Elaboration d’un questionnaire et analyse des résultats
ETUDE BACTERIOLOGIQUE
Caractères morphologiques
Il s’agit d’une bactérie faisant de 1,5 à 2µ sur 0,5 à 0,8µ (les dimensions sont variables), présentant un centre clair plus marqué après coloration à la thionine phéniquée ou au bleu de toluidine. La bactérie est de forme variable, non sporulée, non capsulée (18, 25, 41, 121, 126).
En culture, les cellules isolées sont ovoïdes, ellipsoïdes, coccoïdes ou en forme de tige avec des extrémités arrondies, isolées ou en chaînes courtes. Une coloration bipolaire peut être observée .
Mobilité
Yersinia pseudotuberculosis est mobile à 22°C grâce à 1 à 6 flagelles péritriches. Elle est non mobile et non flagellé à 37°C (18, 19, 29, 32, 33, 41, 121). Le changement entre les deux formes s’opère aux alentours de 28 à 30°C. Les souches non mobiles ayant poussées à 37°C peuvent développer des flagelles et devenir mobiles à 22°C (18, 41).Les souches humaines sont en général moins mobiles que les souches d’origine animales. Cependant, les souches isolées chez les primates présentent souvent les mêmes caractères de mobilité que les souches isolées chez l’homme (18).Ce caractère est important pour la culture car à 37°C, il n’y a pas de mobilité et la dissociation s’accentue. Le germe croit donc mieux à 25°C qu’à 37°C (18, 23).Le test de mobilité s’effectue sur le milieu semi-liquide de Hitchens, à 22 et 37°C (82).
Résistance
Yersinia pseudotuberculosis est un germe qui survit très bien dans l’environnement (comme toutes les Yersinia à l’exception de Yersinia pestis), le sol, notamment dans des conditions défavorables à d’autres organismes, comme les milieux froids et humides, en partie grâce à son caractère anaérobie facultatif : la croissance de la bactérie dans l’eau en milieu naturel est influencée par le contact avec l’air, la proportion de matière organique, le pH, la température, la luminosité, la salinité, l’oxygène dissout, la saison, les pluies. Ainsi, l’eau associée à de la terre est plus riche en matière organique ce qui est favorable aux bactéries en hiver. De la même façon, les sols inondés, riches en matière organique, deviennent rapidement anaérobies et la bactérie survit bien dans ces conditions (21, 119). Si dans le milieu, d’autres microorganismes sont présents (bactéries non pathogènes, ou protozoaires dans l’eau par exemple), alors le nombre de Yersinia pseudotuberculosis peut être régulé (119).Yersinia pseudotuberculosis peut se maintenir 18 mois en terre stérilisée et 11 mois en terre non stérilisée (18, 121).Dans des tissus, la survie est de 1 jour à 45°C, 18 jours à 40°C, 3 à 5 jours à 37°C, 10 à 20 jours à 22°C, et 3 mois à 2°C (41, 121, 130).
En suspension dans le lait, l’exposition à 60°C pendant 70 minutes ne tue que 20% des souches (41).Le germe est détruit par une chaleur de 100°C (120), par 3 à 5 minutes de chauffage à 70°C ou 80°C, mais il survit à un chauffage de 180 minutes à 50°C ou 60°C, ou 6 heures à 50°C, ou ½ heure à 1 heure à 60°C (41, 130).La résistance est légère à la dessiccation, mais des cultures lyophilisées ont été réactivées après au moins 2 ans sous forme de lyophilisat (41).La destruction de la bactérie est chimiquement possible avec les procédés suivants : en 30 secondes avec du phénol à 15%, en 1 minute avec du formol 5%. Peuvent aussi être utilisés : du chlorure mercurique à 0,1%, de l’alcool à 75%, du chlorure de sodium à 0,58%, de la soude à 0,5 ou 1%, de la chloramine à 0,1% (121, 130).En raison de la relative résistance de la bactérie dans le milieu, la pseudotuberculose apparaît comme une maladie insidieuse et difficile à contrôler (12).
