Efficacité à long terme de l’ablation des tachycardies par réentrée intra-nodale

Les arythmies

           Le nœud sinusal génère une activité cardiaque régulière allant normalement de 60 à 80 battements par minute. C’est le rythme cardiaque normal. Les arythmies sont des anomalies du rythme cardiaque. La bradycardie est une fréquence cardiaque anormalement lente (inférieure à 60 battements par minute). La tachycardie est une fréquence cardiaque anormalement élevée, généralement supérieure à 100 battements par minute. Le caractère régulier du rythme cardiaque peut être perturbé au cours de certaines arythmies. L’anomalie causale de l’arythmie peut être ventriculaire ou supra-ventriculaire. Les arythmies peuvent être permanentes ou paroxystiques. Nous allons nous intéresser à la plus fréquente des tachycardies supra-ventriculaires paroxystiques : la tachycardie par réentrée intra-nodale (TRIN).

Forme fast/slow

                  C’est une forme plus rare de TRIN (5 à 10% des cas). L’influx électrique pénètre la voie « fast » de façon antérograde et la voie « slow » de façon rétrograde (figure 7). Cette forme atypique résulte d’une période réfractaire rétrograde de la voie rapide plus longue que celle de la voie lente et une conduction rétrograde très lente dans la voie lente. Comme l’influx est conduit très lentement de façon rétrograde par la voie lente, cela permet à la voie rapide d’être sortie de sa période réfractaire antérograde et de conduire l’influx vers les ventricules. La TRIN atypique débute donc le plus souvent par une extrasystole ventriculaire. Elle est bloquée dans la voie rapide qui est encore en période réfractaire. Elle est conduite de façon rétrograde par la voie lente qui n’est plus en période réfractaire. Lorsque l’influx sort de la voie lente, il va vers les atriums et redescend aux ventricules par la voie rapide. Le circuit de réentrée s’entretient jusqu’à ce qu’une autre extrasystole l’interrompe ou qu’un à-coup vagal modifie les vitesses de conduction.

Déclenchement d’une TRIN

              Un des objectifs de la stimulation atriale programmée est d’observer le saut de conduction. L’autre objectif est de déclencher une TRIN. Il faut alors faire préciser au patient s’il s’agit bien de l’arythmie clinique. Il faut ensuite préciser son caractère typique ou atypique. Le tracé d’une TRIN typique montre une tachycardie régulière à qRS fins (ou identiques aux qRS de base) démarrant après un allongement brutal de AV ou AH. L’auriculogramme et le ventriculogramme paraissent simultanés avec un espace ventriculogramme-auriculogramme inférieur ou égal à 50 ms (figure 23).

Cryothérapie et radiofréquence : avantages et inconvénients

                  Le choix de la technique d’ablation repose sur une discussion entre l’opérateur et le patient, en exposant les avantages et inconvénients théoriques de chacune.
a) Expérience de l’opérateur : L’expérience de l’opérateur pour les deux techniques est un élément à prendre en compte. Généralement les rythmologues interventionnels sont experts dans les deux techniques puisqu’elles permettent le traitement des différentes arythmies. Ce paramètre n’est donc pas celui qui oriente le plus fortement la décision finale.
b) Durée de procédure : La procédure est théoriquement moins longue en radiofréquence pour deux raisons. Premièrement l’absence de cryomapping réduit le temps d’intervention. Deuxièmement, chaque cryoapplication doit durer 240 secondes alors que la durée d’un tir de radiofréquence est libre.
c) Durée de fluoroscopie : La durée de fluoroscopie est théoriquement inférieure en cryothérapie. La cryoadhésion permet de ne pas contrôler la position de la sonde pendant la cryoapplication, contrairement à la radiofréquence où le positionnement de la sonde doit être régulièrement vérifié afin qu’elle ne soit pas déplacée sur les voies de conduction normales.
d) Douleurs per procédure : Quelques études ont évalué la douleur per procédure ressentie par le patient. Dans l’étude de Chan il s’agissait d’une évaluation subjective. Une diminution statistiquement significative de la douleur a été observée pour le groupe cryothérapie. Ce paramètre qui ferait plutôt favoriser la cryothérapie est à relativiser. L’évaluation numérique des patients dans cette étude est restée inférieure au seuil considéré comme nécessitant un antalgique, et ce dans les deux groupes. Il ne paraît donc pas légitime d’orienter le patient vers l’une ou l’autre technique en se basant sur ce critère.
e) Complications : Un des paramètres majeurs à prendre en compte pour le choix de la technique d’ablation est le risque de complication. Les risques inhérents à la procédure sont notamment les hématomes au point de ponction veineux fémoral et les fistules artérioveineuses. Les risques spécifiques de chaque technique sont à évaluer précisément pour s’orienter vers l’une ou l’autre méthode. La complication redoutée est la survenue d’un BAV de haut degré. Il existe plusieurs causes à ces BAV secondaires aux procédures d’ablation. Il faut distinguer les BAV bénins régressifs, qui peuvent être d’origine vagale ou traumatique, et les BAV définitifs nécessitant l’implantation d’un stimulateur cardiaque. Ces derniers peuvent avoir plusieurs mécanismes. Premièrement, il peut s’agir d’une erreur de site d’ablation en cas de déplacement du cathéter pendant le tir. Deuxièmement, le site d’ablation peut être trop proche du faisceau de His du fait de particularités anatomiques comme un triangle de Koch de petite taille. Troisièmement, chez des patients ayant des TRIN relativement lentes il peut être supposé qu’ils aient spontanément une altération relative de la conduction de la voie rapide et que l’ablation de la voie lente provoque un trouble de conduction auriculo-ventriculaire de haut degré. Quatrièmement l’origine du BAV peut être ischémique en cas de lésion de l’artère du NAV si la lésion est sous endocardique. Les BAV justifiant de l’implantation d’un stimulateur cardiaque sont généralement ceux qui ne régressent pas pendant la procédure ni au cours de sept à dix jours de surveillance. L’impact d’un BAV définitif ne sera pas le même selon le terrain. L’implantation d’un stimulateur cardiaque à un patient jeune qui risque les fractures de sondes et les changements de boîtier répétés avec majoration du risque infectieux ne soulève pas les mêmes problématiques que pour les patients âgés. Les patients âgés sont souvent plus symptomatiques des épisodes de TRIN avec une moins bonne tolérance hémodynamique. Il est donc justifié de choisir une technique à haut taux de succès, y compris au prix d’un plus haut risque de stimulateur cardiaque en cas de trouble de conduction de haut degré.

