La conférence des Nations Unies sur l’Environnement et le Développement qui s’est tenue à Rio en 1992, appelée ensuite le Sommet de la Terre, avait pour objet d’évaluer les progrès effectués depuis le rapport de Brundtland, « Notre futur commun », publié en 1987. Alors que l’évènement précédent avait mis l’accent sur le développement durable, le Sommet de la Terre allait plus loin en affirmant que le développement durable et la gestion durable de l’environnement allaient main dans la main. L’un des résultats de la Conférence aura été l’établissement de « Principes forestiers », une alternative à la Convention sur les forêts qui n’avait pu être signée à l’époque. Les « Principes forestiers » faisaient avancer les objectifs autant que possible et constituaient la première tentative mondiale pour parvenir à des critères établissant un consensus sur la gestion, la conservation et le développement durable des forêts (RAVI P. et al., 1998). C’était donc l’occasion pour considérer la dimension environnementale dans le développement économique. C’était également une étape décisive de l’engagement de chaque pays en faveur du développement durable (FAO, GIZ, 2015).
A Madagascar, la dégradation incessante de la diversité biologique face aux différentes menaces chroniques à tous les échelons spatiaux entre autres le changement climatique, les prélèvements divers, les différentes exportations illicites, le braconnage, etc. émergent et actualisent les différentes politiques et stratégies de conservation et de préservation des différents écosystèmes dans tous les niveaux de décision. En effet, dans sa vision depuis la déclaration de Durban en 2003, la politique malgache donne une place stratégique à la préservation de la biodiversité à travers l’augmentation de la superficie des aires protégées de trois fois plus. Avec un mode de gouvernance participative et communautaire, le taux de déforestation estimé à 0,40 % pour la période 2005-2006 a connu une baisse par rapport aux années précédentes qui étaient de 0,80 % selon le Plan National de Développement (2015-2019). Actuellement, cette vision est renforcée dans son Plan National de Développement. En effet, ce plan prône dans son axe stratégique n°05, la valorisation du capital et le renforcement de la résilience aux risques de catastrophes. Ainsi, dans les objectifs spécifiques, à la préservation de l’environnement s’ajoutent l’articulation des ressources naturelles et le développement économique ainsi que la valorisation durable du capital naturel et des écosystèmes. En 2015, dans son document de CPDN, Madagascar prévoit de s’engager lors du sommet mondial sur le Changement Climatique à Paris (COP21) de porter à 14 % le taux d’émission de carbone d’ici 2030. A ce titre, le pays doit intensifier les efforts pour la lutte contre la dégradation forestière c’est-à-dire engager des actions urgentes et plus efficaces pour enrayer le recul de la surface forestière et améliorer le capital forestier malgache. La nouvelle politique forestière en cours de finalisation renforce ces engagements à travers ses différentes orientations.
PROBLEMATIQUE
A Madagascar, la dégradation avec la perte des ressources forestières se fait à un rythme alarmant, la superficie forestière diminue considérablement avec les fonctions des forêts. Rien qu’entre les années 2000 et 2005, la superficie forestière de l’île recule de 0,55 % en moyenne chaque année (CI, 2008). La déforestation continue à y être incontrôlée à cause de la croissance démographique et de la pauvreté (HANNAH, RAKOTOSAMIMANANA, GANZHORN, 1998). Ceci incite à se poser la question si les actions de réduction de la pauvreté permettent de diminuer les pressions sur les ressources forestières et de pérenniser la gestion de ces ressources. Il s’agit donc de prendre des mesures pour réduire les impacts négatifs (social et environnemental) par rapport aux habitudes des communautés, acteurs principaux de la déforestation et de la dégradation des forêts naturelles, de par leurs pratiques habituelles et dépendantes à divers degrés de ces ressources. Les politiques malgaches de conservation de la biodiversité se sont renouvelées depuis les années 1990 par une intégration localisée des modes de gouvernance de l’accès aux ressources (MEEF, 2016). Dans le cadre de cette politique, en 1998, la gestion de l’un des domaines forestiers nationaux qui est la station forestière de Mandraka, a été déléguée à l’ESSA-Forêts.
