que : vc < 1 et donc c < v ce qui n’est pas possible.
Kermen et de Hosson (2013) ont traduit graphiquement la situation d’une vidéo disponible à l’adresse suivante : www.youtube.com/watch?v=wteiuxyqtoM
Cette vidéo décrit un train qui se déplace en ligne droite et avec une vitesse constante le long d’un quai avec une vitesse proche de c. Une passagère est située au milieu du train et un observateur se trouve immobile le long du quai. Lorsque le milieu du train coïncide avec la position de l’observateur sur le quai, deux éclairs frappent simultanément pour cet observateur l’avant et l’arrière du train (voir figure 12).
La passagère du train est atteinte en premier par le front d’onde émis par l’éclair à l’avant du train (voir figure 13). Comme elle se trouve au milieu du train, les distances à parcourir par chaque front d’onde sont égales. Cela veut dire que par rapport à la passagère du train, l’éclair a frappé l’avant du train avant l’éclair qui a frappé l’arrière du train.
La résolution graphique de cette situation est déclinée en deux parties avec un graphique dans le référentiel du quai (voir figure 14) et un autre dans le référentiel du train (voir figure 15).
Le graphique d’espace-temps comportant un repère (x, c.t) dans le référentiel du quai est représenté sur la figure 14. La ligne d’univers de l’observateur est une demi-droite verticale. Les lignes d’univers de l’avant, l’arrière et la passagère du train sont représentées par des demi-droites obliques vers la droite, car le train s’éloigne de l’observateur dans le sens des valeurs de x croissantes.
A l’instant t0, pris pour origine des dates, les éclairs frappent simultanément l’avant et l’arrière du train dans le référentiel du quai. De même à cet instant, la position de l’observateur sur le quai coïncide avec la position de la passagère dans le train. Les lignes d’univers des photons se déplaçant dans le sens des x croissants ou décroissants sont également représentées pour les deux éclairs.
On remarque sur la construction graphique que l’instant t1 correspond au temps pour lequel la lumière issue de l’éclair ayant frappé l’avant du train arrive au niveau de la passagère. t2 est associé à l’instant pour lequel la lumière créée par les deux éclairs arrive simultanément au niveau de l’observateur resté sur le quai. Enfin l’instant t3 est associé à l’arrivée, au niveau de la passagère, de la lumière créée par l’éclair ayant touché l’arrière du train. Comme t1 < t3 on observe graphiquement que la passagère perçoit d’abord la lumière issue de l’éclair ayant touché l’avant du train. Comme elle se trouve au milieu du train, pour elle, l’éclair ayant touché l’avant du train a eu lieu avant l’éclair ayant touché l’arrière du train.
La figure 15 est relative au graphique d’espace-temps dans le référentiel du train en utilisant un repère (x’, c.t’). Les lignes d’univers de l’avant, de l’arrière et de la passagère du train sont des demi-droites verticales cette fois-ci. La ligne d’univers de l’observateur resté sur le quai est une demi-droite oblique vers la gauche car l’observateur s’éloigne du train dans le sens des valeurs de x’ décroissantes.

