Efficience de la prise en charge pharmacologique et psychologique d’un patient adulte atteint d’un trouble dépressif caractérisé

La noirceur de l’âme se place au cœur des préoccupations de la vie humaine contemporaine. Captivante, mystérieuse (KELLER, 2020) ; parses multiplesfacettes, elle fascine autant qu’elle façonne l’existence.

Le mal dépressif semble être l’empreinte d’une existence jalonnée par une réalité intérieure bouleversée. Toute société conserve les traces d’une histoire marquée par la dépressivité. Le trouble dépressif caractérisé anéantit l’entité tant sur le plan psychique que somatique (KELLER, 2020). Éveillée en Grèce Antique, l’originelle mélancolie hippocratique transcrit dans la langue séculaire la noirceur fluviale. Ce doyen, philosophe et médecin, inscrit la bile noire (provenant de la rate) dans sa théorie et affirme que l’équilibre des humeurs (sang, phlegme, bile jaune et bile noire) conduit à la quiétude corporelle et spirituelle. L’homme, parasité par la teinte sombre qui enrobe son existence, paraît parfois terrassé par la noirceur de ses idées, par son « malheur naturel » de sa faible et mortelle condition (PASCAL,1969).

Le XIXe siècle est imprégné du travail des Aliénistes qui promeut le traitement moral des troubles mentaux. C’est ainsi qu’Etienne Esquirol donne le ton et s’enquiert pour la première fois, en 1838, de l’épithète « dépressif ». Il baptise la lypémanie d’un délire accompagné «d’une passion triste, dépressive». Cette évolution linguistique et ce passage d’un trouble de l’intellect à celui d’une pathologie émotionnelle et affective (HAUSTGEN et al, 2018), provoque un véritable changement paradigmatique. Lors de cette même période, l’éminent Emil Kraepelin constitue la première classification des pathologies psychiatriques et étudie la folie maniacodépressive (HUM et al, 2010). De plus, il avance avec ferveur une possibilité thérapeutique biologique de la dépression. Cette éventualité s’est matérialisée avec l’apparition des premiers antidépresseurs. En effet, l’imipramine a vu le jour en 1957 grâce à Roland Kuhn (MARCEAU, 2008).

Dans le but de décrire son tourment, Charles Baudelaire inscrit dans les mémoires le mal romantique dont il est victime : le Spleen (PETITPIERRE, 2001). Le spleen désigne la rate dans la langue antique hippocratique. Le célèbre poète préfère énoncer son mal mélancolique en le traduisant par le lieu chimérique de naissance de ce fluide bileux : la rate. Le corpus actuel montre l’emploi du terme « humeur » et désigne les affections qui lui sont liées. Jean Delay, par l’analyse des perturbations humorales, la définit différemment d’Hippocrate et l’assimile à une « disposition affective de base qui donne à chacun de nos états d’âme une tonalité agréable ou désagréable, oscillant entre les deux pôles extrêmes du plaisir et de la douleur ». Il suggère le fait qu’une nette désadaptation à l’ambiance générale peut amener à la troubler (GUELFI et al, 1987). Le trouble dépressif caractérisé, ici étudié, est consigné comme trouble de l’humeur.

LE PHARMACIEN : UN EXPERT PHARMACOLOGIQUE 

L’image de la défectuosité de la personne traitée par antidépresseurs hante nos sociétés. L’ombre renvoyée est celle de l’incapacité et de l’être disloqué. Ce traitement des troubles de l’humeur met en lumière la pathologie dépressive tant voilée que redoutée. Écho à la maladie mentale, l’action de l’antidépresseur est parfois fantasmée, phantasmée, parfois source d’anxiété.

Ces médicaments, diabolisés, par la communauté, réverbèrent une apparence de dépendance, assimilés à des drogues, les croyances lui attribuent un effet anesthésiant, à l’origine d’un état artificiel avec une perte de soi-même (GRANGER, 2016). Ces représentations sont complétées par celle d’une sur-consommation, d’une sur-prescription. Fiction ou réalité ?