Antigènes et sérotypes
Antigènes
Il existe deux types d’antigènes (18, 41, 121, 130) :
• Un antigène flagellaire H, protéique, thermolabile. Il en existe 5 types.
• Un antigène somatique, polyosidolipoprotéique, constitué d’une fraction R hydrosoluble (commune à tous les types de Yersinia pseudotuberculosis et de Yersinia pestis) et d’une fraction O thermostable, responsable de la spécificité antigénique (la fraction lipopolyosidique se comporte comme un haptène et n’est active qu’en association avec la fraction protéique). C’est aussi la fraction O qui permet de distinguer de nombreux sérotypes.
Classification en sérotypes
Il existe plusieurs sérotypes et des sous-types sérologiques de Yersinia pseudotuberculosis. La classification en sérotype est basée sur les variations de la fraction O de l’antigène somatique :
• Le sérotype O1 est divisé en trois sous-types : O1a, O1b et O1c. Ce sérotype est le
plus fréquemment isolé en Europe et en Amérique du Nord : il représente près de 90% des sérotypes isolés en Europe, que ce soit chez l’homme ou l’animal (17, 60, 85, 105, 135). Il s’agit du sérotype le plus fréquemment isolé au parc zoologique d’Anvers de 1970 à 1974 (75). O1a est plus fréquent en Europe que O1b. Le sérotype O1 est rarement isolé en Asie : il a cependant été isolé chez l’homme, des primates, des saumons, des rennes, des rongeurs et dans l’environnement (60, 72). Il a été isolé chez des cervidés en Australie (72) et chez des buffles au Brésil (112). La découverte de O1c est récente, il s’agit d’un sérotype rarement décrit (93).
• Le sérotype O2 comprend trois sous-types : O2a, O2b et O2c. Il s’agit d’un sérotype essentiellement rencontré en Europe et en Amérique du Nord, mais avec une prévalence moindre que le sérotype O1. Il s’agit du deuxième sérotype le plus fréquemment isolé au parc zoologique d’Anvers de 1970 à 1974 (76). Il a aussi été isolé en Australie chez des cervidés (72). Le sérotype O2c n’a été décrit qu’au Japon, isolé chez des carnivores domestiques, chez l’homme et dans de l’eau de montagne (68, 69, 117). Globalement, des infections par le sérotype O2 sont rarement décrites (96).
• Le sérotype O3 est essentiellement rencontré en Europe, en Amérique du Nord, en Australie (principal sérotype rencontré chez les moutons australiens), en Nouvelle-Zélande. En Europe, il s’agit du deuxième sérotype le plus fréquemment isolé chez l’homme (59). Il est très fréquemment isolé chez le lièvre en Europe, et chez le porc dans de nombreux pays (21, 58, 96). En Asie (Japon, Russie, Corée, etc…), il a été isolé chez l’homme, des rongeurs, des oiseaux et dans l’environnement (53). Il a été isolé chez des buffles au Brésil (112). Ce sérotype peut produire une toxine. La maladie a pu être reproduite expérimentalement avec ce sérotype chez des moutons, des chèvres et des porcs contrairement à d’autres sérotypes (41, 125).
• Le sérotype O4 est divisé en deux sous-types : O4a et O4b. Il est bien moins fréquent en Europe et en Amérique du Nord que les sérotypes précédemment décrits. Par contre, il s’agit d’un des sérotypes les plus fréquemment rencontrés au Japon (notamment le sous-type O4b), et en Asie de manière générale, où il est isolé chez l’homme, les primates, les rongeurs, les oiseaux, les carnivores domestiques, les porcs, dans l’eau et dans l’environnement (53, 68, 76, 103). Le sous-type O4b est essentiellement rencontré au Japon (85).