Les diagrammes d’espace-temps : représenter des situations relativistes

Consubstantialité des diagrammes et de la théorie de la relativité restreinte10

L’histoire de la théorie de la relativité restreinte confirme un lien étroit entre les mathématiques et les sciences physiques. Dans la suite de notre étude, nous avons considéré à chaque fois, par souci de simplification, deux référentiels R et R’ en mouvement de translation rectiligne uniforme l’un par rapport à l’autre. Chaque référentiel possède un repère associé, Oxyz pour R et O’x’y’z’ pour R’. Les axes Ox et O’x’ sont ainsi confondus. R’ se déplace à une vitesse v par rapport à R suivant Ox. Les coordonnées de y, z, y’ ou z’ ont été à chaque fois inchangées (voir figure 19). Les origines spatiales O et O’ des deux référentiels coïncident en t = t’ = 0.
Les transformations dites de Galilée permettent d’exprimer les coordonnées d’un point situé dans le repère d’un référentiel particulier R, dans le repère d’un autre référentiel particulier R’. Ces référentiels, nommés référentiels galiléens, vérifient la propriété selon laquelle tout corps conserve son état de repos ou de mouvement rectiligne uniforme, en l’absence de force extérieure agissant sur lui. Les référentiels galiléens se déduisent les uns des autres par un mouvement rectiligne uniforme. Les équations de transformation entre ces deux référentiels R et R’ s’écrivent alors : Dans cette transformation, le temps est absolu. Néanmoins, les équations de Maxwell ne sont pas invariantes par les transformations de Galilée. Pour régler ce problème épineux, plusieurs stratégies ont été évoquées au XIXe siècle :
– Il faut admettre que la théorie de l’électromagnétisme de Maxwell est fausse.
– Il est nécessaire de chercher à rendre compatibles les postulats de la mécanique classique et de l’électromagnétisme.
– Il faut admettre que les postulats de la mécanique classique sont faux.

Description de la seconde séquence pilote liant approche géométrique et relativité restreinte

Le registre diagrammatique va donc être privilégié, c’est-à-dire que les concepts de la relativité restreinte sont introduits grâce au diagramme (événements, simultanéité, durée propre avec les événements E1 et E2, durée impropre). La résolution graphique a ici le statut de preuve, c’est-à-dire que l’utilisation du diagramme est suffisante pour tirer des conclusions. Les valeurs numériques utilisées sont choisies de façon à être réalistes et le travail sur les ordres chronologiques relatifs est favorisé par l’inversion de l’ordre temporel de deux événements E2 et E3 en fonction du référentiel considéré. Cela permet de montrer que deux événements peuvent être totalement indépendants.
Contexte de l’activité
Il s’agit d’une séquence d’enseignement sur la relativité restreinte dans le cadre du programme de TS. 34 élèves (sur une classe de 35) de terminale S du lycée Boucher de Perthes à Abbeville (Somme) y ont participé. La séquence est constituée de deux séances en groupe à effectifs réduits (1H30 à 1H45 chacune) qui ont eu lieu sur deux semaines consécutives (3H00 à 3H30 en tout). La séquence a été filmée et enregistrée à l’aide d’une caméra et de plusieurs enregistreurs audio.
Les notions de relativité restreinte exigibles au programme officiel avaient déjà été enseignées aux élèves ainsi qu’une séance d’exercices corrigés. Il manquait, dans le cadre du programme de terminale S, une activité en relation avec une situation concrète où le caractère relatif du temps est à prendre en compte.
Il faut préciser ici que l’enseignant est l’auteur de la thèse, donc, le chercheur. La posture de chercheur – professeur a été décrite par Santini (2013) et initialement par Sensevy (1998). Cette association complexe permet de lutter contre deux obstacles : l’obstacle empiriste venant du côté « professeur » et l’obstacle intellectualiste venant du côté « chercheur ». La posture de chercheur-professeur nécessite de mettre en tension deux points de vue différents dans le champ de la didactique : le point de vue de l’enseignant de la classe et le point de vue du chercheur en didactique.
Document distribué aux élèves
Un document est distribué. Il comprend le contexte, trois questions, le rappel de la relation entre durée propre et durée impropre, un diagramme de Minkowski relatif à la situation étudiée et un diagramme de Loedel gradué sur les deux repères.
L’énoncé est le suivant : « Une route horizontale comporte trois dispositifs émettant des flashs lumineux afin de repérer un danger. Daniel est immobile sur le côté de la route qui peut être modélisée par une droite Ox orientée. Une voiture conduite par Armineh, se déplaçant à une vitesse de + 0,8.c, passe sur la route à côté de Daniel et se dirige vers les dispositifs lumineux. L’origine des dates et des positions correspond à l’événement pour lequel Daniel et Armineh se trouvent à la même abscisse. En se plaçant dans le référentiel de Daniel, les deux premiers dispositifs notés S1 et S2 se trouvent à + 3 mètres de Daniel et le troisième, noté S3, se trouve à + 9 mètres de lui. S1 émet un flash au bout de 10 ns, S2 au bout de 23 ns et S3 au bout de 27 ns ».
Des questions sont posées à la suite :
Pourquoi est-il impossible de fabriquer un dispositif14 permettant de déclencher le flash S3 4 ns après le déclenchement du flash S2 ?
On veut travailler ici sur les ordres chronologiques relatifs en montrant que l’ordre des événements E2 et E3 peut changer en fonction du référentiel.
Quelle est la durée entre l’émission du flash de S2 et du flash de S1 dans le référentiel associé à Daniel15 ? Dans le référentiel associé à Armineh ?
On veut travailler ici sur la notion de durée propre dans le référentiel associé à Daniel et de durée impropre dans le référentiel associé à Armineh. Cette question correspond à une situation où la relation entre la durée propre et la durée impropre vue en cours de terminale S est applicable. La relativité des durées est donc travaillée ici.
Quelle est la durée entre l’émission du flash de S3 et du flash de S2 dans le référentiel associé à Daniel ? Dans le référentiel associé à Armineh ?
Cette question correspond à une situation où aucune durée propre n’apparaît. La relation entre la durée propre et la durée impropre vue en cours de terminale S n’est donc plus applicable. La relativité des durées est aussi travaillée ici. Les événements E2 et E3 ont été choisis de façon à ce que leur ordre chronologique soit inversé dans les deux référentiels étudiés.