Les activités d’exploitation de la forêt occupent une place importante dans la localité de Mandraka car la région fait partie des zones d’approvisionnement en bois d’énergie et en charbon de la ville d’Antananarivo. Et quant à leur moyen de subsistance, la population a souvent recours au « Tavy » (RAJOELISON, et al, 2007). Sur ce, une superficie de 1,8 Ha des reliquats de forêt naturelle dans la station a été brulée en 1996 et en 2002 (RAMARSON, 2013). De part ces constats, la vision de pérennisation de la station forestière de Mandraka est remise en cause puisque les différentes habitudes de la communauté locale peuvent constituer des menaces anthropiques pour sa conservation dont les feux de forêts, les braconnages, les coupes illicites, etc. C’est ainsi qu’en 2009, la station forestière de Mandraka a connu des modifications au niveau des organes de gestion et aussi au niveau de sa finalité. Selon les diverses expériences au niveau national, il a été affirmé que « quel que soit la politique adoptée, toute restriction d’accès aux ressources naturelles pour les communautés riveraines doit faire l’objet d’une mesure de compensation ou d’appui, afin de garantir la pérennisation des ressources » (MEEF, 2016). L’association Maintsoanala fût créée en vue de constituer des représentants locaux des responsables du site. Elle contribue aussi à la persuasion de la collectivité locale par rapport à la mise en place du projet de conservation, d’écotourisme et d’éducation environnementale. C’est ainsi que le projet de pérennisation de la gestion de la forêt de Mandraka s’est fait par le biais de sa valorisation non extractive.
NOTION SUR LES INDICATEURS
Un indicateur est défini comme « un facteur ou variable quantitative ou qualitative qui fournit des moyens simples et fiables pour mesurer la réussite ou l’atteinte d’un effet désiré, d’une valeur ou d’un critère » (OCDE, 2004). Selon une autre définition, il s’agit d’une « entité mesurable liée à un besoin spécifique d’informations telles que l’état d’une cible, le changement d’une menace ou le progrès vers un objectif » (CMP, 2007). Un indicateur peut se présenter sous deux formes :
– Quantitatif : la plupart des indicateurs portent sur des éléments qui peuvent être chiffrés. Mais tous les indicateurs ne sont pas forcément quantifiables (DFID, 2002).
– Qualitatif : les indicateurs qualitatifs décrivent la qualité du résultat. Lorsque qu’il n’existe aucune donnée de référence ou que celles-ci ne peuvent pas être facilement agrégées en nombres ou pourcentages, il faut recourir à des déclarations plus générales en ce qui concerne les améliorations (DFID, 2002).
OBSERVATION DIRECTE
L’observation directe est une activité qui implique à la fois un regard et une relation. C’est une construction de connaissances qui relève à la fois de la subjectivité et de l’objectivité. L’observation directe décline en 3 formes essentielles : l’observation directe globale (sans intervention), l’observation directe participative et enfin l’observation systématique. La méthode adoptée pour cette étude est la première qui consiste en une descente sur le terrain et à observer ce qui se passe sans aucune interférence. L’objectif de cette méthode comme son nom l’indique n’est pas de discuter, mais d’observer un endroit en particulier, du personnel au service du projet ou des actions des participants bénéficiaires du projet. L’observation est donc importante pour évaluer le contexte, les comportements, les changements physiques et les résultats de la mise en œuvre. Cette méthode (Cf. Annexe 3) a permis de faire les recoupements d’informations connues au préalable, par le biais des investigations bibliographiques et webographiques concernant le milieu et sur les données des enquêtes socio-économiques. De ce fait, elle s’est concentrée sur les aménagements réalisés dans le cadre de la mise en place du site écotouristique, puis sur le mode d’interaction des ressources humaines impliquées dans sa gestion, notamment, les membres de l’association Maintsoanala et enfin les modes d’interaction de la population limitrophe avec le site d’intervention. Les observations permettent d’appréhender une réalité vécue, plutôt que d’en obtenir un écho éventuellement déformé au travers des représentations que les personnes s’en forgent (BERREWAETS J., 2011). Ainsi, les avantages de cette méthode résident non seulement dans l’identification des phénomènes à approfondir mais aussi dans la vérification des informations pour leur véracité émanant des enquêtés, tant au niveau de la relation entre ressources humaines et ressources forestières que sur la relation entre les membres de l’association et les restes de la population qui ne le sont pas. Enfin, lors de la compilation des données, ces observations serviront également d’outils d’interprétations et d’analyses des résultats (RASOALINORO, 2008). Quant aux limites, certaines d’ordre géographique reposent souvent, surtout avec une restriction en moyen de déplacement. En outre, dans toute procédure d’observation, les personnes observées ont tendance à modifier leur comportement.