• O5 et O6 sont aussi bien moins fréquents en Europe et en Amérique du nord, mais en revanche largement répandus au Japon. Le sérotype O5 peut être divisé en 2 sous-types : O5a et O5b, il s’agit de l’un des sérotypes les plus fréquents au Japon et en Russie chez l’homme (67). O5 a été isolé au Japon chez l’homme et dans l’eau de montagne (68, 69). O6 a été isolé au Japon dans l’eau de montagne, mais assez rarement chez l’homme. Les souches de sérotype O6 isolées chez des animaux ne sont pas associées à des signes cliniques. Cependant, quelques souches apparaissent pathogènes d’après une étude expérimentale (49, 93).
• Le sérotype O7 a été isolé au Japon chez des chiens et des chats.
• D’autres sérotypes existent mais leur importance pathologique est moindre et l’incidence anecdotique. Il s’agit de O8, O9, O10, O11, O12, O13, O14. O10 possède cependant quelques souches pathogènes (93).
De nombreuses souches appartenant aux sérotypes O1 à O5 ont été isolées en Europe, en Amérique du Nord, en Asie, et presque toutes sont pathogènes. Certaines souches de sérotypes O3 semblent peu ou pas virulentes, et d’autres particulièrement virulentes. Les souches de sérotypes O1c, O7, O9, O11, O12, O13 et O14 sont avirulentes (93, 121). Mais en ce qui concerne les sérotypes dont la virulence est avérée, il n’existe pas de relation claire entre sérotype, sévérité de la maladie et espèces sensibles (23).
De la même façon, même s’il semble qu’en Asie les principaux sérotypes rencontrés soient O4 et O5 (O1, O2 et O3 occasionnellement) et en Europe, Amérique du Nord et Australie O1, O2 et O3, il existe des variations importantes suivant les pays d’un même continent et même suivant les régions d’un même pays (119).
Il existe peu de différences entre les sérotypes isolés chez l’homme et ceux isolés chez l’animal. En effet, la source de contamination de l’homme est bien souvent animale (directement ou indirectement) (4, 18).
Les sérotypes sont identifiés par microagglutination. L’identification des sérotypes et des sous-types est importante pour les enquêtes épidémiologiques (26, 137, 138).
Antigénicité croisée
La surface cellulaire est complexe et des réactions sérologiques croisées existent entre certains sérotypes et avec d’autres bactéries, notamment des entérobactéries (18, 26, 27, 60, 82, 95, 130, 148) :
• Entre Yersinia pestis et Yersinia pseudotuberculosis (antigène R commun). Des réactions sérologiques croisées sont possibles.
• Entre Yersinia enterolitica et Yersinia pseudotuberculosis, des réactions sérologiques croisées sont possibles.
• Entre les salmonelles O2 (facteurs 9 et 46 des salmonelles du groupe D et facteurs 4 et 27 des salmonelles du groupe B) et Yersinia pseudotuberculosis type II.
• Entre les salmonelles O4 (facteurs 14 des salmonelles du groupe H et les salmonelles du groupe D) et Yersinia pseudotuberculosis type IV.
• Entre Pasteurella multocida et Yersinia pseudotuberculosis type IV.
• Entre Brucella, Vibrio, Escherichia coli, Shigella flexneri, Shigella sonnei, Flaviobacterium meningosepticum, Bordetella bronchoseptica et Yersinia pseudotuberculosis.
Cette antigénicité croisée avec d’autres genres de bactéries a des conséquences lors de tests sérologiques : il est nécessaire, lors d’agglutination des types II et III de Yersinia pseudotuberculosis, de saturer au préalable les sérums suspects avec les salmonelles correspondantes (18).
Caractères biochimiques
Des caractères biochimiques ont été décrits. Ils permettent d’identifier la bactérie.
Cependant, ils peuvent varier d’une souche à l’autre de Yersinia pseudotuberculosis.