Hypothèses microdidactiques

Ce sont des stratégies adoptées lors de la chronologie a priori de la séquence précédente afin de faciliter la compréhension des concepts introduits.
La construction pas à pas du diagramme de Minkowski en utilisant au tout début un repère (xOc.t) orthonormé est justifiée par l’hypothèse d’une meilleure appropriation des diagrammes d’espace-temps par les élèves. Puis, la construction de l’axe Oc.t’, le placement de l’axe x = c.t et la construction de l’axe Ox’ permettent une exploitation du second postulat par les élèves (en lien avec l’hypothèse macro-didactique a). Le placement des événements dans (xOc.t), les règles de construction parallèlement aux axes et le travail sur la chronologie des événements permettent une meilleure appropriation du concept d’ordre chronologique relatif et l’utilisation concrète et effective du concept d’événement comme un point de l’espace-temps (en lien avec les hypothèses macro-didactiques a et c).
En ce qui concerne le diagramme de Loedel, comme il est déjà donné et que les règles de construction parallèlement aux axes sont identiques à celles du diagramme de Minkowski, nous avons supposé que cela conduirait à une meilleure appropriation de ce diagramme. Le travail des élèves sur le placement des événements dans (xOc.t) et sur la détermination des durées, le diagramme de Loedel ayant la particularité d’avoir ses échelles conservées, permet aux élèves une approche géométrique sur la notion de durée plus accessible, car « visuelle ». Cela permet d’avoir une autre compréhension des notions de durées propre et impropre (en lien avec l’hypothèse macro-didactique b).

L’analyse a posteriori

Etablissement de la grille d’analyse

La séquence d’enseignement a été en grande partie retranscrite et le contenu a été analysé en découpant le corpus en éléments de signification de l’ordre de la phrase. Une grille d’analyse empirique, détaillée en annexe, a été développée après avoir recueilli et commencé à étudier les données. L’affinage des catégories a été développé empiriquement au fur et à mesure de la lecture du corpus comme décrit dans l’approche de la Grounded Theory citée par Guillemette (2006). Seules les difficultés probables des élèves avec l’outil graphique, leurs réussites et la prise en compte du registre étaient initialement envisagées. A la lecture des verbatim, le codage s’est affiné en prenant en compte les difficultés comme les réussites des élèves, les apports de connaissances comme le questionnement de l’enseignant ainsi que ses changements de stratégies entre les deux groupes. La quasi-totalité du corpus a été traité. La précision du codage s’est arrêtée au niveau de la phrase. Lorsqu’il y avait plusieurs possibilités de codage, c’est la catégorie avec le niveau de difficulté le plus élevé qui s’est imposée (une réflexion inter registre prime sur une réflexion intra registre qui elle-même prime sur une catégorie technique). Ce codage a permis de repérer les temps forts de la séquence. Généralement, des épisodes contenant plusieurs phrases sont analysés, ce qui fait ressortir des tendances observables. Bien souvent les résultats de deux groupes sont disponibles, ce qui permet de comparer ou d’enrichir l’analyse.

