Depuis ces vingt dernières années, de nombreux travaux traitent de l’élaboration de couches minces par différents procédés de dépôt en vue de fonctionnaliser la surface des matériaux afin de leur procurer des propriétés superficielles particulières. Plus précisément, le dépôt de films de carbone adamantin désigné par le terme générique Diamond-Like Carbon (DLC) est l’objet de nombreuses recherches en raison de ces multiples applications potentielles. Le carbone adamantin est constitué d’une majorité d’atomes de carbone hybridés sp3 qui lui confère un caractère se rapprochant des propriétés très convoitées du diamant à savoir sa transparence optique, son inertie chimique, sa grande résistivité électrique (10¹⁴-10¹⁶ Ω.cm-1) et sa très grande dureté (de l’ordre de 1000 HVickers).
Les films de DLC sont devenus un enjeu industriel et économique important. Leurs domaines d’application sont très larges en électronique et en optique (revêtements optiques, émission électronique par effet de champ pour des applications aux écrans plats, …) mais également en mécanique pour des applications technologiques exigeantes, comme par exemple l’automobile (injecteurs pour moteurs à rampe commune / Common-Rail ) ou le stockage de l’information (têtes de lecture et disques durs).
Parmi les différents types de procédés d’élaboration, celui le plus couramment utilisé est le dépôt chimique en phase gazeuse. Cependant, le procédé qui consiste à évaporer une cible massive à l’aide d’un laser présente un grand intérêt en raison de ses multiples avantages que nous exposerons dans la suite de ce manuscrit. Le dépôt de couches minces par ablation laser encore appelée Pulsed Laser Deposition (PLD) est une technique très prometteuse concernant le dépôt d’une large variété de matériaux [1] et en particulier le dépôt de couches minces de DLC.
Ce procédé met en œuvre principalement des lasers de durée d’impulsion nanoseconde voire picoseconde [1-19]. Depuis une dizaine d’années, le développement des lasers de durée d’impulsion femtoseconde (10⁻¹⁵ seconde), tant au niveau de leur stabilité que de leur compacité ou encore de leur coût, a conduit quelques équipes [20-24] à réaliser des revêtements de DLC à partir de ces « nouveaux » lasers. Ces lasers permettent d’atteindre des densités de puissance supérieures à celles des lasers « conventionnels ». Un renforcement des avantages du procédé tel qu’une meilleure adhérence des couches sur le substrat, qui permettrait de s’affranchir de l’élaboration d’une sous-couche d’accrochage, comme c’est le cas pour les techniques déjà industrialisées [25], est alors envisageable.
Le domaine dans lequel s’est investi le laboratoire Traitement du Signal et Instrumentation (LTSI) est le domaine biomédical, notamment pour les applications concernant les biomatériaux implantables (prothèses de hanche). L’intérêt des DLC dans ce domaine réside dans leur bonne résistance à l’usure et leur faible coefficient de frottement couplés à une biocompatibilité et une activité antibactérienne [26]. Ce travail de recherche s’intéresse plus particulièrement à la capacité des couches obtenues à satisfaire aux exigences spécifiques du domaine biomédical (pureté, adhérence, rugosité, biocompatibilité). Après la caractérisation physico-chimique, tribologique et mécanique des DLC obtenus après dépôt par ablation laser femtoseconde sur substrat standard (type silicium), l’étude vise le dépôt sur les têtes sphériques des prothèses de hanche métalliques. Pour y parvenir, le laboratoire TSI a fait appel à différents partenaires :
♦ le laboratoire de Tribologie et Dynamique des Systèmes (LTDS) de l’Ecole Centrale de Lyon
♦ le département de Mécanique et Physique des Interfaces (MPI) du centre Sciences des Matériaux et Structures (SMS) de l’Ecole Nationale Supérieure des Mines de Saint-Etienne
♦ le groupe HEF (Hydromécanique Et Frottements) d’Andrézieux-Bouthéon (42) spécialisé dans les traitements de surface et la production de revêtements de DLC
♦ la Région Rhône-Alpes pour son soutien financier, ce travail de recherche s’effectuant dans le cadre d’un programme de recherche « Thématiques Prioritaires 2000-2002 : Ingénierie des Matériaux » de la Région Rhône-Alpes.