Certains caractères biochimiques sont constants, quels que soit la souche ou le sérotype de la bactérie. En revanche, pour certains caractères, les résultats obtenus sont très variables : il s’agit surtout de la fermentation de certains sucres (essentiellement mélibiose, rhamnose, raffinose) et de l’utilisation du citrate. Cette variabilité peut poser problème pour l’identification d’une souche en culture, et notamment pour le diagnostic différentiel avec d’autres bactéries du genre Yersinia (98, 124).
Une étude a permis de constituer une nouvelle classification de Yersinia pseudotuberculosis à partir de l’utilisation ou non du mélibiose, du raffinose et du citrate (138) :
• Biovar 1 : melibiose +, citrate -, raffinose – : 60% des souches étudiées ( sérotypes O1a, O1b, O2, O4b, O5, O6, O7, O8, O10)
• Biovar 2 : melibiose -, citrate -, raffinose – : 30% des souches étudiées (sérotypes O1c, O3, O9, O12, O13, O14)
• Biovar 3 : melibiose -, citrate +, raffinose – : 5% des souches étudiées (sérotype O11)
• Biovar 4 : meliniose +, citrate -, raffinose + : 5% des souches étudiées (sérotype O4a) f/ Caractères culturaux
Milieux utilisés
La littérature décrit une grande quantité de milieux utilisés avec plus ou moins de succès pour la culture de Yersinia pseudotuberculosis.Certains pensent que tous les milieux aérobies peuvent être utilisés (18). Cependant, lors de coproculture par exemple, les milieux traditionnels ne sont pas très intéressants car les petites colonies de Yersinia pseudotuberculosis sont rapidement envahies par la flore non pathogène de l’organisme. Il est préférable d’utiliser des milieux sélectifs (38).Voici les différents milieux sélectifs ayant été décrits pour la culture de Yersinia pseudotuberculosis, il s’agit bien souvent de milieux sélectifs gélosés fréquemment utilisés pour les coprocultures chez l’homme :
• Le milieu de Mac Conkey. Il s’agit d’un milieu sélectif très couramment utilisé pour l’isolement et la différenciation des bactéries entériques, pour Yersinia pseudotuberculosis en particulier. La culture peut être lue plusieurs jours après l’ensemencement à 25°C, cependant une autolyse peut apparaître en quelques jours (10, 32, 40, 131).
• Le milieu CIN (gélose Cefsulodin Irgasan Novobiocine), milieu sélectif pour les Yersinia (76, 96, 124).
• Le milieu DCL ( gélose Désoxycholate Citrate Lactose) ou DCL enrichi de 2% de désoxycholate de soude (12, 18, 26, 87) ou DCA (Désoxycholate Citrate Sugar) après concentration sur milieu au sélénite (57).
• Les géloses au sang (5% de sang) (55, 106, 126, 131).
• Le milieu SS (Salmonella Shigella). La croissance est cependant décrite comme irrégulière parfois sur ce milieu (40).
• Le milieu Trypticase soy avec 7% de sang de mouton (12, 49, 132).
D’autres milieux sont parfois décrits dans la littérature mais d’efficacité moindre et
inconstante : peu de croissance sur le milieu de Wilson et Blair, croissance faible sur le milieu au sulfite de bismuth et uniquement à 22°C, pas de croissance sur le milieu au vert brillant, croissance irrégulière suivant les souches sur milieu Hektoen, 93% de croissance sur le milieu XLD (40), milieu lactose/sucrose/urée, milieux de Kniselys, Morris, milieu au sang de Fildes (69), milieu de Sabouraud (55), de Rappaport (21, 58), gélose chocolat (126), milieu EMB, milieu colistine nalidixique enrichi en sang (13), gélose peptone (24), milieu ENDO (39), milieu Lucia-Bertani (LB) à 28°C pendant 24h (30, 76, 82).