ENQUETE SOCIO-ECONOMIQUE
Les enquêtes étaient une méthode incontournable lors de la réalisation des travaux sur le terrain. En effet, elles sont nécessaires afin d’obtenir des données qualitatives convertibles en données quantitatives ; tels que : l’évolution du mode de vie des personnes membres de l’association, les exploitants des ressources forestières dans la zone de conservation, les avantages que les populations locales tirent de l’existence du site, etc. Aussi, les moments d’enquêtes sont aussi des occasions propices pour approfondir des sujets particuliers selon les expériences, les points de vue, le positionnement social ou tout simplement l’aisance des enquêtés tout au long du discours. De ce fait, la qualité des données dépendra étroitement de l’enquêté et de l’interviewer, de bonnes relations donnent souvent à de bons résultats (GUEYE et SCHOONMAKER, 1991 ; WOLLENBERG et al, 1998).
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Table des matières
1. INTRODUCTION
2. PROBLEMATIQUE ET HYPOTHESES
2.1. PROBLEMATIQUE
2.2. HYPOTHESES
3. METHODOLOGIE DE TRAVAIL
3.1. NOTION SUR LES INDICATEURS
3.2. OBSERVATION DIRECTE
3.3. ENQUETE SOCIO-ECONOMIQUE
3.3.1. Interview formelle par questionnaire
3.3.2. Interview semi-structurée (ISS) ou entretien semi-dirigé
3.3.3. Entretien non directif
3.4. INVENTAIRE FORESTIER
3.4.1. Stratification de la forêt
3.4.2. Méthode d’inventaire
3.4.3. Taux et unité d’échantillonnage
3.4.4. Description de l’inventaire
3.4.5. Matériels d’inventaire
3.5. SUIVI DES LEMURIENS
3.5.1. Méthode adoptée
3.5.2. Description du suivi
3.6. TRAITEMENTS ET ANALYSES DES DONNEES
3.6.1. Données des enquêtes des membres de l’association
3.6.2. Données des enquêtes des populations riveraines
3.6.3. Données d’enquêtes des visiteurs du site
3.6.4. Données des inventaires
3.6.5. Données de suivi des lémuriens
3.6.6. Cadre opératoire
3.7. RECAPITULATION DE LA DEMARCHE METHODOLOGIQUE
3.8. LIMITES DE L’ETUDE
4. RESULTATS
4.1. AGR PERCUES PAR LES MEMBRES DE L’ASSOCIATION
4.1.1. Activité écotouristique
4.1.2. Aménagement du site et entretien
4.1.3. Analyse des AGR bénéficiées
4.1.4. Contribution des revenus issus des AGR selon la typologie des ménages
4.1.5. Autres avantages: formations bénéficiées par les membres de l’association
4.1.6. Indicateurs de suivi des impacts de l’adhésion dans l’association
4.2. BENEFICES PERÇUS PAR LES NON MEMBRES DE L’ASSOCIATION
4.2.1. Accès à la forêt
4.2.2. Chasse
4.2.3. Collecte de bois de chauffe
4.2.4. Tourisme
4.2.5. Indicateurs de suivi des bénéficiaires de l’existence du site
4.3. PLACE DU SITE DANS LE SECTEUR TOURISME
4.3.1. Fréquence des visiteurs
4.3.2. Catégorisation des visiteurs
4.3.3. Degré de satisfaction
4.3.4. Indicateurs de suivi d’intégration du site dans le domaine du tourisme
4.4. RICHESSE FLORISTIQUE DU SITE
4.4.1. Biodiversité des forêts primaires
4.4.2. Etat actuel des forêts de plantations
4.5. DEMOGRAPHIE ET ECOLOGIE DE L’ESPECE Eulemur fulvus
4.5.1. Structure des groupes
4.5.2. Indice sex-ratio et taille du groupe
4.5.3. Rythme d’activité
4.5.4. Préférence des lémuriens d’une espèce
4.5.5. Indicateurs de suivi de la biodiversité de la forêt
5. DISCUSSIONS ET RECOMMANDATIONS
5.1. METHODOLOGIE ADOPTEE
5.1.1. Au niveau des non membres de l’association
5.1.2. Visiteurs
5.1.3. Analyse de la biodiversité floristique
5.1.4. Etude des lémuriens
5.2. RESULTATS OBTENUS
5.2.1. Impacts de la délégation de gestion à l’association Maintsoanala
5.2.2. Place du site dans le secteur tourisme
5.2.3. Biodiversité élevée de l’écosystème forestier
5.3. VERIFICATION DES HYPOTHESES
5.4. RECOMMANDATIONS
5.4.1. Proposition d’indicateurs de suivi
5.4.2. Proposition d’activités pour l’amélioration du projet
6. CONCLUSION
7. BIBLIOGRAPHIE