La nécessité d’un apport théorique

Au fur et à mesure de ce travail, il nous est apparu de plus en plus crucial de construire des outils théoriques afin de nous aider à construire et à analyser des séquences basées sur une approche utilisant des diagrammes d’espace-temps pour introduire des concepts de la relativité restreinte. Nous avons déjà vu que les graphiques présentent un potentiel cognitif important. Duval (1993) a introduit la notion de registre de représentation sémiotique en étudiant des objets mathématiques. Il existe différents registres mobilisables : le langage naturel, l’écriture symbolique, le graphique cartésien, les diagrammes, les figures géométriques, les tableaux de données, … Duval soutient que la maîtrise d’un concept mathématique suppose la maîtrise d’au moins deux registres ainsi que les conversions associées entre les registres.
L’organisation de la représentation spatiale a été étudiée par Vergnaud (1994, page 33, voir figure 50). Il s’est interrogé sur la façon dont les propriétés du signifiant sont associées aux propriétés du signifié et si ces propriétés sont véritablement utiles aux apprentissages.

Élaboration théorique d’une aide à la création d’une séquence d’enseignement en relativité restreinte

Nous allons nous aider du cadre théorique des ETM pour construire une séquence d’enseignement en relativité restreinte mobilisant le registre des diagrammes. Ce cadre permet une certaine distanciation avec les séquences proposées tout en explicitant les interactions entre l’élève (au travers d’un plan appelé « plan cognitif ») et un niveau disciplinaire (décliné en deux plans appelés « plan épistémologique » en fonction des cadres de rationalité des mathématiques ou de la physique). Ce cadre théorique nous sera utile pour évaluer les tâches réalisées et réalisables par les élèves, ce qui nous manquait dans les analyses a priori et a posteriori de la séance ou de la séquence pilote. Commençons par décrire plus particulièrement le fonctionnement que nous allons faire des ETM dans ce travail de thèse.

Les espaces de travail mathématique : un cadre pour penser l’usage des diagrammes d’espace-temps en relativité retreinte