Importance de la température
La température de culture a une importance capitale. On a vu en effet que Yersinia pseudotuberculosis est une bactérie qui survit et se multiplie très bien lors de climat froid et humide, ce qui est défavorable à la croissance des autres bactéries : la croissance de Yersinia pseudotuberculosis s’effectue normalement entre 0 et 44°C, avec un optimum autour de 30°C, alors que les autres entérobactéries ont plutôt un optimum autour de 36 à 43°C, et croissent entre 4 et 47°C. A 37°C, la croissance de la bactérie peut donc être étouffée par celles d’autres entérobactéries croissant mieux à cette température (10, 23, 40).
Cette température est importante car elle influence les besoins nutritionnels de la bactérie. Yersinia pseudotuberculosis a besoin de nutriments à 37°C dont elle n’a pas besoin à 28°C. Ainsi, il est possible de cultiver malgré tout la bactérie à une température élevée, à condition de lui apporter les nutriments nécessaires.D’autre part, la bactérie est mobile à 22°C mais ne l’est plus à 37°C, la dissociation augmente donc à cette température. La température influe aussi sur le développement de colonies lisses (qui se forment à 22°C) ou rugueuses (qui se forment à 37°C) en fonction des milieux (18, 40).Les données de la littérature sont variables, certains auteurs décrivent une bonne réussite en culture à 37°C, d’autres à 22°C (41), et enfin certains préconisent un enrichissement par le froid préalable à la mise en culture afin d’obtenir de meilleurs résultats (20).
Méthodes d’enrichissement
Il existe plusieurs méthodes d’enrichissement qui permettent d’améliorer la culture de Yersinia pseudotuberculosis et éviter l’envahissement de la culture par d’autres entérobactéries.La première méthode décrite et la plus communément utilisée est l’enrichissement par le froid. Plusieurs techniques ont été décrites :
• Mise en culture sur milieu LB puis maintien à –80°C après ajout de glycérol à la concentration finale de 15% (76)
• Mise en culture sur milieu PMB et maintien à 4°C, réalisation de subcultures à 7, 14 et 21 jours (98)
• Maintien dans une solution tampon saline, le PBS (Phosphate Buffered Saline), à 4°C, pendant 2 à 5 semaines (87). Des subcultures sont réalisées chaque semaine pendant 4 semaines (117). Certains auteurs décrivent une perte possible des bactéries au delà d’une durée de 2 semaines (87). Le PBS est un milieu tamponné à pH=7,6 à la concentration de 1/15 à 1/10 (117, 129, 153). Il s’agit de la méthode d’enrichissement la plus couramment utilisée.
L’enrichissement par le froid présente tout son intérêt lors de culture à partir de prélèvements intestinaux (131).
D’autres méthodes d’enrichissement ont été décrites :
• Enrichissement par traitement alcalin selon la méthode d’Aullisio et al. Le prélèvement est mélangé avec de la soude à 0,25% avant inoculation sur un milieu de culture (53, 98).
• Mise en culture sur milieu TSB à 22°C pendant 16 à 18h puis ensemencement du milieu de Rappaport modifié, suivi d’une incubation à 25°C pendant 3 jours (98)
• Mise en culture sur milieu de Rappaport modifié, cette méthode est efficace pour la culture de Yersinia enterolitica, mais apporte peu de résultat pour Yersinia pseudotuberculosis (98).
• Mise en culture sur milieu au sélénite une nuit à 37°C (67).
Les meilleurs résultats sont vraisemblablement obtenus avec un enrichissement sur le froid en milieu PBS (enrichi éventuellement avec du sang de bœuf lysé) pendant 2 semaines à 4°C, suivi d’un traitement alcalin puis une mise en culture sur un milieu traditionnellement utilisé, tel que le milieu de Mac Conkey, le milieu CIN, une gélose au sang ou le milieu SS (67, 98).