Données concernant l’ablation

i. Données globales : La durée moyenne de procédure a été de 71 +/- 23 minutes. La durée de scopie moyenne a été de 6,3 +/- 4,7 minutes. La dose d’irradiation moyenne a été de 5,5 +/- 6,3 Gray.cm².
ii. Cryothérapie versus radiofréquence : La durée de la procédure a été significativement plus courte dans le groupe RF (66 +/- 18 minutes versus 75 +/- 24 minutes, p < 0,001). La durée de scopie et la dose d’irradiation ont été inférieures dans le groupe cryothérapie (5,7 +/- 4,2 minutes versus 7,3 +/- 5,3 minutes, p = 0,002 ; 4,9 +/- 5,5 Gray.cm² versus 6,5 +/- 7,4 Gray.cm², p = 0,058) (tableau 2). En fin de procédure, autant de saut de conduction, écho et tour de TRIN ont été retrouvé dans les 2 groupes avec respectivement dans les groupes cryoablation et RF (tableau 2) :
_ 152 saut de conduction (59%) versus 85 (57%), p = 0,74
_ 135 écho (53%) versus 79 (53%), p = 0,87
_ 24 patients avec > 1 tour de TRIN (9%) versus 18 (12%), p = 0,36.
Il a été conclu à un succès de procédure pour 248 patients du groupe cryothérapie (96%) et 147 du groupe RF (99%), un succès partiel pour 5 patients du groupe cryoablation (2%) et 1 du groupe RF (1%), un échec pour 5 patients du groupe cryoablation et 1 du groupe RF). Ces appréciations données par l’opérateur ont été similaires dans les deux groupes (p = 0,35) (tableau 2).

Données démographiques

                        Notre population avait une prédominance féminine. Le sex ratio de cette pathologie explique cette répartition. Le groupe cryothérapie a inclus significativement plus de femmes que le groupe radiofréquence. Certaines donnéessont en faveur d’un plus haut taux de récidive de TRIN post ablation dans la population féminine. Cette répartition inégale peut donc être un facteur de confusion quant à l’interprétation de la différence d’efficacité des deux techniques mise en évidence. Le groupe radiofréquence était composé de patients significativement plus âgés que le groupe cryothérapie. Il peut être supposé que les patients les plus âgés ont été orientés vers la radiofréquence pour leur offrir le traitement actuellement décrit comme le plus efficace, compte-tenu d’une tolérance souvent moins bonne aux épisodes de TRIN que les sujets jeunes. Ils étaient exposés à un plus haut risque de BAV complet et de stimulateur cardiaque mais leur retentissement est moindre que pour les jeunes patients. Outre les complications des stimulateurs cardiaques chez les sujets jeunes détaillées précédemment, il faut ajouter que le préjudice esthétique est généralement mieux supporté en population âgée. Tout comme la différence de répartition du sexe, ce facteur peut être un facteur de confusion puisqu’il est décrit que le taux de récidive est plus élevé chez les patients les plus jeunes. L’effectif du groupe cryothérapie a été supérieur. Cette différence est retrouvée dans d’autres études, y compris celles portant sur de larges effectifs . Elle peut s’expliquer par deux facteurs principaux. Premièrement, seuls les patients les plus âgés sont orientés vers la radiofréquence, or la TRIN est une pathologie du sujet jeune. Ils sont donc orientés vers la cryothérapie pour limiter le risque de troubles de conduction de haut degré. Deuxièmement, au cours des dix dernières années la cryothérapie est devenue une alternative plus sécuritaire de la radiofréquence avec une efficacité décrite comme similaire.