Dépôts de couches minces de Diamond-Like Carbon (DLC)
De par leurs propriétés très particulières, souvent proches de celles du diamant naturel (inertie chimique, dureté, propriétés électriques et optiques), les films de diamant amorphe ou Diamond-Like Carbon (DLC) sont devenus un enjeu industriel et économique important. Les couches minces de carbone, sous l’appellation générique Diamond-Like Carbon, englobent en fait une grande variété de compositions et de propriétés. Ce travail s’intéresse à la capacité des couches carbone à satisfaire aux exigences du domaine biomédical, en particulier pour le revêtement des prothèses de hanche et de genou. Leur intérêt dans cette application réside dans leur bonne résistance à l’usure et leur faible coefficient de frottement couplés à une biocompatiblité. Les méthodes d’élaboration les plus couramment employées pour la réalisation de couches DLC sont le dépôt chimique en phase vapeur assisté par plasma (PECVD) et le dépôt physique en phase vapeur (PVD) dont le dépôt par faisceau d’ions et l’ablation laser, technique utilisée au cours de ce travail.
Diamond-Like Carbon
Les couches minces carbonées possèdent une grande diversité tant au niveau de leur composition chimique que de leurs propriétés. Elles sont classées en différentes catégories en fonction de la proportion des éléments les composant (carbone, hydrogène) et en fonction de leur structure (carbone hybridés sp² ou hybridés sp³ , structure cubique à faces centrées, structure hexagonale, …). Afin de comparer les propriétés de ces films entre elles et à celles du diamant naturel, il est nécessaire de connaître les différentes structures possibles du carbone : graphite, diamant naturel et carbone adamantin ou DLC. Le terme très générique DLC sera utilisé dans la suite de ce manuscrit pour désigner les couches minces de carbone adamantin mais une terminologie plus précise sera employée pour chaque type de matériau. Nous présentons dans un premier temps les différentes structures du carbone puis nous exposons les propriétés des couches minces de carbone.
Structure chimique
L’atome de carbone se trouve sur la deuxième ligne, il est le premier élément de la colonne IV de la classification périodique de Mendeleïev et son numéro atomique est Z = 6. La forme la plus stable du carbone ¹²C contient 6 protons et 6 neutrons. La configuration électronique de ses 6 électrons est K²L⁴ ou ¹s² ²s² ²p² . Ses deux électrons de valence devraient lui conférer, a priori, un caractère divalent au niveau de ses liaisons chimiques. En fait, les électrons des couches supérieures (2s et 2p) sont distribués sur des orbitales atomiques hybrides appelées « sp » car combinant les orbitales 2s et 2p. Ils deviennent alors non appariés et peuvent ainsi créer des liaisons chimiques. Cet atome de carbone devient alors tétravalent, mais il peut adopter 3 configurations différentes de liaison.
Diamant naturel
Le cristal parfait de diamant ne contient que des atomes de carbone hybridés sp³ . La structure cristallographique du diamant est un réseau de Bravais cubique à faces centrées (CFC) avec la moitié des sites tétraédriques occupés par des atomes de carbone (ce qui est équivalent à deux mailles CFC décalés d’un quart de la diagonale du cube). Le diamant parfait est métastable à pression et température ambiante. Il peut néanmoins se synthétiser à partir du carbone graphitique à des pressions et des températures très élevées de l’ordre de 3.10⁸ Pa et 2000°C respectivement.