Une étude chez le porc a montré qu’aucun isolement n’a pu être réalisé si le prélèvement était directement mis en culture car un étouffement par d’autres bactéries se produit alors. Aucun isolement n’a pu être réalisé non plus avec un traitement alcalin seul. Les meilleurs résultats ont été obtenus avec un enrichissement par le froid suivi d’un traitement alcalin (117).
Aspects de la culture
La morphologie et la biologie des bactéries varient suivant la durée de la mise en culture, le type de milieu utilisé et la température d’incubation (41).De manière générale, la culture est macroscopiquement visible à la sixième heure en milieu liquide et à la dixième heure en milieu solide. Les colonies sont en général translucides, de 0.5 à 1 mm de diamètre à 24h, de 1 à 2 mm à 48h. Elles deviennent opaques, blanchâtres ou gris jaunâtres ensuite, la surface peut prendre des reflets cuivrés (18, 25).En milieu CIN, on observe des petites colonies roses à rouges foncées avec un « œil » central bleu en 24h, puis plus grandes (1,5mm de diamètre) et mauves à 48h .Sur une gélose au sang, on observe des petites colonies rondes, finement granuleuses, d’abord translucides puis grises/jaunes, au centre opaque avec une périphérie plate, non hémolytiques et sans odeur (55, 106, 126, 131).La croissance sur milieu DCL donne des colonies lisses et transparentes en 24h d’incubation. Puis, 24 à 48h plus tard , les colonies deviennent opaques et colorées en blanc-crème voire rose, sans changement apparent dans le milieu de culture (40, 41, 130).Sur milieu de Mac Conkey ou gélose SS, les colonies sont petites et confluentes, humides, brillantes, incolores à grisâtres puis roses pâles, translucides, aux bords irréguliers après 24 à 48h d’incubation. Il s’agit de colonies très similaires aux colonies de Shigella mais la croissance de Yersinia pseudotuberculosis est plus lente, en 48h en général au lieu de 24h (40).
Sur Trypticase soja, apparaissent en 24h des petites colonies rondes de 0,5 à 1mm de diamètre, jaunes grises et translucides lors de conditions aérobies. En conditions anaérobies, les colonies sont de très petite taille (12, 49, 132).De manière générale, on observe une certaine uniformité de l’aspect des colonies quel que soit le milieu utilisé (40).Les colonies de petite taille sont plus souvent associées avec une forte virulence sur les souris que les colonies de grande taille, et la proportion de colonies de grande taille augmente après une série de subcultures et d’incubation à 37°C (59, 63).
Conclusion
Il n’existe pas de méthode universelle. Un très grand nombre de méthodes sont décrites dans la littérature avec des résultats variables d’une étude à l’autre. Il semble cependant que les points suivants soient importants :
1. La combinaison d’un enrichissement par le froid (c’est-à-dire une croissance à 4°C) avec tampon phosphate (PBS) et d’une culture sur milieu sélectif semble être la méthode la plus efficace et en tout cas la plus récemment décrite et la plus couramment employée à l’heure actuelle (23, 28, 30, 45).
2. Les milieux sélectifs les plus efficaces sont probablement le milieu de Mac Conkey, le milieu CIN, le milieu SS, la gélose au sang. Une association de plusieurs milieux successifs est couramment décrite (par exemple : milieu de Mac Conkey puis gélose au sang) (40, 55, 63).
3. Bien souvent, une température d’incubation de 35 à 37°C semble plus adaptée que l’incubation à 22°C. Il est certain qu’en cas d’ensemencement direct d’un prélèvement intestinal sur un milieu peu sélectif à 37°C, un envahissement de la culture par d’autres espèces d’entérobactéries est fréquent (23, 53). Mais il semble préférable d’effectuer un enrichissement préalable (froid et traitement alcalin) plutôt que de faire une incubation directe à 22°C pour limiter la croissance d’autres bactéries. L’ambiance doit être aérobie, avec 10% de dioxyde de carbone (55).