Caractéristiques initiales de la TRIN

                  Les RIN typiques étaient prépondérantes dans notre étude. Cette donnée est cohérente avec la littérature. Il n’y avait pas de différence entre les deux groupes. La différence d’efficacité entre les deux techniques ne peut donc pas être expliquée par une complexité de procédure supérieure dans un groupe par rapport au second. La mise en évidence initiale d’un saut de conduction et l’inductibilité initiale de la TRIN sont des éléments importants de la procédure. Leurs disparitions en fin d’intervention sont nécessaires pour conclure au succès de procédure. Il n’y avait pas de différence pour ces paramètres. Ils étaient donc comparables quant à la probabilité de pouvoir conclure à un succès de procédure.

Récidives de symptômes

                 En toute logique, le taux de récidive de symptômes a été supérieur au taux de récidives prouvées. Il faut interpréter cette différence avec prudence. Il est tout d’abord impossible de conclure à des récidives de TRIN sans tracé per-critique. L’interrogatoire des patients a été orienté et leurs descriptions correspondaient à des épisodes identiques à ceux préexistants à l’ablation. Le plus souvent les patients ont décrit des récidives plus courtes et plus rares. Compte-tenu du caractère moins invalidant des épisodes et d’un retentissement moindre sur leur vie quotidienne, les patients n’ont pas souhaité reconsulter. Certains patients ont écarté l’idée de réaliser une seconde procédure d’ablation en cas de confirmation du diagnostic et n’ont donc pas voulu poursuivre les investigations. Enfin, quelques-uns n’ont pas reconsulté, ne pensant pas qu’une seconde procédure serait possible. Nous n’avons pas retrouvé d’autres études portant sur les récidives de symptômes déclarés par les patients. Toutes les études s’intéressent aux récidives prouvées, voire même à des récidives ayant nécessité des passages aux urgences uniquement. Cela suppose de ne s’intéresser qu’aux patients ayant un retentissement important sur leur vie quotidienne. L’objectif du traitement curatif de cette affection bénigne est l’amélioration subjective de la qualité de vie du patient. Il peut donc être considéré comme atteint pour les patients qui ne se sont plus sentis invalidés par les crises. Il faudrait par contre que les patients ayant à nouveau recours à des traitements ou étant toujours gênés soient revus en consultation spécialisée pour de nouvelles explorations. Il est possible que les symptômes présentés par les patients ne correspondent pas à la même tachycardie et qu’il ne s’agisse pas d’une récidive mais de l’émergence d’une nouvelle arythmie. Il conviendrait donc de réaliser un holter voire une nouvelle exploration électrophysiologique. Si l’on regarde le délai moyen des récidives de symptômes on peut supposer qu’un suivi à plus long terme permettrait un meilleur dépistage, et donc davantage d’explorations et de réintervention si nécessaire. Il pourrait être intéressant de réaliser un premier suivi à six mois puis une consultation à deux ans de la procédure.

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Table des matières

I – INTRODUCTION
1) Anatomie et rôle du système cardionecteur
a. Le nœud sinusal
b. Le nœud auriculo-ventriculaire
2) Électrophysiologie cardiaque
a) Généralités
b) Potentiel de repos
c) Potentiel d’action
d) Propriétés des cardiomyocytes
e) Vitesse de conduction
f) Les arythmies
3) Focus sur la TRIN
a) Définition
b) Épidémiologie
c) Physiopathologie
d) Symptomatologie et examen clinique
e) Électrocardiogramme
f) Exploration électrophysiologique
g) Pronostic
h) Prise en charge en urgence
i) Prise en charge au long cours
4) Cryothérapie et radiofréquence : avantages et inconvénients
a) Expérience de l’opérateur
b) Durée de procédure
c) Durée de fluoroscopie
d) Douleurs per procédure
e) Complications
5) Efficacité et sécurité
II- MATÉRIEL ET MÉTHODES
1) Recueil de données
a) Liste des patients
b) Données démographiques
c) Données concernant l’ablation
d) Suivi
2) Modalités de l’ablation
a) Généralités
b) Mesures à l’état de base
c) Stimulation atriale programmée
d) Choix du site d’ablation
e) Cryothérapie
f) Radiofréquence
g) Critères de succès
3) Critères de jugement
a) Principal
b) Secondaires
4) Méthodes statistiques
III- RÉSULTATS
1) Données démographiques
2) Critère de jugement principal
3) Critères de jugement secondaires
a) Données concernant l’ablation
b) Caractéristiques initiales de la réentrée intra-nodale
c). Efficacité
d). Sécurité
e). Facteurs de risque de récidive
IV – DISCUSSION
1) Données démographiques
2) Efficacité
3) Critères de jugement secondaires
a) Caractéristiques initiales de la TRIN
b) Données concernant l’ablation
c. Délai avant récidive
d. Récidives de symptômes
e. Sécurité
e. Facteurs de risque de récidive
4) Forces et limites de l’étude
a. Forces
b. Limites
IV- CONCLUSION
REFERENCES

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