On estime que sur 923 professionnels exerçant en pharmacie composant notre cohorte (étudiants, préparateurs, pharmaciens), 722 d’entre eux jugent une prescription trop abondante d’antidépresseurs. Ces 78,3% de réponses positives questionnent la prise en charge actuelle du trouble dépressif caractérisé. (140 000 professionnels pharmaceutiques exercent en France. Afin d’avoir une statistique de test représentative de la population pharmaceutique, l’échantillon doit se composer au minimum de 383 personnes, fait exaucé ici. Ainsi notre étude représente ces professionnels de santé dans leur globalité. La population pharmaceutique pense avec un risque de 5% et un indice de confiance à 95% que les prescriptions de molécules antidépressives ne sont pas toujours indispensables). Un vaste panel de molécules s’est établi sur le marché médicamenteux. Certaines, par leur fréquente utilisation se sont intégrées au vocabulaire vernaculaire. Diverses classes composent les possibilités thérapeutiques. En effet, depuis la découverte de l’imipramine, de nouvelles manières moléculaires de traiter le trouble dépressif ont émergé. La noradrénaline et la sérotonine sont des neurotransmetteurs majoritairement impliqués dans le cadre de la tristesse pathologique. Un déséquilibre dans le sens d’un déficit immanent de ces deux transmetteurs a été identifié dans cette pathologie des humeurs. Afin de décupler la transmission synaptique et de moduler les concentrations plasmatiques et donc majorer leur biodisponibilité, un des mécanismes des antidépresseurs est d’inhiber la recapture présynaptique de la sérotonine et/ou de la noradrénaline. Plus de quatre groupes médicamenteux permettent aujourd’hui à nos patients d’espérer une efficacité. Parmi ceux-ci, les inhibiteurs de la recapture de la sérotonine (ISRS), les inhibiteurs de la recapture de la noradrénaline et de la sérotonine (IRSNa), sont les plus délivrés ; les IMAO, les antidépresseurs tricycliques et apparentés sont aussi intégrés à cet arsenal thérapeutique. Ce spectre médicamenteux peut être élargi par exemple dans le cadre d’une dépression résistante. Dans un but commun, les imipraminiques aussi nommés tricycliques inhibent les transporteurs membranaires présynaptiques de la noradrénaline (NET) et/ou de la Sérotonine (SERT), les antidépresseurs apparentés aux tricycliques représentent à eux seuls un groupement thérapeutique. L’inhibition de la dégradation de neurotransmetteurs a été expérimentée, discernant la catégorie sensible des IMAO : inhibiteurs des monoamines oxydases. L’hypothèse monoaminergique actuelle de la dépression suggère une neuroplasticité liée à une sensibilité variable des récepteurs suite à un traitement chronique par antidépresseurs (NIEDERHOFFER, 2016).

Des différentes silhouettes moléculaires naissent différentes caractéristiques physicochimiques desquelles découlent des propriétés thérapeutiques et une variabilité interindividuelle. Nous passerons en revue les ensembles thérapeutiques distincts en insistant sur les molécules principalement prescrites et les points clés de la prise en charge par le pharmacien d’officine.

Les points généraux : stratégie et cinétique particulières 

Les molécules antidépressives se rassemblent par un mécanisme d’action dont la visée est d’amplifier les concentrations de noradrénaline et/ou de sérotonine. Ces médicaments se discernent d’autres classes thérapeutiques notamment par la spécificité de leur cinétique. Malgré l’obscurité dépressive, l’action moléculaire requiert un délai de deux à trois semaines avant de manifester son activité. La mise en suspension de l’amertume grâce à ces molécules ne s’envisage qu’après une amplification sur la durée des concentrations plasmatiques. Pendant ces premiers jours d’expectation, seule l’écume médicamenteuse reste présente, autrement dit les effets indésirables vont se révéler ou s’absenter. Donner un goût de légèreté à la vie en délivrant la molécule la plus adaptée à la posologie la plus faible ; tel est l’un des enjeux de notre médecine.

Deux phases composent la stratégie thérapeutique. Une première consiste en une rémission des symptômes, la seconde est une phase de consolidation plus longue. Mise en place durant 4 à 12 mois, cette dernière phase a pour objectif d’éviter les rechutes. Le traitement dans sa globalité ne peut s’achever avant 6 mois. En cas de chronicité du trouble, un traitement allongé est recommandé. Il n’est pas forcément nécessaire d’associer des anxiolytiques ou un hypnotique aux antidépresseurs. Si cela s’affiche indispensable, la prescription doit être la plus brève possible et rapidement réévaluée. La pharmacodépendance aux benzodiazépines et apparentées et leurs effets à long terme sur la mémoire forcent leur momentanéité (CORRUBLE, 2013).

Retrouver une saveur, par l’administration d’une molécule, engage le patient et le pharmacien dans un cheminement commun. Ce dernier prendra garde à une introduction progressive du traitement au cours du temps, ainsi qu’à une décroissance rythmée et programmée en fin de médication. Ainsi, le rebondissement des symptômes ou la survenue d’un syndrome transitoire de sevrage sera réduit.

Par l’acte de sa présence, le pharmacien renforce l’inclusion du patient dans un processus continu de soin. Il connait le risque de virage maniaque, celui de réactions paradoxales (délire, anxiété, hallucinations) et la probabilité d’aggravation de la dépression (risque suicidaire) dans les premiers jours suivant l’instauration. L’entourage du patient, ses acteurs soignants et paramédicaux, par leur sensibilité et leur attention mesurée veilleront à informer le plus rapidement possible le professionnel compétent (psychiatre, médecin prescripteur) si ces effets surviennent. De plus, il convient d’être précautionneux quant au rare syndrome sérotoninergique (diarrhées, sueurs, tremblements, confusions…) observé en cas de surdosage ou d’associations à des médicaments modulant les voies sérotoninergiques imposant un arrêt imminent du traitement (MEGARBANE, 2017).