4. La croissance de Yersinia pseudotuberculosis est plus lente que celle d’autres espèces de Yersinia : 48h sont en général nécessaires pour un développement satisfaisant et une caractérisation de la culture, alors que Yersinia enterolitica n’a besoin que de 24h. Certains auteurs semblent pourtant pouvoir caractériser la culture dès 18h à 24h sur milieu de Mac Conkey. Des petites colonies peuvent être visibles à 24h, mais elles atteignent une bonne taille (2 à 3 mm) en 3 jours (23, 40, 41, 58, 63, 72). Attention cependant, une culture de Yersinia pseudotuberculosis à 48h ressemble beaucoup à une culture d’autres entérobactéries (32).
5. Le prélèvement doit être adapté à la symptomatologie afin d’obtenir de bons résultats : préférer la culture d’un prélèvement de sang lors de septicémie à un prélèvement de selles qui peut alors donner un résultat négatif par exemple. La culture à partir de tissu congelé est possible plusieurs mois après la mise en congélation (10).
Virulence bactérienne
La virulence de Yersinia pseudotuberculosis est liée à la capacité de la bactérie à envahir les cellules et à survivre de manière intracellulaire (27, 51). Elle est permise par l’expression de deux types de gènes : des gènes chromosomiques et des gènes plasmidiques.
α/ Virulence liée au plasmide
Un plasmide (environ 70kb) de virulence existe chez les 3 espèces pathogènes de Yersinia et est retrouvé dans quasiment toutes les souches de Yersinia pseudotuberculosis : une étude au Japon le met en évidence chez 105 souches de Yersinia pseudotuberculosis sur
110. Il est indispensable à l’expression de la virulence de la bactérie : en l’absence de plasmide, une souche n’est en général pas pathogène. Inversement, si elle possède le plasmide, elle est pathogène. Cependant, le plasmide peut exceptionnellement se perdre lors de la culture de la bactérie ; on constate alors que la souche peut être non pathogène ou parfois qu’elle conserve une virulence, certes diminuée.Le plasmide de virulence code pour des opérons complexes impliqués dans l’expression de protéines de virulence. Ces protéines sont impliquées dans l’adhérence cellulaire, la résistance à la phagocytose, la survie dans le sérum, la cytotoxicité et l’adhésion au collagène.Il existe différents types de plasmides qui permettent une classification encore plus poussée que les sérotypes. Une étude au Japon a montré par exemple que le sérotype O1b présente 4 plasmides différents et le sérotype O4b 10 plasmides de types différents. Cette donnée est intéressante car l’étude des plasmides permet de retracer l’origine d’une infection. Par exemple, un homme est infecté par un germe du sérotype O4b de type plasmidique 1. Ce même type de germe est retrouvé chez des animaux sauvages, mais pas chez les animaux domestiques. Par conséquent, les animaux sauvages sont très sûrement les principales sources d’infection par Yersinia pseudotuberculosis O4b1. Ainsi le typage des plasmides aide à l’épidémiologie de la maladie afin de retracer la chaîne des contaminations (46, 47).
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Table des matières
Introduction
Chapitre I – Données bibliographiques concernant la pseudotuberculose
A/ Historique
B/ Généralités
C/ Epidémiologie
E/ Diagnostic
1 – Diagnostic clinique 7
2 – Diagnostic sérologique
3 – Diagnostic bactériologique
4 – Diagnostic par PCR
5 – Diagnostic allergique
6 – Diagnostic thérapeutique 7
F/ Traitement et prophylaxie
1 – Traitement
2 – Prophylaxie (en parcs zoologiques)
G/ Conclusion : importance en parcs zoologiques
Chapitre II – Situation dans quelques parcs zoologiques : élaboration d’un questionnaire et analyse des résultats
A/ Elaboration du questionnaire
B/ Résultats
C/ Discussion
Conclusion
Annexes
Annexe 1 : questionnaire
Annexe 2 : Liste des vétérinaires ayant répondu au questionnaire
Bibliographie
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