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Table des matières
Introduction générale
CHAPITRE 1 : Dépôts de couches minces de Diamond-Like Carbon (DLC)
Introduction
I. Diamond-Like Carbon
I.1. Structure chimique
I.1.1. Graphite
I.1.2. Diamant naturel
I.1.3. Couches minces de DLC
I.2. Propriétés du carbone en couches minces
I.2.1. Propriétés optiques
I.2.2. Propriétés électroniques
I.2.3. Propriétés nanomécaniques : nanodureté, module d’élasticité, contraintes internes
I.2.4. Propriétés tribologiques
I.2.4.1. Frottement
I.2.4.2. Usure
I.2.5. Propriétés « biomédicales »
II. Procédés de dépôt de couches minces de DLC
II.1. Dépôt par voie chimique (CVD, PECVD)
II.1.1. Procédé non assisté
II.1.2. Procédé assisté par plasma
II.2. Dépôt par voie physique (PVD)
II.2.1. Dépôts par faisceau d’ions (sélectionnés en masse)
II.2.2. Dépôts par arc cathodique
II.2.3. Dépôts par pulvérisation
II.2.4. Dépôt par ablation laser
II.2.4.1. PLD avec des lasers de durée d’impulsion nanoseconde
II.2.4.2. PLD avec des lasers de durée d’impulsion femtoseconde
III. Applications
III.1. Applications dans le domaine de l’optique
III.2. Applications dans le domaine de la microélectronique
III.3. Applications mécaniques
III.4. Applications biomédicales
Conclusion
Références bibliographiques
CHAPITRE 2 : Dispositifs expérimentaux
Introduction
I. Dispositif expérimental de dépôt
I.1. Source laser de durée d’impulsions femtosecondes
I.2. Chambre d’expérience
I.3. Procédés de nettoyage des surfaces
I.3.1. Bains à ultrasons
I.3.2. Décapage ionique in situ
II. Diagnostic du panache plasma par imagerie
III. Caractérisations des couches minces
III.1. Mesures des épaisseurs des films
III.2. Caractérisations structurales des films
III.2.1. X.P.S.
III.2.1.1 Principe
III.2.1.2. Appareillage
III.2.2. X.A.N.E.S.
III.2.2.1. Principe
III.2.2.2. Appareillage
III.2.3. Raman
III.2.3.1. Principe
III.2.3.2. Appareillage
III.3. Caractérisations mécaniques
III.3.1. Mesures de l’adhérence
III.3.1.1. Scratch-Test
III.3.1.2. Tests de traction
III.3.1.2.1. Principe
III.3.1.2.2. Dispositif expérimental
III.3.2. Nanoindentation
III.4. Caractérisations tribologiques
III.4.1. Principe
III.4.2. Dispositif expérimental
IV. Dispositifs expérimentaux pour l’application biomédicale
Conclusion
Références bibliographiques
CHAPITRE 3 : Propriétés des couches minces de DLC élaborées par ablation laser femtoseconde
Introduction
I. Paramètres expérimentaux
I.1. Substrats : nature et préparation
I.1.1. Silicium (100)
I.1.2. Acier AISI 316L
I.1.3. Polyéthylène haute densité
I.1.4. Préparation des substrats
I.2. Cible
I.3. Fluence laser
I.4. Pression résiduelle
I.5. Distance cible-substrat
I.6. Durée du dépôt
I.7. Récapitulatif
II. Caractérisations des films de DLC
II.1. Epaisseur et répartition en épaisseur des revêtements
II.1.1. Epaisseur
II.1.2. Etude du panache d’interaction en fonction de la fluence laser
II.1.3. Répartition en épaisseur
II.2. Etat de surface des échantillons et des dépôts – Rugosité
II.2.1. Echantillons silicium
II.2.2. Echantillons AISI 316L
II.3. Adhérence et contraintes du matériau déposé
II.3.1. Tests d’adhérence
II.3.1.1. Dépôts élaborés sur substrats silicium
II.3.1.2. Dépôts élaborés sur substrats Acier AISI 316L
II.3.1.3. Discussion
II.3.2. Contraintes intrinsèques au dépôt
II.4. Caractérisations structurales des films de DLC
II.4.1. X.P.S
II.4.2. Spectroscopie Raman
II.4.3. X.A.N.E.S
II.5. Propriétés nanomécaniques : tests de nanoindentation
II.5.1. Nanodureté
II.5.1.1. Conditions expérimentales
II.5.1.2. Résultats
II.5.2. Module d’élasticité
II.5.2.1. Conditions expérimentales
II.5.2.2. Résultats
II.5.3 Discussion
II.6. Propriétés tribologiques
II.6.1. Détermination du coefficient de frottement
II.6.1.1. Conditions expérimentales
II.6.1.2. Résultats
II.6.2. Détermination du coefficient d’usure
II.6.2.1. Conditions expérimentales
II.6.2.2. Résultats
II.6.3. Discussion
Conclusion
Références bibliographiques
Conclusion générale
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