Chez une femme enceinte, l’apport d’un traitement non médicamenteux est à privilégier. Cependant, il ne faut pas hésiter à délivrer ces molécules en accord avec le prescripteur et avec un regard critique (consultation du CRAT) sur la grossesse et le trouble dépressif. Les buts sont de favoriser le bon déroulement de la grossesse et de sauvegarder la préciosité du lien mèreenfant (CRAT, 2020).

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Table des matières

INTRODUCTION GENERALE
NOTA BENE
PARTIE 1
LE PHARMACIEN : UN EXPERT PHARMACOLOGIQUE
Les points généraux : stratégie et cinétique particulières
Les inhibiteurs de la recapture de la sérotonine
Les inhibiteurs de la recapture de la noradrénaline et de la sérotonine
Les antidépresseurs tricycliques
Les antidépresseurs apparentés aux tricycliques
Les IMAO
Les autres molécules
LES PSYCHOTHERAPIES
La psychanalyse
Les bases théoriques
Les représentations sociales : accès et place du patient
La définition de la dépression selon la psychanalyse
Le soin psychanalytique de la dépression
La thérapie systémique
Les bases théoriques
Les représentations sociales : accès et place du patient
Les outils systémiques utilisés durant la thérapie
L’exemple de la thérapie de couple
Les thérapies cognitives et comportementales
Les bases théoriques
La définition de la dépression selon les thérapies cognitives et comportementales
Les places du patient et le déroulé global d’une thérapie cognitive et comportementale
La structure d’un entretien en thérapie cognitive et comportementale
Le déroulement de la thérapie dans le cadre dépressif
La méditation de pleine conscience
LIENS HUMAINS ENTRE LE PHARMACIEN ET LE CLINICIEN
Une rencontre clinique singulière
Une déontologie partagée
L’asymétrie de la rencontre
Les différents types d’entretien et leurs écoutes
La relation thérapeutique
Un lien de confiance
L’alliance thérapeutique
L’exposition du soignant
REGARDS CROISES ENTRE PROFESSIONS DE SANTE
Le pharmacien : un investissement vers l’humain
Les rôles du pharmacien dans le cadre du trouble dépressif
Les cadres thérapeutiques
Les co-interventions de la prise en charge pharmacologique
Le conseil médicamenteux
Le renforcement de l’adhérence
LES RESISTANCES ET LA RECHERCHE
Les résistances
Les résistances médicamenteuses
Les résistances psychologiques
Les nouvelles perspectives scientifiques
La dépression et l’inflammation
Les études microbiotiques
Les autres perspectives de recherches
CONCLUSION
PARTIE 2
Introduction
Matériel et méthodes
Description de l’échantillon et présentation des résultats
Étude des attentes des patients
Étude des propositions
Analyse des durées de suivi
Études des durées de traitement et du sexe
• Le sexe influe-t-il les durées de traitements ?
• Étude de l’influence de l’âge sur la durée des thérapies
Aide apportée par la psychothérapie
• Aide et durée de traitement psychologique
• Aide et durée de traitement médicamenteux
Étude de l’efficience
Provenance de l’efficience
Discussion
État de la santé mentale et du trouble dépressif en France
• Place des jeunes adultes et du trouble dépressif caractérisé
• Place des femmes et dépression
• Place des hommes et dépression
Place des acteurs et leurs liaisons
• Force du médecin
• Place du médecin généraliste
• Place du psychiatre
• Qu’est-ce que la guérison et quelle place a l’humain dans sa propre survie ?
Efficience de la prise en charge mixte du trouble dépressif caractérisé
• Définition
• Approfondissement
Annexes
Psychanalyse et pharmacologie
Homéostasie
Communauté structurale
Destin pulsionnel
Sublimation
Objet partiel et total, agoniste partiel et entier
Notion de complexes
Sexualité et dépression
Place de la sexualité dans l’intimité
Dépression et sexualité
Antidépresseurs et fonction sexuelle
Les ISRS
Les IRSNA
Les autres antidépresseurs
Recommandations
Dépliant à destination des psychologues cliniciens
Réponses aux questionnaires pharmaciens
Réponses aux questionnaires des psychologues spécialisés en psychanalyse
Réponses aux questionnaires des psychologues spécialisés en thérapie systémique
Réponses aux questionnaires des psychologues spécialisés en thérapies cognitives et comportementales
CONCLUSION GENERALE
BIBLIOGRAPHIE

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