Tout d’abord il convient de repérer dans une tâche si un ou des cadres de rationalité des mathématiques ou de la physique sont mobilisés. Si la signification physique d’un phénomène n’est pas mobilisée et que le travail ne porte que sur l’exploitation mathématique d’objets représentés sur un diagramme, le plan épistémologique de la physique ne sera pas utilisé.
Par exemple, s’il est demandé d’expliquer si deux événements E1 et E2, placés sur un diagramme, ont la même abscisse dans un référentiel donné, le travail ne s’effectue pas dans le plan de l’épistémologie de la physique qui n’est pas mobilisé.
Par contre s’il est demandé d’expliquer pourquoi les événements E1 et E2, placés sur un diagramme, permettent de définir une durée propre dans un référentiel donné, cette fois-ci les deux plans épistémologiques sont mobilisés. Il faut d’une part connaître la signification physique d’une durée propre et d’autre part repérer si les deux événements ont la même abscisse dans un référentiel donné.
En fonction du questionnement, la tâche peut donc porter sur un ou deux cadres de rationalité et donc conduire à un niveau de complexité plus élevé.
Par défaut le plan cognitif est à chaque fois utilisé, car nous nous intéressons aux interactions entre l’élève via son plan cognitif et un ou deux plans épistémologiques. De plus, nous n’allons pas nous intéresser dans ce travail de thèse, aux éventuelles interactions entre les deux plans épistémologiques sans passer par le plan cognitif de l’élève, car nous focalisons notre attention sur lui en posture de résolution d’une tâche.
L’élève est étudié dans sa posture de résolution d’une tâche. Les interactions avec le plan cognitif seront donc les seules prises en compte.
Le plan cognitif contient trois éléments (visualisation, construction, preuve). La visualisation correspondra ici à une lecture sur un diagramme. La construction sera associée au tracé de quelque chose sur un diagramme d’espace-temps à l’aide d’un crayon ou d’une action sur le logiciel GeoGebra. La preuve sera associée à un raisonnement plus ou moins élaboré conduisant à un résultat correct.
Chaque plan épistémologique contient également trois éléments (représentamen, artéfacts et référentiel). Un représentamen correspond à un signe (par exemple un trait) représentant un objet appartenant au cadre de rationalité des mathématiques (ici une demi-droite) ou de la physique (ici une ligne d’univers). Les artéfacts correspondent aux outils utilisés lors de la résolution de la tâche, un diagramme (cadre de rationalité des mathématiques) ou un enregistrement sur papier des positions au cours du temps d’un objet (cadre de rationalité de la physique). Enfin, le référentiel est associé à l’ensemble des règles, des définitions, des postulats d’un domaine pour un cadre de rationalité donné (théorie de la relativité restreinte en physique, calcul matriciel en mathématiques).
Un élément d’un plan sera bien souvent en interaction avec un élément d’un autre plan sur une verticale pour former une genèse. Il existe également des interactions sur un même plan qui ne sont pas associées cette fois-ci aux genèses. La genèse sémiotique correspond à une interaction representamen – visualisation, la genèse instrumentale à l’interaction artéfacts – construction et la genèse discursive à l’interaction référentiel – preuve.
La genèse sémiotique sera donc associée bien souvent ici à une observation (deux événements avec une même abscisse ou pas, une inversion d’ordre chronologique d’événements sur une animation). La genèse instrumentale demandera une action de la part de l’élève sur un diagramme ou un logiciel (tracer des parallèles, relever une durée). Enfin la genèse discursive sera associée à un raisonnement associé à un domaine théorique (on voit une inversion de l’ordre chronologique de deux événements dans un référentiel B par rapport au référentiel A donc les événements sont indépendants).
L’interaction entre deux éléments à la verticale dans deux plans différents forme une genèse et correspond à un type de tâche réalisé par l’élève.
L’association de deux genèses (observée sur un verbatim ou supposée lors d’une analyse a priori) peut être reliée à un niveau de maîtrise d’un élève sur un problème posé.
L’association d’une genèse sémiotique et d’une genèse instrumentale correspond à la découverte du problème (découverte d’un logiciel en « cliquant » et en observant le résultat, découverte des propriétés d’un diagramme d’espace – temps). L’élève agit sur des artefacts et observe les résultats.
L’association d’une genèse instrumentale et d’une genèse discursive correspond plutôt à des actions majoritairement de raisonnement. L’élève agit sur des artéfacts et en déduit des résultats en utilisant un bagage théorique à sa disposition (l’élève trace plusieurs lignes d’univers d’objets ayant des valeurs de vitesse différentes dans un référentiel donné et il en déduit des résultats sur la traduction, sur le diagramme, du second postulat).
Enfin l’association d’une genèse sémiotique et d’une genèse discursive correspond à des actions décrites comme étant plutôt de communication. Cela correspond à un niveau de maîtrise élaboré de l’élève pour le problème posé. Il prend du recul car il n’agit pas directement sur les artéfacts pour visualiser et en déduire des résultats théoriques (l’élève anticipe ce qu’il pourrait se passer pour la ligne d’univers d’un objet en changeant sa vitesse dans un référentiel donné et il comprend à quoi correspond le second postulat explicité sur le diagramme).
L’association de deux genèses conduit à une tâche plus élaborée mise en œuvre par l’élève. Il est ainsi possible de quantifier son degré de maîtrise lors de la résolution d’un problème posé. Le niveau de difficulté d’une séance va être également relié aux associations qu’il est possible de développer chez les élèves. Une double évaluation est donc envisageable en utilisant le cadre théorique des ETM : une évaluation a priori de la séance et a posteriori via l’observation du travail des élèves. Cette évaluation est aussi possible en la déclinant au niveau des questions d’un problème posé. Enfin, comme nous avons vu, il faut aussi tenir compte de l’utilisation des deux cadres de rationalité pour quantifier le niveau de difficulté d’une tâche et le niveau de maîtrise d’une notion par un élève. Il doit même être possible de quantifier ces niveaux pour chaque cadre de rationalité.

Présentation d’une nouvelle progression d’enseignement

La construction de graphiques en cinématique peut bénéficier des outils de la géométrie dynamique avec par exemple le logiciel GeoGebra. Son utilisation correspondrait à une mobilisation des artefacts des différents cadres de rationalité de notre modèle d’ETM étendu. Commençons par regarder, dans la partie suivante, une utilisation de GeoGebra dans le contexte des mathématiques.

Utilisation de GeoGebra en cinématique

Cazes et Vandebrouck (2014) ont étudié le déroulement d’une séquence visant à un apprentissage des fonctions. A partir de situations réelles, les élèves devaient chercher à les modéliser puis à les simuler à l’aide de Geogebra. La simulation a permis un réinvestissement des connaissances sur les fonctions linéaires et affines puis une introduction de la fonction inverse ainsi que de ses propriétés globales et asymptotiques.
La séquence commence par le visionnage par les élèves de vidéos de poursuites permettant la constitution d’une banque de situations réelles. Une des vidéos décrit la poursuite de Bip-Bip par Vil Coyotte (voir figure 63).

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Table des matières

Introduction
Première partie
I. Théorie de la relativité restreinte et diagrammes d’espace-temps : éléments épistémologiques et didactiques
I.1. Les graphiques d’espace-temps : points de vue didactique
I.1.1. Difficultés didactiques à utiliser des graphiques
I.1.2. Potentialités didactiques des graphiques
I.2. Les diagrammes d’espace-temps : représenter des situations relativistes
I.2.1. Consubstantialité des diagrammes et de la théorie de la relativité restreinte
I.2.2. Des exemples de diagrammes : Minkowski, Brehme et Loedel
Seconde partie
II. Mise à l’épreuve de deux séances pilotes mobilisant plusieurs registres d’expression d’une situation relativiste
II.1. Mise en place d’une première séance pilote avec des élèves de terminale
II.1.1. Le document 1 : le langage naturel
II.1.2. Le document 2 : les schémas
II.1.3. Le document 3 : Le registre fonctionnel
II.1.4. Le document 4 : Le registre diagrammatique
II.1.5. Le document 5 : les schémas et les diagrammes
II.1.6. Le travail demandé aux élèves
II.1.7. Analyse des documents écrits des élèves ainsi que du verbatim de la séance
II.2. Les questions de recherche
II.3. Elaboration des outils d’enseignement et analyses a priori et a posteriori
II.3.1. Description de la seconde séquence pilote liant approche géométrique et relativité restreinte
II.3.2. Analyse a priori
II.3.3. L’analyse a posteriori
II.4. La nécessité d’un apport théorique
Troisième partie
III. Élaboration théorique d’une aide à la création d’une séquence d’enseignement en relativité restreinte
III.1. Les espaces de travail mathématique : un cadre pour penser l’usage des diagrammes d’espace-temps en relativité retreinte
III.2. Présentation d’une nouvelle progression d’enseignement
III.2.1. Utilisation de GeoGebra en cinématique
III.2.2. Une séquence, plusieurs niveaux de progressivité
III.2.3. Mise à l’épreuve de la classe
Conclusion et perspectives
Bibliographie

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